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Centrale nucléaire de Doel

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Centrale nucléaire de Doel
La centrale nucléaire de Doel,
sur l'estuaire de l'Escaut.
Administration
Pays
Région
Province
Commune
Coordonnées
Opérateur
Construction
Doel-1 : 1969
Doel-2 : 1971
Doel-3 : 1975
Doel-4 : 1978
Mise en service
Doel-1 : 1975
Doel-2 : 1975
Doel-3 : 1982
Doel-4 : 1985
Statut
Doel-1 et 3 : arrêt définitif
Doel-2 et 4 : opérationnels
Réacteurs
Fournisseurs
Type
Réacteurs actifs
Doel-2 : 445 MWe
Doel-4 : 1026 MWe
Puissance nominale
1 471 MWe nets
Production d’électricité
Production totale
459,838 TWh

Source froide
Site web
Carte

La centrale nucléaire de Doel (en néerlandais : Kerncentrale Doel) est l'une des deux centrales nucléaires belges (avec celle de Tihange dans la province de Liège). Elle est située à Doel, une section de la commune de Beveren, dans la province de Flandre-Orientale, sur la rive gauche de l'Escaut, non loin de la frontière avec les Pays-Bas.

Exploitée par Electrabel (filiale du groupe français Engie), elle comprend un total de quatre réacteurs à eau pressurisée (REP) cumulant un puissance électrique nette totale d'environ 2 900 MWe.

Conformément à la loi de sortie du nucléaire civil belge votée en 2003, le réacteur Doel-3 est mis à l'arrêt définitif le , suivi de Doel-1 le . Après plusieurs retournements d'opinion des gouvernements belges successifs, le réacteur Doel-2 doit être définitivement arrêté le , et Doel-4 à l'horizon fin 2035. À eux deux ils cumulent une puissance électrique nette de 1 471 MWe.

Situation géographique

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La centrale occupe une surface d'environ 80 hectares. Elle se situe à 25 km au nord d'Anvers, à 42 km au nord de Bruxelles, à 136 km au sud-est d'Amsterdam et à 140 km au nord-ouest d'Aix-la-Chapelle. De toutes les centrales nucléaires européennes, celle de Doel est située dans la région avec la plus forte densité de population : environ 9 millions d'habitants se trouvent dans un périmètre de 75 km[1],[2].

Début 2011, elle emploie 940 collaborateurs, dont 800 pour le cœur de la centrale.[réf. nécessaire]

Description

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La centrale nucléaire de Doel, vue aérienne.

Caractéristiques techniques

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Les quatre réacteurs sont des réacteurs à eau pressurisée (REP) conçus par l'entreprise américaine Westinghouse. Doel-1 et 2 (d'une puissance électrique nette unitaire de 445 MWe) sont des REP de modèle Westinghouse 2-loop car comportant un circuit primaire à deux boucles. Doel-3 (1 006 MWe) et Doel-4 (1 026 MWe) sont des REP plus puissants de modèle Westinghouse 3-loop[3].

Les réacteurs Doel-1 et 2 ont un refroidissement dit en « circuit ouvert » où l'eau de l'Escaut est intégralement restituée au fleuve après passage dans le condenseur. Les réacteurs Doel-3 et 4 ont eux un refroidissement dit en « circuit fermé » où l'eau restituée est d'abord refroidie dans une tour aérorefrigérante (une par réacteur) après passage dans le condenseur. Cela permet de diminuer l'échauffement du fleuve en aval, au prix de l'évaporation d'une part de cette haut (de l'ordre d'environ 20%)[3].

Les réacteurs Doel-1, 2 et 4 sont construits par le consortium ACECOWEN (Acec-Cockerill-Westinghouse), et Doel-3 par le consortium FRAMACECO (Framatome-Acec-Cockerill)[4].

