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Adrien Degbey

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Adrien Degbey
Illustration.
Portrait d'Adrien Degbey
Fonctions
Ministre du Développement rural et de la Coopération

(1 an, 10 mois et 4 jours)
Président Sourou Migan Apithy (démission)
Justin Ahomadegbé (intérim)
Premier ministre Justin Ahomadegbé
Prédécesseur Sourou Migan Apithy
Successeur Antoine Boya
Ministre du Travail et Affaires sociales

(1 mois et 16 jours)
Président Hubert Maga
Prédécesseur Bertin Borna (Travail)[n 1]
René Deroux (Affaires sociales)[n 2]
Successeur Justin Ahomadegbé[1]
Député

(1 an, 8 mois et 9 jours)
Élection 2 avril 1959
Circonscription Sud-Ouest
Président Justin Ahomadegbé
Conseiller général

(5 ans, 2 mois et 25 jours)
Élection 5 janvier 1947
Circonscription Athiémé-Ouidah
Président Sourou Migan Apithy
Groupe politique UPD
Commission Commission des affaires sociales
Commission des vœux
Commission des travaux publics et urbanisme
Biographie
Nom de naissance Adrien Degbey
Date de naissance
Lieu de naissance Dogbo (Dahomey)
Date de décès (à 52 ans)
Nature du décès Accident de la route
Nationalité Dahoméenne
Parti politique UPD (1946-1951)
PDU (1960-1963)
PDD (1963-1965)
Diplômé de École normale William-Ponty
Profession Instituteur
Distinctions Voir distinctions
Religion Catholicisme[2]

Signature de Adrien Degbey

Adrien Degbey, né le à Dogbo et mort le , est un instituteur, inspecteur principal de l'Enseignement primaire et homme politique dahoméen.

Études et carrière professionnelle

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Adrien Degbey naît le à Dogbo au Dahomey (ancien nom du Bénin)[3]. Il entre à l'École primaire supérieure Victor-Ballot à Porto-Novo en 1932[4]. En 1935, il passe avec cinq autres élèves de sa promotion, dont Justin Ahomadegbé, le concours d'entrée à l'École normale William-Ponty[5]. Ils intègrent l'école en réussissant à se classer aux six premières places à l'issue des épreuves du concours[6]. Cet établissement, situé à Gorée au Sénégal, est connu pour former une part importante des instituteurs, médecins et cadres d'Afrique-Occidentale française.

Grâce au directeur de l'école, Charles Béart[7], et au théâtre de Ponty[8], il s'initie au 6e art. En 1936, il joue dans une pièce intitulée Retour aux fétiches délaissés[n 3], au milieu d'une troupe composée d'autres élèves dahoméens notamment Hubert Maga, Émile Derlin Zinsou, François Aplogan et Antoine Boya, futures figures de la vie politique dahoméenne[9]. La pièce, jouée à Gorée et à Dakar, connaît un franc succès.

Il sort de l'École normale avec un diplôme d'instituteur et rentre au Dahomey pour exercer son métier. En 1948, il obtient son diplôme supérieur d'aptitude professionnelle[n 4],[10] et devient par la suite directeur d'école publique à Bopa[11].

Le , alors instituteur principal de première classe, il est nommé inspecteur adjoint et affecté à l'Inspection primaire de la circonscription de Porto-Novo[12].

Il termine sa carrière à l'Éducation nationale en tant qu'inspecteur principal de l'Enseignement primaire[13].

Carrière politique

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Adrien Degbey s'engage très jeune dans la vie politique de son pays. À l'âge de 28 ans, en tant que membre de l'Union progressiste dahoméenne (UPD), premier parti politique de l'histoire du Dahomey, il se présente aux premières élections permettant au pays de se doter d'un Conseil général[n 5]. Sa liste UPD, sur laquelle figure également Augustin Azango, Albert Akindès et Denis Djogo, est inscrite au second collège[n 6], dans la 2e circonscription, cercles d'Athiémé-Ouidah, où quatre sièges sont à pourvoir[14]. Adrien Degbey est élu conseiller général le [15]. Au cours de son mandat, il est membre de la commission des affaires sociales, de la commission des vœux et de la commission des travaux publics et urbanisme[16].

