Amérique russe
Русская Америка
Drapeau |
|
| Statut | Colonie de l'Empire russe (offic. en 1792) |
|---|---|
| Capitale | Novoarkhangelsk |
| Langue(s) | Russe |
| Religion | Christianisme orthodoxe |
| Monnaie | Rouble impérial russe et rouble |
| 1733–1743 | Expédition du Kamtchatka |
|---|---|
| 1825 | Traité de Saint-Pétersbourg |
| 18 octobre 1867 | Vente de l'Alaska |
Entités suivantes :
L'Amérique russe (en russe : Русская Америка, Rousskaïa Amerika) correspond aux possessions russes sur le continent américain, et organisées en colonie à partir de 1796. Ces territoires correspondent aujourd'hui principalement à l'Alaska mais incluait aussi le Fort Ross dans l'actuelle Californie.
Historique
[modifier | modifier le code]En Alaska
[modifier | modifier le code]Au cours du XVIIIe siècle, l'Empire russe entreprend plusieurs expéditions afin d'explorer la partie orientale de la Sibérie et de déterminer si une route existe entre l'Asie et l'Amérique du Nord. La deuxième expédition du Kamtchatka notamment, menée par Vitus Béring, permet la découverte de l'Alaska en 1741.
Néanmoins, ce n'est qu'à la fin du siècle, en grande partie grâce à la Compagnie russe d'Amérique fondée en 1799, que la Russie prend pleinement possession du territoire et l'érige en colonie.
On estime que l'Alaska comptait dans les années 1860 2 500 Russes ou métis et 8 000 aborigènes, pour un total de 10 000 habitants, sous le commandement direct de la compagnie russe des fourrures, et peut-être 50 000 Inuits vivant sous cette juridiction. Les Européens vivaient dans 23 lieux de peuplement, situés sur les îles ou en bordure des côtes. Les petites stations regroupaient seulement 4 ou 5 Russes chargés de la collecte et du stockage des fourrures apportées par les Amérindiens et du ravitaillement des navires qui venaient les chercher. La plus grande ville de l'époque, la Nouvelle-Arkhangelsk, maintenant nommée Sitka, a été fondée en 1804 pour le négoce des très rentables fourrures d'otaries. Elle comptait environ 116 baraques abritant 968 habitants. La seconde ville était Saint-Paul sur l'île Kodiak avec 100 baraques et 283 personnes. Elle était le centre de l'industrie de la fourrure d'otarie.
Mais pour la Russie, le territoire est d'un faible intérêt économique et sans continuité avec ses possessions sibériennes et difficile à défendre. Une puissance maritime, anglaise ou américaine ou autre le couperait aisément du reste de la Russie. Aussi en 1867, elle vend sa colonie pour 7 200 000 $ aux États-Unis. Cette vente permet aux deux États d'éviter que les Britanniques, frontaliers de l'Alaska par leurs possessions canadiennes, ne s'emparent du territoire.
En Californie
[modifier | modifier le code]Avec la création de la Compagnie russo-américaine, les Russes s'étendent sur les côtes californiennes. Les premières installations russes se trouvent dans la baie de Bodega en 1806, dans la zone où est construit le Fort Ross en 1812. La présence russe s'étendit sur la côte californienne jusqu'en 1841-42 dans une volonté d'accéder à des terres fertiles pour assurer un approvisionnement en nourriture à l'Alaska à l'environnement très hostile. Ce fut un échec en partie car elle se heurta politiquement aux Espagnols puis Mexicains et américains, en partie car l'économie russe en Amérique était trop centrée sur le très rentable commerce des fourrures[1].
Le Fort Ross était le point principal d'ancrage de l'empire russe en Californie. La terre y était très fertile selon les témoignages, les Russes se mélangeait pacifiquement avec les tribus locales, et les ravitaillements de poisson étaient assurés par le poste de chasse des îles Faralon. Les Russes ne développent cependant pas l'agriculture de masse car leurs colonies restent trop proches des côtes. Jamais plus de cinquante Russes occupaient Fort Ross en même temps. Les Aléoutes et les Indiens vivaient dans des chaumières aux abords du Fort. Fort Ross fut conçu par Alexandre Baranov qui avait pour ambition de développer la présence russe sur toute la côte californienne[2].
