Bataille de La Chabotterie

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Bataille de La Chabotterie
Description de cette image, également commentée ci-après
La capture du général Charette, huile sur toile de Louis Joseph Watteau, 1796.
Informations générales
Date
Lieu Entre Saint-Sulpice-le-Verdon et Les Lucs-sur-Boulogne
Issue Victoire républicaine
Belligérants
Drapeau de la France République française Drapeau de l'Armée catholique et royale de Vendée Vendéens
Commandants
Jean-Pierre Travot
François Valentin
François Athanase Charette de La Contrie
Forces en présence
650 hommes[1] 45 à 50 hommes[2],[1],[3]
Pertes
2 blessés[4],[5] 30 morts[6]
3 prisonniers[6]

Guerre de Vendée

Batailles

Coordonnées 46° 52′ 47″ nord, 1° 24′ 20″ ouest
Géolocalisation sur la carte : France
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Bataille de La Chabotterie

La bataille de La Chabotterie a lieu le lors de la guerre de Vendée. Elle s'achève par la victoire des républicains qui capturent le général vendéen Charette, mettant ainsi un terme à la deuxième guerre de Vendée.

Forces en présence[modifier | modifier le code]

Quatre colonnes républicaines sont engagées dans les combats[1],[7], dont celle de l'adjudant-général Travot forte de 350 hommes[1], venue de Chauché[3], et celle de l'adjudant-général Valentin forte d'une centaine d'hommes[1], venue des Lucs[7]. Les deux autres colonnes sont constituées pour l'une d'une centaine de grenadiers[1] venus de Saint-Philbert-de-Grand-Lieu[7] et pour l'autre de 85 hommes[1]. De son côté, Charette n'a plus que 45[1] à 50[3] combattants avec lui.

Déroulement[modifier | modifier le code]

Le combat de La Guyonnière, d'après l'huile sur toile d'Alexandre Bloch, 1887.

Le 23 mars à l'aube, la troupe de Charette est surprise par une colonne de grenadiers à La Pellerinière, au nord des Lucs-sur-Boulogne[1]. Elle traverse alors la Boulogne au moulin de Gâtebourse et s'enfuit par des chemins creux en direction de l'est[1]. Mais à 9 heures, la colonne de l'adjudant-général Valentin tombe à son tour sur les Vendéens près de la métairie de La Guyonnière[1],[3]. Dix hommes de Charette sont tués, dont l'Allemand Pfeiffer, son garde-du-corps[3],[A 1]. Les Vendéens continuent ensuite de faire retraite vers l'est en tiraillant[1],[3]. La poursuite dure trois heures[3]. Les fuyards se portent vers le Sableau, puis arrivent non loin de là à la Boulaye, où ils rencontrent une nouvelle troupe de 85 républicains[1]. Charette se porte ensuite vers le nord-est en direction de la Morinière, afin de gagner le bois de l'Essart[1]. Il pense alors avoir semé ses poursuivants[1].

Vue en 2010 de la Croix de Charette, à La Chabotterie, à l'emplacement de sa capture.

La colonne de l'adjudant-général Travot, qui a passé la nuit à La Pinnetière, près de Chauché, fait alors son apparition à l'est[3]. En mouvement depuis 6 heures du matin, elle a notamment été ralliée en chemin près de Saint-Denis-la-Chevasse par 20 hommes du bataillon Le Vengeur[3]. À midi, elle engage le combat[1]. Les Vendéens courent se réfugier à l'intérieur du bois de la Chabotterie, au sud-est de Saint-Sulpice-le-Verdon[1],[3]. Charette est légèrement blessé à la tête, à l'épaule et à la main droite[1],[3]. Alors que les républicains commencent à encercler le bois, le chef vendéen se cache dans un taillis très épais puis tente de revenir sur ses pas, mais Travot évente la ruse[1],[3].

Charette n'a plus que deux hommes avec lui lorsqu'il est poursuivi à vue par Travot à la tête de trois chasseurs de la Vendée et de quelques chasseurs des montagnes[3]. Épuisé par ses blessures, le général vendéen est bientôt rejoint, ceinturé, puis jeté à terre[3]. Un cri de joie se propage alors parmi les soldats républicains : « Charette est pris ! »[1],[A 2].

Pertes[modifier | modifier le code]

Selon le rapport[A 3] du général Grigny au général Hoche, presque tous les hommes de Charette ont été tués[10]. On compte en fait environ 30 morts[6] — dont 17 à La Chabotterie[2] et 10 à La Guyonnière[11] — et 3 prisonniers, dont Charette[6],[2],[12].

Parmi les tués figurent Pfeiffer, garde-du-corps de Charette, Bossard, son domestique, et un officier nommé La Roche-Davo[1]. Un jeune noble, Samuel François Marie de Lespinay, âgé de 21 ou 22 ans, parvient à s'enfuir mais succombe des suites de ses blessures le 26 mars 1796[8].

