Équatoria (bande dessinée)

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Équatoria
14e album de la série Corto Maltese
Scénario Juan Díaz Canales
Dessin Ruben Pellejero

Personnages principaux Corto Maltese

Éditeur Casterman
Première publication 2017
ISBN 978-2-203-12209-3
Nombre de pages 80 en couleurs
88 en noir et blanc

Prépublication Le Figaro Magazine
Albums de la série

Équatoria est un album de bande dessinée, de la série Corto Maltese. Publié en 2017, il est le deuxième de la série après la mort de Hugo Pratt. Ses auteurs sont Juan Díaz Canales et Ruben Pellejero. Il montre le marin maltais Corto Maltese sur les traces du royaume du prêtre Jean, puis traversant l'Afrique jusqu'en Équatoria.

Résumé[modifier | modifier le code]

À Venise, en 1911, Corto Maltese rencontre une journaliste britannique pour le National Geographic, Aïda. Il lui parle du royaume du prêtre Jean et l'invite à partir avec lui à Malte à la recherche du miroir de ce prêtre.

N'ayant pu débarquer à Malte, ils arrivent en Égypte, à Alexandrie. Corto Maltese y fait plusieurs rencontres et déjoue un attentat contre Winston Churchill pour sauver la vie d'Aïda qui l'interviewait.

Ils embarquent tous deux sur le bateau d'Henry de Monfreid, avec qui Aïda décide de rester pour un reportage sur ses aventures, pendant que Corto débarque avec une esclave à Zanzibar. Il y rencontre l'ancien trafiquant Tippo Tip, qui finance une expédition pour que la fille d'Emin Pacha puisse retrouver les restes de son père en Équatoria, à Wadelai (en), où il était gouverneur. Maltese dirige l'expédition. Malgré les turpitudes dues aux colonialistes britanniques, il mène à bien sa mission.

Analyse[modifier | modifier le code]

Personnalités historiques[modifier | modifier le code]

Comme dans d'autres épisodes de la série, Corto Maltese croise maintes personnalités historiques :

D'autres personnalités sont seulement évoquées, en particulier :

Allusions littéraires[modifier | modifier le code]

L'histoire est ponctuée d’allusions littéraires plus ou moins discrètes :

Allusions historiques[modifier | modifier le code]

Comme les autres épisodes de Corto Maltese, celui-ci regorge d'allusions historiques diverses :

Le « Miroir du Prêtre Jean »[modifier | modifier le code]

À Venise, Corto raconte à Aïda l'histoire d'un objet magique, le « Miroir du Prêtre Jean ». En 1165, à la suite de la défaite de la première croisade, circule en Europe une lettre adressée à l'Empereur de Byzance, signée par un certain prêtre Jean. Cet homme avait son royaume situé quelque part entre l'Afrique et l'Inde. Il dirigeait une armée puissante et redoutable domaines peuplés d'Amazones, de licornes et mille autres prodiges. Son principal trésor était un miroir magique, qui lui permettant d'observer n'importe quelle partie de son royaume. Selon le Maltais, Lord Byron, en fréquentant le monastère, découvrit un ouvrage qui lui permit d'en apprendre plus sur ce prêtre.

Représentation de Wang Khan (Toghril) sur une illustration du Livre des Merveilles de Marco Polo, XVe siècle.

Ce livre explique qu'il s'appelait Toghril et qu'il était un khan converti au christianisme nestorien. Ses dépouilles furent confiées au pape Innocent IV par le moine Jean de Plan Carpin. Ce dernier, qui fut un des premiers Européens à laisser un récit de voyage en Asie centrale, revenait alors de son voyage comme ambassadeur en Mongolie. Les reliques furent ensuite gardées dans un coffret recouvert d'argent et de pierres précieuses. Au fil du temps, les croyants commencèrent à attribuer des pouvoirs miraculeux au reliquaire, qui fut surnommé « le Miroir du Prêtre ». Par la suite, le pape donna l'objet à l'Ordre de Malte, en remerciement pour sa résistance lors du Grand Siège de Malte contre les Ottomans en 1565. Corto décide alors de se rendre à Malte.

Plus tard, lors d'un rêve, il voit la silhouette de La Valette (capitale maltaise) prendre la forme d'une femme, qui lui révèle ce qu'est devenu le reliquaire. En mai 1798, Napoléon Bonaparte est en route pour la campagne d'Égypte, quand il s'empare de l'île. C'est ainsi que débute la brève occupation française de Malte, pendant laquelle les français, aux dires de la femme, se débarrassèrent des os du prêtre. Ils fondirent alors l'argent du reliquaire et ne laissèrent qu'une seule pierre précieuse, un saphir bleu, dont la piste s'est perdue à Alexandrie. À la suite de l'invasion de cette ville par les Britanniques, le bijou est manifestement passé de main en main, jusqu'à entrer en possession d'un officier anglais. Tippo Tip, qui cherchait à le récupérer, le lui acheta et le fit incruster dans une théière.

