Arthur Dillon (1750-1794)

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Arthur Dillon
Fonction
Député aux États généraux de 1789
Biographie
Naissance
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Bray Wick (en)Voir et modifier les données sur Wikidata
Décès
Nationalité
Activités
Père
Mère
Charlotte Lee (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Fratrie
Conjoints
Thérèse-Lucy de Rothe (à partir de )
Marie-Françoise Laure Girardin de Montgérald (d) (à partir de )Voir et modifier les données sur Wikidata
Enfants
Henriette Lucy Dillon
Élisabeth-Françoise Dillon (en)
Louise Dillon (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Autres informations
Membre de
Grades militaires
Distinctions
Archives conservées par
Siège de la ville de Savannah, 1779
Reprise de l'île de Saint-Eustache aux Anglais en septembre 1781

Arthur, comte de Dillon, né le à Bray Wick (en) en Irlande et guillotiné le à Paris, est un général, député aux États généraux de 1789. Il est le petit-fils du général Arthur Dillon, et le frère du général Théobald Dillon.

En 1794, pendant la Terreur, accusé par Vadier et Barère, qui l'attaquent pour sa proximité avec Danton, il est guillotiné.

Biographie[modifier | modifier le code]

Issu d'une famille de jacobites irlandais émigrés en France après la seconde révolution anglaise et la chute de Jacques II d'Angleterre, Arthur Dillon est le fils d'Henry Dillon, officier dans le régiment de Dillon, et le petit-fils d'Arthur Dillon, officier de l'armée française à la fin de l'Ancien Régime.

Arthur Dillon est marié une première fois en 1769 avec sa cousine Thérèse-Lucy de Rothe (1751-7 septembre 1782), dame du palais de Marie-Antoinette. De cette union naît en 1770 une fille, Henriette-Lucy Dillon, qui épouse le comte de La Tour du Pin Gouvernet, fils de Jean-Frédéric de La Tour du Pin Gouvernet, dernier ministre de la guerre de Louis XVI. Elle raconte dans son Journal d'une femme de cinquante ans (édition Mercure de France) toute l'histoire de la Révolution telle qu'elle l'a vécue.

Carrière militaire d’Ancien Régime[modifier | modifier le code]

Il entre à 15 ans comme cadet au régiment de Dillon. À dix-sept ans le 21 mai 1766, il reçoit le brevet de colonel propriétaire de ce régiment, à condition de n'en prendre le commandement qu'à 23 ans ; ce qu'il fait, avec un peu d'anticipation le 24 mars 1772.

Il passe en 1777 en Amérique. En 1779, alors qu’il n’est encore que colonel, il débarque sur l’île de la Martinique, commandant l’un des trois régiments irlandais envoyé par Louis XVI sous les ordres de La Motte Piquet. La venue de ces troupes aux Antilles est la conséquence de la participation de la France à la guerre d’indépendance des colonies britanniques d’Amérique. Le comte Dillon est hébergé chez Laure de Girardin de Montgérald (1764-1816), cousine de Marie-Joseph-Rose de Tascher de la Pagerie plus connue sous le nom de Joséphine de Beauharnais, future épouse du général Bonaparte et impératrice.

Signalé par sa bravoure à la conquête de la Grenade, au siège de Savannah, il devient brigadier des armées du roi en 1780. Après avoir contribué à la prise de Tobago, de Saint-Eustache, de Saint-Christophe, dont il est nommé gouverneur le 25 avril 1782, il est décoré chevalier de Saint-Louis, et obtient le brevet de maréchal de camp le 13 juin 1783.

En 1784, la guerre d’indépendance américaine est terminée. Dillon veuf depuis 1782 est promu général, et fait gouverneur de Tobago. Il revient en Martinique, renoue avec Laure de Girardin elle-même veuve depuis 1779. Ils se marient le 7 février 1785 à Paris en l’église Saint Sulpice. De cette deuxième union naît le 24 juillet 1785, Elisabeth Françoise Dillon dite Fanny[2], future épouse du général comte Bertrand, grand maréchal du palais de Napoléon.

Quelque temps après, Dillon fait un voyage à Londres, et reçoit le plus brillant accueil à la cour.

