Amarante (plante)

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Amaranthus

Amaranthus (les amarantes ou amaranthes) est un genre de plantes dicotylédones de la famille des Amaranthaceae, originaire des régions tempérées et tropicales.

Ce sont des plantes herbacées vivaces mais gélives ou annuelles, dont certaines espèces sont cultivées comme plantes potagères, pour leurs feuilles comestibles[2] à la manière des épinards ou pour leurs graines[3], et parfois comme plantes ornementales pour leur floraison en épis spectaculaires. Quelques espèces sont considérées comme « mauvaises herbes », communes dans les champs cultivés et pour certaines devenues très problématiques dans les cultures transgéniques car résistant maintenant au glyphosate, le désherbant le plus utilisé au monde[4]. On la trouve sur tout le territoire français jusque dans le sud sur des stations sèches (friches et terrains en construction, région d'Aix-en-Provence).

Étymologie[modifier | modifier le code]

Amaranthus vient du nom de cette plante en grec ancien, ἀμάραντος / amárantos, « amarante, immortelle », nom formé du préfixe privatif ἀ- / a-, « sans », et du verbe μαραίνω / maraínō, « se consumer, s'épuiser »[5],[6] : en effet, l'amarante a la réputation de ne pas se faner, avec notamment son calice qui reste persistant, et pour cette raison, représente un symbole de l’immortalité[7]. Certaines espèces sont d'ailleurs utilisées dans les bouquets secs.

La forme amaranthus (avec H), provient d'un rapprochement erroné avec l'étymon grec anthos (lat. -anthus) signifiant fleur, que l'on trouve dans le nom de nombreuses plantes (l'agapanthe, par exemple).

Histoire[modifier | modifier le code]

Depuis très longtemps, diverses espèces d’amarantes sont cultivées pour l’alimentation en Asie, en Amérique et en Afrique.

Ainsi, Amaranthus caudatus (l'amaranthe queue-de-renard), Amaranthus cruentus et Amanthus hypochondriacus jouèrent un rôle alimentaire important dans les civilisations précolombiennes, aussi bien en Mésoamérique (chez les Mayas et les Aztèques, notamment) qu'en Amérique du Sud (chez les Incas par exemple)[8].

En 2000, l'industrie du génie génétique a envisagé de transférer à la pomme de terre un gène de l'amarante qui lui fait produire de l'albumine[9].

Au début du XXIe siècle d'importants phénomènes de résistances aux désherbants chimiques et en particulier au roundup apparaissent, notamment dans les cultures transgéniques américaines[10]. On avait déjà montré en 1999 que le trait de résistance peut passer d'une espèce d'amarante à l'autre[11]. Le genre Amaranthus est connu pour avoir certaines des mauvaises herbes les plus communes et les plus gênantes au monde, dont Amanthus palmeri S. Wats (amarante de Palmer), Amaranthus tuberculatus (Moq.) Sauer, et Amaranthus retroflexus L.

On peut noter également l’existence de la Pierre d’Amarante, une tablette d’écriture rituelle qu’utilisaient les prêtres Toltèques pour la fête de Texcatlipoca en gloire à Tezcatlipoca.

En Mésoamérique[modifier | modifier le code]

Depuis plusieurs millénaires[12], les graines ont été consommées grillées (comme le pop-corn) ou sous forme de farine tandis que les feuilles étaient cuisinées comme légume vert.

Selon D. Guillet (2002, p. 373) : « La culture de l'Amaranthe fut à son apogée durant l'Empire aztèque. Pour le peuple aztèque, l'Amaranthe possédait une valeur nutritionnelle, thérapeutique et rituelle. »

Après la conquête espagnole du Mexique, sa culture fut interdite car elle servait dans divers offices religieux aztèques[13]. Du fait de cette interdiction et de la violente répression qui sévit durant plusieurs siècles à l'encontre des jardiniers qui continuaient à cultiver cette plante, l'Amaranthe a, depuis le XXe siècle, presque totalement disparu de l'alimentation mexicaine, alors même qu'elle entrait dans la constitution de très nombreux plats aztèques (tamales, tortillas, sauces et boissons). L'utilisation traditionnelle de graines d'amarante dans la confection de têtes de mort en sucre pour le Jour des morts perdure toutefois.