En , il ne parvient pas à conserver son siège lorsqu'il se présente aux élections territoriales suivantes, dans la circonscription d'Athiémé[17]. Il doit alors attendre les élections législatives de 1959 pour redevenir un représentant élu de la République, en étant un député de la circonscription du Sud-Ouest[n 7],[18]. Il le demeure jusqu'en où de nouvelles élections législatives sont organisées à la suite de l'indépendance du pays, le [3].

Au début de son indépendance, la république du Dahomey connait une longue période d'instabilité politique, émaillée par plusieurs coups d'État. C'est durant cet intervalle qu'Adrien Degbey participe à deux reprises à un gouvernement. Il est nommé par le président de la République, Hubert Maga, le , ministre du Travail et Affaires sociales[19] et le demeure jusqu'au de la même année[20]. À cette date, l'armée sous la conduite du colonel Christophe Soglo, souhaitant éviter que les troubles sociaux et politiques agitant le pays ne se transforment en guerre civile, force Hubert Maga à quitter le pouvoir[21].

Un mois plus tard, Adrien Degbey est convié par Christophe Soglo à prendre part à une commission constitutionnelle nationale, constituée « d'experts, de représentants de toutes les régions et de familles spirituelles du Dahomey, de représentants des syndicats, des mouvements de jeunesse » chargée d'étudier l'avant-projet de Constitution arrêté par le Gouvernement provisoire[22].

Concernant cette période de transition militaire qui fait basculer le Dahomey dans la Deuxième République, Bruno Amoussou, dans ses mémoires, aborde quelques confessions dont lui fait part Adrien Degbey. Ce dernier se montre acerbe quant aux décisions hâtives qui sont actées et pointe des errements, notamment l'élaboration d'une nouvelle Constitution en seulement une dizaine de jours, la création d'un nouveau parti unique[n 8],[n 9] en 47 jours et l'organisation d'élections législatives où seul ledit parti unique est autorisé à participer[23].

Une nouvelle Constitution est adoptée par référendum le [24].

Lors de l'accession au pouvoir, le , de Sourou Migan Apithy, président de la République et de Justin Ahomadegbé, Premier ministre et vice-président, Adrien Degbey retrouve des fonctions ministérielles en obtenant le portefeuille du Développement rural et de la Coopération[25].

Cet exécutif bicéphale connait des tensions palpables jusqu'à un point de non-retour poussant Sourou Migan Apithy, le , puis Justin Ahomadegbé, deux jours plus tard, à donner leur démission. Tahirou Congacou, président de l'Assemblée nationale, prend alors les rênes du pays à partir du . Il forme un gouvernement restreint, composé de cinq membres. Adrien Degbey cède son poste à Antoine Boya nommé secrétaire d'État aux Finances, à l'Économie, au Développement rural et à la Coopération[26].

Mais le , l'armée s'empare de nouveau du pouvoir et Christophe Soglo, promu depuis général, redevient président jusqu'au , lorsqu'un groupe de jeune officiers le renverse à son tour pour placer le lieutenant-colonel Alphonse Alley à la tête du pays[27].

Le nouveau chef de l'État crée, le , un comité constitutionnel chargé d'élaborer un avant-projet de Constitution[28] ; 54 membres, dont Adrien Degbey, sont nommés en fonction de leur département d'origine et leurs compétences[29]. La nouvelle Constitution est approuvée par les urnes, le de la même année, par 846 521 voix contre 71 695[30].

Il meurt, le , dans un accident de la circulation[31]. Des obsèques nationales sont organisées en son honneur[32].

Postérité

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Un collège d'enseignement général (CEG) créé en 1972 à , dans le département du Mono, porte son nom[33].

Entrée du CEG Adrien Degbey
Entrée principale du collège d'enseignement général Adrien Degbey de Sè.

