Bridget O'Donnel

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Bridget O'Donnel
Bridget O'Donnel and children. Dessin de James Mahony représentant Bridget O'Donnel et ses deux filles, paru dans The Illustrated London News le .
Biographie
Naissance
Activité

Bridget O'Donnel est une femme irlandaise qui incarne, par son témoignage et par le dessin qui la représente avec ses deux enfants, les victimes de la grande famine qui sévit au milieu du XIXe siècle en Irlande, à la suite de la baisse drastique des récoltes de pomme de terre causée par le mildiou.

Biographie[modifier | modifier le code]

Le , le journal londonien The Illustrated London News propose le témoignage de Bridget O'Donnel comme illustration de la grande famine irlandaise et de la politique d'expulsion des fermiers menée par les grands propriétaires :

« Mon mari louait 4,5 acres de terre et 3 acres de tourbière ; notre loyer annuel était de 7 livres et 4 shillings ; nous avons été expulsés en novembre dernier ; il devait du loyer. […] J’étais alors alitée avec la fièvre. Dan Sheedey et cinq ou six hommes sont venus pour démolir ma maison. Ils voulaient que je la leur remette. J’ai dit que je ne le ferais pas ; j’avais la fièvre et j’étais à deux mois de mon accouchement ; ils ont commencé à abattre la maison, et l’avaient à moitié abattue quand deux voisines, Nell Spellesley et Kate How, m’ont portée au dehors. Le prêtre et docteur s’est occupé de moi peu après. Le père Meehan m’a donné les sacrements. On m’a portée dans une cabane, et je suis restée allongée pendant huit jours, quand j’ai donné naissance à un enfant mort-né. Je suis restée couchée trois semaines. Toute ma famille a attrapé la fièvre, et un garçon de treize ans est mort de faim et de privations alors que la maladie nous terrassait[1]. »

Bridget O'Donnel et ses deux filles survivantes sont emmenées au workhouse de Kilrush[2]. Une femme du même nom et sa fille émigrent en 1850, à partir de Kilrush, à New York en passant par Liverpool. Probablement est-ce la même personne[2],[3]. On peut penser que son mari a émigré aux États-Unis avant l'éviction de la famille de sa ferme et qu'ainsi il a pu économiser et envoyer à sa femme de quoi financer le voyage[3].

Comme cette famille, les paysans les plus souvent expulsés cultivent de très petites surfaces, moins de 5 acres (2 hectares) de terres, et ne peuvent pas payer le loyer pour ces terres, alors que sévit la famine[1].

Symbole[modifier | modifier le code]

Bridget O'Donnel incarne la femme héroïque qui défie les propriétaires[2]. Son portrait avec ses deux filles, réalisé par James Mahony (en)[4], publié dans le journal londonien The Illustrated London News en complément de l'article, donne un visage à la famine et fait de Bridget O'Donnel une incarnation symbolique[5],[4]. Dès 1847, James Mahony publie des dessins de femmes avec des enfants, comme des Vierge à l'Enfant, pour illustrer la famine. Toutefois, ce dessin, dont les personnages sont plus émaciés et sont plus habillés en haillons que dans les travaux publiés précédemment par James Mahony, dégage une impression étrange, notamment par le contraste entre les traits fins du visage, le corps presque androgyne et les longs membres fins[6].

Ce dessin est sans doute la représentation la plus répandue actuellement de la grande famine irlandaise[7]. Une statue en bronze, sculptée par Elizabeth McLaughlin, qui est une copie sculpturale de ce dessin[8], a été érigée à Roscommon en 1999[9].

D'autre part, le fait que les propres mots de Bridget O'Donnel, prononcés par une femme pauvre, soient repris tels quels dans cet article, probablement par James Mahony lui-même, est une nouveauté[10].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a et b Fabrice Bensimon et Laurent Colantonio, La Grande Famine en Irlande, Paris, Presses universitaires de France, , 208 p. (ISBN 978-2-13-063294-8, DOI 10.3917/puf.bens.2014.01, lire en ligne), p. 80.
  2. a b et c (en) Susan Campbell Bartoletti, « Ghosts of the Famine », Horn Book Magazine, vol. 78, no 6,‎ 2002/11//nov/dec2002, p. 784–785 (lire en ligne, consulté le ).
  3. a et b (en) Susan Campbell Bartoletti, Black Potatoes: The Story of the Great Irish Famine, 1845–1850, Houghton Mifflin Harcourt, , 192 p. (ISBN 978-0-547-53085-7, lire en ligne).
  4. a et b (en) Irish Post, « World’s first newspaper interview was with an Irish Famine victim », sur The Irish Post (consulté le ).
  5. (en) « Bridget O’Donnel and Children », sur Views of the Famine, (consulté le ).
  6. (en) Charlotte Boyce, « Representing the "Hungry Forties" in image and verse: the politics of hunger in early-victorian illustrated periodicals », Victorian Literature and Culture, vol. 40, no 2,‎ , p. 421–449 (ISSN 1060-1503, lire en ligne, consulté le ).
  7. (en) Niamh Ann Kelly, Imaging the Great Irish Famine: Representing Dispossession in Visual Culture, Londres - New York, Bloomsbury Publishing, , 293 p. (ISBN 978-1-83860-872-9, lire en ligne), p. 45.
  8. (en) Emily Mark-FitzGerald, Commemorating the Irish Famine: Memory and the Monument, Liverpool, Liverpool University Press, , 344 p. (ISBN 978-1-78138-169-4, lire en ligne), p. 124.
  9. « Roscommon - Ros Comáin - An Gorta Mór », sur statues.vanderkrogt.net (consulté le ).
  10. (en) « Interview with grieving Irish Famine mother », sur IrishCentral.com, (consulté le ).

Articles connexes[modifier | modifier le code]