Aérodynamique automobile

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L’aérodynamique automobile est l'étude des phénomènes aérodynamiques induits par l'écoulement de l'air autour d'un véhicule automobile en mouvement. La connaissance de ces phénomènes permet entre autres, de réduire la consommation des véhicules en diminuant leur traînée, d'améliorer leur comportement routier en influant sur leur portance (ou leur déportance) et de diminuer les phénomènes aéroacoustiques ainsi que les turbulences à haute vitesse.

Prise en compte très tôt dans l'histoire de l'automobile, à l'image de La Jamais contente profilée comme une torpille, l'aérodynamique automobile a pris de l'ampleur dans les années 1930. C'est en effet en 1934 aux États-Unis que la Chrysler Airflow, première automobile de série dessinée en respectant un profil aérodynamique, voit le jour. Par la suite, les automobiles ne vont cesser de s'améliorer, notamment après l'apparition des Formule 1 dont le championnat suscite encore aujourd'hui beaucoup d'effervescence dans ce domaine.

L'aérodynamique étant intrinsèquement liée à la mécanique des fluides, les essais en soufflerie sont aujourd'hui devenus indispensables aux constructeurs automobiles. Par ailleurs, en raison des phénomènes complexes mis en jeu en aérodynamique, ces derniers — et plus particulièrement les écuries de courses — ont également recours au calcul numérique (ou CFD pour « Computational Fluid Dynamics ») pour résoudre leurs problèmes.

Arrivée de G. Vinet au Paris-Amsterdam-Paris 1898, sur l'Amédée Bollet fils « Torpilleur Type B » à la carrosserie en aluminium, première voiture née d'une étude aérodynamique.
Test aérodynamique en soufflerie d'une Ford Flex à l'aide d'un gaz opaque.

Pré-requis : grandeurs aérodynamiques

Traînée ou résistance aérodynamique à l'avancement

Coefficient de traînée d'un corps selon sa forme, en référence à sa surface frontale

En mécanique des fluides, la traînée est la force qui s'oppose au mouvement d'un corps dans un fluide, soit, en automobile, la force qui s'oppose à l'avancement du véhicule dans l'air. Il est donc dans l'intérêt des constructeurs de diminuer la traînée, force à l'origine d'une augmentation de la consommation en carburant et d'une dégradation de la vitesse de pointe en ligne[1].

Cette traînée s'exprime par la formule[2] :

où :

, masse volumique de l'air (en kg/m3) ;
, vitesse du véhicule par rapport à l'air (en m/s) ;
, maître-couple (en m2) ;
, le coefficient de traînée (sans unité).

Cette expression met en avant un paramètre essentiel à la détermination de la traînée : le Cx[a]. Le Cx ou coefficient de traînée est le rapport de la traînée d'un objet à celle d'un objet de même surface de référence se déplaçant à la même vitesse dans le même fluide et qui aurait un coefficient de traînée de 1. Ce nombre adimensionnel caractérise ainsi la qualité du « profilage aérodynamique » d'un objet vis-à-vis de sa résistance à l'avancement l'air dans l'axe longitudinal du véhicule.

La pression à l'avant d'une éco-mobile (en rouge) est source de traînée, même si cette traînée est paradoxalement compensée presque intégralement par les dépressions sur le reste de l'avant-corps.

La valeur du maître-couple S — surface frontale maximale du véhicule — peut être obtenue par calcul sur plan ou estimée par exemple, par la formule dite de Paul Frère :

En ce qui concerne les véhicules particuliers, le maître-couple varie entre 1,5 et 2,5 m2[4][réf. incomplète].

La principale traînée, de l'ordre des 23 de la traînée totale, est la « traînée de forme » (ou de profil)[3]. Elle est due à deux phénomènes physiques : d'une part le jeu de pressions sur l'avant-corps du véhicule (surpressions et dépressions)qui résulte d'ailleurs, très contre-intuitivement, en une traînée d'avant-corps assez faible, et d'autre part la dépression laissée après le passage du véhicule qui produit une traînée appelée traînée de culot, cette traînée de culot représentant une part importante de la traînée totale (voir plus bas)[5].

Les autres traînées viennent des turbulences liées aux décollements de l'écoulement, des tourbillons ou vortex liés à la « traînée induite » par la portance, de la « traînée interne » due au refroidissement du moteur, de la circulation d'air dans l'habitacle, de la traînée de frottement ou de rugosité due à la viscosité de l'air (voir fluides visqueux)[6]etc.

Importance du Cx et de la surface frontale quant à la consommation

Croisement des traînées aérodynamique et de roulement

En utilisation routière, une grande partie de l'énergie consommée par une automobile est utilisée pour vaincre la résistance aérodynamique à l'avancement[7]. À grande vitesse, cette résistance aérodynamique (ou traînée aérodynamique) est prépondérante par rapport à la résistance au roulement, étant donné que sa valeur évolue comme le carré de la vitesse (figure ci-contre).

Pour diminuer la résistance aérodynamique d'une automobile, les constructeurs peuvent agir sur deux paramètres : le Cx et le maître-couple S. L'évolution à la hausse des standards en matière de confort et d'habitabilité étant incompatibles avec une réduction du maître-couple, c'est essentiellement le Cx qui peut évoluer. En diminuant de 15 % un Cx initialement à 0,40, un véhicule roulant à 120 km/h économise un litre de carburant aux 100 km[7].

La densité de l'air est prise égale à 1,2 kg/m3 à 20 °C.

Le tableau ci-dessous récapitule les frottements aérodynamiques d'un SUV d'une surface frontale de 2,70 m2 en fonction de sa vitesse, pour deux de 0,3 et 0,38.

