Château de Domfront

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Château de Domfront
Les vestiges du château de Domfront.
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XIe siècleVoir et modifier les données sur Wikidata
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Le château de Domfront est un ancien château fort, du XIe siècle, aujourd'hui ruiné, dont les vestiges se dressent sur le territoire de l'ancienne commune française de Domfront, dans le département de l'Orne, en région Normandie. Le château au cours de son histoire dû subir treize sièges.

Le château est partiellement classé aux monuments historiques.

Localisation[modifier | modifier le code]

Les vestiges du château sont situés dans un parc public, libres d'accès, à 400 mètres au nord-ouest de l'église Saint-Julien de Domfront, au sein de la commune nouvelle de Domfront en Poiraie, dans le département français de l'Orne.

Le château a été bâti à l'extrémité de l'éperon rocheux portant la vieille ville, culminant à plus de 70 mètres la cluse de la Varenne. Il avait pour rôle de commander les marches méridionales du duché de Normandie.

Historique[modifier | modifier le code]

La Normandie ducale[modifier | modifier le code]

Vers 1010-1020, Guillaume Ier de Bellême fait construire une première fortification, sans doute essentiellement en bois. Guillaume de Jumièges dit « le premier (Guillaume de Bellême) qui, après avoir abattu une forêt, avait fait construire sur une montagne le château nommé Domfront ». celui-ci attira les populations voisines près du château par l'octroi de privilèges et fonda la ville de Domfront[1].

Le duc Robert Ier de Normandie mate la révolte des comtes de Bellême en les assiégeant, et en les affamant dans leur château de Domfront[2].

Après la bataille du Val-ès-Dunes, le château possession de Guillaume II Talvas, seigneur de Bellême, est saisi par le comte d'Anjou, Geoffroy Martel[3]. En 1049, il est assiégé et pris par le duc de Normandie Guillaume II. Fort de ses escarpements naturels et de ses énormes tours palissadées, la garnison se rend, par composition, après avoir tenu quinze mois en échec le duc, et après qu'Alençon soit prise[4],[1]. Le château était un des éléments essentiel pour la défense du duché de Normandie sur sa frontière sud, contre d'éventuelles attaques angevines[5].

Dans le cadre des guerres de succession entre les fils du Conquérant, Robert Courteheuse et Henri Beauclerc, les Domfrontais se révoltent, en 1092, contre Robert II de Bellême, et transmettent leur fidélité à Henri Beauclerc. Robert tente vainement de reprendre la place. Repoussé, il bat en retraite et est fait prisonnier, en 1106, à la bataille de Tinchebray et perd la couronne ducale. Henri Beauclerc s'était entre-temps déjà emparé de la couronne d'Angleterre (1100). Le nouveau duc-roi fait de Domfront l'une des défenses des frontières du duché (comme Avranches, Mortain et Vire) et y fait ériger l'un de ses typiques donjons romans quadrangulaires. Après sa mort, survenu en 1135, laissant son trône sans héritier mâle, et après qu'Étienne de Blois se soit emparé du royaume d'Angleterre et du duché de Normandie, le château est pris par Geoffroy Plantagenêt époux de Mathilde l'Emperesse, fille et héritière légitime d'Henri Ier, lors de sa conquête de la Normandie. Geoffroy V sera duc de Normandie de 1144 à sa mort en 1151. Mathilde se retire à Domfront, ou elle fait souvent sa résidence[6].

En 1162, Aliénor d'Aquitaine accouche de sa fille Aliénor au château[7].

En 1166, Henri II Plantagenêt, fils de Geoffroy, roi d'Angleterre, duc de Normandie et seigneur personnel de Domfront, alors malade, y fait son testament et règle le partage de ses états entre ses fils[6]. En il y reçoit les légats du pape qui doivent le réconcilier avec Thomas Becket[6]. Richard Barre(en) y est présent. Il est envoyé à Rome en septembre pour se plaindre du comportement des légats[8]. Or, les armes de la famille Barré figuraient sur les linteaux de chaque porte au château de Jumilly à quatre kilomètres de Domfront[9].

C'est à Domfront que Henri II, en 1185, tiendra sa cour de la Noël[10]. Richard Cœur de Lion y passera son dernier Noël, en 1198[11]. Richard meurt en 1199. Guillaume de Barrres et Rainaud, compte de Boulogne assiègent la ville pour appuyer les prétentions de Bérangère contre celles d’Isabelle soutenues par Gautier de la Ferrière, qui défend le château pour le compte du frère de Richard contre leur neveu Arthur[12] qui, lui, est soutenu par Philippe Auguste[6].