Description[modifier | modifier le code]

Appareil végétatif[modifier | modifier le code]

Ce sont généralement des plantes herbacées annuelles, aux feuilles alternes et aux tiges ramifiées. L'insertion des feuilles dans l'axe de la tige (type rameau de hêtre, tige en zigzag), avec développement d'un rameau à l'insertion, ainsi que le réseau particulier de nervures de la feuille (voir photo ci-dessus) et les panicules des fleurs puis des graines peuvent permettre de reconnaitre l'amarante.

Appareil reproducteur[modifier | modifier le code]

Les inflorescences sont généralement de longues panicules rameuses constituées de fleurs minuscules verdâtres ou rougeâtres. Les espèces sont monoïques ou dioïques. Les fleurs mâles ont trois à cinq bractées, trois à cinq sépales et trois à cinq étamines. Les fleurs femelles ont un ovaire prolongé par deux à trois styles[14].

Principales espèces[modifier | modifier le code]

Amarante, graines
Valeur nutritionnelle moyenne
pour 100 g
Apport énergétique
Joules 1540 kJ
(Calories) (365 kcal)
Principaux composants
Glucides 56,8 g
Amidon 55,1 g
Sucres 1,47 g
Fibres alimentaires ? g
Protéines 15,8 g
Lipides 8,81 g
Saturés 2,138 g
Oméga-3 0,081 g
Oméga-6 4,031 g
Oméga-9 2,143 g
Eau 11,1 g
Cendres totales 3,25 g
Minéraux et oligo-éléments
Calcium 214 mg
Cuivre 1,6 mg
Fer 9,0 mg
Magnésium 308 mg
Manganèse 3,0 mg
Nickel 0,160 mg
Phosphore 582 mg
Potassium 484 mg
Sodium 26 mg
Zinc 3,7 mg
Vitamines
Vitamine B1 0,800 mg
Vitamine B2 0,190 mg
Vitamine B3 (ou PP) 1,2 mg
Acides aminés
Acide aspartique 1233 mg
Acide glutamique 2363 mg
Alanine 574 mg
Arginine 1314 mg
Cystine 310 mg
Glycine 1110 mg
Histidine 396 mg
Isoleucine 557 mg
Leucine 866 mg
Lysine 847 mg
Méthionine 314 mg
Phénylalanine 6410 mg
Proline 604 mg
Sérine 890 mg
Thréonine 561 mg
Tryptophane 196 mg
Tyrosine 533 mg
Valine 633 mg
Acides gras
Acide myristique 8 mg
Acide palmitique 1679 mg
Acide margarique 70 mg
Acide stéarique 250 mg
Acide arachidique 90 mg
Acide béhénique 41 mg
Acide oléique 2143 mg
Acide linoléique 4031 mg
Acide alpha-linolénique 81 mg

Source : Souci, Fachmann, Kraut : La composition des aliments. Tableaux des valeurs nutritives, 7e édition, 2008, MedPharm Scientific Publishers / Taylor & Francis, (ISBN 978-3-8047-5038-8)

Le genre Amaranthus comprend une soixantaine d'espèces, originaires principalement des régions tropicales et tempérées d'Amérique et d'Asie, dont :

Liste d'espèces[modifier | modifier le code]

Selon The Plant List (16 novembre 2016)[15] :

Aspects culturels[modifier | modifier le code]

Le poème en vers no LXXIX intitulé Bruxelles d'Arthur Rimbaud, daté de commence par « Plates-bandes d'amarantes »[16].

Dans son album de 2007, Dark Passion Play, le groupe de métal Nightwish consacre une chanson entière (Amaranth) à cette espèce, « Caresse l'unique, celle qui ne fane jamais, (...) caresse l'unique, l'amarante cachée, dans la terre de l'aube. »

Début 2011, le groupe de metal Amaranthe sort son premier album éponyme en référence à cette plante.

Le poète Gilliatt Lazarel évoque les amarantes dans son poème "Les Algues" : « Se répétant sans cesse qu'elles sont nées amarantes ».[1]

Le béret des parachutistes français est appelé « béret amarante », tant pour sa couleur rappelant la plante, que pour la symbolique d'immortalité s'y rattachant.

