Chacals et Arabes

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Chacals et Arabes
Image illustrative de l’article Chacals et Arabes
Couverture de la première édition allemande du recueil de nouvelle
Publication
Auteur Franz Kafka
Titre d'origine
Schakale und Araber
Langue Allemand
Parution 1920
Recueil
Intrigue
Genre Nouvelle
Personnages Narrateur ; Chacals ; Arabes
Nouvelle précédente/suivante

Chacals et Arabes (Schakale und Araber) est une nouvelle de l'auteur germanophone Franz Kafka publiée dans le deuxième numéro du journal Der Jude, puis, en 1920, dans le recueil de nouvelles Un Médecin de campagne.

Résumé[modifier | modifier le code]

La narrateur est un homme du nord qui tente de se reposer avec ses compagnons et un groupe d'arabes dans une oasis. Soudain, une meute de chacals arrive et interpelle le narrateur. Le chef des chacals le considère comme un élu attendu depuis longtemps par le peuple des chacals. Il serait appelé pour les libérer, bien que ceux-ci soient décrits comme étant répugnants, violents et sanguinaires.

Le chef de la caravane arabe arrive alors et clôt cette scène en levant son fouet contre les chacals. Il connaît bien ces animaux et explique au narrateur qu'ils disent cela à chaque européen de passage. Il les considère comme des idiots, pour preuve, il leur offre une carcasse de chameau fraîche et ceux-ci se jettent dessus et projette du sang tout autour d'eux. Rien ne peut plus les faire partir, ni cris ni coups de fouets. Le chef des arabes conclut par une remarque ironique sur leur prétendue noblesse et affirment qu'ils se haïssent[1].

Analyse[modifier | modifier le code]

Parabole[modifier | modifier le code]

L'éditeur, Martin Buber, souhaitait que cette nouvelle soit présenté comme une parabole, mais Kafka a refusé[2]. Il ne souhaitait pas attirer l'attention du lecteur sur les différentes lectures possibles derrière cette nouvelle, il préférait que chacun y trouve sa propre interprétation[3].

Arrière-plan biographique[modifier | modifier le code]

Kafka lui aussi a aspiré à une vie purifiée de ses pulsions, comme condition à son écriture. Il écrit ainsi à Milena Jesenská qu'il se sent « sale ». La cupidité élémentaire des chacals rend ce désir de pureté illusoire. Cet échec face à un objectif transcendantal est ainsi un thème récurrent de la prose de Kafka[3].

Le judaïsme[modifier | modifier le code]

Cette nouvelle a d'abord été publiée dans le mensuel Der Jude, cela montre qu'elle a certainement des références à la vie et à la pensée juives[4],[5].

Les chacals peuvent symboliser le peuple juif. C'est une image souvent utilisée chez d'autres écrivains, comme Heinrich Heine ou Alfred Döblin mais aussi et surtout par des personnalités antisémites comme Oswald Spengler[4]. Les chacals vivent ici comme des parasites sur un peuple hôte. Kafka, lui-même juif, porte ici un regard extérieur et ironique, presque judéophobe sur son propre peuple, en décrivant les Arabes comme des maîtres et les Chacals comme des animaux dépendants[3].

L'attente des Chacals pour cet homme du nord peut symboliser l'attente juive pour le Messie. Cet homme a un rôle similaire à celui du voyageur dans Le Verdict ; il fait l’expérience de l'archaïsme, mais sans le critiquer ni chercher à le modifier[6].

Incommunicabilité[modifier | modifier le code]

Un autre thème récurrent de la littérature kafkaïenne est l'impossibilité de la communication, entre les individus et entre les groupes. Cette impossibilité du langage a pour impact d'empêcher toute tentative d'amélioration ou d'apaisement des haines. C'est ici l'impossibilité de la communication entre peuple juif et population allemande qui refrène tout apaisement de la haine[7].

Notes et Références[modifier | modifier le code]

  1. Franz Kafka (trad. Claude David), Un Médecin de campagne et autres récits = Ein Landarzt und andere Erzählungen, Gallimard, (ISBN 2-07-039441-7 et 978-2-07-039441-8, OCLC 34763809, lire en ligne)
  2. (de) Bettina von Jagow et Oliver Jahraus, Kafka-Handbuch : Leben, Werk, Wirkung, Vandenhoeck & Ruprecht, (ISBN 978-3-525-20852-6 et 3-525-20852-9, OCLC 216923729, lire en ligne)
  3. a b et c (de) Reiner Stach, Kafka : die Jahre der Erkenntnis, S. Fischer, (ISBN 978-3-10-075119-5 et 3-10-075119-1, OCLC 232123695, lire en ligne)
  4. a et b (de) Peter-André Alt, Franz Kafka : der ewige Sohn : eine Biographie, Beck, (ISBN 3-406-53441-4 et 978-3-406-53441-6, OCLC 61430130, lire en ligne)
  5. (en) Dimitry Shumsky, « Czechs, Germans, Arabs, Jews: Franz Kafka's “Jackals and Arabs” between Bohemia and Palestine », AJS Review, vol. 33, no 1,‎ , p. 71–100 (ISSN 0364-0094 et 1475-4541, DOI 10.1017/S036400940900004X, lire en ligne, consulté le )
  6. (de) Roland Reuß, « Kafkas Sätze (28): Der Messias der Schakale », Frankfurter Allgemeine,‎ (ISSN 0174-4909, lire en ligne, consulté le )
  7. Gil Anidjar, « Chacals et Arabes (encore un mot sur le dialogue judéo-allemand) », Contretemps,‎ (lire en ligne)