Frottement aérodynamique d'un SUV (en N)
Surface frontale = 2,70 m2 50 km/h 70 km/h 90 km/h 110 km/h 130 km/h
Cx = 0,38 118,8 232,8 384,8 574,8 802,8
Cx = 0,30 93,8 183,8 303,8 453,8 633,8

Le tableau ci-dessous récapitule les frottements aérodynamiques d'une citadine à moteur Diesel de surface frontale de 1,74 m2 en fonction de sa vitesse, pour deux de 0,3 et 0,38.

Frottement aérodynamique d'une citadine (en N)
Surface frontale = 1,74 m2 50 km/h 70 km/h 90 km/h 110 km/h 130 km/h
Cx = 0,38 76,5 150,0 248,0 370,4 517,3
Cx = 0,30 60,4 118,4 195,8 292,4 408,4

L'unité kWh/100 km étant l’équivalent d'une force de 36 N, les tableaux peuvent être écrits :

Perte énergétique d'origine aérodynamique d'un SUV (en kWh/100 km)
Surface frontale = 2,70 m2 50 km/h 70 km/h 90 km/h 110 km/h 130 km/h
Cx = 0,38 3,3 6,5 10,7 16,0 22,3
Cx = 0,30 2,6 5,1 8,4 12,6 17,6

ainsi que :

Perte énergétique d'origine aérodynamique d'une citadine (en kWh/100 km)
Surface frontale = 1,74 m2 50 km/h 70 km/h 90 km/h 110 km/h 130 km/h
Cx = 0,38 2,1 4,2 6,9 10,3 14,4
Cx = 0,30 1,7 3,3 5,4 8,1 11,3

Un litre d'essence représentant environ 10 kWh[b], le tableau devient :

Perte énergétique d'origine aérodynamique d'un SUV (en l/100 km)
Surface frontale = 2,70 m2 50 km/h 70 km/h 90 km/h 110 km/h 130 km/h
Cx = 0,38 0,33 0,65 1,07 1,60 2,23
Cx = 0,30 0,26 0,51 0,84 1,26 1,76

ainsi que :

Perte énergétique d'origine aérodynamique d'une citadine (en l/100 km)
Surface frontale = 1,74 m2 50 km/h 70 km/h 90 km/h 110 km/h 130 km/h
Cx = 0,38 0,21 0,42 0,69 1,03 1,44
Cx = 0,30 0,17 0,33 0,54 0,81 1,13
Efficacité énergétique des voitures thermiques en ville et sur autoroute[8].

Il reste à tenir compte de l'efficacité globale du véhicule, illustrée par le schéma ci-contre. Elle vaut de 13 à 20 % pour les véhicules thermiques et autour de 50 % pour les véhicules électriques (en tenant compte du chauffage, de la climatisation et des pertes du réseau électrique[9], mais en omettant le rendement de production de l'électricité — voir Avantages de la voiture électrique et Énergie grise énergétique).

Remarque
Les calculs sont effectués pour une vitesse constante. Dans le cas d'une rampe de vitesse linéaire en fonction du temps, telles que celles présentes dans les cycles normalisés NEDC par exemple, il reste néanmoins possible de déterminer un frottement aérodynamique moyen. Pour une rampe de vitesse linéaire entre les vitesses et , le frottement moyen vaut ainsi :

Estimation du gain en consommation dû aux gains en

Vitesse à laquelle la traînée aérodynamique égale celle de roulement (vitesse stabilisée, en palier)

En palier (et à vitesse stabilisée), on peut écrire que la force propulsive vaut [10].

équation où est la masse du véhicule, l'accélération de la pesanteur, le coefficient de résistance au roulement, la masse volumique de l'air, la vitesse du véhicule par rapport à cet air, la surface de référence du et le frontal du véhicule.


Lorsque (toujours en palier et à vitesse stabilisée) la traînée de roulement est égale à la traînée aérodynamique , on peut écrire :

Il est aisé de tirer de cette égalité la valeur de qui égalise traînée de roulement et traînée aérodynamique et de tracer le graphe ci-contre dessinant cette vitesse d'égalité en fonction du et pour différentes valeur du produit ( étant la masse du véhicule en Kg et son coefficient de résistance au roulement, celui-ci s'abaissant jusqu'à 0,006 pour les meilleurs trains de pneumatiques).

On tire facilement de la première équation que la variation relative de , c.-à-d. , vaut :

Lorsque l'on donne à sa valeur 9,81, à sa valeur 1,225 Kg/m3, et qu'on transforme les Km/h en m/s, on trouve que pour une vitesse stabilisée V en palier de 130 km/h :

Il convient de lier cette variation relative de la force propulsive à une variation relative de la consommation.

Une variation de la force propulsive produit bien une variation (dans le même sens) de la consommation : la consommation en litres par 100 km est en effet, en première approche et à un coefficient k près, liée au rendement du moteur, proportionnelle à la force propulsive[11].

Cependant une partie de l'énergie dépensée par le véhicule n'est pas liée à la distance parcourue ni à la force propulsive, c'est la partie de l'énergie dépensée pour mettre en action les accessoires (climatisation, éclairage, assistance de la direction, etc.). Sovran et Blasere[12] estiment cette énergie (ou cette consommation) à 6 % de l'énergie totale dépensée par le véhicule sur une autoroute urbaine (highway des États-Unis). Si l'on adopte cette estimation pour les trajets sur les autoroutes européennes (toujours à vitesse constante et en palier), on peut donc écrire :

étant la variation de consommation consécutive à une variation de l'aérodynamique du véhicule et étant la consommation en litres aux 100 Km du véhicule puisque la force de traînée totale (traînée de roulement + traînée aérodynamique) ne coûte que 94 % de la consommation.