On parle aussi de la fleur d'Amarante dans le jeu de rôle Vampire : la Mascarade de l'univers Le monde des ténèbres créé par White Wolf Publishing. La fleur est utilisée comme synonyme de la « diablerie », le cannibalisme vampirique, qui était souvent annoncée en envoyant une amarante à la victime.

L'amarante voit son nom attribué au 8e jour du mois de vendémiaire du calendrier républicain ou révolutionnaire français[17], généralement chaque 29 septembre du calendrier grégorien.

Résistance à des herbicides[modifier | modifier le code]

L'amaranthe de Palmer (Amaranthus palmeri) est, parmi les amarantes, celle qui est devenue la plus rapidement et plus communément résistante au glyphosate. Depuis 2005 elle menace les cultures de cotonnier et soja transgéniques Roundup Ready dans le sud des États-Unis[18].

Depuis 1977 (environ vingt ans après le début de l'utilisation des herbicides de synthèse) de nombreux cas de résistance de populations d'amaranthes à des herbicides ont été signalés dans divers pays. Ces populations (ou écotypes) appartiennent à onze espèces du genre Amaranthus, à savoir Amaranthus albus, Amaranthus blitoides, Amaranthus blitum, Amaranthus cruentus, Amaranthus hybridus, Amaranthus palmeri, Amaranthus powellii, Amaranthus retroflexus, Amaranthus spinosus, Amaranthus reticulatus, Amaranthus viridis. Les herbicides concernés appartiennent à plusieurs groupes de la classification HRAC (classement selon le mode d'action). Ces groupes sont les suivants : B (inhibiteurs de l'enzyme acétolactate synthase), C1 (inhibiteurs de la photosynthèse au niveau du photosystème II : triazines), C2 (inhibiteurs de la photosynthèse au niveau du photosystème II : urées et amides), C3 (inhibiteurs de la photosynthèse photosystème II : nitriles), D (inhibiteurs de la photosynthèse : diversion d'électrons dans le photosystème I), E (inhibiteurs de la protoporphyrinogène oxydase), G (inhibiteurs de la 5-énolpyruvylshikimate-3-phosphate synthase : glyphosate), F2 (inhibiteurs de la 4-hydroxyphénylpyruvate dioxygénase), K1 (inhibiteurs de l'assemblage des microtubules) et O (herbicides auxiniques). Dans de nombreux cas il s'agit de résistances croisées (résistance à plusieurs matières actives du même groupe par mode d'action) ou de résistances multiples (résistance d'une même population à des herbicides appartenant à deux ou trois groupes différents). Ainsi en 2009 dans des champs de maïs et de sorgho du Kansas, une population d'amaranthe de Palmer était signalée résistante aux herbicides suivants : atrazine, mésotrione, pyrasulfotole, tembotrione, thifensulfuron-méthyl et topramézone, relevant de trois groupes (B, C1 et F2)[19]. Au total, de 1977 à 2015, 101 écotypes résistants ont été documentés dans 19 pays (Afrique du Sud, Allemagne, Argentine, Bolivie, Brésil, Bulgarie, Canada, Chine, Espagne, États-Unis, France, Grèce, Israël, Italie, Malaisie, Pologne, République tchèque, Serbie, Suisse)[20].

L'amarante s'est fait connaître du grand public lors de l'apparition, dans l'état de Géorgie (États-Unis), d'une population résistante à l'herbicide Roundup. La plante s'y est adaptée et s'est multipliée dans les champs traités avec l'herbicide Roundup par une plus grande capacité de résistance.

La résistance s'explique par une amplification génique, la multiplication du gène de l'enzyme cible du glyphosate, l'EPSPS (5-énolpyruvylshikimate-3-phosphate synthase)[21].