Le rattachement au royaume de France[modifier | modifier le code]

Possession personnelle, donc, de Jean sans Terre, Domfront est pris en 1204 par les troupes de Philippe Auguste dans le cadre de l'annexion de la Normandie au domaine royal. La place est concédée à Renaud de Dammartin, comte de Boulogne, qui fera ensuite hommage au roi d'Angleterre et verra ses terres et charges confisqués par Philippe Auguste qui les donnent alors à son fils naturel Philippe Hurepel. Au décès de Jeanne de Clermont, sa fille et héritière, en 1251, Domfront revient au domaine royal.

En 1259, Saint Louis donne Domfront à Robert II, comte d'Artois, comme douaire de sa femme. Après sa mort, en 1302, en compensation pour n'avoir pas reçu l'Artois, Robert III d'Artois reçoit ses héritages et apanages normands en 1309, dont Domfront, après un procès contre sa tante Mahaut. Ils lui sont confisqués en 1332.

En 1342, Philippe VI de Valois cède le Domfrontais au comte d'Alençon qui, en 1367, réunit la vicomté de Domfront au comté d'Alençon.

Mais entre-temps, en 1356, les troupes de Charles le Mauvais, roi de Navarre, commandées par Robert Knolles prennent la place et la conservent jusqu'en 1366.

En 1382 Pierre II rénove le château. Gràce à ces rénovations, le château résitera sous Jean I aux attaques du Duc de Bourgogne en 1412[6].

Durant l'hiver 1417-1418, le château est assiégé par l'anglais Henri Philizen sous le duc de Clarence. Clément Bigot le défend pendant huit mois mais se rend à Richard Beauchamp le [6]. Henri V en investit Edmond Mortimer. Malgré un raid sur la ville en 1430, la place n'est reprise que tardivement ; ce fut l'avant-dernière place tenue par les Anglais à être reprise, quinze jours avant Cherbourg .

La place est encore disputée dans les années 1466-1467 entre les troupes fidèles au roi de France et celles des princes révoltés contre son autorité, lors de la révolte du Bien public.

En 1574, dans le cadre de la cinquième guerre de Religion, le château de Domfront, une nuit, deux calvinistes, les frères Le Hérissé[note 1] s'empare par surprise du donjon et ouvre les portes de la place à leur chef le capitaine protestant Gabriel Ier, comte de Montgommery, lointain descendant des Bellême, qui est le à Domfront. Le lendemain, le maréchal de Matignon Jacques II de Goyon, à ses trousses, arrive avec toute sa cavalerie. La ville que les habitants ont désertée est investie, et dix jours plus tard, une artillerie arrive en renfort. Montgommery, se retranche dans le château, mais la forteresse vétuste ne résiste pas aux boulets, et il finit par se rendre le . Il est conduit à Paris, jugé et aura la tête tranchée en place de Grève le [1], sur les ordres de Marie de Médicis.

La place finit par faire soumission à Henri IV, qui en 1598, fait raser le château et démantelées en parties les fortifications de la ville[1]. Sully ordonne, en 1608, le démantèlement du château. La démolition est effectivement réalisée en 1610[13].

Chronologie des treize sièges[1][modifier | modifier le code]

  1. 1058, par Geoffroy Martel.
  2. 1059, par Guillaume le Conquérant.
  3. 1091, par Henri Beauclerc.
  4. 1106, par le duc Robert Courteheuse.
  5. 1140, par Geoffroy Plantagenêt quand celui-ci conquiert la Normandie sur Étienne de Blois.
  6. 1204, par Philippe Auguste.
  7. 1211, pour déloger Renaud de Dammartin, vassal infidèle.
  8. 1228, par des paysans révoltés.
  9. 1412, par les Bourguignons et le connétable de Saint-Paul (la ville tenant pour les Armagnacs).
  10. 1417, par un détachement Anglais du comte de Warwick.
  11. 1450, par les troupes de Charles VII.
  12. 1574, par le maréchal de Matignon.
  13. 1593, quand le château passe des protestants aux ligueurs.

Description[modifier | modifier le code]

Le château érigé, au tout début du XIe siècle, par Guillaume de Bellême, se présentait sous la forme d'une citadelle de plan carrée flanquée de quatre grosses tours d'angle et ceint d'un profond fossé taillé dans le roc[1]. Henri Ier d'Angleterre, après 1106, remplace la vieille citadelle des Bellême et érige un grand donjon roman dont il subsiste deux pans de murs. Il était renforcé aux angles — comme à Chambois et à Falaise — par de petites tourelles renfermant escaliers et chambres, et au centre des murs par des contreforts plats. Son accès se faisait au niveau du premier étage, qui s'éclairait par des baies romanes en plein cintre[1]. La courtine extérieure plus tardive n'est conservée également que sur deux côtés, mais a conservé son châtelet avec ses deux puissantes tours[1].

