Abbaye Notre-Dame de Cercamp

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Abbaye Notre-Dame de Cercamp
image de l'abbaye
L'ancien logis abbatial en 1878.
Diocèse Diocèse d'Amiens
Patronage Notre-Dame
Numéro d'ordre (selon Janauschek) CLXI (161)[1]
Fondation 1137[2] ou
10 novembre 1141[3]
Cistercien depuis 1141
Dissolution 1791
Abbaye-mère Abbaye de Pontigny
Lignée de Abbaye de Pontigny
Abbayes-filles Aucune
Congrégation Ordre cistercien
Protection Logo monument historique Inscrit MH (1946)
Logo monument historique Classé MH (1947)[4]
Logo monument historique Classé MH (2015)
Coordonnées 50° 16′ 10″ N, 2° 18′ 04″ E[3].
Pays Drapeau de la France France
Province Comté d'Artois
Région Nord-Pas-de-Calais
Département Pas-de-Calais
Commune Frévent
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Abbaye Notre-Dame de Cercamp
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Abbaye Notre-Dame de Cercamp

L'abbaye Notre-Dame de Cercamp est une ancienne abbaye cistercienne fondée au XIIe siècle par Hugues III de Campdavaine, à Frévent dans le hameau de Cercamp.

Rattachée à l'ordre cistercien, elle était fille de Pontigny[5]. Elle a été fermée à la Révolution française et ses bâtiments ont été en grande partie ruinés au XIXe siècle.

L'abbaye se trouvait dans la vallée de la Canche qui baignait, au nord, les murs du monastère au moyen d'un canal creusé de main d'hommes. Ce canal amenait l'eau dans les jardins de l'abbaye.

Toponymie[modifier | modifier le code]

Les différentes formes qui désignaient Cercamp ont été : Carus campus ; Clairsage ; Claircamp ; Cercamp. Cercamp signifierait le « champ du cerf » comme en témoigne l'écusson qui était sculpté sur le principal bâtiment de l'abbaye. Cet écusson a été enclavé, par la suite, dans un mur latéral de l'hôtel Saint-Martin à Frévent[6].

Histoire[modifier | modifier le code]

Acte fondateur[modifier | modifier le code]

Hugues de Camp d'Avesnes, comte de Saint-Pol, investit en 1131 Saint Riquier où s'étaient réfugiés les seigneurs d'Auxi et de Boubers-sur-Canche, ennemis qu'il avait combattus lors de diverses rencontres. Il utilise le feu grégeois qui détruit la ville, l'abbaye et tue 2 500 personnes. Les survivants se réfugient à Abbeville, dont l'abbé de Saint-Riquier qui porte plainte contre le comte au concile de Reims, mais celui-ci continue de dévaster la région.

Louis le Gros s'apprête à punir le comte Hugues quand ce dernier suit les conseils du pape en fondant un monastère et en construisant l'abbaye de Cercamp.

La légende[modifier | modifier le code]

Malgré ce revirement, il est, si l'on en croit la légende, condamné par le jugement divin à se changer en loup et à parcourir les lieux qu'il avait dévastés sous cette forme, chargé de chaînes. On le voit pendant la nuit, poussant d'affreux hurlements, et on l'appelle désormais la « Bête canteraine »[7].

Moyen Âge[modifier | modifier le code]

Le champ du cerf, écusson sculpté au fronton de l'abbaye.

En 1124, Hugues Corbet ayant participé à la croisade avec son père Renaud Corbet, de retour du Levant est inhumé dans l'abbaye[8]. Plus tard son fils Raoul y est également inhumé.

En 1197, Huges, sire et baron d'Auxi-le-Château est cité avec son épouse et ses enfants dans un titre de l'abbaye de Cercamp[9].

En 1239, Hugues V de Châtillon-Saint-Pol (Ier de Saint-Pol) (fin du XIIe siècle -1248)[10] et par sa seconde épouse Marie d'Avesnes (1200-1241)[11] constituent par une charte une rente annuelle et perpétuelle de treize muids de grain au profit du monastère et stipulèrent comme condition expresse que les moines de Cercamp enverraient chaque année aux frais de leur couvent 10 000 harengs et trois pots de beurre à l'abbaye du Pont-aux-Dames à Couilly. La redevance de trois pot de beurre fut rachetée en 1360, moyennant six muids de vin vermeil que les moines possédaient dans le vignoble de Crécy, et qu'ils cédèrent à l'abbaye du Pont-aux-Dames. La redevance des harengs fut rachetée plus tard moyennant une rente de 140 livres qui fut payée régulièrement jusqu'en 1789[12].

En , une charte de l'abbaye de Cercamp indique le mariage de Mahault et de Mayus de Hauteclocque[13].

