Centres d'extermination nazis

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Localisation des camps d'extermination nazis.

Les camps d’extermination nazis étaient des centres de mise à mort à grande échelle, dont « les opérations s'apparentaient par certains égards aux méthodes de production complexes d'une usine moderne ». Créés et organisés par le régime nazi d'Adolf Hitler, sous la responsabilité opérationnelle d'Heinrich Himmler et de son adjoint Reinhard Heydrich dans le seul but d'exterminer un maximum de victimes dans un minimum de temps, ils firent près de trois millions de victimes[1], juives dans leur énorme majorité, assassinées au moyen de chambres à gaz. Maillon essentiel de la Shoah, ils prirent le relais des fusillades de masse perpétrées par les Einsatzgruppen.

L'historiographie s'accorde sur une liste de six camps d'extermination : Chełmno, Bełżec, Sobibor, Treblinka, Auschwitz–Birkenau et Majdanek, les deux derniers étant intégrés à des camps de concentration préexistants.

Raul Hilberg a écrit que ces camps, qu'il appelle des « centres de mise à mort », « n'avaient aucun précédent. Jamais, dans toute l'histoire de l'humanité, on n'avait ainsi tué à la chaîne »[1].

La création : objectifs et processus décisionnel

L'anéantissement des Juifs et des Roms est voulu par Hitler dès 1941 et progressivement, en particulier lors de la conférence de Wannsee en 1942, on y évoque la solution finale au problème Juif : les centres de mises à mort. Les premiers centres sont prévus par Reinhard Heydrich pour protéger les tueurs et éviter le développement d'une perversion chez les SS qui deviendraient des sadiques. Cela aurait des conséquences négatives sur la « race allemande ». Cela répond aussi à un problème logistique avec la présence de partisans à l'arrière du front et les difficultés en hiver. Le gel du sol rend difficile le creusement de fosses communes.

Une triple continuité : camps de concentration, Aktion T4 et Einsatzgruppen

Le système concentrationnaire

Les camps d'extermination sont dans la continuité des camps de concentration : lorsque ces derniers étaient en surcharge de détenus, ou lorsqu'ils ne pouvaient plus travailler, des convois étaient organisés afin de libérer de la place. Les camps d'extermination avaient le même but que les Einsatzgruppen : éliminer systématiquement toute personne ne convenant pas au Reich.

Un sort dramatique attendait presque à coup sûr les prisonniers des camps de concentration, il n'y avait que peu de chance de survie : manque constant d'eau, de nourriture ; travail harassant dans des conditions plus que précaires ; hygiène déplorable ; maladies ; expériences menées sur certains détenus ; et enfin ceux qui ne pouvaient plus travailler étaient envoyés dans les chambres à gaz.

L'assassinat des malades mentaux

Une politique d'extermination des handicapés physiques et mentaux, l'Aktion T4, avait déjà été entreprise sur le territoire du Reich avant la mise en œuvre de la solution finale de la question juive. C'est dans ce cadre que les premières exécutions au gaz (monoxyde de carbone) ont été réalisées, mais après que les malades eurent été rendus somnolents par l'administration de médicaments[2]. Les nazis ont été contraints d'y mettre fin à cause de l'émotion et de la protestation d'une partie de la population allemande, relayée par les églises protestante et catholique[3].

Cependant l'extermination des handicapés se poursuivra jusqu'en 1945[4],[5].

Les meurtres de masse des Einsatzgruppen

La « Shoah par balles » a été perpétrée par des unités spéciales nommées les Einsatzgruppen. Elles ont agi principalement en 1941 (par exemple à Babi Yar) et 1942 dans l'Est de l’Europe, en suivant l'avancée de la Wehrmacht.

Construction des camps et début des assassinats

Le premier centre d'extermination à être construit et à être mis en service est celui de Chełmno en .

Les camps de Belzec, Sobibor et Treblinka, destinés à tuer dans le cadre de l’Aktion Reinhard tous les Juifs polonais, ouvrent dans le courant de l'année 1942.