Au début du XIXème siècle, des rumeurs circulent sur les intentions russes de s'emparer de San Francisco. José Arguello exigea auprès des autorités russes la destruction de Fort Ross, sans suite. À partir de 1815, le nouveau gouverneur de Californie Pablo Vicente de Sola procède a une série d'arrestations d'employés de la Compagnie russo-américaine. Fin 1817, les Russes s'allient aux tribus indiennes aux alentours de Fort Ross pour étendre leur influence dans la région face à des Espagnols tendus. S'en suit la levée du boycott des navires russes dans les ports espagnols de Californie. Dès 1818, les révolutionnaires mexicains commencent à retourner le pouvoir espagnol en Californie, donnant un nouvel avantage aux Russes dans la région[2].
De 1817 à 1825, le développement des missions espagnoles de Californie commence à se concentrer autour de Fort Ross (trois nouvelles missions cernent le fort)[2].
Dès 1820, les Russes de Californie prêchent en faveur du démantèlement de Fort Ross, du fait de la faiblesse de la force commerciale développée dans la région pour le bénéfice de la Compagnie américano-russe, et parce que les Espagnols persistent toujous dans leur revendication de la Californie. Mais l'arrivée du pouvoir mexicain, plus faible que le pouvoir espagnol, rebat les cartes et force les Russes à maintenir leur présence californienne. Cependant, les Mexicains imposent des taxes douanières rendant l'approvisionnement en Californie peu rentable. Le nouveau gouvernement mexicain craint que les Russes visent une colonisation de toute la Californie du nord, et exigent un départ des Russes de Fort Ross sans avoir les moyens militaires de les en convaincre. Dmitri Zavalichine développe un nouveau plan de colonisation pour la Compagnie russo-américaine, mais l'Empereur ne suit pas, laissant les ambitions Russes en Californie en friches[2].
Le 17 avril 1824, la Russie et les États-Unis signent une convention limitant l'expansion des Russes sur le territoire nord-américain. En 1835, alors que la situation russo-mexicaine patine, les Russes choisissent de liquider leurs terres et propriétés en Californie. La Russie vend Fort Ross à John Sutter le 13 décembre 1841 pour $30 000, et les Russes quittent le Fort (et symboliquement la Californie) en 1842[2].
Des Russes s'installèrent plus au sud comme en témoigne une cloche d'une cinquantaine de kilos qui fut retrouvée enterrée dans un bois près de la Mission San Fernando Rey de España (en) dans la Californie du Sud en 1920. Elle portait l'inscription russe : « En ce mois de janvier de l'année 1796, cette cloche fut apportée de l'île de Kodiak par sa sainteté l'Archimandrite Joseph, durant le séjour d'Alexandre Baranov ». Il est maintenant reconnu que cet objet d'art orthodoxe russe de Kodiak, a réellement fait le trajet vers les missions catholiques espagnoles du sud de la Californie, prouvant l'existence d'une diaspora russe sur l'ensemble de la côte pacifique nord-américaine et de ses contacts avec les Espagnols et les cultures autochtones d'Amérique.
Notes et références
[modifier | modifier le code]- ↑ Emmanuelle Perez Tisserant, « Prologue. La Haute-Californie, dernière conquête de la monarchie espagnole », dans Nuestra California : Une histoire politique de la Californie mexicaine. De Zorro à la ruée vers l’or, Presses universitaires de Rennes, coll. « Des Amériques », , 13–18 p. (ISBN 978-2-7535-9517-0, lire en ligne)
- P. Gronsky, « L'établissement des Russes en Californie (II) », Revue d’Histoire Moderne & Contemporaine, vol. 5, no 26, , p. 101–123 (DOI 10.3406/rhmc.1930.3598, lire en ligne, consulté le )