Réplication de l'ADN

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La réplication de l'ADN, aussi appelée duplication de l'ADN ou synthèse de l'ADN, est le processus au cours duquel l'ADN est synthétisé. Ce mécanisme permet d'obtenir, à partir d'une molécule d'ADN, deux molécules identiques à la molécule initiale. L'ADN dupliqué sera par la suite divisé entre les deux cellules filles lors de la division cellulaire (mitose et méiose). Cela permet de maintenir l'information génétique et de produire deux cellules filles avec un matériel génétique identique.

La mitose permet, grâce à la réplication de l'ADN, la formation de deux cellules filles strictement identiques génétiquement à la cellule mère.

La réplication va commencer à des endroits précis: les origines de réplication. Les deux chaînes de l'ADN parental se séparent pour donner naissance à deux nouvelles molécules contenants, un brin parental et un brin nouvellement synthétisé, on qualifie ce processus de semi-conservateur[1].

Un grand nombre de protéines interviennent dans le mécanisme moléculaire de la réplication de l’ADN formant le complexe enzymatique de réplication, appelé réplisome[2],[3]. Les enzymes et protéines intervenant dans la réplication de l’ADN sont homologues chez les eucaryotes et chez les archées mais ont des séquences en acides aminés très différentes chez les bactéries. Toutefois, au niveau fonctionnel comme au niveau structural, on retrouve des homologies frappantes entre les protéines bactériennes et les protéines eucaryotes, ce qui indique que les mécanismes de réplication sont analogues[4],[5].

Réplication de l’ADN : semi-conservatrice et bidirectionnelle[modifier | modifier le code]

schéma de la fourche de réplication montrant que les deux brins d'ADN sont séparés pour permettre la synthèse de 2 nouveaux brins.
Schéma général de la fourche de réplication de l'ADN

Le brin d’ADN qui sert de matrice à la réplication est le brin parental. Le nouveau brin complémentaire au brin parental est le brin néoformé. À l’issue de la réplication, chacune des deux molécules d’ADN nouvellement formée est constituée d’un brin parental et d’un brin néoformé. On qualifie ce processus de semi-conservateur. C'est l'expérience de Meselson et Stahl en 1958 qui a permis de le démontrer[6].

Œil de réplication[modifier | modifier le code]

En biologie, le terme d'œil de réplication est utilisé pour désigner la forme représentée par la molécule d'ADN lors de sa réplication. La réplication commence au niveau d'une ou plusieurs origines de réplication qui sont des séquences de nucléotides spécifiques reconnues par des protéines de réplication. Ces protéines vont s'attacher aux origines de réplication et séparer les deux brins d'ADN ce qui va former un « œil » de réplication.

Fourche de réplication[modifier | modifier le code]

La fourche de réplication est la structure formée lorsque l’ADN se réplique, et sur laquelle l'ADN polymérase vient se fixer. L'ADN polymérase est une enzyme catalysant la formation des liaisons nucléotidiques. Le complexe enzymatique intervenant dans la réplication est appelé réplicase.

La réplication peut être divisée en trois étapes principales : l’initiation, l’élongation et la terminaison.

Initiation de la réplication[modifier | modifier le code]

L’initiation de la réplication a lieu à l’origine de réplication. Il n’y a qu’une seule origine de réplication dans les chromosomes bactériens alors qu’il en existe plusieurs chez les eucaryotes (chez les Archaea, le nombre d’origines varie entre une et trois selon les espèces). La première étape débute par la fixation de la protéine DnaA (protéine capable de reconnaître les origines chez les procaryotes) ou complexe ORC (Origine Recognition Complex chez les eucaryotes) sur l'origine de réplication. Il s'ensuit un enroulement de l'ADN autour de la protéine qui provoque une dénaturation locale des deux brins. Une hélicase s'y engouffre et sépare les brins dans les deux sens en rompant les liaisons hydrogène (ou « ponts hydrogène ») entre les deux brins de la double hélice d’ADN. Deux fourches de réplication sont ainsi créées, délimitant l'œil de réplication. D’autres protéines se lient à l’ADN simple brin (monocaténaire) ainsi formé et évitent la reformation de la double hélice. Ce sont les protéines SSB (single strand binding) chez les bactéries et les protéines RPA chez les eucaryotes et les archées. De part et d'autre des deux fourches de réplications, une gyrase (topoisomérase de classe II) enlève les supertours positifs engendrés par la formation de l'œil de réplication.