On a donc :

Ceci nous permet d'écrire, en reprenant la valeur de calculée plus haut :

Si l'on symbolise par le coefficient qui précède et que l'on nomme ce coefficient Coefficient d'influence de l'aérodynamique sur la consommation, on peut écrire :

avec

Vitesse d'égalité des traînées de roulement et aérodynamique et coefficient d'influence de l'aérodynamique sur la consommation

Les courbes vertes du graphe ci-contre dessinent l'évolution de ce coefficient d'influence de l'aérodynamique sur la consommation en fonction du (pour 2 m² de surface frontale de référence) et en fonction du produit de la masse du véhicule (en Kg) par son coefficient de roulement (typiquement 0,006 pour les meilleurs trains de pneumatiques).

À titre d'exemple, pour une berline de masse , de coefficient de roulement , de et de surface frontale , en palier et à la vitesse de 130 km/h stabilisée : une modification relative n % de procure donc une modification relative 0,837 n % de la consommation.

Portance ou appui aérodynamique

Nez d'une F1 Renault R28, dessiné pour augmenter l'appui sur l'avant de la monoplace.

En mécanique des fluides, la force subie par un corps en mouvement dans un fluide peut se décomposer en deux : une composante verticale donc perpendiculaire à la direction du mouvement, , dénommée portance, et une composante parallèle, , dénommée portance latérale ; elles sont données par les formules[2] :

où :

, masse volumique de l'air (en kg/m3) ;
, vitesse du véhicule par rapport à l'air (en m/s) ;
, surface de référence (en m2) ;
et , les coefficients de portance (sans unité).

En aéronautique, la portance s'oppose au poids de l'aéronef et assure la sustentation. En automobile, les constructeurs cherchent à réduire ou annuler la portance aérodynamique, voire à créer (en compétition) une portance négative ou déportance, de façon à augmenter l'appui du véhicule. L'intérêt est d'augmenter à son tour l'adhérence des pneumatiques sur le sol, donc la force du freinage et les vitesses de passage en courbe[1].

La déportance est obtenue par une application particulière de l'effet de sol et/ou par des surfaces profilées (ailerons) présentant le plus souvent des fentes pour augmenter la déflexion aérodynamique et le coefficient de portance Cz. Toutefois, l'ajout de ces éléments s'accompagne nécessairement d'une augmentation du Cx et donc de la traînée ; à titre d'exemple, le Cx d'une Formule 1 est proche de 0,9. Les automobiles de compétition doivent donc trouver un compromis entre déportance et traînée[13].

Moments aérodynamiques

Les forces exercées par l'air autour de la carrosserie engendrent également des moments selon les trois axes du véhicule : un moment de roulis selon l'axe longitudinal x, un moment de tangage selon l'axe transversal y et un moment de lacet selon l'axe vertical z ; ces moments sont donnés par les formules suivantes[3] :

où :

, masse volumique de l'air (en kg/m3) ;
, vitesse du véhicule par rapport à l'air (en m/s) ;
, maître couple (en m2) ;
, voie (en m) ;
, empattement (en m) ;
, coefficient de moment en roulis (sans unité) ;
, coefficient de moment en tangage (sans unité) ;
, coefficient de moment en lacet (sans unité).

La connaissance de ces moments est plus particulièrement utile pour la dynamique du véhicule.

Histoire

Les premières préoccupations

La Jamais contente, parée de fleurs après son record de vitesse.

Très tôt dans l'histoire de l'automobile, les constructeurs se sont intéressés à l'aérodynamique de leurs modèles. L'un des premiers fut le Belge Camille Jenatzy qui en 1889 conçoit une automobile électrique profilée comme une torpille dans le but de battre des records de vitesse. Dénommée La Jamais contente, elle devient la même année la première automobile à franchir la barre symbolique des 100 km/h[14]. Le texte du brevet de Jenatzy no 281 660 du 26 septembre 1898 : « En résumé je revendique : Dans une voiture automobile, en vue de l'obtention de vitesses exceptionnelles, la disposition à l'avant de la voiture d'un bouclier ou coupe-vent terminé en pointe et formé par deux surfaces convexes s'élevant de manière à protéger jusqu'aux parties les plus élevées de la machine… ». En phase préparatoire à la réalisation d'une réplique une maquette au 1/5 a été réalisée et testée en soufflerie par des étudiants de l'UTC (Université de Technologie de Compiègne) sous la direction de Joël Debout le Cx avec conducteur est de 0,758[c].

Dans les années 1910, quelques dessinateurs s'intéressent également à l'aérodynamique des automobiles, à l'image de l'Alfa Romeo 40-60 HP dessinée par le carrossier Castagna, dont la carrosserie forme une carène profilée en forme d'aéronef[15]. Même si ces automobiles avant-gardistes demeurent marginales, elles traduisent une volonté des « grands » constructeurs automobiles de réduire la traînée : les pare-brise sont davantage inclinés, les roues sont carénées, etc[1].

Contrairement à l'aéronautique, l'automobile a pu, dès le début, profiter « d'un corps de doctrine, de dispositifs d'essais et d'un nombre considérable de résultats expérimentaux »[2] issus de l'aviation. Ces résultats ayant permis, entre autres, de démontrer que le meilleur profil vis-à-vis du Cx est a priori celui dit « en goutte d'eau »[d], l'ingénieur autrichien Edmund Rumpler met au point au début des années 1920 une automobile profilée en corps de moindre traînée. Testée en soufflerie par Volkswagen en 1979, la Rumpler Tropfenwagen (littéralement « voiture goutte » en allemand) disposait d'un Cx de seulement 0,28[16] ; Volkswagen n'obtint un meilleur coefficient qu'en 1988, avec la Passat[16].