Définitions

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Les caractéristiques des réacteurs sont données dans les tableaux ci-après ; les données sont principalement issues de la base de données PRIS (Power Reactor Information System) de l’Agence international de l'énergie atomique (AIEA) qui définit ainsi les termes[5] :

  • la puissance nette correspond à la puissance électrique délivrée sur le réseau et sert d'indicateur en termes de puissance installée ;
  • la puissance brute correspond à la puissance délivrée par l'alternateur (soit la puissance nette augmentée de la consommation interne de la centrale) ;
  • la puissance thermique correspond, à la puissance délivrée par la chaudière nucléaire.

Le début de construction correspond à la date de coulage des fondations du bâtiment réacteur. Une tranche (nom utilisé pour un réacteur complet) est considérée comme opérationnelle après son premier couplage au réseau électrique. La mise en service commerciale est le transfert contractuel de l’installation du constructeur vers le propriétaire ; intervenant en principe après réalisation des tests réglementaires et contractuels, et après fonctionnement continu à 100 % pendant une durée définie au contrat de construction.

Nom du réacteur Modèle de REP Statut Puissance Début de construction Première divergence Raccordement au réseau Mise en service commercial Arrêt définitif (prévu)
Nette

[MWe]

Brute

[MWe]

Thermique

[MWth]

Doel-1[6] WH-2 loop Arrêt définitif 445 454 1 311
Doel-2[7] Opérationnel 445 454 1 311 [8]
Doel-3[9] WH-3 loop Arrêt définitif 1 006 1 056 3 054
Doel-4[10] Opérationnel 1 026 1 090 2 988 ~2035[11]

Le centre de visite et d'information de la centrale nucléaire de Doel ouvre ses portes en . Depuis lors, l'Infocenter a accueilli plusieurs dizaines de milliers de visiteurs[12].

Mise à l’arrêt définitif (loi de sortie du nucléaire civil belge)

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La centrale de Doel en 2012.

Le gouvernement belge vote en 2003 la sortie progressive du nucléaire civil (loi Olivier Deleuze), loi de nouveau confirmée en 2015. Elle exige l'arrêt définitif de chaque réacteur à l'issue de ses 40 ans d'exploitation, aboutissant à un arrêt total des sept réacteurs nucléaires belges en 2025[13].

Le , l'exploitant Electrabel arrête le réacteur Doel-1 après 40 ans d'exploitation conformément à la loi. Des négociations débutent alors entre Electrabel et le gouvernement Belge pour prolonger l'exploitation de 10 ans, soit jusqu'en 2025[14]. Un accord est conclu le avec le gouvernement Michel I pour une prolongation d'exploitation de 10 ans des deux réacteurs Doel-1 et 2. La production d'électricité reprend à Doel-1 en [15],[16]. Cette prolongation est annulée par la Cour Constitutionnelle belge en en raison de l'absence d'une étude d'incidence environnementale et d'une consultation publique transfrontalière[17], mais autorise néanmoins une prolongation d'exploitation jusqu’en 2022[18]. Après réalisation de l'étude d'incidence environnementale et de la consultation publique transfrontalière, la chambre des représentants adopte en la loi permettant le fonctionnement de Doel-1 et 2 jusqu'en 2025[19].

Doel-3 et 4 devaient être mis à l’arrêt définitif respectivement en 2022 et en 2025. Après l'invasion de l'Ukraine par la Russie, le gouvernement belge - en prévision d'une réduction de la dépendance fossile belge de la Russie - décide la prolongation de l'exploitation des réacteurs Doel-4 et Tihange-3 pour dix années[20]. Cette décision se confirme en avec l'annonce d'un accord passé avec Electrabel pour la prolongation de ces deux réacteurs pour une période de dix ans à compter de , soit jusqu'à la fin 2035[21],[22].

Conformément à la loi, Doel-3 est mis à l'arrêt définitif le 23 septembre 2022 après 40 ans d'exploitation[23],[24], et Doel-1 le après 50 ans d'exploitation[25]. L'arrêt définitif de Doel-2 à ses 50 ans d'exploitation est prévu pour la fin [13].

