Château d'Allinges-Neuf

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Château d'Allinges-Neuf
Image illustrative de l’article Château d'Allinges-Neuf
Période ou style Médiéval
Type Château fort
Début construction Xe – XIe siècle
Propriétaire initial Famille d'Allinges
Destination initiale Résidence seigneurial
Propriétaire actuel Congrégation des Missionnaires de Saint-François-de-Sales
Destination actuelle Centre d'un pèlerinage salésien
Protection Logo monument historique Classé MH (2011)[1]
Coordonnées 46° 19′ 50″ nord, 6° 27′ 50″ est[2]
Pays Drapeau de la France France
Anciennes provinces du Duché de Savoie Chablais
Région Auvergne-Rhône-Alpes
Département Haute-Savoie
Commune Allinges
Géolocalisation sur la carte : France
(Voir situation sur carte : France)
Château d'Allinges-Neuf
Géolocalisation sur la carte : Haute-Savoie
(Voir situation sur carte : Haute-Savoie)
Château d'Allinges-Neuf

Le château d'Allinges-Neuf est un ancien château fort, des Xe – XIe siècles, dont les vestiges se dressent, dans le Chablais, sur la commune d'Allinges dans le département de la Haute-Savoie, en région Auvergne-Rhône-Alpes.

Les ruines se partagent l'éminence d'une colline, dite « butte des châteaux », avec celles d'Allinges-Vieux, dont-elles sont distantes de seulement 150 m. Le château était accompagné d'un bourg ceint de murailles dont-il ne reste guère de traces.

Situation[modifier | modifier le code]

Les ruines du château d'Allinges-Neuf sont situées dans le département français de la Haute-Savoie sur la commune d'Allinges, à l'ouest d'une colline de 712 mètres d'altitude. Il dominait avec Allinges-Vieux, d'une hauteur de 200 mètres le village d'Allinges. De cette éminence, les occupants des châteaux jouissaient d'une vue dominante sur Thonon-les-Bains et le lac Léman. Les deux châteaux étaient séparés par un petit col surcreusé de deux fossés[3].

Histoire[modifier | modifier le code]

Allinges-Neuf est édifié au Xe siècle par le roi de Bourgogne Rodolphe II, et restauré par son successeur Rodolphe III[Note 1]. Allinges-Neuf est cité, en 1204[4], sous le terme de castra. Il est aux mains de la famille d'Allinges, branche distincte de celle qui est en possession d'Allinges-Vieux, avant de passer aux mains des comtes de Savoie[Note 2]. Amédée VIII de Savoie en fait le siège d'une importante châtellenie du Chablais, dont dépend Thonon, rattaché au bailliage de Saint-Maurice d'Agaune, rôle qu'Allinges-Neuf perdra en 1288[5] au profit de Thonon  ; châtellenie d'Allinges-Thonon. Vers le milieu du XIIIe siècle, Pierre II de Savoie par son mariage avec Agnès de Faucigny, réunit les deux châteaux d'Allinges.

À la mort de ce dernier survenue en 1268, la rivalité qui oppose la Savoie dans la lutte de succession avec les dauphins de Viennois, héritiers des Faucigny, jusqu'à la première moitié du XIVe siècle, fait que pendant près de 70 ans les garnisons des deux châteaux sont en conflit permanent.

En 1272[3], il subit des dégâts par des machines de guerre. En 1282[3], le châtelain y fait des réparations, et le fait armer pour résister à la coalition des dauphins de Viennois et des comtes de Genève. En 1291, 1292 et 1302[3], il est de nouveau endommagé par des machines de sièges installées à Allinges-Vieux. En 1305[3], les deux châteaux se font subir un violent bombardement. Le château est pendant les deux années qui vont suivre pourvu d'une forte garnison. Au début de l'année 1308[3], les engins qui étaient jusqu'alors placés hors les murs, sont mis derrière les remparts. Il subit ensuite un siège qui durera 12 jours et qui se terminera par une grande bataille remportée par les savoyards. On y fait de nouveau de grosses réparations.