Quelques visionnaires

Mathis 333, avec sa roue arrière unique. Noter la finesse de l'arrière du véhicule.
Conçue en 1921, la Rumpler Tropfenwagen disposait d'un Cx de seulement 0,28.

À la même époque, l'ingénieur hongrois Paul Jaray est le premier à noter que la forme d'un « corps de moindre traînée » est différente suivant qu'il se situe dans l'air (aérodyne) ou près du sol (automobile par exemple)[17]. En effet, la traînée d'un corps fuselé à proximité du sol augmente fortement par décollement de la couche limite.

Cette découverte faite, il réalise avec Wolfgang Klemperer, bien avant les constructeurs automobiles, des essais dans la soufflerie du comte Zeppelin à Friedrichshafen[17] ; le résultat est une automobile profilée à la manière d'une aile d'avion, la Ley T2, sans aspérités et dont tous les accessoires (phares, calandre, etc.) sont intégrés à la carrosserie. Son but était, selon Serge Bellu, « d'optimiser les performances, la consommation, la ventilation et le silence »[18].

Si le gain aérodynamique est majeur, la carrosserie dessinée par Jaray et Klemperer engendre de la portance et donc de la traînée induite par la formation de deux importants vortex latéraux. Pour résoudre ce problème, Mauboussin propose « une carrosserie en forme d'aile verticale qui [élimine] la traînée induite », puis, devant les problèmes de stabilité de route créés par cette solution, « un étagement des maîtres couples vers la poupe formant une dérive stabilisatrice[17] ».

Si les automobiles ont auparavant la forme d'une torpille, le dessin global est désormais celui d'un berlingot, à l'image de la Mathis 333, forme reprise par beaucoup de constructeurs automobiles de l'époque, surtout allemands, comme Mercedes-Benz, Opel ou Maybach[16],[19].

Les crises comme vecteurs de développement

Article de Everyday Science and Mechanics de 1931 s'intéressant aux automobiles « Streamlined ».

Les années 1930 marquent réellement le début de l'aérodynamique moderne. Alors que le « Jeudi noir » plonge l'industrie automobile dans la crise, au même titre que les autres secteurs économiques — ayant notamment pour conséquence l'augmentation du prix du pétrole —, les constructeurs américains opèrent une véritable révolution esthétique ; c'est la période du Streamline Moderne.

Outre le fait de renouveler le style des automobiles pour mieux séduire, l'intérêt est d'améliorer l'aérodynamique et ainsi de diminuer la consommation[20]. Le constructeur américain Chrysler est le premier à s'intéresser à ce mouvement et à produire en série une automobile s'en inspirant. En 1934, la Chrysler Airflow, signifiant littéralement « flux d'air » en anglais, devient rapidement l'emblème le plus expressif du courant Streamline Moderne. Malgré la crise, elle se révèle trop innovante pour susciter, au-delà du « succès d'estime », un succès commercial[20]. Elle marque pourtant le début de l'ère des designers aérodynamiciens et le phénomène Streamline se propage à l'Europe.

En France, Peugeot dévoile au Salon de Paris 1935, la 402, berline aux lignes fluides dénommées « fuseau Sochaux », marquée par une calandre arrondie, des ailes gonflées, une très longue carrosserie de six glaces, un pare-brise en coupe-vent en deux parties ainsi que des phares intégrés à la calandre[21].

Les années 1970 marquent à leur tour un tournant dans l'histoire de l'aérodynamique automobile. Alors que le monde connaît son premier choc pétrolier le , les constructeurs automobiles poussent plus loin l'aérodynamique de leurs véhicules ; le coefficient de traînée devient un critère important dans le cahier des charges. Le constructeur français Citroën décide de remplacer la DS — qui avait déjà franchi un pas grâce à l'ingénieur aéronautique André Lefèbvre, en contraignant l'architecture de l'automobile à l'aérodynamique et non l'inverse[22] — — par la CX, au nom évocateur de cette tendance[23].

La Formule 1, laboratoire de l'aérodynamique

La Ferrari 312 B est l'une des premières monoplaces à adopter un aileron arrière.

« L'aérodynamique est la partie où le plus gros gain en performance peut être fait, mais essayer de l'anticiper dans le but d'être compétitif est très difficile[13]. »

— Mike Gascoyne, 2002

En 1950, la Fédération internationale de l'automobile instaure le premier championnat du monde des pilotes de Formule 1. Ceux-ci disputent des Grands Prix à bord de monoplaces aux roues non-carénées, ce qui engendre une traînée particulièrement handicapante pour les performances. Le perfectionnement de l'aérodynamique devient donc au fil des années un enjeu majeur, au même titre que celui des suspensions ou de la motorisation.

Les débuts sont pourtant assez lents. Ce n'est qu'en 1966 qu'une première Formule 1 est testée en soufflerie. En 1968, le premier aileron arrière apparaît sur la Ferrari 312 ; les concepteurs de F1 se contentaient jusque là de réduire la traînée, sans voir que l'aérodynamique pouvait servir à augmenter l'appui en ajoutant des masses fictives (des forces aérodynamiques qui n'augmentent pas la masse et donc l'inertie du véhicule)[24].

La Lotus 79, l'une des premières wing-cars.

Par la suite vont naître les wing-cars, ou voitures à effet de sol, qui sont les premières monoplaces de Formule 1 dont l'intégralité (et plus seulement la carrosserie) est étudiée aérodynamiquement ; les pontons, notamment, prennent la forme d'ailes inversées. Ainsi, la forme des pontons sous la voiture rétrécit-elle l'espace entre le fond de la voiture et le sol avant d'élargir le passage. Cette particularité permet de bénéficier de l'effet Venturi, du nom de son inventeur qui avait montré que l'air, en passant par un tel chemin, crée une dépression. Dans le même temps, les côtés des pontons sont isolés des flux extérieurs par des « jupes » qui descendent jusqu'au sol. Ainsi les wing-cars bénéficient-elles d'un puissant phénomène aérodynamique qui leur permet de coller à la route dans les virages.