Le , Mahaud de Brabant meurt et est enterrée dans l'abbaye de Cercamp. Elle est l'épouse de Robert J., comte d'Artois en 1237, puis avec dispense du pape Alexandre IV elle épouse en secondes noces Guy de Châtillon II, comte de Saint-Pol[14]. Elle est inhumée près de son mari sous un tombeau de cuivre doré et émaillé de pierreries.

Au XIIIe siècle, Gautier Disque meurt de maladie quinze jours après Pâques. Il est inhumé dans l'église d'Iuuy bien qu'il ait ordonné de le transporter à l'abbaye de Cercamp, car les chemins sont périlleux[15].

Le , Marie de Bretagne (1268–), fille de Jean II de Bretagne et son époux Guy IV de Châtillon-Saint-Pol, comte de Saint-Pol (1254-1317), sont tous deux inhumés dans l'abbaye[16].

En 1415, l'abbaye est ravagée par l'armée anglaise, pendant la guerre de Cent Ans.

L'énergique abbé Pierre de Bachimont (1512-1550) releva Cercamp. Il était bachelier en théologie et fut confirmé à Paris par le prélat de Citeau, 38 ans d' exercisse. Pierre de Bachimont fit remplacer par des ardoises les tuiles qui coiffaient la croisée c'est-à-dire le transept et la nef, celle-ci fut confiée au couvreur Servais, il dota l'édifice de vitraux colorés, notamment à trois fenêtres hautes percées dans le cœur dessus l' autel. Il fit percer des stèles commandées à Adam Dobelmer, enfin devant le pupitre et autour il fit exécuter une clôture en bois et deux autels respectivement dédiés à la Vierge et à tous les Saints.

Le , par ses lettres patentes, le roi Louis XI (1423-1483) confirme les privilèges de l'abbaye accordées par ses prédécesseurs[17].

Temps modernes[modifier | modifier le code]

En 1517, dans une charte de l'abbaye, il y a un aveu et dénombrement de Charles de Hauteclocque au sire marquis de Blangy[18].

En 1553, du 5 au , séjourna à l'abbaye Charles de La Roche-sur-Yon qui servait avec son frère Louis III de Montpensier dans les guerres contre Charles Quint. Il rejoignit Henri II qui assiégeait Renty[19].

Le [20], les négociations des traités du Cateau-Cambrésis débutent à l'abbaye[21], avant de se poursuivre au château du Cateau-Cambrésis. Les traités sont signés le 2 et et mettent un terme au conflit entre la France d'un côté et l'Espagne et l'Angleterre de l'autre.

Atelier de Pierre Mignard, Le Cardinal Mazarin (1658-1660), Chantilly, musée Condé.

En 1617, Louis XIII nomme Eustache Picot, maître de musique de sa chapelle à l'abbaye de Cercamp pour défense des droits du roi pour la mouvance du comté de Saint-Pol[22].

Le , Gaspard III de Coligny campe à l'abbaye, il essaie d'assiéger la ville de Saint-Omer. L'intervention de Thomas de Savoie-Carignan puis de Piccolomini l'oblige à se retirer[23].

Le , à cette date sous une inscription dans une des chapelles de la nef rappelle le transfert des corps de Guy de Chastillon et Anne de Bretagne, Pierre de Luxembourg et la dame des Essaux ainsi que Jacques de Luxembourg[5].

En 1710, les murailles du jardin sont renversées lors de la guerre de Succession d'Espagne.

Le , le sieur Bonnaire, chevalier de Saint-Lazare, reçoit du roi une pension de mille livres sur l'abbaye de Cercamp[24].

Époque contemporaine[modifier | modifier le code]

Le , l’Assemblée nationale décrète le transfert des biens de l'abbaye au département du Pas-de-Calais[25].

Le , le directoire du département du Pas-de-Calais décrète qu'en exécution de la loi du , l'abbaye de Notre-Dame d'Hénin-Liétard serait supprimée et que les religieux se réuniraient avant le aux bernardins de la maison de Cercamp[26]. Le , trois charrettes emmènent les chartes, livres, manuscrits, titres papiers au district d'Arras où ils sont brûlés publiquement le soir-même en exécution de l'arrêté du directoire.

Le , l'abbaye est vendue avec toutes les dépendances immédiates d'une contenance de 32 arpents.

En 1823, le baron François-Luglien de Fourment établit une filature de laine sur les ruines de l'ancien couvent des moines de Cîteaux[6]. La filature est détruite par un incendie en 1871.

En 1837, l'église abbatiale n'est plus qu'un amas de ruines sous les marteaux des démolisseurs.