Les hostilités reprennent dès 1321[3] et dureront jusqu'en 1334[3] et de nouveau à partir de 1350[3]. En 1325[6], lorsque le dauphin de Viennois Guigues VIII, en guerre avec le comte de Savoie, Édouard , vient mettre le siège devant le château, accompagné par Hugues de Faucigny, Amédée III de Genève et Hugues d'Anthon. La résistance qu'oppose la forteresse, permet au comte Édouard de se porter à son secours. Les troupes savoyardes au cri de « Savoie, Savoie », galvanisé par leur chef, « Prenons donc par les cheveux, cette occasion de gloire immortelle et n'endurons pas que la céleste Croix-Blanche à la vue de laquelle a souvent tremblé tout le pays d'Orient, soit aujourd'hui maculée de déshonneur », remporte la victoire.

En 1353[3], de durs combats opposent de nouveaux les deux garnisons. Il faudra attendre 1355 et le traité de Paris, qui voit l'incorporation du Faucigny aux États de la Maison de Savoie, pour mettre fin aux luttes qui ont opposé les deux châteaux d'Allinges. Les habitants du bourg, qui s'étaient vu doté de franchises peu après sa création, tout comme ceux d'Allinges-Vieux, se transportèrent dans la plaine.

En 1536[5] il est pris, comme Allinges-Vieux, par les Bernois et occupé jusqu'en 1567[5].

En 1570[5] le commandement de la place est confié au baron d'Hermance qui pour renforcer les fortifications, abat les dernières maisons du bourg. Par la suite, Emmanuel-Philibert de Savoie, érige Allinges en comté ; il comprend les paroisses d'Allinges, de Lyaud, d'Armoy, d'Orcier, de Margencel, d'Anthy, de Perrignier, de Mésinges, de Draillant et de Cervens.

Saint François de Sales y séjourne, accueilli par le baron d'Hermance, de à [5]. Chaque jour, par tous les temps, il descendait la colline des Allinges pour aller prêcher la bonne parole à Thonon et aux environs afin de ramener la population à l'Église catholique, apostolique et romaine passé depuis l'occupation bernoise à la Réforme protestante.

Lors des guerres qui opposent la Savoie à la France ; le château capitule en 1600[5] lors de la guerre franco-savoyarde de 1600-1601, et en 1630[7] les armées de Louis XIII occupent la place pendant un an.

Il est de nouveau occupé lors des invasions de 1690 et 1703[6]. En 1703[5], pendant la guerre de succession d'Espagne, menacé par les troupes du roi de France, Louis XIV, le duc de Savoie, Victor-Amédée II, fait démanteler les forteresses.

En 1832[5] les ruines des deux châteaux sont achetées par Mgr Rey, évêque d'Annecy afin d'y installer une maison de la congrégation des Missionnaires de Saint-François-de-Sales. Ces derniers en font le centre d'un pèlerinage salésien et en sont encore aujourd'hui propriétaire.

Protection[modifier | modifier le code]

L'enceinte castrale, les deux barbacanes défendant les accès au sud-ouest, la chapelle castrale et les anciens logis adjacents (actuellement occupés par les missionnaires de Saint-François-de-Sales), la grange et ses caves voûtées situées au sud-ouest de la chapelle, l'emprise de l'ancien bourg castral occupant la moitié sud-ouest de l'enceinte où sont visibles des aménagements liés à l'habitat ou aux fonctions agricoles ; la parcelle comprenant les accès anciens et actuels à Château-Neuf font l’objet d’un classement au titre des monuments historiques par arrêté du [1].

Description[modifier | modifier le code]

Allinges-Neuf est composé de deux parties précédées d'une enceinte basse commune. La plus ancienne, au nord ouest, est une enceinte formant cour autour du donjon mentionné depuis 1073[3], aujourd'hui rasé, des sires d'Allinges.

La plus récente, le « château du comte », est une enceinte polygonale étirée, que l'on doit aux comtes de Savoie, qui l'ont crée à la fin du XIIe siècle ou au début du XIIIe siècle. Elle contient les ruines d'une tour maitresse carrée de 14 mètres de côté et ayant des murs épais de 2,24 mètres, avec logis et d'une chapelle castrale. Son abside semi-circulaire, logée dans une tour flanquante, présente, les restes d'une fresque romane du XIe siècle représentant un christ en majesté entouré des évangélistes et de saints[8]. On peut aussi voir les bustes des quatre vertus et l'image en pied de saint Martin, évêque de Tours.