Côté républicain, aucun des officiers ne prend la peine de faire mention des pertes dans les rapports[13]. Seul l'armateur sablais André Collinet fait mention de deux volontaires blessés dans son journal[5],[4].

Conséquences[modifier | modifier le code]

Exécution du général Charette, place Viarme à Nantes, mars 1796, par Julien Le Blant

Charette est transporté non loin de là au château de La Chabotterie, où ses blessures sont pansées dans la cuisine du logis[1]. Il échange avec Travot des propos courtois[7]. En fin de journée, il est conduit au Poiré-sur-Vie pour y passer la nuit[14]. Le lendemain, il est envoyé à Angers[14]. Le prisonnier est reçu avec égards par les officiers républicains et dîne à leur table après que ses blessures aient été soignée par le docteur Lachèze[14],[9]. Le général Hédouville remet également à Travot son brevet de général de brigade[14].

Charette s'embarque sur une chaloupe canonnière et quitte Angers par la Loire le 26 mars, à 9 heures du matin, accompagné des généraux Grigny, Travot et Valentin[14],[9]. Il est débarqué à Nantes à 11 heures du soir et enfermé dans la prison du Bouffay à 1 heure du matin[15],[9].

À 9 heures, il est conduit chez le général Dutilh, commandant de la place, qui procède à son interrogatoire[15]. Dutilh décide ensuite de le faire promener à travers les rues de la ville[15]. Pendant cette procession, inspirée des triomphes romains, Charette, est précédé par 50 tambours et 50 musiciens, entouré par des gendarmes, puis suivi par 50 cavaliers, 50 grenadiers, 50 artilleurs et des officiers d'état-major[15],[9]. Le cortège parcourt le place du Bouffay, la rue de Hermitage, la place Graslin et la place du Pilori, puis il regagne le Bouffay[15],[9]. Ramené en prison, Charette est autorisé à recevoir la visite de sa sœur, Marie-Anne, et de sa cousine, Mme Charette de Thiersant[15],[16]. Il passe ensuite un second interrogatoire mené par le capitaine Perrin, du 4e bataillon de volontaires de l'Hérault[15],[9].

Le 29 mars, à 9 heures du matin, il passe en jugement devant un conseil militaire présidé par Jacques Gautier, le commandant du 4e bataillon de volontaires de l'Hérault[16],[9]. Il est défendu par l'avocat Mathieu-Guillaume-Thérèse Villenave et subit un troisième interrogatoire public[16],[9]. Il accueille sa condamnation à mort dans un calme imperturbable[17]. Il réclame un prêtre réfractaire, mais sa demande ne pouvant être satisfaite, il accepte la confession de l'abbé Guibert, prêtre constitutionnel de Sainte-Croix de Nantes[17],[9].

À quatre heures de l'après-midi, Charette est conduit sur la place Viarme, alors nommée place des Agriculteurs[17]. Un millier de soldats[1] et douze généraux[17] l'y attendent. Dix-huit hommes forment le peloton d'exécution[9]. Charette retire son bras blessé de son écharpe et refuse de se mettre à genou ou de se faire bander les yeux[17],[A 4]. Il est fusillé à cinq heures et quatorze minutes de l'après-midi[17],[A 5].

La mort de Charette marque la fin de la guerre de Vendée, même si quelques groupes d'insoumis subsistent encore[18]. Dans le Poitou, Jean Savin est capturé le 28 avril[19]. À l'armée du Centre, Vasselot, le successeur de Sapinaud, est pris puis fusillé le 4 mai[20]. En Anjou, Charles d'Autichamp, le successeur de Stofflet, et Henri Forestier déposent les armes en mai[21]. La région connait encore quelques insurrections en 1799, en 1815 et en 1832, mais elles sont d'une intensité bien moindre que le conflit de 1793-1796[18].

Notes[modifier | modifier le code]

  1. D'après Le Bouvier-Desmortiers, un soldat allemand de Charette aurait saisi son chapeau pour le mettre sur sa tête et attirer ainsi le feu sur lui[8]. Selon cet auteur, les républicains étaient guidés par Hyacinthe Hervouët de La Robrie[8]. Cette version est également donnée par l'abbé Remaud et par le marquis de la Jaille dans une lettre à sa femme, mais elle est démentie par Travot[9]. Pour l'historien Lionel Dumarcet, il n'y a aucune preuve la présence de La Robrie à ce combat[8].
  2. Travot et Charette auraient eu cet échange : « Es-tu Charette ? - Oui, c'est moi. Où est ton commandant ? - Je suis le commandant. - Tu es Travot ? - Je le suis. - À la bonne heure ; c'est à toi que je voulais me rendre. »[9].
  3. « Comme il importe que vous soyez instruit par quels moyens on est parvenu à la prise importante de Charette et quels sont les braves qui y ont coopéré, je vous adresse copie des rapports que j'ai reçus de tout ce qui s'est passé dans la journée du 23 mars. Vous verrez avec satisfaction combien on a déployé de zèle et d'énergie pour exécuter vos ordres et remplir vos intentions.