Parmi les premiers exemplaires, les Lotus 78 et Lotus 79, apparues en 1977, font preuve d'une incroyable efficacité, si bien qu'elles sont rapidement copiées par les autres écuries[25],[1].

Colin Chapman, l'ingénieur responsable de Lotus, est l'un des initiateurs de cette innovation en Formule 1. Il choisit de s'intéresser au soubassement des monoplaces jusqu'alors largement oublié. Conscient que la création de déportance engendre celle de traînée, néfaste à l'avancement de l'automobile, il est persuadé que le soubassement peut offrir une déportance intéressante et une traînée minimale[25]. Chapman réalise alors l'intérêt d'abaisser la garde au sol de la monoplace pour profiter de l'effet de sol[1].

À la suite de diverses interdictions et restrictions règlementaires de la FIA pour limiter l'efficacité des monoplaces — une garde au sol minimale, un fond plat, etc. — les ingénieurs cherchent à retrouver l'appui qu'ils ont perdu avec les nouvelles règles. C'est ainsi que naît à la fin des années 1980, et se développe dans les années 1990, le diffuseur[1]. Celui-ci est installé à l'arrière du fond plat imposé aux monoplaces, pour recréer l'effet de sol grâce à sa forme qui canalise l'air, à sa sortie à l'arrière des voitures.

Beaucoup d'autres éléments aérodynamiques, comme les déflecteurs ou plus récemment le système F-Duct, ont fait leur apparition en Formule 1 mais demeurent spécifiques à ce domaine de l'automobile, contrairement aux ailerons ou au diffuseur qui sont maintenant présents sur certains modèles de série. De fait, jusqu'au milieu des années 1970, la plupart des améliorations aérodynamiques des modèles de série proviennent des connaissances acquises en sport automobile à travers les courses de prototypes d'endurance ou les courses de Formule 1[16].

Des années 1980 à aujourd'hui

L'industrie automobile est durablement touchée par le choc pétrolier puis par la recession des années 1970. En conséquence, l'amélioration de l'aérodynamique automobile devient une réponse à la fois technique et marketing aux préoccupations des usagers[26]. Un des constructeurs à l'avoir très tôt compris est l'Allemand Audi. En 1982 est dévoilée l'Audi 100 (C3), dont le Cx de seulement 0,30 est le plus faible jamais atteint pour une automobile de série[16]. Cette prouesse pour l'époque est permise par le soin particulier apporté aux détails — qui représentent près de 6 % de la traînée[3] —, notamment au niveau des fenêtres, affleurantes à la carrosserie[16].

Afin de perfectionner leurs modèles, les constructeurs automobiles ont aujourd'hui systématiquement recours aux essais en soufflerie. Grâce à l'expérience ainsi acquise, les meilleures automobiles de série en termes d'aérodynamique obtiennent ainsi des valeurs de Cx proches de 0,25.

Néanmoins, la diminution du Cx n'est pas aisée pour des automobiles de série ; si l'aérodynamique automobile des premières années permet des progrès rapides pour atteindre des valeurs de l'ordre de 0,30, il faut attendre près de dix ans pour passer du 0,26 de l'Opel Calibra au 0,25 de la Honda Insight I, et encore autant pour le 0,24 de la Mercedes-Benz Classe E W212 coupé[27]. Quatre ans après, Mercedes sort la Classe CLA et la Classe C W205, actuelles détentrices du record sur une automobile de grande série[28].

L'EV1 de General Motors, première voiture électrique « moderne » deux places, a bien atteint un Cx de 0,19[29],[30] mais pour seulement seulement 1 117 exemplaires construits de 1996 à 1999.

De nos jours, le record du plus faible Cx obtenu par une automobile « grand public » est détenu par l'Aptera 2 Series, petite automobile à trois roues atteignant un Cx de 0,15. En véhicule classique à quatre roues, le concept car Mercedes-Benz Bionic, à la carrosserie inspirée d'un poisson-coffre, se distingue avec une valeur de 0,19.

Historique des records de Cx sur des modèles de série
Audi 100 (C3) Renault 25 Subaru XT[31] Opel Calibra General Motors EV1 Honda Insight Mercedes Classe E Mercedes - Classe CLA
Année de sortie 1982 1984 1985 1989 1996 1999 2009 2013
Coefficient Cx 0,30 0,28 0,29 0,26 0,19 0,25 0,24 0,23

Modèle:Message galerie

Influence de la géométrie d'une automobile sur son aérodynamique

Distribution des Cp sur une berline DrivAer fastback dans son plan de symétrie

Répartition des pressions (ou des ) sur une automobile

Le schéma ci-contre donne une répartition type des coefficients de pression dans le plan de symétrie d'une voiture routière fastback assez vertueuse, le modèle DrivAer. Ce modèle DrivAer a été créé par la Technische Universitat Munchen (TUM), en coopération avec deux grands constructeurs, et est basé sur les formes et dimensions de deux berlines routières typiques, l’Audi A4 et la BMW Série 3.

Profil de la partie arrière

Comparaison d'une carrosserie hatchback et semi-fastback.
Schéma des vortex générés à l'arrière d'une automobile.

Le dessin de la poupe d'un véhicule influence fortement sa résistance aérodynamique, en raison des turbulences générées dans cette partie. Le phénomène de décollement de la couche limite, source majeure de traînée, est notamment mis en jeu ; ce phénomène intervient lorsque les flux d'air laminaires ne suivent plus la carrosserie. Plus la zone de décollement est faible et plus la traînée sera réduite, d'où l'importance du lieu du décollement[3]. En théorie, la forme idéale pour la poupe du véhicule — connue sous le nom de « arrière de Kamm » — est un cône se rétrécissant avec un angle inférieur à 15°[3].