Auguste, son fils, membre du conseil supérieur du Commerce et de l’Industrie, maire de Frévent de 1855 à 1891, crée un haras, collectionne les peintures et ne cesse d’embellir son domaine. L'abbaye, usine un temps, devient château.

En 1915, le général Foch y installe son état major. Il y reçoit notamment le roi George V, Alexandre Millerand, ministre de la guerre, les généraux Joffre et French. Dans ces lieux, le président Poincaré lui remet les insignes de grand-croix de la Légion d’honneur.

Légué à l’Assistance publique de la Seine, le domaine est affecté à des établissements liés à la santé ou à l’enseignement.

Depuis 2012, il est ouvert au public et fait l’objet d’une restauration progressive[27].

Architecture et description[modifier | modifier le code]

L'intérieur des bâtiments de la Porterie, des Hôtes et des Étrangers, ainsi que les bâtiments annexes et le parc font l’objet d’une inscription au titre des monuments historiques depuis le [4], transformée en classement par arrêté du [28].

Le bâtiment des Hôtes, pour ses façades, toitures, cheminées et salles aux boiseries du rez-de-chaussée, ainsi que les façades et toitures du bâtiment de la Porterie, font l’objet d’un classement au titre des monuments historiques depuis le [4].

Filiation et dépendance[modifier | modifier le code]

Notre-Dame de Cercamp est fille de l'abbaye de Pontigny.

Liste des abbés[modifier | modifier le code]

Hyacinthe Rigaud, Portrait du cardinal Guillaume Dubois (1723), Cleveland Museum of Art.
  • Cinquante-quatre abbés se succèdent durant six siècles. Le premier abbé conventuel, Jourdain, reste à la tête du monastère de 1140 à 1141.
  • Au XVIe siècle, par la signature du concordat de Bologne de 1516, l'abbaye de Cercamp, comme toutes les abbayes, est soumise au système de la commende. L'abbé, nommé par le roi, ne réside plus à l'abbaye mais en perçoit les bénéfices.

Abbés réguliers[modifier | modifier le code]

  • Jean X 34e abbé de 1484 à 1503.
  • Louis Vignon 35e abbé de 1503 à 1512.

Abbés commendataires[modifier | modifier le code]