Révolution française[modifier | modifier le code]

En 1789, en tant que député de la noblesse des colons de la Martinique, il va siéger aux États généraux, où il défend surtout les intérêts des colonies. Bien qu'il ait embrassé le parti révolutionnaire, il vote plusieurs fois dans le sens opposé, parlant quelquefois en faveur des ministres, contrariant très souvent les idées de ses collègues des colonies, et s'élevant aussi contre les gens de couleur.

Devenu lieutenant général le 13 janvier 1792, il reçoit, du général en chef La Fayette, le commandement de l’aile gauche de l’armée du Nord alors en Champagne. Après la journée du 10 août 1792, il fait prêter de nouveau à ses troupes le serment de fidélité à la loi et au roi. Aux commissaires dépêchés pour le destituer, il parvient cependant à s'excuser : le commandement lui est retiré le 18 août, mais il continue néanmoins d'être employé à l'armée du Nord.

Il passe alors sous les ordres de Dumouriez, auquel il commandait jusque-là. Dirigeant l’avant-garde de l'armée du Centre, il contribue puissamment à la défaite des Prussiens en Champagne : il se distingue à Biermes, où il arrête la marche de l'ennemi, à Entrecœur, à la défense du camp de Louis Bertrand de Sivray, à la reddition de Verdun. Mais, pendant la retraite des Prussiens, ayant écrit au prince de Hesse-Cassel pour l'engager à regagner l'Allemagne, il est dénoncé par Laflotte.

Arthur Dillon et l'Irlande[modifier | modifier le code]

Le surlendemain de l'exécution de Louis XVI, la perspective d'une guerre avec l'Angleterre est sur toutes les lèvres. Il semble à tous qu'elle est inévitable, la seule question étant de savoir qui en prendrait l'initiative. À la Convention, le parti de la guerre est celui des Brissotins, du ministre des Affaires étrangères Lebrun-Tondu et de Dumouriez lui-même, également par Bertrand Barère de Vieuzac. En Angleterre, le gouvernement William Pitt arme car il n'ignore pas que c'est une question de semaines. C'est dans cette situation que le général Arthur Dillon propose le 23 janvier 1793 à la Convention un plan de descente et d'occupation de l'Irlande, talon d'Achille de l'Angleterre, qui malgré les massacres d'indépendantistes, n'a encore pas réussi à se concilier les catholiques et à pacifier le pays. La perspective d'un soutien des Français aux indépendantistes est, depuis des années, l'obsession du ministère britannique qui, dès le début de la Révolution, a dépêché à Paris un certain nombre d'agents d'influence et de renseignements, comme Nicolas Madget, pour neutraliser les velléités françaises en direction de l'Irlande. Outre la surveillance des Irish defenders réfugiés en Europe, et leur capture dans le meilleur des cas, les agents anglais cherchent à contrôler le comité diplomatique de la Constituante sous Mirabeau — travail de Auguste Miles et de Hugh Elliott — puis ils infiltrent progressivement le département des Affaires étrangères dès 1792. Sous le ministre de la Convention Lebrun-Tondu, les choses semblent si faciles que cela a nourri les accusations de trahison retenues plus tard contre lui au Tribunal révolutionnaire. En réalité, la situation échappe à Lebrun-Tondu puisque, sous Barère, rapporteur et membre inamovible du Comité de salut public[3], le renseignement français est gangrené par le contre-espionnage britannique.

Lorsqu'Arthur Dillon propose son plan d'invasion de l'Irlande, Charles-Marien Somers, l'espion principal de William Pitt à Paris, brillant successeur de Georges Munro - qui a été identifié depuis et est retourné à Londres -, prévient son gouvernement du projet dès le 28 janvier 1793[4]. Dès lors, le but à atteindre est d'éliminer Dillon. Bertrand Barère de Vieuzac, l'imposteur du Comité de salut public, pour reprendre l'expression de Vergniaud, profite de la publication de la Lettre anglaise, où figure le nom de Dillon pour l'accuser de connivence avec l'Angleterre. Incarcéré aux Magdelonnettes, Arthur Dillon proteste de son innocence, expliquant qu'il est victime d'une homonymie : il s'agit en fait d'un abbé Dillon, supérieur du collège irlandais de Douai, un véritable espion celui-là[5]. D'après une lettre de l'ancienne collection La Bédoyère, Arthur Dillon demande à être conduit au Comité de salut public, s'engageant à démontrer « en présence d'experts », que la fameuse Lettre anglaise et les notes du portefeuille qui l'accompagne, imprimées chez Baudouin, où se trouve son nom, sont « fausses, archi fausses et controuvées »[6]. Volant à son secours et convaincu de son innocence, Camille Desmoulins invite même la Convention à renvoyer le général Dillon devant un tribunal pour qu'il puisse se justifier avec éclat.