Le dessin de la descente de toit est particulièrement important pour l'aérodynamique. Généralement en automobile, les descentes de toit « aérodynamiques » adoptent un profil dit fastback caractérisées par une pente douce du toit au coffre. Plus concrètement, des études ont démontré que la traînée est minimale pour une inclinaison de la lunette arrière de 12°, et maximale pour 30°[4] :

  • pour un angle inférieur à 12°, l'air s'écoule naturellement sur la lunette et décolle en bout de véhicule ;
  • pour un angle compris entre 12° et 30°, l'air décolle partiellement de la paroi en haut de lunette, la recolle ensuite et décolle en bout de véhicule ;
  • au-delà de 30°, l'air décolle dès la fin du pavillon et demeure dans cet état, d'où un Cx particulièrement mauvais.

Hormis l'intérêt de diminuer la traînée, repousser la zone de décollement permet de limiter le dépôt de crasses sur la vitre arrière dû aux particules éjectées de la route par les roues et ramenées par les turbulences sur la plage arrière[3].

Par ailleurs, les flux d'air latéraux du véhicule peuvent être aspirés dans la dépression arrière et générer par conséquent des systèmes tourbillonnaires, appelés vortex, nuisibles à l'aérodynamique générale. Outre le dessin du coffre et de la descente de toit, celui des arêtes latérales de la carrosserie doit également être pris en compte pour réduire ce phénomène[3].

La contribution de l'arrière d'un véhicule deux volumes actuel (où le décollement se produit sur quasiment toute la hauteur de l'arrière) est estimée à 30 % du Cx d'un tel véhicule[32].

Contribution de la partie avant

Influence des formes avant et arrière sur le Cx frontal (d'après Walter E. Lay).

La partie avant d'un véhicule particulier représente en général près de 11 % du SCx, dont huit sont dus uniquement au refroidissement du moteur[4]. En effet, l'air entrant par la calandre du véhicule exerce une pression aérodynamique importante sur les parois du radiateur, du moteur et des conduits permettant de l'acheminer vers l'extérieur du compartiment moteur ; l'écoulement de l'air dans la partie avant y est donc très chaotique[3]. En théorie, il serait possible de réduire à zéro la traînée due au refroidissement du moteur, en utilisant l'énergie thermique gagnée par l'air de refroidissement[e].

Les 3 % restants, dus au profil de la proue du véhicule, sont induits par la rupture de pente au niveau de la calandre provoquant « l'apparition de structures tourbillonnaires »[4]. La hauteur Zs du point de stagnation, lieu sur la surface de la calandre où la vitesse locale de l'air est nulle, est par ailleurs particulièrement importante pour diminuer le Cx ; ce dernier est minimal pour un rapport Zs/Zv (où Zv est la hauteur du véhicule) proche de 0,06 et maximal pour 0,2[3].

Contrairement à l'intuition, la partie avant d'un véhicule particulier (ou avant-corps) n'est génératrice que d'un partie très faible de la traînée[f]. Au demeurant, les mesures aérodynamiques montrent assez que certaines ogives de fusées, par exemple, en subsonique, présentent des traînées de pression négatives, ce qui est plus contre-intuitif encore[33],[34]. Cette intuition fautive est encouragée par l'ensemble des constructeurs d'automobiles du début du 21e sciècle, qui produisent des véhicules à avant-corps « en coin », comme si ces avant-corps étaient chargés de « fendre l'air ». Un exemple symptomatique est la silhouette de la Citroën Xsara Picasso, qui est la même, mais inversée, que celle de la Schlörwagen de Karl Schlör qui avait obtenu, en 1939, un Cx très faible (voir images ci-dessous).

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Traînée des accessoires internes ou externes

Soubassement

Bien que les constructeurs automobiles ne s'y soient intéressés que tardivement, le soubassement peut représenter quant à lui jusqu'à 30 % de la traînée[3] en raison des différents organes mécaniques faisant obstacle au passage de l'air. Hormis abaisser la hauteur du véhicule pour limiter le volume d'air s'engouffrant sous l'automobile (ce qui limite la garde au sol), la solution pour diminuer la traînée du soubassement est de le caréner (rendre le fond le plus lisse possible) en réduisant au maximum la largeur des passage de roues.

Roues et passages de roues

Les constructeurs avaient l'habitude de caréner les roues de leurs modèles, à l'image de cette Panhard & Levassor Dynamic.

La contribution des roues et des garde-boue à l'aérodynamique d'un véhicule n'est pas négligeable, qui représente entre 15[4] et 20 %[3] de la traînée totale. Sur l’Audi A3, les roues et passages de roues comptent pour 30 à 35 % du Cx[35] ,[36]. En effet, la rotation de la roue fait apparaître des zones de turbulences et de recirculations. Pour limiter ces phénomènes, il suffit de caréner les roues et de réduire la cavité dans le garde-boue[3]. Cette solution est pourtant rarement appliquée, pour des raisons essentiellement esthétiques ; les roues arrière, à l'axe immobile, s'y prêtent pourtant, comme sur les Citroën DS et Ami 8.

Les formes irrégulières données aux enjoliveurs ou aux jantes pour des raisons esthétiques (ou plutôt de mode) créent également des perturbations de l'écoulement de l'air au niveau des roues. Afin de réduire les conséquences de ce phénomène sur la consommation, certains prototypes testent les jantes pleines, ou optimisées, notamment sur les véhicules électriques où l'enjeu de l'économie d'énergie est bien plus grand.