Personnalités liées à l'abbaye[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. (la) Leopold Janauschek, Originum Cisterciensium : in quo, praemissis congregationum domiciliis adjectisque tabulis chronologico-genealogicis, veterum abbatiarum a monachis habitatarum fundationes ad fidem antiquissimorum fontium primus descripsit, t. I, Vienne, , 491 p. (lire en ligne), p. 159. Cette source utilise la graphie « Cercamp » mais donne une liste qui est probablement celle des autres graphies rencontrées dans laquelle « Cercamps » est présent.
  2. Gallia Christiana, tome X.
  3. a et b « Cercamp », sur cistercensi.info, Ordre cistercien (consulté le ).
  4. a b et c « Ancienne abbaye de Cercamp », notice no PA00108286, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture.
  5. a et b Edmond Martène et Ursin Durand, Voyage littéraire de deux religieux bénédictins de la Congrégation de Saint Maur, vol. 1, Paris, F. Delaulne, (lire en ligne), p. 176.
  6. a et b Cardevacque 1878.
  7. François César Louandre, Histoire ancienne et moderne d'Abbeville et de son arrondissement, A. Boulanger, , 606 p. (lire en ligne), p. 75. Copie de l'exemplaire de l'université d'Oxford numérisée le .
  8. Jean Le Carpentier, Histoire généalogique des Païs-Bas, ou Histoire de Cambray, et du Cambresis…, Chez L'Autheur, (lire en ligne), p. 419.
  9. François-Alexandre Aubert de La Chesnaye des Bois, Dictionnaire de la noblesse, contenant les généalogies, l'histoire et la chronologie des familles nobles de France, vol. 1, (lire en ligne), p. 591.
  10. Seigneur de Châtillon (1219), Troissy, Melun, Crécy (1223), d'Ancre, vicomte de Châteaudun (1211) comte de Saint-Pol (1228), bouteiller de Champagne.
  11. Comtesse de Blois, dame d'Avesnes, de Bohain (1236) et de Guise, unique héritière de Gauthier d'Avesnes en Ternois et de Marguerite, comtesse de Blois (cf. André Duchesne, Histoire de la Maison de Châtillon).
  12. « Charte du 25 février 1360 », in Berthault, Abbaye du Pont-aux-Dames, Paris-Meaux, 1878, p. 89.
  13. Franc̜ois-Alexandre Aubert de La Chesnaye-Desbois, Dictionnaire de la noblesse, contenant les généalogies, l'histoire & la chronologie des familles nobles de France, l'explication de leur armes, & l'état des grandes terres du royaume, Badier - Chez veuve Duchêne, (lire en ligne), p. 686.
  14. Anselme de Sainte-Marie (1625-1694), Honoré Caille Du Fourny et Ange de Sainte-Rosalie (1655-1726), Histoire généalogique et chronologique de la maison royale de France, des pairs, grands officiers de la couronne & de la maison du Roy, & des anciens barons du royaume…, La compagnie des libraires associez, (lire en ligne), p. 792.
  15. Jean-Antoine Roucher, Antoine Perrin et Louis d'Ussieux, Collection universelle des mémoires particuliers relatifs a l'histoire de France…, vol. 5, (lire en ligne), p. 376.
  16. André Du Chesne, Histoire généalogique de la maison de Dreux de Bar le Duc, de Luxembourg et… (lire en ligne), p. 213.
  17. Comte de Pastoret, Ordonnance des Rois de France de la troisième race, recueillies par ordre chronologique : contenant les ordonnances rendues depuis le mois de juin 1463 jusqu'au mois de juin 1467, vol. 16, Paris, Imprimerie royale, (1re éd. 1463, avant Pâques) (lire en ligne), « Lettres patentes de Louis XI », p. 159.
  18. s.a., Le journal des sçavans, pour l'année 1788, Paris, Bureau du Journal de Paris, (lire en ligne), p. 617.
  19. François de Rabutin, Collection universelle des Mémoires particuliers relatifs à l'histoire de France : contenant les mémoires de François de Rabutin […] depuis l'année 1550 jusqu'en 1559, vol. 38, (lire en ligne), p. 145.
  20. François Clément, L'Art De Vérifier Les Dates Des Faits Historiques, Des Chartes, Des Chroniques, Et Autres Anciens Monumens, Depuis La Naissance De Notre-Seigneur, Jombert, (lire en ligne), p. 643.
  21. Jean Dumont (Baron de Carlscroon), Corps universel diplomatique du droit des gens, contenant un recueil des traitez d'alliance, de paix, de trève, de neutralité, de commerce, etc., qui ont été faits en Europe, depuis le règne de l'empereur Charlemagne jusques à présent, vol. 5, (lire en ligne), p. 43.
  22. Jacques Le Long, Pierre Nicolas Desmolets, Gaspard-Moïse-Augustin de Fontanieu, François-Roger de Gaignières et Laurent Étienne Rondet, Bibliothèque historique de la France : contenant le catalogue des ouvrages, imprimés & manuscrits, qui traitent de l'histoire de ce royaume, ou qui y ont rapport ; avec des notes critiques et historiques, vol. 2, Paris, Bibliothèque nationale de France, Impr. Herissant, (lire en ligne), p. 818..
  23. Jacques Marie Ray de Saint-Geniles, Histoire Militaire Du Regne De Louis Le Juste, XIII. Du Nom, Roy…, vol. 2, Durant, (lire en ligne), p. 137.
  24. Théophraste Renaudot, Gazette de France, vol. 1, (lire en ligne), p. 209.
  25. Assemblée nationale constituante, Procès-verbal de l'Assemblée nationale (1789-1791), vol. 22, Royaume de France, (lire en ligne), p. 8.
  26. Louis Dancoisne, Recherches historiques sur Hénin-Liétard, A. Obez, , p. 171. Archive de l'université de Gand.
  27. « Visites Guidées », sur www.cercamp.fr (consulté le ).
  28. JORF n°0095 du 22 avril 2016 texte n° 55 Liste des immeubles protégés au titre des monuments historiques en 2015
  29. Antoine Mongez, Vie privée du cardinal Dubois : Premier ministre, archevêque de Cambrai, etc., Londres, Taylor Institution, , 389 p. (lire en ligne), p. 264.
  30. s.a., La Gazette de France, Paris, Imprimerie de la Gazette de France, , 416 p. (lire en ligne), p. 151.
  31. Floris Van der Haer, trésorier et chanoine de Saint-Pierre à Lille, Les chastelains de Lille. Leur anciens estat, office & famille, vol. 2, Lille, Imprimerie de Christofle Beys, , 300 p. (lire en ligne), p. 297.
  32. s.a., Histoire de l'Académie royale des inscriptions et belles lettres : Les mémoires de littérature tirés des registres de cette académie depuis l'année 1726 jusques et compris l'année 1730, t. 7, Paris, Imprimerie royale, , 487 p. (lire en ligne), « Éloge de M. l'Abbé de Boissy », p. 425.

Annexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Adophe de Cardevacque, Histoire de l'abbaye de Cercamp, Arras (31 petite place), Sueur-Charruey, (lire en ligne).

Articles connexes[modifier | modifier le code]