Affaire Carolin Stenvall

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L'affaire Carolin Stenvall commence en avec la disparition de cette jeune femme de 29 ans dans le grand nord suédois. Elle s'achève en 2009 avec la condamnation du meurtrier, Toni Alldén, à la réclusion criminelle à perpétuité.

Cette affaire criminelle est largement médiatisée en Suède, la presse locale et nationale s'en emparant dès le lendemain de la disparition. Deux éléments marquent particulièrement l'opinion : d'une part, la personnalité du meurtrier, bon père de famille sans antécédents judiciaires, et d'autre part, sa défense lors des procès. Il soutient en effet la thèse d'un accident, tout en reconnaissant avoir volontairement tiré par deux fois sur sa victime.

La disparition[modifier | modifier le code]

Le vendredi , Carolin Stenvall quitte au volant de sa voiture son domicile de Piteå (dans le nord de la Suède) pour se rendre chez des amis à Kiruna, 400 km plus au nord. Elle a prévu d'y passer la nuit avant de se rendre le lendemain à un entretien d'embauche à l'hôtel de glace de Jukkasjärvi[sr 1].

Le samedi matin, les amis de la jeune femme appellent son compagnon pour le prévenir qu'elle n'est jamais arrivée. Ce dernier alerte immédiatement la police[sr 2]. En début d'après-midi, les policiers parviennent à localiser le téléphone mobile de Carolin dans une zone située quelques kilomètres à l'est de Gällivare, à une centaine de kilomètres au sud de Kiruna. Une patrouille envoyée sur les lieux découvre la Ford Focus bleue de la jeune femme abandonnée portières closes sur l'aire de repos de Stenbron (67° 06′ 19″ N, 20° 53′ 56″ E), en bordure de la route E10[sr 3]. Cette aire de repos située près d'un cours d'eau est bien connue des touristes, chauffeurs de poids-lourds et des habitants de Gällivare[sr 4]. Aucune trace de la jeune femme n'est retrouvée à proximité.

La presse locale et nationale s'empare immédiatement de l'affaire. Dans la journée du dimanche, des battues sont organisées autour du lieu de la disparition et des plongeurs effectuent des recherches dans le cours d'eau, mais en vain. Les policiers ouvrent une enquête pour disparition inquiétante, l'hypothèse d'une fugue étant écartée en raison de la personnalité de la jeune femme et du lieu et des circonstances de sa disparition.

Les premières pistes[modifier | modifier le code]

La police diffuse une photographie de Carolin qui est largement reprise dans la presse. Les témoignages affluent et dans les semaines qui suivent la disparition, les policiers reçoivent jusqu’à cinq cents appels.

Parmi les premières pistes suivies par les enquêteurs figure celle du géocaching, une activité de loisir que pratiquait Carolin. L'aire de repos de Stenbron étant située à proximité d'une géocache, on imagine que la jeune femme aurait pu y rencontrer un autre adepte[1]. On recherche également un jeune auto-stoppeur qui aurait été aperçu le long de la route empruntée par Carolin[2]. Divers véhicules font également l'objet d'un signalement, parmi lesquels une Volvo bleue dont la présence a été signalée sur l'aire de repos le jour de la disparition[3].

Ces premières pistes n'aboutissent toutefois à aucun résultat tangible, et deux semaines après la disparition, l'enquête semble au point mort[sr 5].

La piste du break Audi[modifier | modifier le code]

Sur la base d'une information fournie par un couple de retraités, les enquêteurs se rendent le sur l'aire de repos 58 au bord de la route E10, à 58 kilomètres au sud de Gällivare. Le lendemain de la disparition, ce couple, de retour d'une partie de pêche, remarque au sol une large tache de sang au milieu de laquelle on distingue ce qui s'apparente à des morceaux de cervelle. Pensant à l'acte d'un braconnier, ils cherchent en vain le corps d'un animal dans les environs avant de rentrer chez eux. Dans la soirée, ils apprennent aux informations la disparition de Carolin et font immédiatement le rapprochement[sr 6]. Le lundi, ils se rendent au poste de police de Gällivare.

Sur les lieux, les policiers découvrent notamment des cartouches et des fragments d'os humains. Plus loin, un chien les conduit vers un ravin où est retrouvé un tapis de sol taché de sang[sr 7]. Ce tapis est identifié comme provenant du coffre d'une Audi 100 break modèle 1992. Les enquêteurs décident alors de convoquer pour vérification les 83 propriétaires d'un tel véhicule domiciliés à Gällivare.