Châtellenie d'Allinges-Neuf[modifier | modifier le code]

Organisation[modifier | modifier le code]

Le château d'Allinges-Neuf est le centre d'une châtellenie comtale, dite des Allinges-Neuf au XIIIe siècle, puis châtellenie d'Allinges-Thonon vers la fin du XIIIe siècle[9],[10]. La châtellenie de Ballaison y est adjointe de 1285 à 1288 et l'ancienne châtellenie d'Allinge-Vieux y est réunie en 1356. Elle relève de la judicature et du bailliage du Chablais[11]. Son rôle, dans le cadre du contrôle du Chablais par la maison de Savoie, est relativement important.

La châtellenie recouvre le mandement — compris dans le sens territorial — d'Allinges-Neuf, constitué d'une vingtaine de paroisses, ainsi que la châtellenie de Ballaison (Balleyson) et, à partir de 1300, le bourg de Thonon et ses environs[12]. Un métral représente le châtelain à Thonon[13].

Villages, paroisses, fortifications de la châtellenie d'Allinges[10]
Commune Nom Type
Allinges Château d'Allinges-Neuf château fort
Thonon-les-Bains Château de Thonon château
Thonon-les-Bains Château de Ripaille châtelet
Maison forte de Bonnant maison forte

La châtellenie est érigée en comté le , elle comptait à cette période les paroisses suivantes : Allinges, Anthy, Armoy, Cervens, Draillant, Le Lyaud, Margencel, Mesinge, Orcier, Perrignier[14].

Les châtelains[modifier | modifier le code]

Le châtelain est un « [officier], nommé pour une durée définie, révocable et amovible »[15],[16]. Il est chargé de la gestion de la châtellenie ou mandement, il perçoit les revenus fiscaux du domaine, et il s'occupe de l'entretien du château[17]. Le châtelain est parfois aidé par un receveur des comptes, qui rédige « au net [...] le rapport annuellement rendu par le châtelain ou son lieutenant »[18].

Le siège de la châtellenie est transférée de Château-Neuf au château de Thonon en 1288, en raison de son dynamisme économique[13]. Thonon devient une châtellenie indépendante à partir de 1570[20].

De 1536 à 1567, la partie nord du duché est occupée par les bernois[9]. Après 1567, les châtelains ne gardent plus qu'un rôle judiciaire, la fonction militaire étant dévolue à des fonctionnaires qui portent le titre de capitaine, commandant ou encore gouverneur de la fortification[9].

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Un des châteaux des Allinges est cité en 1073, D'Agostino L., Chevalier M., Guffond C., Les châteaux du Moyen Âge en Haute-Savoie, entre recherches et mises en valeur. État de la question et perspectives, actes du colloque de clôture du projet AVER tenu à Aoste les 29,30 novembre et 1er décembre 2012, Aoste, 2012, p. 75.
  2. Château-Neuf serait le château ancestral de la famille d'Allinges ; il prend probablement son nom lorsque le comte de Savoie y construit son propre donjon.

Références[modifier | modifier le code]