Détails de carrosserie

Les détails de carrosserie — l'arrondi bas de caisse, la rupture de pente au-dessus de la calandre, les montants de pare-brise, le culot de pavillon ou encore les montants de fenêtres — ont une contribution non négligeable à la traînée. En raison des petites turbulences qu'ils génèrent, les détails de carrosseries sont également étudiés pour améliorer le confort aéroacoustique des passagers.

Traînée de refroidissement

Le refroidissement du moteur augmente le frontal du véhicule de 0,02 à 0,06[36]. Il faut se souvenir, à ce sujet, que sur l’avion Mustang, le refroidissement du moteur (longuement travaillé par les ingénieurs) produisait de la traction (donc avait un négatif) du fait de l'éjection vers l'arrière, à forte vitesse, de l'air de refroidissement.

Rétroviseurs externes

Les rétroviseurs externes ne peuvent prétendre à un propre inférieur à 0,3[37]. Mais ils sont placés dans une région de forte survitesse (ce qui augmente leur Cx propre). Les rétroviseurs accroissent le frontal du véhicule de 0,01[36], soit, pour une berline assez vertueuse de 0,25 de , un accroissement de 0,01/0,25 = 4 %[38],[39],[40]. D'où l'intérêt que pourrait présenter le remplacement des rétroviseurs à miroir par des caméras.

Barres de toit

Les barres de toit augmentent le de 30 à 40 %[36] ,[41].

Coffre de toit

Le culot droit des coffres de toit et boîtes à skis ne cesse de surprendre les aérodynamiciens[36].

L'aileron, un appendice aérodynamique classique

Aileron déployé d'une Bugatti Veyron 16.4.

Nombreux sont les appendices aérodynamiques, dont l'aileron, reposant sur un principe physique simple, le principe de Bernoulli, qui définit que l'augmentation de la vitesse de l'air s'accompagne d'une diminution de sa pression statique[13]. Il s'agit de l'effet Venturi. Le fonctionnement de l'aileron est donc d'augmenter la vitesse du flux d'air passant dans sa partie inférieure de manière à créer une dépression « aspirant » l'aileron vers le sol, d'où l'augmentation d'appui[13]. Un appui supplémentaire peut être généré par l'inclinaison de l'aileron, au détriment néanmoins d'une dégradation de la traînée, due entre autres à la formation de tourbillons[42].

Comme évoqué précédemment, l'amélioration de la déportance par l'ajout d'un aileron engendre nécessairement une dégradation du Cx, d'autant plus grande que son inclinaison est importante. Le dimensionnement d'un aileron doit donc prendre en compte cet aspect et trouver le meilleur compromis entre l'appui L (lift) et la traînée D (drag). L'efficacité aérodynamique d'un aileron, défini par le rapport L/D, représente ce compromis ; plus ce rapport est élevé et plus les performances de l'aileron seront bonnes[13],[43]. En Formule 1, l'efficacité aérodynamique est proche de 3[13],[43].

Analyses expérimentales et numériques

Essais en soufflerie

Le gaz opaque permet de visualiser les flux d'air autour de la carrosserie.

Les essais en soufflerie constituent pour les constructeurs automobiles un moyen d'obtenir des résultats empiriques de la traînée aérodynamique du véhicule, des bruits aérodynamiques générés autour de la carrosserie ou encore des efforts verticaux ou transversaux — efforts mesurés grâce à des balances — induits par l'écoulement de l'air. Un gaz opaque ou des brins de laine placés sur la carrosserie permettent par ailleurs de visualiser les lignes de courant[44].

Bien qu'il ne soit pas rare d'utiliser des modèles réduits, les souffleries automobiles accueillent généralement des maquettes à l'échelle 1 et peuvent être équipées d'un plateau tournant permettant de simuler un vent latéral, ainsi que d'un sol défilant et d'un système permettant de faire tourner les roues des véhicules, de manière à reproduire le plus fidèlement possible le déplacement d'une automobile sur la route[44].

Computational Fluid Dynamics

La mécanique des fluides numérique traité de manière informatique, plus souvent dénommée CFD (pour « Computational Fluid Dynamics »), est une méthode de résolution numérique utilisée entre autres en aérodynamique automobile. Relativement récente puisque née dans les années 1970, cette méthode a pris de l'ampleur au fil des ans grâce aux progrès réalisés en informatique et permet aujourd'hui de résoudre des problèmes à géométrie complexe[1].

La CFD fonctionne donc grâce au calcul numérique ; le logiciel crée pour cela un modèle informatique de l'objet étudié, le divise en éléments finis — processus appelé « maillage » — et applique ensuite les lois mathématiques de la dynamique des fluides à chaque cellule[45]. Plus le maillage est fin (petits éléments), plus les résultats seront précis mais plus l'ordinateur aura besoin de ressources pour effectuer les calculs[g]. Le résultat est « une représentation très précise des gains ou pertes au niveau aérodynamique »[45].

Le calcul numérique a notamment trouvé sa place en Formule 1, où il permet de considérablement réduire les heures passées en soufflerie ou encore d'analyser l'aérodynamique des monoplaces en virage[46] ; les écuries y passent environ 12 000 heures pour un modèle[1], ce qui constitue une source importante de dépenses. Aujourd'hui, bien que certains tentent de se dispenser d'essais en soufflerie à l'instar dans les années 2010 de l'écurie de Formule 1 Virgin Racing, la CFD ne peut complètement s'affranchir de résultats expérimentaux[1],[45].