Chez les procaryotes, le complexe multienzymatique composé de l'hélicase et de la primase est appelé le primosome[7].

Élongation ou la synthèse d’ADN[modifier | modifier le code]

C’est au cours de cette phase qu’il y a formation du réplisome et synthèse d’ADN. L’élongation de l’ADN progresse toujours dans le sens 5' vers 3' pour le brin en création. C’est l'ADN polymérase, qui ajoute à l'extrémité 3' de la molécule en formation, des désoxyribonucléotides. Cependant, les deux brins de la double hélice d’ADN sont enroulés dans des sens opposés : ils sont antiparallèles. Il existe de ce fait des mécanismes différents selon le brin d’ADN répliqué.

Il existe ainsi un « brin direct », ou « brin précoce » (leading strand) et un « brin indirect », ou « retardé », ou « tardif » (lagging strand) :

  • le « brin direct » est le brin complémentaire du brin parental orienté 3’ vers 5’ (le « brin direct » est donc orienté 5’ vers 3’). Il est donc créé de façon continue, dans le sens 5’ vers 3’ ;
  • le « brin indirect » est le brin complémentaire du brin parental orienté 5' vers 3’ (le « brin indirect » est donc orienté 3’ vers 5’). Il est créé de façon discontinue, sous forme de fragments d’Okazaki, dans le sens 3’ vers 5’.

Chez les procaryotes, les fragments d' Okazaki ont une longueur de 1.000 à 2.000 paires de bases ; chez les eucaryotes, ils ne font qu'environ 200 paires de bases de long.

L'ADN polymérase a besoin d'une amorce pour fonctionner, parce qu'elle ne commence à synthétiser que par une extrémité 3'OH Libre. Et c'est l'amorce ARN qui va fournir cette extrémité libre. La présence ici d'ARN est expliquée par le fait que seules deux enzymes peuvent synthétiser les chaînes nucléotidiques : L'ARN Polymérase et L'ADN Polymérase. Dans le cas présent, l'ADN Polymérase ne pouvant fonctionner sans amorce, c'est L'ARN polymérase qui prend le relais pour fournir l'amorce nécessaire. La primase va en effet créer ces amorces d'ARN. Il y aura donc sur le brin retardé des jonctions ARN-ADN, qui seront par la suite éliminées par une RNase H. Des ADN polymérases particulières vont ensuite combler les lacunes laissées par l'ARN.

D'autres enzymes sont nécessaires au bon fonctionnement de la réplication d'ADN. Puisque le placement des histones dans la chromatine régule l'expression génétique, des protéines chaperons séparent les histones de l'ADN avant la réplication et les remettent après aux mêmes endroits[8]. Les polymérases sont retenues à l'ADN parental par des protéines tenons et des protéines à pince coulissante. C’est le PCNA des eucaryotes et des archées, et la sous unité b des bactéries. Une hélicase brise les liaisons H entre les deux brins, et des protéines SSB se fixent à l'ADN monocaténaire par des liaisons salines, pour éviter la reformation de liaisons entre les deux brins. Sur l'ADN double brin précédant l'hélicase se fixe une topoisomérase I qui va permettre d'éviter les torsions entraînées par l'ouverture de la double-chaîne par l'hélicase (comme pour une ficelle dont on écarte les deux brins), en coupant un des brins, puis le ressoudant après déroulement. Une topoisomérase II va se fixer sur une des molécules d'ADN filles, et par la scission des deux brins de celle-ci, va permettre le démêlement des 2 ADN filles. Elle ressoude ensuite (après le passage de l'autre molécule dans l'interstice formé) la molécule lysée.