Anomalie des micro-bulles de la cuve de Doel-3 (2012)

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En lors d'une inspection programmée de la cuve du réacteur Doel-3 par ultrasons, environs 8 000 micro-bulles d'hydrogène sont découvertes dans la parois en acier (parfois improprement appelées « fissures » dans la presse[26])[27]. Cette cuve a été forgé par Rotterdamsche Droogdokmaatschappij, motivant un contrôle en de celle du réacteur Tihange-2 forgée par cette même entreprise, et où les même anomalies seront retrouvées. En , le réacteur est mis à l'arrêt par décision de l'Agence fédérale de contrôle nucléaire (AFCN) afin de vérifier que ce défaut n'impacte pas l'intégrité et la sûreté de la cuve. Des inspections approfondies révèlent que les microbulles d’hydrogène étaient déjà présentes lors du forgeage des cuves de réacteur et résulteraient d'un excès d'hydrogène lors du refroidissement et du durcissement de l'acier à sa fabrication. Après de nouvelles analyses plus précises conduites par Electrabel en , d'environ 60% de micro-bulles supplémentaires sont découvertes[27].

Les cuves des réacteurs Doel-4, Doel-1 puis Doel-2 sont controlées respectivement en septembre, octobre et . Aucun défaut dû à l'hydrogène n'est détecté[28].

L'AFCN indique que ces micro-bulles n’ont pas d’impact sur la structure en acier de la cuve et donc sur sa sûreté, et qu'elles n’évoluent pas avec le temps. L'AFCN autorise une redémarrage de Doel-3, effectif en janvier 2016, et impose à Electrabel un contrôle régulier de l'absence d'évolution de ces micro-bulles. Les analyses menées en 2016 et montrent de légères variations dans les résultats de mesure (imputables aux fluctuation de la méthode de mesure), mais une stabilité des micro-bulles conformément aux attentes[29],[30],[31].

Les incidents sont classés selon l'échelle INES. Cette échelle compte huit niveaux de gravité notés de 0 à 7. Les incidents de niveau 0 ne sont pas systématiquement rendus publics. Il n'y a jamais eu d'incidents ou d'accidents nucléaires de niveau supérieur à 2 à Doel.

Année Anomalie (niveau 1) Incident (niveau 2)
2010[32] 10 0
2011 0 1[33]

En mai 2012, une anomalie dans une vanne est détectée lors de la mise à l'arrêt du réacteur no 2 en raison de son entretien annuel. L'incident est classé au premier niveau de l'échelle INES[34].

Le mardi au matin, les 65 000 litres d’huile nécessaires au fonctionnement de la turbine à vapeur liée au réacteur no 4 sont vidangés dans un réservoir souterrain prévu à cet effet en cas d’incendie, entraînant l'arrêt de la centrale et des dégâts importants. La vidange est due à une manœuvre manuelle délibérée et une intention criminelle est soupçonnée[35]. Le vendredi , après réparation de la turbine endommagée, le réacteur no 4 est relancé.

