Algue Klamath (complément alimentaire)

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L'algue Klamath est une cyanobactérie de l'espèce Aphanizomenon flosaquae (AFA) utilisée comme complément alimentaire. Elle ne se confond pas strictement avec celle-ci étant donné qu'il ne s'agit que d'une souche non toxique d'une espèce comptant une multitude de souches toxiques. Elle tire son nom du fait qu'elle est récoltée à la surface du lac Klamath dans l'Oregon, aux États-Unis.

Histoire[modifier | modifier le code]

Les cyanobactéries, appelées autrefois « algues bleues », et notamment la spiruline d'Amérique du sud, font partie du régime alimentaire traditionnel de nombreuses cultures. Elles ont été utilisées comme nourriture et pour le commerce par de nombreux peuples indigènes, notamment en Afrique, en Asie et dans les Amériques (Aztèques, Mayas…)[1].

À partir des années 1980, Aphanizomenon flosaquae commença à être récoltée pour être vendue comme complément alimentaire. La plus grande partie de la production provient du lac Klamath supérieur, dans l'Oregon, aux États-Unis, qui a donné à la cyanobactérie son nom d'usage courant[2].

Depuis 2019, l'AFA Klamath est également produite en milieu contrôlé sous le nom de "Pastel d'eau"[3] par la startup française Kyanos Biotechnologies.

Biologie[modifier | modifier le code]

Aphanizomenon flosaquae fait partie des cyanobactéries, qui sont parmi les organismes les plus anciens sur terre, présents peut-être depuis plus de 3.5 milliards d'années (ère de l'Archéen)[4].

AFA a la structure cellulaire classique d'un procaryote. Elle utilise la photosynthèse pour produire les ressources nutritives (glycogène) stockées et consommées par la cellule. La plupart des cyanobactéries sont extrêmement efficaces pour la photosynthèse, encore plus même que les plantes[5]. La cyanobactérie utilise l'énergie du soleil, le dioxyde de carbone de l'air et l'eau pour synthétiser les protéines, les glucides et les lipides. AFA, comme d'autres procaryotes, est aussi capable d'utiliser directement l'azote de l'air pour produire des protéines et d'autres biomolécules[6].

Toxicité[modifier | modifier le code]

En tant qu'espèce, Aphanizomenon flosaquae contient à la fois des souches non toxiques (celles utilisées pour la consommation humaine), et des souches toxiques[réf. nécessaire]. Ces dernières peuvent parfois contaminer la récolte avec certaines toxines (notamment les microcystines, toxiques pour le foie). L'agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) a mis en garde contre ce risque dans un avis rendu en 2003 : l’AFSSA estime que le produit ne présente pas toutes les garanties d’innocuité et que l'effet de l'AFA sur le « bien-être » n'est pas scientifiquement étayé[7]. Il est donc important de vérifier la qualité et les certifications des produits utilisés comme complément alimentaire[8].

Le lac Klamath, où est récoltée Aphanizomenon flosaquae, sous le nom impropre d'« algue Klamath », est un écosystème aquatique perturbé, soumis à de nombreuses efflorescences cyanobactériennes, en particulier de Microcystis aeruginosa. Les cyanobactéries du genre Microcystis produisent des toxines appelées microcystines qui sont hépatotoxiques (endommagent le foie) et potentiellement cancérogènes. Des problèmes récurrents de contamination à la récolte ont conduit les autorités sanitaires de l'Oregon à imposer une limite régulatoire de la quantité de microcystines dans la cyanobactérie Aphanizomenon flos aquae produite à destination humaine en 1996. Cette même année, 85 des 87 échantillons testés contenaient des microcystines tandis que 63 échantillons étaient au-dessus de la limite maximale admissible de 1 µg/g[9]. Selon l’agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA), « le produit est contaminé par des microcystines à des concentrations dépassant à plusieurs reprises la teneur maximale qui peut être dérivée de la DJT[N 1] proposée par l’OMS »[7]. Des cyanobactéries de l’espèce Aphanizomenon flosaquae (mais d'une souche différente d'AFA, celle utilisée pour la consommation humaine[réf. nécessaire]) peuvent aussi contenir de l’aphantoxine, une neurotoxine proche de la saxitoxine.

Fin 2012, une étude allemande a remis en cause la pertinence de la consommation humaine de produits à base d'Aphanizomenon flosaquae pour des questions de cytoxicité in vitro et de contamination aux microcystines [10].

Parallèlement, en Italie, une autre étude a mis en évidence la contamination systématique aux microcystines d'échantillons d'AFA, et fait état d'un risque prévisible pour les consommateurs à partir d'une exposition chronique ou sous-chronique d'une consommation pourtant modeste de 4 grammes par jour [11].

Du fait du risque de présence de ces toxines, il est conseillé une consommation quotidienne inférieure à 3 grammes. De plus, il est déconseillé toute interaction avec les antidépresseurs (du fait de la présence de phényléthylamine) et les anticoagulants (du fait de sa teneur en vitamine K)[12].

Utilisation comme complément alimentaire[modifier | modifier le code]

La cyanobactérie Aphanizomenon flosaquae est utilisée comme complément alimentaire pour sa richesse nutritive, mais aussi pour certaines possibles propriétés thérapeutiques qui ont fait l'objet d'études scientifiques.