Le château en ruine est l'objet de restaurations depuis 1984 par l'Association pour la restauration du château de Domfront[14].

La chapelle priorale fortifiée romane en croix latine, du prieuré Saint-Symphorien, prieuré appartenant à l’Abbaye de Lonlay jusqu'à la Révolution, a été construite vers 1090-1100[15]. Elle fut ruinée probablement à la suite de la destruction du château en 1610.

Protection aux monuments historiques[modifier | modifier le code]

Au titre des monuments historiques[16] :

  • les ruines du donjon sont classées par liste de 1875 ;
  • l'enceinte du château avec ses remparts, tours, bretèches, casemates, et les anciennes chapelles Sainte-Catherine et Saint-Symphorien, sont classés par arrêté du .

Autres[modifier | modifier le code]

L'enceinte de la ville fait l’objet d’un classement par arrêté du [17],[18].

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Peut être en lien avec la famille d'Héricy.

Références[modifier | modifier le code]

  1. a b c d e f g et h Beck 1986, p. 122.
  2. André Davy, Les barons du Cotentin, Condé-sur-Noireau, Éditions Eurocibles, coll. « Inédits et introuvables du patrimoine Normand », , 319 p. (ISBN 978-2-91454-196-1), p. 85.
  3. Bernard Beck, Châteaux forts de Normandie, Rennes, Ouest-France, , 158 p. (ISBN 2-85882-479-7), p. 23.
  4. Beck 1986, p. 103.
  5. Stéphane William Gondoin, « Les châteaux forts au temps de Guillaume le Conquérant », Patrimoine normand, no 94,‎ juillet-août-septembre 2015, p. 41 (ISSN 1271-6006).
  6. a b c d e et f Jean François René Caillebotte, Essai sur l'histoire et les antiquités de la ville et arrondissement de Domfront. Troisième édition, (lire en ligne).
  7. (en-GB) Greg Wheeler, « King Henry II (Plantagenet) of England Timeline 1133-1189 », sur TheTimelineGeek, (consulté le ).
  8. Barlow, Thomas Becket
  9. « Les remparts de Jumilly (Orne) », sur Médiévale... Remparts de Normandie (consulté le ).
  10. Stéphane William Gondoin, « Richard Cœur de Lion : La jeunesse d'un prince rebelle », Patrimoine normand, no 119,‎ octobre-novembre-décembre 2021, p. 53 (ISSN 1271-6006).
  11. William Gondoin 2021, p. 65.
  12. « 1199 le vicomte de Thouars s'empare de Tours - Don du château de Langeais à Robert de Vitré par Arthur 1er, duc de Bretagne. - PHystorique- Les Portes du Temps », sur www.lesportesdutemps.com, (consulté le )
  13. « Chateau de Domfront », sur Monjoye.net.
  14. L’Association pour la Restauration du Château de Domfront (A.R.C.D.).
  15. Chapelle du château (chapelle Saint-Symphorien)
  16. « Château », notice no PA00110791, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture.
  17. Notice no PA00110793, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture
  18. Enceinte de la Ville : Remparts.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Sur les autres projets Wikimedia :

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Histoire de Domfront ou recueil de nombreux documents sur Domfront depuis son origine jusqu'à nos jours, Domfront, François Liard, (lire en ligne), « Le donjon de Domfront (Orne), par M. Blanchetière », p. 109-114.
  • Charles-Laurent Salch, Atlas des villes et villages fortifiés en France, Début du Ve siècle à la fin du XVe siècle, Strasbourg, Éditions Publitotal, , 495 p.
    Domfront, p. 368 et Carte n°2
  • Charles-Laurent Salch, Dictionnaire des châteaux et des fortifications du moyen âge en France, Strasbourg, Éditions Publitotal, 4ème trimestre 1979, 1287 p. (ISBN 2-86535-070-3)
    Domfront, pp. 419-420
  • Bases du Ministère de la culture : Le château de Domfront ; l'enceinte de la ville ; Poterne du Château de Gadras ; La Varenne et le donjon de Domfront. Lavoir ; Chapelle Saint-Symphorien du château ; Château : Vue extérieure du Donjon.

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]