Toni Alldén[modifier | modifier le code]

Dans le cadre des interrogatoires des propriétaires d'Audi 100 break résidant à Gällivare, Toni Alldén, un homme de 51 ans, marié et père de trois enfants, est entendu par les enquêteurs le jeudi . Au cours de son interrogatoire, l'homme reconnait avoir changé tout récemment le tapis de sol dans le coffre de sa voiture. Les techniciens de la police scientifique qui examinent au même moment le véhicule y trouvent de larges traces de sang, dans le coffre et sur le siège avant[sr 8].

En l'espace de quelques heures, Toni Alldén devient le principal suspect dans l'enquête sur la disparition de Carolin Stenvall. Le procureur est alerté et décide de sa mise en examen[sr 9]. L'annonce de l'arrestation fait immédiatement les gros titres des journaux.

La presse dresse alors le portrait d'un individu sans aucun antécédent judiciaire, bon père de famille et bien intégré dans la communauté locale[sr 10].

Les aveux[modifier | modifier le code]

Alldén commence par nier toute implication dans la disparition de Carolin, mais les éléments à charge s'accumulent rapidement, les analyses montrant que le sang prélevé dans le coffre de sa voiture est bien celui de la jeune femme[4]. Pendant le weekend du 18 au , il tente de se suicider dans sa cellule. Le lundi, il reconnait être responsable de la mort de Carolin, mais affirme qu'il s'agit d'un accident.

Le récit qu'Alldén fait aux enquêteurs est le suivant. Le , il aurait rencontré Carolin Stenvall sur l'aire de repos de Stenbron. La jeune femme l'aurait pris à partie verbalement au sujet de sa conduite. Il l'aurait « repoussée » et elle serait mal tombée, sa tête heurtant l'attache-remorque à l'arrière de son véhicule[5]. Pris de panique, il l'aurait alors mise dans son coffre et aurait conduit plusieurs heures sans savoir quoi faire[sr 11]. Il se serait finalement rendu sur l'aire de repos 58, où il aurait frappé la jeune femme avec un marteau pour confirmer qu'elle n'était plus en vie[sr 12].

Alldén affirme ne pas se souvenir de la suite des événements : le lendemain, il se serait réveillé à côté d'une bouteille de whisky[sr 13].

Découverte du corps[modifier | modifier le code]

Affirmant dans un premier temps qu'il ne sait pas ce qu'il a fait du corps, Alldén envoie ensuite les enquêteurs sur des fausses pistes. Mais le , il pointe sur une carte et décrit avec précision un lieu situé près de Lansjärv (66° 39′ 15″ N, 22° 11′ 45″ E) à une centaine de kilomètres au sud de Gällivare[6]. Il déclare également avoir non pas frappé Carolin avec un marteau, mais lui avoir tiré une balle de fusil, alors qu'elle était déjà morte.

Le corps partiellement brûlé de Carolin est effectivement retrouvé sur les indications d'Alldén. L'autopsie confirme que la jeune femme a bien été atteinte d'une balle dans le dos, mais relève aussi que cette balle a causé une hémorragie interne. La jeune femme était donc en vie lorsqu'Alldén a tiré. On constate par ailleurs des traces de coups violents sur son visage et sur sa nuque.

Alldén indique également aux enquêteurs un autre lieu, où il a brûlé puis caché le corps pendant deux semaines avant de le déplacer. On y retrouve un soutien-gorge et une chaussette appartenant à la victime.

Le procès[modifier | modifier le code]

Alldén est soumis à un examen psychiatrique dont il ressort qu'il est sain d'esprit[7]. Le procès s'ouvre le devant le tribunal de Gällivare. Les trois chefs d'inculpation sont les suivants : meurtre, enlèvement, et recel de cadavre.

L'objectif de la défense est d'obtenir une requalification en homicide involontaire et recel de cadavre, c'est-à-dire de montrer que Carolin était déjà décédée lorsqu'Alldén lui a tiré dans le dos[sr 14]. Cette version est toutefois mise à mal par les résultats de l'autopsie d'une part, et par l'expertise balistique d'autre part. Celle-ci montre en effet que Caroline était debout lorsqu'une première balle l'a atteinte dans le dos, et qu'elle était à terre lorsqu'une deuxième balle lui a traversé la boite crânienne[8].

Reconnu coupable, Alldén est condamné à la réclusion criminelle à perpétuité.