Distinctions

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Notes et références

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  1. Selon le décret n° 62/P.R du portant formation du Gouvernement de la république du Dahomey, Bertin Borna est nommé ministre des Finances, du Budget et du Travail.
  2. Selon le décret no 62/P.R du , René Deroux devient ministre de la Santé publique et des Affaires sociales.
  3. La pièce de théâtre Retour aux fétiches délaissés est écrite en 1936 par Hubert Maga et Émile Derlin Zinsou.
  4. Selon les débats parlementaires du Conseil de la République française, « l'instituteur africain, sorti de l'école normale avec le diplôme lui conférant son titre, [doit] passer le diplôme d'aptitude professionnelle huit ou dix ans après pour accéder au grade d'ordinaire, puis le diplôme supérieur d'aptitude professionnelle pour être titulaire du cadre supérieur ». Selon Peggy Sabatier, l'obtention du diplôme supérieur d'aptitude professionnelle « dépend à la fois des aptitudes pédagogiques du candidat et de son dossier professionnel. Les visites d'aptitude se font en classe, mais également chez l'enseignant qui doit faire preuve d'un mode de vie occidentalisé ».
  5. Le Conseil général est rebaptisé Assemblée territoriale en 1952, Assemblée législative en 1959 et Assemblée nationale en 1961. [lire en ligne].
  6. Le premier collège est réservé aux citoyens de statut civil français (colons) et aux « évolués » ; le second collège est destiné aux autochtones soumis au statut personnel (« indigènes »). Cette distinction de collèges permet aux colons de s'assurer de disposer de sièges au Conseil général.
  7. La circonscription du Sud-Ouest correspond au département du Mono.
  8. Il s'agit du Parti démocratique dahoméen (PDD) créé par Sourou Migan Apithy et Justin Ahomadegbé, le 15 décembre 1963. Il est dissous par Tahirou Congacou le 4 décembre 1965. Décret no 1965-121-bis du .
  9. Adrien Degbey est membre du bureau politique en tant que délégué des affaires sociales. CIA, Daily Report, Foreign Radio Broadcasts, no 244, États-Unis, 1963, p. I1, [lire en ligne].
  10. Il s'agit de la médaille de l'enseignement du premier degré, appelée plus communément « médaille des instituteurs », elle s'obtient après un minimum de 7 ans de services comme titulaire[lire en ligne].
  11. Selon le BODMR no 12 du , p. 538.
  12. La distinction d'officier d'académie a été remplacée par celle de chevalier de l'ordre des Palmes académiques, lors de la création de ce dernier le 4 octobre 1955, selon l'article 13 du décret no 55-1323 portant institution d'un ordre des Palmes académiques.
  13. Selon le décret du 9 juillet 1959 portant promotions et nominations dans l'ordre des Palmes académiques (BODMR no 11 du , p. 454).

