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Cloches de Balangiga

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1853 Balangiga bell
La cloche de 1853
1889 Balangiga bell
La cloche de 1889
1895 Balangiga bell
La cloche de 1895
Les trois cloches de Balangiga.

Les cloches de Balangiga sont trois cloches, prises par l'armée américaine, à l'église de San Lorenzo de Martir[1], à Balangiga, sur l'île de Samar aux Philippines, en tant que trophées de guerre, après des représailles, lors du massacre de Balangiga, en 1901, pendant la guerre américano-philippine. L'une de celles-ci était en possession du 9e régiment d'infanterie, au Camp Red Cloud (en), leur base en Corée du Sud[2],[3], tandis que les deux autres étaient sur une ancienne base du 11e régiment d'infanterie (en), actuellement la base aérienne F. E. Warren de Cheyenne, dans le Wyoming aux États-Unis[4].

Depuis la fin des années 1950, diverses personnes représentant l'Église catholique aux Philippines, le gouvernement philippin (en) et les habitants de Balangiga, cherchaient à récupérer les cloches. Ces efforts ont été freinés durant des décennies. En , la loi d'autorisation de la Défense nationale pour l'exercice 2018 (en) (National Defense Authorization Act) a donné au secrétaire à la Défense, James Mattis, le pouvoir de prendre une décision sur cette question. Il a finalement informé le Congrès des États-Unis que le département de la défense avait l'intention de retourner les cloches aux Philippines[5].

Le , les trois cloches de l'église se trouvaient à la base aérienne de Kadena, au Japon, en attente de rapatriement aux Philippines[6]. Le lendemain matin, l'ambassade des États-Unis aux Philippines déclare que les cloches sont à bord d'un Lockheed C-130 Hercules, en route pour Manille[7]. L'avion est arrivé plus tard dans la journée et les cloches sont de retour aux Philippines, après 117 ans[8].

Massacre de Balangiga

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Le , un groupe de villageois philippins de Balangiga, tend une embuscade à la compagnie C du 9e régiment d'infanterie américain, alors qu'ils étaient au petit déjeuner, faisant 48 morts et 22 blessés sur les 78 hommes de l'unité, dont quatre seulement s'échappent indemnes et quatre disparaissent au combat. Les villageois capturent environ 100 fusils et 25 000 cartouches de munitions. On estime que 20 à 25 d'entre eux sont morts au combat, avec un nombre similaire de blessés[9].

En représailles, le général Jacob Hurd Smith ordonne que « Samar soit transformé en un "désert hurlant" et que soient tués tous les philippins mâles de plus de dix ans »[9], capables de porter les armes. Lors de cette mission, les soldats américains saisissent les trois cloches de l'église de la ville et les ramènent aux États-Unis comme butin de guerre. Le 9e régiment d'infanterie soutient que l'unique cloche en leur possession leur a été remise par les villageois lorsque l'unité a quitté Balangiga le . En fait, la cloche leur a été donnée par le 11e Régiment d'infanterie, qui avait pris les trois cloches en quittant Balangiga pour Tacloban, le [10].

Le général Smith et son principal subordonné, le major Littleton Waller (en), du Corps des Marines des États-Unis, ont tous deux été jugés en cour martiale pour vengeance illégale contre la population civile de Samar. Waller est acquitté des charges retenues contre lui. Le général Smith est reconnu coupable, réprimandé et prend sa retraite, mais les accusations sont abandonnées peu après. Plus tard, il est reconnu comme héros de guerre[11].

Groupe d'hommes, un garçon et une cloche d'église sur le sol
Soldats américains de la compagnie C du 9e régiment d'infanterie ayant survécu au massacre de Balangiga posant avec une des cloches de Balangiga. Photo prise à Calbayog, en .
Deux cloches posées sur des cadres
Deux cloches présentées au Fort D.A. Russel (en), actuelle base aérienne F. E. Warren, vers 1910[12].
Une cloche sur socle en béton
La troisième cloche du Madison Barracks à Sackets Harbor, dans l'État de New York, base du 9e régiment d'infanterie américain au tournant du XXe siècle. Cette cloche a été déplacée plus tard au Camp Red Cloud (en), leur base en Corée du Sud.

L'église de Balangiga est dédiée, en 1854, au martyr Saint Laurent, et la ville a probablement mis quatre ans à réunir des fonds pour acquérir sa première cloche d'église[13],[14].

Elle est coulée vers 1853 et porte le blason des franciscains[15]. Elle a une lèvre inférieure de 76,2 cm de diamètre pour une hauteur de 76 cm. L'inscription suivante apparaît sur cette cloche : « R. San Francisco Año El 1853 ». R. San Francisco aurait pu être le curé de la paroisse à l'époque, ou le terme peut indiquer Religioso de San Francisco, une référence au nom de l'ordre religieux des Franciscains[14].