Organisation générale

Arrivée des convois

Les prisonniers étaient emmenés dans des wagons à bestiaux, où ils étaient entassés avec très peu d’espace par personne. De nombreuses personnes mouraient au cours de ces voyages, de faim, de soif, de froid ou d’excès de chaleur — selon la saison — et de maladies contagieuses éventuelles qui avaient pu se propager dans les wagons[réf. nécessaire].

L'hygiène y était déplorable et les déportés devaient faire leurs besoins le plus souvent dans un seau qui passait de main en main, dans la promiscuité, devant les autres. L'odeur nauséabonde durait pendant tout le trajet. Une fois arrivés, dans la plupart des centres, les Juifs étaient tous gazés. Certains étaient conservés pour les tâches les plus pénibles (récupération des affaires, coupe des cheveux...). À Auschwitz et Majdanek, une sélection existait en lien avec l'existence d'un camp de concentration. « Le premier tri avait lieu pendant le voyage. Le second à l'arrivée. La première sélection ne tenait qu'à la résistance et à la volonté de l'homme enfermé dans le wagon. La seconde était l’œuvre des S.S., mais dépendait aussi de la manière dont s'était déroulé le voyage. »[6]

Sélection

À l'arrivée des convois, les juifs sont triés en deux groupes : l'un sera immédiatement gazé (certaines femmes, les enfants, les vieillards, les handicapés et les malades) et l'autre regroupe les hommes et femmes considérés comme assez forts. Ces derniers sont gardés pour le travail forcé jusqu'à ce que mort s'ensuive. Les personnes dotées de caractéristiques particulières (jumeaux, nains, etc) sont parfois gardées en vie et mises à l'écart pour des expériences pseudo-médicales.

Gazage

Après avoir pratiqué les fusillades de masse (Einsatzgruppen) et constaté les effets psychologiques négatifs sur les troupes, les SS et le RSHA ont cherché des alternatives nécessitant moins d'exécutants pour le meurtre de masse: explosifs, noyades, poison, ..., mais les résultats ne répondaient pas au besoin d'échelle, de rapidité et discrétion. C'est après avoir constaté le décès de prisonniers allongés de force dans une cave mal ventilée que l'idée du gazage a été explorée. L'oxyde de carbone a alors été utilisé dans les camions à gaz (ou Sonderbehandlungswagen, S-Wagen) spécialement aménagés et produits en série. Mais, témoin du fonctionnement de ces camions, Adolf Eichmann leur reproche un manque de discrétion avec les cris, une durée trop longue de mise à mort (jusqu'à 30 min), des manipulations pénibles des corps crispés et souillés altérant le moral des opérants. Enfin, c'est le SS Globocnik qui fait une expérience dans une maisonnette aménagée: le gazage dans un local hermétique avec un minimum d'exécutants et une clandestinité supérieure. Son invention de la chambre à gaz sera ensuite perfectionnée avec un gaz plus rapide, le Zyklon B, et une industrialisation du procédé. Le 3 septembre 1941 Rudolf Höss assiste à l'exécution de 900 prisonniers de guerre pour valider le procédé. Il écrit qu'il est rassuré de constater l'absence de crispation des cadavres et ajoute « Quand nous avions appris qu'on procèderait prochainement à l'extermination en masse des Juifs, ni moi, ni Eichmann n'étions renseignés sur les méthodes à employer. Nous savions qu'on allait les gazer, mais comment et avec quel gaz ? Maintenant, nous possédions les gaz et nous en avions découvert le mode d'emploi... »[7].

Destruction des cadavres et dissimulation des preuves

Après avoir été dans un premier temps enfouis dans des fosses communes, les cadavres des victimes ont été incinérés dans des fours crématoires ou dans des fosses de crémation, à partir du printemps 1942 à Chelmno et à Auschwitz et de l'automne dans les camps de l'action Reinhard[8]. Des détenus étaient chargés de déposer les cadavres et ensuite d'y mettre feu.