Références

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  1. « Ordonnance no 1963-1 portant dissolution d'institutions et formation du Gouvernement provisoire », sur Secrétariat général du Gouvernement du Bénin, (consulté le ).
  2. « Bulletin catholique de doctrine et d'information », sur Gallica, La Croix au Dahomey, (consulté le ), p. 12.
  3. a et b Houngnikpo 2024, [1], p. 153.
  4. Ballot 1992, p. 19.
  5. Fifatin 1973, p. 190.
  6. Emmanuel Karl-August, « Serpos Abdou Tidjani : l'homme et l'œuvre », Présence africaine, no 129,‎ , p. 142 (JSTOR 24350967, consulté le ).
  7. « Charles Béart initiateur du théâtre africain est mort », sur Le Monde, (consulté le ).
  8. Huannou 1984, p. 49.
  9. « Retour aux fétiches délaissés », sur Retronews, France-Outre-mer, (consulté le ).
  10. « Chronique locale », sur Gallica, France-Dahomey, (consulté le ).
  11. « Distinctions honorifiques », sur Gallica, France-Afrique Abidjan, (consulté le ).
  12. « Décret no 1961-81 portant nomination et affectation de monsieur Degbey Adrien », sur Secrétariat général du Gouvernement du Bénin, (consulté le ).
  13. « Décret no 1964-241 portant reclassement », sur Secrétariat général du Gouvernement du Bénin, (consulté le ).
  14. « Liste définitive des candidats au 2e tour de scrutin aux élections du Conseil général », France-Dahomey, no 983,‎ , p. 2 (lire en ligne, consulté le ).
  15. « Résultats des scrutins », Le Phare du Dahomey, no 28,‎ 1re édition de janvier 1947, p. 2 (lire en ligne, consulté le )
  16. « La deuxième session ordinaire du Conseil général », France-Dahomey, no 62,‎ , p. 1 (lire en ligne, consulté le )
  17. « Résultats définitifs des élections à l'Assemblée territoriale proclamés par la commission de recensement général des votes », France-Dahomey, no 30,‎ , p. 2 (lire en ligne, consulté le )
  18. Guid'AOF 1960, p. 29.
  19. « Décret no 1963-432 portant formation du Gouvernement de la république du Dahomey », sur Secrétariat général du Gouvernement du Bénin, (consulté le ).
  20. « Décret no 1963-488 portant abrogation du décret no 432 du relatif à la formation du Gouvernement de la république du Dahomey », sur Secrétariat général du Gouvernement du Bénin, (consulté le ).
  21. « Renversement du Gouvernement de Hubert Maga au Dahomey | Evenements | Perspective Monde », sur perspective.usherbrooke.ca (consulté le )
  22. « Décret no 1963-518 portant formation de la commission constitutionnelle nationale », sur Secrétariat général du Gouvernement du Bénin, (consulté le ).
  23. Amoussou 2009, p. 125.
  24. Commission de publication des documents diplomatiques français, « Documents diplomatiques français. 1965, Tome II, 1er juillet-31 décembre », sur Gallica, Ministère des affaires étrangères, (consulté le ).
  25. « Dahomey : installation du premier gouvernement de la 11e République », sur Le Monde, (consulté le ).
  26. « Décret no 1965-119-bis portant nomination », sur Secrétariat général du Gouvernement du Bénin, (consulté le ).
  27. Philippe Decraene, « Une mesure d'apaisement », sur Le Monde, (consulté le ).
  28. « Décret no 1967-441 portant création du Comité constitutionnel et nomination du président dudit Comité », sur Secrétariat général du Gouvernement du Bénin, (consulté le ).
  29. « Décret no 1968-19-bis portant nomination des membres du comité constitutionnel », sur Secrétariat général du Gouvernement du Bénin, (consulté le ).
  30. Philippe Decraene, « L'impasse est totale au Dahomey après les élections présidentielles », sur Le Monde diplomatique, (consulté le ).
  31. Houngnikpo 2024, [2], p. 154.
  32. Pliya 1993, [3], p. 6.
  33. « Annuaire répertoriant les établissements scolaires béninois », sur Espeduc (version du sur Internet Archive).
  34. a b c et d Towou 1973, [4], p. 5.
  35. « Décret no 1967-295 portant nominations et promotions, à titre civil dans l'ordre national du Dahomey », sur Secrétariat général du Gouvernement du Bénin, (consulté le ).

Articles connexes

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Bibliographie

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  • Guid'AOF : L'Afrique occidentale française cercle par cercle, Dakar, Agence de distribution de presse,
  • André Towou, Au clair de lune sous les tropiques : contes, Volume 1, Cotonou, Éditions A.B.M.,
  • Agossou Maurice Fifatin, La société dahoméenne et ses institutions politiques (Thèse d'État en Droit), Montpellier, Université de Montpellier, , 295 p. (lire en ligne)
  • Le livre d'or des anciens de Ballot : École primaire supérieure et collège Victor Ballot, Porto-Novo, Cotonou, Éditions du Bénin, coll. « Mémorial du Bénin », , 72 p. (OCLC 36088785)
  • Jean Pliya, L'histoire de mon pays, le Bénin, Cotonou, La Librairie Notre-Dame, , 3e éd., 142 p.
  • Adrien Huannou, La littérature béninoise de langue française, Paris, Karthala Éditions, , 327 p. (ISBN 978-2865371051)
  • Bruno Amoussou, L'Afrique est mon combat, Paris, L'Archipel, , 1re éd., 216 p. (ISBN 978-2809801576)
  • (en) Mathurin C. Houngnikpo, Historical Dictionary of Benin, Lanham, Rowman & Littlefield, , 5e éd., 562 p. (ISBN 9781538186565)