En appel[modifier | modifier le code]

Pour son procès en appel, Alldén choisit un nouvel avocat. Celui-ci s'efforce de montrer que la mort de Carolin est accidentelle en s'appuyant sur trois arguments :

  • il estime possible que Carolin était déjà morte quand Alldén lui a tiré dessus à deux reprises,
  • il met en parallèle le cas de son client avec une autre affaire datant de 1990, dans laquelle une femme ayant tué un homme qu'elle croyait mort en cherchant à se débarrasser du cadavre a été condamné pour homicide involontaire,
  • il affirme que les indices prélevés sur l'aire de repos 58, sur lesquels repose en partie l'expertise balistique, sont irrecevables car les enquêteurs s'y sont rendus pour la première fois dix-huit jours après les faits[9].

La cour d’appel du Haut-Norrland confirme toutefois la condamnation d'Alldén à la prison à vie.

Zones d'ombre[modifier | modifier le code]

L'enquête et les procès n'ont pas permis d'établir ce qui s'est réellement passé lorsque Carolin Stenvall a croisé le chemin de son meurtrier le . Il n'est du reste pas certain que cette rencontre ait eu lieu à l'aire de repos de Stenbron. Les déclarations d'Alldén ont été contredites par les éléments matériels. Durant les procès, l'accusation a proposé trois scénarios. L'un d'eux est celui d'un crime à motif sexuel, le corps de Carolin ayant été retrouvé partiellement dénudé.

Les deux autres reposent sur la dépendance à l'alcool de l'accusé. L'enquête a en effet montré qu'Alldén buvait de façon plus qu'immodérée dans les semaines et les jours qui ont précédé le meurtre. Dans le deuxième scénario, Alldén, sous l'emprise de l'alcool, ne se serait pas contenté comme il l'a affirmé de « repousser » Carolin lors de leur altercation, mais l'aurait violemment frappée. Le troisième scénario est que, conduisant en état d'ébriété, il aurait renversé Carolin avec sa voiture[10].

Notes et références[modifier | modifier le code]

P3 dokumentär om mordet på Carolin Stenvall

Le , la station de radio suédoise P3 a diffusé un documentaire réalisé par David Carr sur le meurtre de Carolin Stenvall. Les minutages sont décomptés en prenant pour origine le moment où David Carr parle pour la première fois : I början av september 2008....

  1. 03:51 - 04:17 : Arbetsintervjun på ishotellet...
  2. 04:17 - 04:34 : Men hon dyker aldrig upp...
  3. 05:17 - 05:43 : Och vid tvåtiden...
  4. 05:43 - 05:51 : Rastplatsen...
  5. 18:53 - 19:02 : Polisen har hållt...
  6. 21:09 - 21:15 : Men när de senare...
  7. 22:25 - 22:38 : När en polishund senare...
  8. 29:36 - 29:48 : Teknikerna...
  9. 29:48 - 30:09 : På kvällen...
  10. 51:17 - 51:50 : Och att den misstänkte...
  11. 37:41 - 37:48 : I paniken lyfter...
  12. 37:59 - 38:11 : Innan han kör vidare...
  13. 38:23 - 38:41 : Mannen påstår också...
  14. 59:03 - 59:24 : Men försvarets linje...
Autres références
  1. (sv) Anna Norberg, Mia Karlsson. Här är nya ledtråden. Expressen. 16 septembre 2008.
  2. (sv) Polisen jagar okänd liftare. Aftonbladet. 21 septembre 2008.
  3. (sv) Camilla Sundell. Blå Volvo kan vara viktig ledtråd. Aftonbladet. 16 septembre 2008.
  4. (sv) Clas Svahn. Blodet kom från Carolin Stenvall. Dagens Nyheter. 18 octobre 2008.
  5. (sv) Clas Svahn. 50-åringen erkände i dag. Dagens Nyheter. 20 octobre 2008.
  6. (sv) Emma Johannisson. Presskonferens om fallet Carolin Stenvall. Svenska Dagbladet. 23 octobre 2008.
  7. (sv) 50-åringen sinnesundersökt. Dagens Nyheter. 5 novembre 2008.
  8. (sv) Maria Ödalen. Avrättning på nära håll. Norrländska SocialDemokraten. 3 mars 2009.
  9. (sv) Hans L Olofsson. Silberskys slutanförande ord för ord. Norrländska SocialDemokraten. 4 juin 2009.
  10. (sv) Emma Johannisson. 51-åringen inför rätta. Svenska Dagbladet. 2 mars 2009.