Les bourreaux

Les gardiens des camps, et même parfois des médecins nazis, agissaient en bourreaux envers les Juifs. Par exemple, Joseph Mengele, que l'on surnommait « l'ange de la mort », faisait des expériences barbares sur des enfants ou des jumeaux. L'un des médecins ayant travaillé aux camps d'Auschwitz et de Ravensbrück, Carl Clauberg, faisait des expériences de stérilisation sur les femmes. Des gardiens SS ou venant des Einzatzgruppen se chargeaient des exécutions.

Les Sonderkommandos

Les Sonderkommandos (initialement Krematoriumskommandos, les commandos du crématoire) étaient des unités de travail dans les camps d'extermination, composées de prisonniers, juifs dans leur très grande majorité, forcés à participer au processus de la solution finale, leur rôle étant de vider les chambres à gaz, arracher les dents en or, couper les cheveux des morts et incinérer les cadavres dans les fours crématoires et les fosses. Le mot vient de l'allemand et signifie unité spéciale. Ce terme est parfois rencontré dans une autre acception car il a également été utilisé auparavant pour qualifier les Einsatzgruppen qui, eux, étaient Allemands et participaient à ce qu'on appelle désormais la « Shoah par balles » sur le front de l'Est.

Les victimes

La Shoah est le terme généralement employé pour désigner le génocide d'environ six millions de Juifs européens durant la Seconde Guerre mondiale. L'historien Martin Gilbert estime que 5,7 millions (soit 78 %) des 7,3 millions de Juifs vivant dans les territoires occupés par l'Allemagne ont été victimes de la Shoah[9]. Les autres estimations vont de 4,9 à 6 millions de juifs[10].

Détail des victimes :

  • Massacres en URSS par les Einsatzgruppen : Raul Hilberg avance à 1,4 million le nombre de Juifs tués par les groupes mobiles de tuerie[12].
  • Morts supplémentaires dans les ghettos de l'Europe occupée : 700 000 selon Raul Hilberg[12].

Les chambres à gaz dans les camps de concentration

Résistance et révolte

Bilan

  • Auschwitz-Birkenau : 1 100 000 morts.
  • Treblinka : 750 000 à 1 200 000 morts, 300 survivants.
  • Bełżec : 430 000 à 500 000 morts, deux survivants.
  • Sobibór : 200 000 à 250 000 morts, environ 50 survivants.
  • Chełmno : 153 000 morts, deux ou trois survivants.
  • Majdanek : 78 000 morts, 200 000 survivants.

Notes et références

Notes

  1. L'historien Raul Hilberg donne le chiffre de 3 millions de morts juifs dans les camps de la mort[12].

Références

  1. a et b Hilberg 2006, p. 1595-1596.
  2. Poliakov 1974, p. 279-280.
  3. voir l'intervention de l'évêque de Munich Mgr von Galen.
  4. [Horst von Buttlar:Forscher öffnen Inventar des Schreckens at Spiegel Online (2003-10-1) (German)].
  5. Evans 2009, p. 127-128.
  6. Dominique Decèze, L'esclavage concentrationnaire, 1979
  7. Ady Brille, Les Techniciens de la Mort, ch. De la théorie à la pratique, 1979
  8. Brayard 2012, emplacement 7152-7171 sur 12153.
  9. Gilbert 1988, p. 244.
  10. (en) « United States Holocaust Memorial Museum. Holocaust Encyclopedia. How many Jews were killed during the Holocaust? », United States Holocaust Memorial Museum (consulté le )
  11. (pl) Wojciech Materski et Tomasz Szarota, Polska 1939-1945 : straty osobowe i ofiary represji pod dwiema okupacjami, Varsovie, , p. 32.
  12. a b et c Hilberg 1973, p. 767.

Annexes

Bibliographie

Mémoires et témoignages

Ouvrages scientifiques

Romans

Filmographie

Documentaires

Dans la fiction

Articles connexes

Liens externes