Actuellement[Quand ?], l'amarante inca ou kiwicha (Amaranthus caudatus) devient un problème pour les cultures telles que le soja, car cette espèce d'amarante est très résistante à certains herbicides, comme le glyphosate.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. IPNI. International Plant Names Index. Published on the Internet http://www.ipni.org, The Royal Botanic Gardens, Kew, Harvard University Herbaria & Libraries and Australian National Botanic Gardens., consulté le 11 juillet 2020
  2. À consommer avec modération en raison de leur richesse en acide oxalique.
  3. Comme le sarrasin et le quinoa, l'amarante n'est pas vraiment une céréale, mais elle est utilisée comme telle et peut être réduite en farine.
  4. Wu C, Davis A.S & Tranel P.J (2018). Limited fitness costs of herbicide‐resistance traits in Amaranthus tuberculatus facilitate resistance evolution. Pest management science, 74(2), 293-301.
  5. Anatole Bailly ; 2020 : Hugo Chávez, Gérard Gréco, André Charbonnet, Mark De Wilde, Bernard Maréchal & contributeurs, « Le Bailly », (consulté le ).
  6. Dioscoride, 3, 9 ; 4, 55 et 57.
  7. (es) « Histoire Amarante », sur www.amaranto.cl.
  8. Debalin Sarangi , Amit J. Jhala , Prabhu Govindasamy3 and Anthony Brusa, « Amaranthus spp. », dans Bhagirath S. Chauhan, Biology and Management of Problematic Crop Weed Species, Academic Press, Elsevier, (ISBN 978-0-12-822917-0)
  9. Chakraborty, S., Chakraborty, N., & Datta, A. (2000). Increased nutritive value of transgenic potato by expressing a nonallergenic seed albumin gene from Amaranthus hypochondriacus. Proceedings of the National Academy of Sciences, 97(7), 3724-3729.
  10. Nichols, R. L., Bond, J., Culpepper, A. S., Dodds, D., Nandula, V., Main, C. L.,... & Patterson, M. (2009). Glyphosate-resistant Palmer amaranth (Amaranthus palmeri) spreads in the Southern United States. Resist. Pest Manag. Newsl, 18(2), 8-10
  11. Wetzel, D. K., Horak, M. J., Skinner, D. Z., & Kulakow, P. A. (1999). Transferal of herbicide resistance traits from Amaranthus palmeri to Amaranthus rudis. Weed science, 538-543|résumé.
  12. Comme l'indique D. Guillet (2002, p. 373), « la culture d'amaranthe remonte à un lointain passé (...) puisque des graines d'amaranthes cultivées ont été découvertes dans les grottes de Tehuacan Puebla au Mexique et datées à 5500 ans. »
  13. D. Guillet (2002, p. 373) précise à ce sujet : « Sur le plan rituel, l'Amaranthe était la plante sacrée par excellence. Durant certaines fêtes religieuses, des figurines élaborées à partir de la pâte d'Amaranthe étaient offertes aux dieux du panthéon aztèque et étaient parfois consommées lors de certains rituels religieux rappelant le rite catholique de l'Eucharistie. (...) La valeur sacrée de l'Amaranthe suffit sans doute à expliquer que sa culture fut l'objet de répressions directes ou indirectes, de la part de la chrétienté désireuse d'extirper la vieille religion hérétique ».
  14. Hippolyte Coste, Flore descriptive et illustrée de la France, de la Corse et des contrées limitrophes, P. Klincksieck, , p. 171
  15. The Plant List (2013). Version 1.1. Published on the Internet; http://www.theplantlist.org/, consulté le 16 novembre 2016
  16. Arthur Rimbaud, Œuvres complètes, Gallimard, Éd. La Pléiade, 1963, p. 136.
  17. Ph. Fr. Na. Fabre d'Églantine, Rapport fait à la Convention nationale dans la séance du 3 du second mois de la seconde année de la République Française, p. 19.
  18. Nichols, R. L. (2018). Impacts of Weed Resistance to Herbicides on United States (uS) Cotton (Gossypium Hirsutum) Production. Outlooks on Pest Management, 29(1), 5-9|résumé.
  19. (en) Curtis Thompson, « Multiple resistance Palmer amaranth (Amaranthus palmeri) », sur International Survey of Herbicide Resistant Weeds, (consulté le ).
  20. (en) « International Survey of Herbicide Resistant Weeds », sur International Survey of Herbicide Resistant Weeds (consulté le ).
  21. (en) Gaines, T. a, Zhang, W., Wang, D., Bukun, B., Chisholm, S. T., Shaner, D. L., … Westra, P., « Gene amplification confers glyphosate resistance in Amaranthus palmeri », Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America, vol. 107, no 3,‎ , p. 1029–1034 (DOI 10.1073/pnas.0906649107, lire en ligne).

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Article connexe[modifier | modifier le code]

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Références taxinomiques[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]