    Depuis près d'un mois nos troupes exécutaient divers mouvemens, sans avoir pu atteindre Charette ; je désespérais, tout en soutenant leur ardeur. Le commandant de Saint-Gilles a rejeté ce chef vendéen sur le commandant de Saint- Philibert ; celui-ci, [après l'avoir poursuivi quelque temps, l'a jeté sur Valentin. C'est Valentin qui a poursuivi le plus long-temps Charette. Ce brigand a tiré lui-même deux coups de sa carabine sur cet officier ; enfin Charette, tout essoufflé, s'est jeté sur un détachement du Vengeur que j'avais donné ordre au commandant Dupuis d'envoyer du côté des Brousils ou de Gralas. De là, Charette est enfin tombé dans la colonne de Travot qui lui a tué presque tous ceux qui le suivaient encore, et l'a pris vivant entre deux morts. Travot était accompagné d'un capitaine des montagnes.

    Tel est le résultat de la rencontre de ces différentes colonnes. Chaque commandant ayant à cœur de prendre Charette, j'ai conçu qu'en courant tous vers le même but, un d'eux l'atteindrait y aussi les ai-je encouragés, stimulés de toutes mes facultés : je n'ai pas dormi jusqu'à ce que ce chef fût en notre pouvoir.

    Je dois des éloges au citoyen Grimes, chargé de courir après Charette. Il avait laissé chez le curé de Mormaison un billet pour un rendez-vous avec Charette qui a refusé de s'y rendre, quoiqu'il ait prétendu devant ses juges que, d'après ce billet, il avait envie de se rendre ; mais sa non-apparition au rendez-vous, et le rapport de Travat et de Valentin qui constate sa prise les armes à la main, ont fait voir la nullité de cette allégation.

    J'ai conduit Charette à Angers ; je croyais vous y trouver et que c'était votre intention ; je l'ai ensuite conduit à Nantes où il a été jugé et où il a subi son jugement. J'ai vu le général Rey ; j'attends son arrivée à Montaigu. Je désirerais bien que vous y vinssiez un moment.

    D'Autichamp a réuni près de cent cinquante déserteurs, mais point d'habitans.

    Rézeau et Cailleau, officiers de Charette, sont venus, pendant que j'étais à Angers, pour faire leur soumission aux lois de la République ; je les attends demain avec un nommé Martineau. Je compte les garder jusqu'à votre décision.

    L'esprit du Bocage n'est pas meilleur. Il y a beaucoup de scélérats déguisés en paysans dans l'intérieur de la Vendée, qui, parleurs discours, séduisent les habitans des campagnes[10]. »

    — Rapport du général Grigny, le 31 mars à Fontenay-le-Comte, général en chef Hoche.

  4. D'après Urbain-René-Thomas Le Bouvier-Desmortiers, Charette aurait eu une parole en faveur du général Jacob, emprisonné après sa défaite la bataille de La Roullière[16]. Le vicomte Walsh affirme que Charette aurait déclaré au peloton en portant la main vers son cœur : « Soldats ajustez bien, c'est ici qu'il faut frapper un brave »[16]. D'autres auteurs affirment que Charette aurait fait un signe de tête pour commander le feu du peloton[16]. Selon l'historien Lionel Dumarcet, aucun des deux témoins oculaires ayant relaté l'exécution ne font mention de tels faits[16].
  5. Selon Pitre-Chevalier, avant d'expirer Charette s'appuie sur son coude « comme pour retarder la chute »[16]. Ce récit est faux selon Lionel Dumarcet, Charette s'effondre en arrière[16].

Références[modifier | modifier le code]

  1. a b c d e f g h i j k l m n o p q r s t u v et w Gras 1994, p. 165-167.
  2. a b et c Goué 1911, p. 61.
  3. a b c d e f g h i j k l m et n Dumarcet 1998, p. 514-515.
  4. a et b Chassin, t. II, 1899, p. 410.
  5. a et b Goué 1911, p. 60.
  6. a b c et d Goué 1911, p. 71.
  7. a b c et d Tabeur 2008, p. 256.
  8. a b c et d Dumarcet 1998, p. 520.
  9. a b c d e f g h i j k et l Gabory 2009, p. 506-509.
  10. a et b Savary, t. VI, 1827, p. 267-268.
  11. Goué 1911, p. 59.
  12. La Revue du Bas-Poitou et des Provinces de l'Ouest: Volume 23, p. 362.
  13. Goué 1911, p. 68.
  14. a b c d et e Dumarcet 1998, p. 515.
  15. a b c d e f et g Dumarcet 1998, p. 516.
  16. a b c d e f g h et i Dumarcet 1998, p. 521.
  17. a b c d e et f Dumarcet 1998, p. 517-518.
  18. a et b Hussenet 2007, p. 62.
  19. Dumarcet 1998, p. 513.
  20. Gabory 2009, p. 512-513.
  21. Gabory 2009, p. 510-512.

Bibliographie[modifier | modifier le code]