  1. a et b « Domaine des châteaux d'Allinges ou des Allinges », notice no PA00118339, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture.
  2. Coordonnées trouvées sur Géoportail.
  3. a b c d e f g h i j et k Dictionnaire des châteaux et des fortifications du Moyen Âge en France 1987, p. 24.
  4. Matthieu de la Corbière, L'invention et la défense des frontières dans le diocèse de Genève. Étude des principautés et de l'habitat fortifié (XIIe – XIVe siècle), Annecy, Académie salésienne, 2003, 647 p., p. 292.
  5. a b c d e f g et h Christian Regat - François Aubert 1999, p. 13-15.
  6. a et b Georges Chapier 2005, p. 68-70.
  7. Association pour la sauvegarde des Châteaux.
  8. « peinture murale », notice no PM74000016, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Palissy, ministère français de la Culture.
  9. a b c d et e Gonthier 1881, p. 111-113 (lire en ligne).
  10. a et b Payraud 2009, p. Annexe 8 : liste des ensembles fortifiés intégrés au corpus.
  11. (en) Eugene L. Cox, The Green Count of Savoy : Amedeus VI and Transalpine Savoy in the Fourteenth-Century, Princeton University Press, (réimpr. 2015) (1re éd. 1967), 422 p. (ISBN 978-1-4008-7499-6, lire en ligne), p. 354.
  12. Gonthier 1881, p. 109-110 (lire en ligne).
  13. a et b Histoire des communes savoyardes 1980, p. 66.
  14. Article « Allinges » dans Roger Devos et Charles Joisten, Mœurs et coutumes de la Savoie du Nord au XIXe siècle : l'enquête de Mgr. Rendu, vol. Mémoires et documents, Volumes 87 à 88, Académie salésienne, , 502 p. (ISBN 978-2-901102-01-4, lire en ligne), p. 275.
  15. Christian Sorrel, Histoire de la Savoie : images, récits, La Fontaine de Siloé, , 461 p. (ISBN 978-2-84206-347-4, lire en ligne), p. 146-147.
  16. Nicolas Carrier, « Une justice pour rétablir la « concorde » : la justice de composition dans la Savoie de la fin du Moyen Âge (fin XIIIe -début XVIe siècle) », dans Dominique Barthélemy, Nicolas Offenstadt, Le règlement des conflits au Moyen Âge. Actes du XXXIe Congrès de la SHMESP (Angers, 2000), Paris, Publications de la Sorbonne, , 391 p. (ISBN 978-2-85944-438-9), p. 237-257.
  17. Alessandro Barbero, « Les châtelains des comtes, puis ducs de Savoie en vallée d'Aoste (XIIIe – XVIe siècle) », dans Guido Castelnuovo, Olivier Mattéoni, « De part et d'autre des Alpes » : les châtelains des princes à la fin du moyen âge : actes de la table ronde de Chambéry, 11 et 12 octobre 2001, , 266 p. (lire en ligne).
  18. Nicolas Carrier, « A travers les archives médiévales de la principauté savoyarde - Les comptes de châtellenies », sur le site de mutualisation des Archives départementales de la Savoie et de la Haute-Savoie - Sabaudia.org (consulté en ).
  19. a et b Payraud 2009, p. 671-682, Annexe 11 : liste des châtelains recensés dans le cadre de cette étude.
  20. Gonthier 1881, p. 75 (lire en ligne).
  21. « SA - Comptes des châtellenies, des subsides, des revenus et des judicatures », sur le site des Archives départementales de la Savoie - enligne.savoie-archives.fr (consulté en ), p. 3

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Henri Baud, Jean-Yves Mariotte, Histoire des communes savoyardes : Le Chablais, Roanne, Éditions Horvath, , 422 p. (ISBN 978-2-7171-0099-0), p. 57-58, « Canton de Thonon », 125 à 133, « Allinges ».
  • Louis Blondel, Châteaux de l'ancien diocèse de Genève, vol. 7, Société d'histoire et d'archéologie de Genève (réimpr. 1978) (1re éd. 1956), 486 p., p. 355-367.
  • Georges Chapier, Châteaux Savoyards : Faucigny, Chablais, Tarentaise, Maurienne, Savoie propre, Genevois, Éditions La Découvrance, coll. « L'amateur Averti », , 410 p. (ISBN 978-2-8426-5326-2), p. 68-70.
  • Monique Constant, « L'établissement de la maison de Savoie au sud du Léman : la châtellenie d'Allinges-Thonon (XIIe siècle- 1536) », Mémoires et documents de l'Académie chablaisienne, Thonon-les-Bains, 1972, pages 367-370.
  • Monique Constant, « La justice dans une châtellenie savoyarde au Moyen Age : Allinges-Thonon », Revue historique de droit français et étranger, 4e série, vol. 50, no 3,‎ , p. 374-397
  • Abbé Jean-François Gonthier (1847-1913), Les Châteaux et la chapelle des Allinges, Annecy, impr. de J. Niérat (Ancienne imprimerie Burdet), , 136 p. (lire en ligne)
  • Ruth Mariotte Löber, Ville et seigneurie : Les chartes de franchises des comtes de Savoie, fin XIIe siècle-1343, Librairie Droz - Académie florimontane, , 266 p. (ISBN 978-2-600-04503-2, lire en ligne).
  • Christian Regat et François Aubert, Châteaux de Haute-Savoie : Chablais, Faucigny, Genevois, Éditions Cabédita, , 193 p. (ISBN 978-2-8829-5117-5), p. 13.
  • Charles-Laurent Salch, Dictionnaire des châteaux et des fortifications du Moyen Âge en France, Strasbourg, Éditions Publitotal, , 28e éd. (1re éd. 1979), 1304 p. (ISBN 2-86535-070-3, OCLC 1078727877)
  • Marc Thibout, « Les château des Allinges », dans Congrès archéologique de France. 123e session. Savoie. 1965, Paris, Société française d'archéologie, (lire en ligne), p. 254-263.

Fonds d'archives[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Lien externe[modifier | modifier le code]