La deuxième cloche est coulée vers 1889. Elle a une lèvre inférieure de 58,42 cm et une hauteur de 68,58 cm. La ville l'acquiert en 1889, à l'initiative du frère Agustin Delgado, dont le nom y est inscrit[3]. L'inscription suivante apparaît sur cette cloche « Se Refundio Siendo Cura Parroco El M.R.P.F. Agustin Delgado Año 1889 »[16]. Les cloches sont appelées en espagnol : campana colgante, ce qui signifie cloches suspendues. Celles-ci sont généralement suspendues à une poutre et à l'aide d'une corde attachée au battant[1].

La troisième et plus petite cloche a pu être acquise en 1895, à l'initiative du frère Bernardo Aparicio. Les estimations de sa taille en déduisent une hauteur de 58,42 cm à 60,96 cm et un diamètre de lèvre inférieure d'environ 50,8 cm. Elle porte l'emblème franciscain[3] et l'inscription suivante apparaît sur cette cloche : « Se Refundio Siendo Parroco P. Bernardo Aparicio Año 1895 ». Les cloches de ce type sont appelées esquila (petite cloche) ou Campana de vuelo, littéralement "cloche de vol" utilisées pour donner l'alerte en cas de danger. Le mot espagnol refundio signifie que la cloche a été refondue à partir de ferraille de bronze[1].

Les cloches de Balangiga, à la base aérienne de Villamor (en), lors de leur rapatriement (2018).

Références

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  1. a b et c (en) McKinnon Jr. Daniel W., « The Bells of San Lorenzo de Martir [Desk guide to truth] » [PDF], sur le site vfwwy.org (consulté le ).
  2. (en) « Voluntary Return of One Balangiga Bell by US Seen », sur le site nenepimentel.org (lien archivé), (consulté le ).
  3. a b et c (en) Rolando Borrinaga, « Solving the Balangiga bell puzzle A third bell paves way for info sharing », sur le site geocities.com (lien archivé) (consulté le ).
  4. (en) Medroso Leonardo Y., « The Bells of Balangiga: An Appeal for Support », sur le site Catholic Bishops (lien archivé) (consulté le ).
  5. (en) Joyce Ann L. Rocamora, « US Defense decides to return Balangiga Bells to PH: Embassy », sur le site Philippine News Agency, (consulté le ).
  6. (en) Aika Rey, « Balangiga Bells in Japan before return to the Philippines », sur le site rappler.com, (consulté le ).
  7. (en) « Balangiga Bells headed to Manila for historic homecoming », sur le site abs-cbn.com, (consulté le ).
  8. (en) « Balangiga Bells back in Philippines after 117 years », sur le site abs-cbn.com, (consulté le ).
  9. a et b (en) Veltisezar Bautista, « The Balangiga, Samar, Massacre », sur le site filipinoamericans.net (lien archivé) (consulté le ).
  10. (en) Seth Robson, « Book casts doubt on bell's history », sur le site stars ans stripes (consulté le ).
  11. (en) US Army Military History Institute, Philippine Insurrection, 1899-1902 : A Working Bibliography, (lire en ligne).
  12. (en) Dobson, G.B, « Fort D. A. Russell Photos », sur le site wyomingtalesandtrails.com (consulté le ).
  13. (en) « The name Balangiga », sur le site balangiga.yolasite.com (consulté le ).
  14. a et b (en) Bordeos Carl Jaime, « Historian confirms: Franciscans made Balangiga bells », sur le site CBCP News, (consulté le ).
  15. (en) Michael Charleston “Xiao” Chua, « The Bells of Balangiga: From war trophy to goodwill symbol », sur le site ABS-CBN News, (consulté le ).
  16. M.R.P.F. est un acronyme pour le titre Muy Reverendo Padre Fray (en français : Très Révérend Père Fray)

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Bibliographie

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  • (en) Rolando O. Borrinaga, The Balangiga conflict revisited, New Day Publishers, , 198 p. (ISBN 978-971-10-1090-4).
  • (en) Gerald M. Adams, The bells of Balangiga, Lagumo Corp., , 87 p. (ISBN 978-1-878117-19-9).
  • (en) Eleonor Mendoza, The Bells of Balangiga, iUniverse, , 352 p. (ISBN 978-1-4759-1146-6, lire en ligne).
  • (en) Couttie Bob, Hang the Dogs : The True and Tragic History of the Balangiga Massacre, New Day Publishers, (ISBN 971-10-1124-7).
  • (en) Taylor James O., The Massacre of Balangiga : Being an Authentic Account By Several of the Few Survivors, Joplin, McCarn Printing Co.

Article connexe

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Source de la traduction

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