Tombe de Laure de Girardin (1764-1816), veuve d’Arthur Dillon (1750-1794) et de leur fille Elisabeth Frances Dillon (1785- ?), dite Fanny, épouse du général comte Bertrand, à Paris, au Cimetière du Père-Lachaise.

Il lui est seulement permis de demeurer à résidence chez lui rue Jacob. Mais sentant qu'il risque de lui échapper, Barère, qui a pris le contrôle des opérations au Comité de salut public, ordonne son arrestation et son envoi immédiat à la prison du Luxembourg. Il y obtient une accusation contre lui d'un autre prisonnier, Alexandre Laflotte, lui-même en situation très précaire et qui doit témoigner à charge au Tribunal révolutionnaire.

Profitant de l'affaire Danton, n'ignorant pas les liens existant entre Arthur Dillon et le couple Desmoulins, il est d'abord dénoncé par Marc-Guillaume-Alexis Vadier, qui l'accuse de vouloir organiser des conspirations dans les prisons pour libérer Danton[7]. Puis, Bertrand Barère le fait agréger à l'affaire Lucile Desmoulins, épouse de Camille Desmoulins, accusée d'avoir voulu fomenter une révolte en faveur de son mari jugé avec Danton. Convaincus d'avoir voulu soulever la prison du Luxembourg, Lucile Desmoulins et Arthur Dillon sont condamnés à la peine capitale sans même que cela donne lieu à débat, le 13 avril 1794, et guillotinés le soir même vers dix-neuf heures. Les condamnés meurent tous avec infiniment de courage et de dignité, à commencer par les deux femmes qui sont exécutées les premières après s'être embrassées selon un témoignage visuel rapporté dans un article paru dans la presse étrangère[8].

Son nom figure au côté nord de l'Arc de triomphe.

Famille[modifier | modifier le code]

  • Theobald Dillon, 7e vicomte Dillon
    • Henry Dillon (1668-1713), 8e vicomte Dillon
      • Richard Dillon ( -1737), 9e vicomte Dillon, dans descendance mâle,
    • Arthur Dillon (1670-1733) marié avec Christina Sheldon ( -1757)
      • Charles Dillon (1701-1741), 10e vicomte Dillon, sans descendance mâle,
      • Henry Dillon (1705-1787), 11e vicomte Dillon de Costello-Gallen, colonel-propriétaire du régiment de Dillon, marié en 1744 avec Charlotte Lee (vers 1720-1794)
        • Charles Dillon (1745-1813), 12e vicomte Dillon, marié en 1776 avec Henrietta Phipps (1757-1782)
        • Frances Dillon (1747-1825) mariée en 1767 avec William Jerningham (1736-1809)
        • Arthur Dillon (1750-1794), comte Dillon, gouverneur de Tobago, lieutenant-général, marié en premières noces, en 1768, avec Thérèse-Lucy de Rothe (1751-1782)
          • Georges Dillon
          • Henriette Lucy Dillon (1770-1853) dame d'honneur de la reine Marie-Antoinette, mariée en 1787 avec Frédéric Séraphin de La Tour du Pin Gouvernet (1759-1837), marquis de La Tour du Pin, comte de Gouvernet ;
        • Arthur Dillon (1750-1794), comte Dillon, gouverneur de Tobago, lieutenant-général, marié en secondes noces, en 1785, avec Laure de Girardin de Montgérald (1749-1817), veuve d'Alexandre Le Vassor de La Touche de Longré (1744-1779), lieutenant de vaisseau. de ce premier mariage est né Betsy Le Vassor de La Touche de Longpré (1775-1816) mariée en 1798 avec Édouard de Fitz-James (1776-1838), 6e duc de Fitz-James. Laure de Girardin avait été auparavant la maîtresse du vicomte de Beauharnais, mari volage de Joséphine de Beauharnais ,
          • Louise Dillon (1783-1822)
          • Élisabeth Françoise Fanny Dillon (1785-1836)[9], comtesse Bertrand, mariée en 1808 avec Henri-Gatien Bertrand (1773-1844), Grand maréchal du Palais
      • Arthur Richard Dillon (1720-1806), dernier archevêque de Narbonne
      • Laura Dillon ( -1741)