Terminaison[modifier | modifier le code]

Cette phase correspond à l’arrêt de la réplication lorsque deux fourches de réplication se rencontrent ou lorsqu’une fourche rencontre un signal de terminaison de la réplication. Il y a « ter » : terA terD terB terC qui freinent les fourches de réplication.

Fidélité de la réplication[modifier | modifier le code]

La fidélité de réplication est très grande et elle est en très grande partie due à l'ADN polymérase, qui incorpore les bases nucléiques en fonction de la complémentarité des appariements Watson-Crick (A-T, C-G). En effet, ce très faible taux d'erreur de l'ADN polymérase pendant la réplication est dû au fait que les ADN polymérases réplicatives disposent d'une activité de relecture qui leur permet de vérifier que le dernier nucléotide incorporé est bien le bon.

En cas d'erreur, les ADN polymérases (I et III) les corrigent au moyen de leur activité exonucléase 3' → 5'. Ceci permet à la polymérase de reculer d'un cran en éliminant le nucléotide incorrect qui est hydrolysé, pour ensuite reprendre la synthèse du brin d'ADN.

Avant cette relecture de l'ADN le taux d’erreur est d'environ 10-5 (une erreur sur cent mille bases répliquées) ce qui est très peu compte tenu du nombre de bases répliquées par seconde qui est d'environ 500 bases par seconde chez les bactéries. L'étape de relecture fait chuter le taux d'erreur de réplication à environ 10-7. Enfin, les erreurs qui ont éventuellement échappé à ce mécanisme de contrôle sont réparées ensuite dans l'ADN double brin par un mécanisme spécifique de réparation des mésappariements ou MR (mismatch repair). L'ensemble du dispositif constitue donc un système extrêmement efficace puisque le taux d'erreur chute à environ une mutation pour 10 milliards de bases répliquées.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. (en) Matthew Meselson et Franklin W. Stahl, « The replication of DNA in Escherichia coli », Proceedings of the National Academy of Sciences, vol. 44, no 7,‎ , p. 671–682 (ISSN 0027-8424 et 1091-6490, PMID 16590258, PMCID PMC528642, DOI 10.1073/pnas.44.7.671, lire en ligne, consulté le )
  2. Bénédicte Michel et Giuseppe Baldacci, « Réplication », Médecine/sciences, vol. 14, no 12,‎ , p. 1422-1427 (ISSN 0767-0974, lire en ligne)
  3. (en) Pomerantz R.T., O'Donnell M., « Replisome mechanics: insights into a twin DNA polymerase machine. », Trends Microbiol., vol. 15,‎ , p. 156-164 (PMID 17350265)
  4. (en) Indiani C., O'Donnell M., « The replication clamp-loading machine at work in the three domains of life. », Nat. Rev. Mol. Cell. Biol., vol. 7,‎ , p. 751-761 (PMID 16955075)
  5. (en) Baker T.A., Bell S.P., « Polymerases and the replisome: machines within machines. », Cell, vol. 92,‎ , p. 295-305 (PMID 9476890)
  6. « Expérience de Meselson et Stahl », sur Planet-Vie (consulté le ).
  7. Alberts 1987
  8. Ransom M, Dennehey B, Tyler JK, « Chaperoning histones during DNA replication and repair », Cell, vol. 140, no 2,‎ , p. 183-195 (PMID 20141833, DOI 10.1016/j.cell.2010.01.004)

Annexes[modifier | modifier le code]

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Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Cooper, Geoffrey, La Cellule, une approche moléculaire, 3e édition, 1997, Éd. De Boeck Université.
  • B. M. Alberts, « Prokaryotic DNA replication mechanisms », Philos. Trans. R. Soc. Lond., B., Biol. Sci., vol. 317, no 1187,‎ , p. 395-420 (PMID 2894677, lire en ligne [[PDF]]).
  • Michael O’Donnell , Lance Langston , and Bruce Stillman, Principles and Concepts of DNA Replication in Bacteria, Archaea, and Eukarya,

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]