Elle contient notamment[1] :

Selon l’agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA), « en dehors de l’apport de molybdène, le produit présente peu d’intérêt nutritionnel »[7].

En plus de cette composition, qui la fait parfois qualifier de « superaliment » (superfood)[13], AFA a aussi montré certaines propriétés thérapeutiques intéressantes.

La phycocyanine (pigment photosynthétique responsable de la teinte bleue des cyanobactéries) est connue pour ses propriétés antioxydantes et anti-inflammatoires[14]. D'autres recherches ont également montré une possible action anti-tumorale de la phycocyanine[15].

Une étude menée au Royal Victoria Hospital, à Montréal (Canada), a montré que la cyanobactérie stimulait le système immunitaire en facilitant la circulation des cellules immunitaires[16].

Enfin, une des propriétés qui suscite le plus d'intérêt est la capacité apparente de l'AFA à stimuler in vitro la production des cellules souches de la moelle épinière, ce qui contribuerait à favoriser la régénération cellulaire[17].

Notes[modifier | modifier le code]

  1. DJT = Dose Journalière Tolérable

Références[modifier | modifier le code]

  1. a et b Kay, Robert A.; Barton, Larry L. (1991). "Microalgae as food and supplement". Critical Reviews in Food Science and Nutrition. 30 (6): 555–73
  2. Wayne W. Carmichae, Christian Drapeau et Donald m. Anderson, « Harvesting of Aphanizomenon flos-aquae from Klamath Lake for human dietary use », Journal of Applied Phycology, vol. 12, no 6,‎ , p. 585–595.
  3. Nathalie Fournis, « Une start-up toulousaine en pointe dans la culture d'une algue rare », sur france3-regions.francetvinfo.fr, .
  4. Lynn Margulis & Michael J. Chapman, Kingdoms and Domains, An Illustrated Guide to the Phyla of Life on Earth"", Academic Press, Boston, 2009.
  5. Barsanti, Laura; Gualtieri, Paolo (2006). Algae: anatomy, biochemistry, and biotechnology. Florida, USA: CRC Press
  6. Barsanti, Laura; Gualtieri, Paolo (2006). Algae: anatomy, biochemistry, and biotechnology. Florida, USA: CRC Press.
  7. a b et c « Avis de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments relatif à l'évaluation de l'emploi d'une micro-algue, Aphanizomenon flos aquae var. flos aquae, du lac Klamath Supérieur (Oregon, États-Unis) sous forme de complément alimentaire, et sous forme de poudre à saupoudrer sur les aliments et demande de justification de l'allégation "la consommation d'Aphanizomenon flos aquae var. flos aquae permet de maintenir l'état de bien-être, en particulier lorsqu'il est perturbé par des causes physiologiques" ».
  8. « Les normes et certifications des compléments alimentaires », sur sharefitness (consulté le ).
  9. "Assessing potential health risks from microcystin toxins in blue-green algae dietary supplements". Environ. Health Perspect. 2000 may; 108(5): 435–439. D. J. Gilroy, K. W. Kauffman, R. A. Hall, X. Huang and F. S. Chu [1]
  10. "Toxin content and cytotoxicity of algal dietary supplements". Toxicol. Appl. Pharmacol. 2012 Dec 1; 265(2):263-71. doi: 10.1016/j.taap 2012.10.005. Epub 2012 Oct. 2012. Heussner A. H., Mazija L., Fastner J., Dietrich D. R. [2]
  11. "Contamination by Microcystis and microcystins of blue-green algae food supplements (BGAS) on the italian market and possible risk for the exposed population". Food Chem. Toxicol. 2012 Dec; 50(12):4493-9. doi: 10.1016/j.fct.2012.09.029. Epub 2012 Oct. 2, Vichi S., Lavorini P., Funari E., Scardala S., Testai E. [3]
  12. « Les bienfaits extraordinaires d’Aphanizomenon Flos-Aquae – AFA, dite Algue bleue du lac Klamath », sur plusminceplusjeune.org (consulté le ).
  13. « A quoi ça sert de manger des micro-algues ? - AnotherTree », sur AnotherTree, (consulté le ).
  14. Romay, C.; Armesto, J.; Remirez, D.; González, R.; Ledon, N.; García, I. (1998). "Antioxidant and anti-inflammatory properties of C-phycocyanin from blue-green algae". Inflammation Research. 47 (1): 36–41
  15. Kumar, K.; Lakshmanan, A.; Kannaiyan, S. (2003). "Bioregulatory and therapeutic effects of blue green algae". Indian Journal of Microbiology. 43 (1): 9–16
  16. Jensen, Gitte S.; Ginsberg, Donald I.; Huerta, Patricia; Citton, Monica; Drapeau, Christian (January 2000). "Consumption of Aphanizomenon flos-aquae Has Rapid Effects on the Circulation and Function of Immune Cells in Humans". Journal of the American Nutraceutical Association. 2 (3): 50–58
  17. Shytle, DR; Tan, J; Ehrhart, J; Smith, AJ; Sanberg, CD; Sanberg, PR; Anderson, J; Bickford, PC (2010). "Effects of blue-green algae extracts on the proliferation of human adult stem cells in vitro: A preliminary study". Medical science monitor. 16 (1): BR1–5