Notes et références

Notes

  1. Dans la littérature anglo-saxonne, le coefficient Cx est désigné par Cd pour « drag ».
  2. Voir notes sur la consommation des véhicules électriques.
  3. Visible à la Cité de l'automobile de Mulhouse.
  4. Erronément, puisque la forme des gouttes d'eau est sphérique jusqu'à un diamètre de 3 ou 4 mm, où elles commencent à se creuser sur l'avant.
  5. Ceci a été effectué, après de longs travaux d'ingénieurie, sur l'avion P-51 Mustang dont le système de refroidissement produisait une force de propulsion.
  6. L'intuition fautive pourrait être qualifiée de collisionnelle car l'on ressent, à tort, la partie avant du véhicule comme chargée de « faire la trace » (comme un soc de charrue) pour le reste du véhicule.
  7. À titre d'exemple, l'ordinateur utilisé par Renault F1 Team en 2010 est capable de réaliser plus de 38 millions d'opérations à la seconde.

Références

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  3. a b c d e f g h i j k l et m Pierre Duysinx, Performances du véhicule, ac.be, (lire en ligne [PDF]).
  4. a b c d et e Leclerc 2008.
  5. (en) « General Aerodynamic Principals », gmecca.com (consulté le ).
  6. « Les composantes de la traînée », volez.net (consulté le ).
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  8. (en) « Where the Energy Goes: Gasoline Vehicles », Département de l'Énergie des États-Unis, (consulté le ), cité et illustré dans : (en) Transportation Research Board (en), Tires and Passenger Vehicle Fuel Economy : Informing Consumers, Improving Performance, National Research Council, , 178 p., pdf, p. 40.
  9. Jean-Marc Jancovici, La voiture électrique sur jancovici.com.
  10. BARREAU & BOUTIN 2009.
  11. La consommation de carburant pour 100 km représente l'énergie dépensée pour parcourir cette distance. Or l'énergie dépensée en traînée pour parcourir ces 100 km en palier et à vitesse stabilisée est de F⋅100 km.
  12. Gino Sovran, Dwight Blaser, A Contribution to Understanding Automotive Fuel Economy and Its Limits, SAE International, 2003 [PDF].
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  14. « Caractéristiques de La Jamais Contente » [PDF], Energie Ouest Suisse (consulté le ).
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  32. Lionel Fiabane, Méthodes analytiques de caractérisation de structures cohérentes contribuant aux efforts aérodynamiques (thèse de doctorat en mécanique), polytechnique, 2010, Lire en ligne [PDF].
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  34. (en) Fluid-Dynamic Drag, (lire en ligne [PDF]), p. 3-12.
  35. D’après Pfadenhauer, Wickern & Zwicker (1996), 32,3 % de baisse de Cx sont en effet obtenus en supprimant les roues et en obturant les passages de roues sur cette Audi A3.
  36. a b c d et e Vehicle aerodynamics, The drag, Alessandro Talamelli, 2002, KTH-Mekanik, University of Bologna, Lire en ligne
  37. C'est le d'un disque à avant-corps caréné, essentiellement dû à son culot plan
  38. Hoerner estime que la pression dynamique moyenne s'appliquant aux rétroviseurs est 1,6 fois plus forte que celle de l'écoulement. De plus, il insiste sur le fait que les rétroviseurs entraînent une forte traînée additionnelle d'interférence avec le reste de la carosserie, traînée aditionnelle estimée par lui à 60 % de la traînée propre. Une adaptation du calcul d'Hoerner à deux rétroviseurs à avant-corps carénés modernes donne ainsi pour leur apport en une valeur de 0,015, soit 6 % du 0,25 d'un véhicule assez vertueux
  39. Hoerner et 1965 p250
  40. Hoerner et 1992 p12-5
  41. Si l’on compte deux barres de toit de 1,20 m de large et de 25 mm d’épaisseur posées sur le toit d’un véhicule assez vertueux de 2 m2 de surface frontale et de 0,25 de , on peut sommer les ainsi : 2*0,25 + 1,4 (2*0,025*1,20*1) ; dans cette équation 1,4 est un coefficient multiplicateur dû à la surpression dynamique créée par la surcélérité de l’air sur le toit du véhicule et 1 est le moyen des barres de toit. On trouve ainsi que le surcroît de dû aux barres de toit est 0,084, soit ~17 % du dudit véhicule (ceci sans tenir compte des fixations des barres de toit).
  42. « Dossier Aérodynamique en F1 », Go-F1.com (consulté le ).
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  46. Marc Limacher, « F1 - 2010 : soufflerie vs CFD », TomorrowNewsf1, (consulté le ).

Annexes

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Bibliographie

Document utilisé pour la rédaction de l’article : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • Cédric Leclerc, Réduction de la traînée d'un véhicule automobile simplifiée à l'aide du contrôle actif par jet synthétique (thèse de doctorat en dynamique des fluides), Institut de mécanique des fluides de Toulouse, , 330 p. (lire en ligne [PDF]). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
  • Jean-Pierre Brossard, Dynamique du véhicule : Modélisation des systèmes complexes, PPUR Presses Polytechniques, (ISBN 978-2-8807-4644-5, lire en ligne).
  • Serge Bellu, Histoire mondiale de l'automobil, Flammarion, (ISBN 978-2-0801-3901-6). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
  • Julien Trombini, Comprendre la Formule 1, Éditions ETAI, , 207 p. (ISBN 978-2-7268-9463-7).
  • S. F. Hoerner, Résistance à l'avancement dans les fluides, Paris, Gauthier-Villars, (OCLC 727875556, ASIN B07B4HR4HP).
  • (en) S. F. Hoerner, Fluid-dynamic drag : theoretical, experimental and statistical information, (OCLC 228216619).
  • Matthieu Barreau et Laurent Boutin, Réflexions sur l’énergétique des véhicules routiers, Paris, , 50 p. (lire en ligne [PDF]).

Articles connexes