Super Physicam Aristotelis, 1595, exemple de Miroirs des princes.

L'homme l'offrit ensuite à Corto, qui l'emporta avec lui jusqu'en Équatoria. Mais l'esclave profita de son sommeil pour partir avec. Finalement, à la fin de l'aventure, le marin lit sur un paquebot un livre envoyé par son ami Constantin Cavafy. Intitulé « Speculum Presbyter Iohannes », il s'agit d'un codex datant du XIIIe s, que l'on croyait perdu. C'est ce qu'on appelle un « Specula principium » (Miroirs des princes) : il a pour but d'apprendre aux princes médiévaux comment bien gouverner. D'après le poète, ce document constitue le vrai « Miroir du Prêtre Jean », que Corto cherchait.

Alexandrie[modifier | modifier le code]

À Alexandrie, Corto quitte la ville en empruntant les galeries des Catacombes de Kom El Shoqafa. Il s'agit du plus grand site funéraire romain d'Égypte connu à ce jour, construit à la fin du Ier siècle.

Emin Pacha[modifier | modifier le code]

Bien qu'Emin Pacha n'apparaisse pas physiquement dans cette histoire, à l'époque de laquelle il est décédé, il y joue un rôle important. En effet, le Maltais accompagne sa fille Ferida dans une expédition jusqu'en Équatoria, afin de récupérer ses restes et les ramener dans sa Silésie natale[b]. L'histoire de cette figure historique est brièvement racontée dans cet épisode par Tippo Tip. Né sous le nom d'Eduard Schnitzer, il fit partie de la résistance à la rébellion islamiste du Mahdi. Cet événement, qui débuta en 1881, secoua la région du Haut-Nil, coupant Equatoria du monde dès 1883. L'expédition de secours à Emin Pacha (1886 - 1889) fut dirigée par Henry Morton Stanley, ce qui permit de l'amener sain et sauf jusqu'à Zanzibar avec sa fille Ferida.

Mais en 1890, Emin Pacha envoya cette dernière en Allemagne, sous la garde d'une sœur. Puis, au service de la Compagnie de l'Afrique orientale allemande, il repartit en Afrique afin d'annexer de nouveaux territoires pour l'Empire du Kaiser. Seulement, au bout de plusieurs mois de mésaventures, son expédition a été décimée par les attaques de tribus hostiles et la malaria. Ce qui n'empêcha pas Emin de poursuivre son but... jusqu'à être à Kinena (État indépendant du Congo) par les soldats arabo-swahilis des marchands arabes d'esclaves de la région de Kibonge, sûrement le 28 octobre 1892.

En 1911, un trafiquant (sans doute un de ses meurtriers) révèle à Corto parti sur ses traces que ses fidèles compagnons ont enseveli son cœur sous un arbre et ont acheminé son corps séché avec du sel (comme pour David Livingstone) jusqu'à fort Wadelai, en Équatoria.

Allusions à d'autres épisodes[modifier | modifier le code]

Dans cette histoire se déroulant en 1911, Corto rencontre le lieutenant Tenton, du King's African Rifles. Il le reverra plus tard en Tanzanie dans l'histoire Les Hommes-léopards du Rufiji (histoire réalisée par Hugo Pratt, publiée dans le volume Les Éthiopiques), en 1918. Ce même militaire est également présent dans d'autres histoires de Pratt se déroulant en Afrique : Ann de la jungle et Les Scorpions du désert (série se déroulant au début des années 1940).

Jugements sur l'album[modifier | modifier le code]

Pour Olivier Delcroix, ce « nouvel épisode de l'aventurier charmeur » est « une grande réussite ». Dès le début de l'album, l'entrée en matière « surréaliste » emmène Maltese « vers des horizons aussi littéraires que poétiques »[1].

Anne Douhaire trouve aussi que c'est « une expédition BD réussie », avec une bonne dose d'aventure, et « ce qu'il faut de mystère et d'ésotérisme ». Elle juge le propos clair, l'intrigue bien menée et subtile[2].

Publication[modifier | modifier le code]

L'épisode est prépublié à partir du dans Le Figaro Magazine.

Il paraît en album en septembre suivant aux éditions Casterman, en deux versions : une version noir et blanc, et une version en couleurs.

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Henry de Monfreid évoque à Aïda qu'il a hérité son goût pour l'art de son père. Ce peintre était ami de Paul Gauguin, entre autres artistes.
  2. La province de Silésie (actuellement en Pologne) était alors rattachée au royaume de Prusse.

Références[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]