Théobald Dillon (1745-1792), général de brigade de l'armée française, parfois cité comme le frère d'Arthur Dillon, est plutôt un proche parent. Il est le parrain d'Élisabeth Françoise Fanny Dillon.

Ouvrages[modifier | modifier le code]

On a de lui :

  • Pièces justificatives sur l'affaire de la Martinique qui constatent la conduite patriotique de M. de Damas, gouverneur général de cette colonie, 1790 (lire en ligne)
  • avec Moreau de Saint-Méry, Opinion de M. Moreau de Saint-Méry, député de La Martinique à l'Assemblée nationale, sur les dangers de la division du ministère de la Marine et des Colonies. Du 28 octobre 1790 (lire en ligne)
  • Motifs de la motion faite à l'Assemblée nationale, le 4 mars 1791 (lire en ligne)
  • Révolution de la Martinique depuis le premier septembre 1790 jusqu'au 10 mars 1791 (lire en ligne)
  • Aux vrais amis de la patrie, 1791 (lire en ligne) ;
  • Compte-rendu au ministre de la guerre par le lieutenant-général A. Dillon, commandant l'armée des Ardennes ; suivi de pièces justificatives, Paris, 1792 (lire en ligne) ;
  • Exposition des principaux événements qui ont eu le plus d'influence sur la révolution française, Paris, 1792.


Notes[modifier | modifier le code]

  1. « https://francearchives.fr/fr/file/ad46ac22be9df6a4d1dae40326de46d8a5cbd19d/FRSHD_PUB_00000355.pdf »
  2. Pour le prénom correct voir l'acte de baptême sur les registres de la commune de Quévy-le-Grand, transcrit par B. De Gaissart : La naissance, le mariage et la mort de Fanny Dillon, comtesse Bertrand. In : Revue du Nord, tome 49, n° 193, avril-juin 1967, pp. 333-241 (en ligne). Sa date de naissance est le 24 juillet 1785, et non pas le 25 juillet 1785, jour du baptême.
  3. Il y contrôle entièrement les services secrets, indépendamment du ministre "potiche" Chemin-Deforgues
  4. Richard Hayes, Irish and Irishmen under the French Revolution, p. 14-15 & 121-122
  5. Il est encore différent de l'oncle du général, Arthur Richard Dillon (1721-1806), archevêque de Narbonne, libertin fameux et coauteur de la Feuille du matin de Parisau, sous le nom d'abbé Coquillard
  6. Catalogue de lettres de M. J. L.B., de Nancy, vente du 25 janvier 1855, BHVP, 32924
  7. Alain Cohen, « Les procès des anciens intendants durant la Révolution », Annales historiques de la Révolution française, vol. 356, no 2,‎ , p. 29–56 (ISSN 0003-4436, DOI 10.4000/ahrf.10563, lire en ligne, consulté le )
  8. Nouvelles politiques et étrangères du 15 avril 1794. Mais une légende qui ne repose sur rien (sources ???) prétend que Lucile Desmoulins, appelée la première à l'échafaud et saisie d'angoisse — ce qui est faux d'après les témoignages incontestables de la presse du temps et de Sanson l'exécuteur public lui-même le supplie humblement de passer avant elle. « Il n'y a rien que je ne fasse pour une dame » répond le comte en la saluant avec une politesse toute chevaleresque, et, montant rapidement les degrés de l'échelle, il livre sa tête à Sanson, en criant : « Vive le roi ! » d'une voix aussi forte que s'il eût commandé une évolution militaire.
  9. B. De Gaissart, La naissance, le mariage et la mort de Fanny Dillon, Comtesse Bertrand, dans Revue du Nord, 1967, Modèle:N°-193, p. 333-341 (lire en ligne)

Annexes[modifier | modifier le code]

Sources et bibliographie[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]