Notes et références

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  1. « La centrale de Doel en zone très peuplée », sur vrt.be, .
  2. Kerncentrale Doel in dichtstbevolkte gebied, deredactie.be
  3. a et b « Nuclear Power in Belgium - World Nuclear Association », sur world-nuclear.org (consulté le )
  4. « Le secteur nucléaire en Belgique : développement et structures actuelles », Courrier hebdomadaire du CRISP, vol. 718719, no 12,‎ , p. 1–41 (ISSN 0008-9664, DOI 10.3917/cris.718.0001, lire en ligne, consulté le )
  5. (en) « Glossaire », sur AIEA PRIS Base de données réacteurs, (consulté le ).
  6. « PRIS - Reactor Details », sur pris.iaea.org (consulté le ).
  7. « PRIS - Reactor Details », sur pris.iaea.org (consulté le ).
  8. « Belgique: Doel 1 définitivement déconnecté du réseau | Forum nucléaire suisse | S'informer maintenant », sur Forum nucléaire suisse, (consulté le ).
  9. « PRIS - Reactor Details », sur pris.iaea.org (consulté le ).
  10. « PRIS - Reactor Details », sur pris.iaea.org (consulté le ).
  11. (en) « Belgium's Tihange 1 nuclear reactor ends 50 years of service », sur World Nuclear News, (consulté le ).
  12. « electrabel.com/whoarewe/nuclea… »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?).
  13. a et b Belga -, « Rebondissement au sein du gouvernement: la prolongation de vieilles centrales nucléaires est envisagée », sur La Libre.be (consulté le ).
  14. « Doel 1 a tiré sa révérence », sur 7sur7.be, (consulté le ).
  15. (en) « Belgian nuclear reactor shut down three days after restarting », sur phys.org (consulté le )
  16. rtbf.be - 18 décembre 2014 : [1] Accord sur le nucléaire: Doel 1 et 2 prolongés de 10 ans
  17. rtbf.be - 2 avril 2021 : [2] Sortie du nucléaire : la moitié de l'Europe consultée dès le 15 avril sur la prolongation de Doel 1 et 2
  18. Réacteurs nucléaires de Doel 1 et 2 : une consultation populaire ouverte à tous, dans un rayon de 1000 kilomètres, rtbf, 15 avril 2021
  19. Évaluation des incidences sur l’environnement du projet de report de la désactivation des centrales nucléaires de Doel 1 et de Doel 2, economie.fgov.be, 12 avril 2023
  20. ANS Nuclear Newswire
  21. « Prolongation de Doel 4 et Tihange 3 dès novembre 2026 : voici ce qu’ont conclu Engie et le gouvernement », sur RTBF (consulté le ).
  22. « En Belgique, le gouvernement approuve le « contrat du siècle » sur le nucléaire avec Engie », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  23. Sortie du nucléaire - Le réacteur nucléaire Doel 3 ne génère plus d'électricité, lalibre.be, 23 septembre 2022
  24. La-Croix.com, « Énergie : la Belgique, dernier pays européen à amorcer sa sortie du nucléaire », sur La Croix, (consulté le )
  25. « Fermeture de Doel 1 : l’Arizona « vend des contes de fées nucléaires », dénoncent les ONG », sur Le Soir, (consulté le )
  26. RFI, « Nucléaire: Nucléaire : un réacteur arrêté pour cause de fissures en Belgique », Radio-France Internationale,‎ (lire en ligne)
  27. a et b « Nucléaire belge : découverte de nouvelles fissures sur les cuves de Thiange 2 et Doel 3 », sur actu-environnement.com, (consulté le ).
  28. « Indications de défauts dans les cuves des réacteurs de Doel 3 et Tihange 2 | AFCN - Agence fédérale de Contrôle nucléaire », sur afcn.fgov.be (consulté le )
  29. (en-US) « News archivos », sur Foro Nuclear (consulté le )
  30. « Pas d'évolution des flocons d'hydrogène à Doel 3 | AFCN - Agence Fédérale de Controle Nucléaire », sur afcn.fgov.be (consulté le ).
  31. « Microbulles d’hydrogène dans la cuve du réacteur de Doel 3 : pas d'évolution | AFCN - Agence fédérale de Contrôle nucléaire », sur afcn.fgov.be (consulté le )
  32. AFCN, rapport annuel 2010, pages 22-25
  33. Communiqué de Presse, Electrabel, mars 2011
  34. rtl.be - 25 mai 2012 : Anomalie détectée à la centrale nucléaire de Doel 2
  35. « Fermeture de Doel 4: "Une manœuvre manuelle et délibérée" », sur Le Vif/L'Express, (consulté le ).

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Articles connexes

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Lien externe

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