Élections législatives de 1979 aux Nouvelles-Hébrides

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Élections législatives de 1979 aux Nouvelles-Hébrides
39 sièges, majorité absolue à 20 sièges
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Corps électoral et résultats
Inscrits 52 636
Votants 47 541
90,3 %
Votes exprimés 47 122
Vanua'aku Pati – Walter Lini
Voix 28 636
60,8 %
Sièges obtenus 25 en augmentation 25
Partis modérés
Voix 13 133
28,0 %
Sièges obtenus 11 en diminution 27
Ministre-en-chef
Sortant Élu
Gérard Leymang
Union tan
Walter Lini
Vanua'aku Pati

Des élections législatives ont lieu aux Nouvelles-Hébrides en . Il s'agit des troisièmes élections nationales dans le pays, condominium franco-britannique qui se prépare à accéder à l'indépendance. Les élections doivent amener la formation d'un gouvernement assurant la transition finale vers cette indépendance, qui est proclamée en . Le pays devient alors le Vanuatu[1],[2].

Deux grands mouvements politiques participent aux élections. Le Vanua'aku Pati (Parti de Notre Terre), à dominante anglophone, a été le moteur du mouvement anticolonial. Face à lui, les francophones, davantage rétifs à une indépendance rapide, et le plus souvent attachés à la relation avec la France, se rassemblent pour la plupart en un Parti fédéral des Nouvelles-Hébrides[3],[4],[5]. Par ailleurs, participent à l'élection divers mouvements régionalistes, autonomistes, voire sécessionnistes, souvent partisans du maintien de la 'coutume' (kastom). Tel est le cas des mouvements Nagriamel, John Frum et Kapiel, sur les îles de Tanna et d'Espiritu Santo, sécessionnistes et généralement francophiles ; s'opposant à une indépendance du pays dans son ensemble, qui verrait le pouvoir politique remis aux mains d'une élite à Port Vila, ils font cause commune dans une certaine mesure avec les francophones rétifs à une indépendance immédiate[6].

Résultats[modifier | modifier le code]

Résultats nationaux[modifier | modifier le code]

Résultats[7]
Parti Voix % Sièges +/-
Vanua'aku Pati 28 636 60,77 25 en augmentation 25
Parti fédéral des Nouvelles-Hébrides 5 742 12,19 5 Nv
Parti modéré 2 731 5,80 2 Nv
Namangi-Aute 1 985 4,21 2 Nv
Mouvement John Frum 1 050 2,23 1 Nv
Kapiel 985 2,09 1 Nv
Natui Tanno 719 1,53 1 Nv
Kastom 683 1,45 0 Nv
Natatok 640 1,36 0 en diminution 5
Tabwemassana 155 0,33 0 en stagnation
Indépendants 3 796 8,06 2 en stagnation
Votes valides 47 122 99,12
Votes blancs et nuls 418 0,88
Total 47 540 100 39 en augmentation 1
Abstentions 5 096 9,68
Inscrits / participation 52 636 90,32

Analyse[modifier | modifier le code]

Le taux de participation est de 90,3 % des quelque 53 000 inscrits[8]. Le Vanua'aku Pati obtient vingt-six sièges (dont un revenant au mouvement Natuitanno, qui fusionne avec le VP), soit la majorité absolue des trente-neuf sièges à pourvoir au Parlement. Les treize sièges restants sont répartis entre le Parti fédéral, les autonomistes, et deux députés sans étiquette. La majorité des députés porte donc le pasteur Walter Lini, chef du Vanua'aku Pati, au poste de Premier ministre[3],[6]. Vincent Boulekone, député sans étiquette de l'île de Pentecôte, est quant à lui élu chef de l'opposition parlementaire[9].

Résultats par circonscription[modifier | modifier le code]

Les résultats sont les suivants[8] :

Ambae / Maewo : 3 députés

Candidat Parti Voix % Résultat
Onneyn Tahi VP 1184 31,2 % élu
Thomas Tungu Parti modéré 815 21,4 % élu
Judah Vira VP 683 18,0 % élu
R. Wilson VP 662 17,4 %
J.H. Bihu sans étiquette 453 11,9 %

Ambrym : 2 députés

Candidat Parti Voix % Résultat
Amos Andeng PFNH 1163 41,5 % élu
Jack Hopa VP 952 34,0 % élu
Kai Patterson VP 685 24,5 %

Autres îles du sud : 1 député

Candidat Parti Voix % Résultat
John Naupa VP 515 61,1 % élu
Jean-Marie Léyé Parti modéré 257 30,5 %
W. Mete sans étiquette 71 8,4 %

îles Banks et Torrès : 2 députés

Candidat Parti Voix % Résultat
George Worek VP 866 42,5 % élu
Norman Roslyn VP 769 37,8 % élu
A. Laloyer sans étiquette 294 14,4 %
Luke Dini sans étiquette 108 5,3 %

Éfaté rurale : 3 députés

Candidat Parti Voix % Résultat
Donald Kalpokas VP 1362 32,1 % élu
George Kalkoa VP 1266 29,6 % élu
Nanua Albert VP 672 15,8 % élu
M. Tangarasi sans étiquette 411 9,6 %
George Kalsakau Natatok Éfaté 300 7,1 %
Jack Kalotiti Natatok Éfaté 180 4,2 %
D. Laouto Natatok Éfaté 63 1,5 %

Épi : 1 député

Candidat Parti Voix % Résultat
Jack Taritonaa VP 840 73,0 % élu
J. Louis Parti modéré 311 27,1 %

Luganville : 2 députés

Candidat Parti Voix % Résultat
Georges Cronsteadt Parti modéré 886 38,1 % élu
Kalmer Vocor Natuitanno 719 30,9 % élu
C. Tamata VP 541 23,3 %
Louis Vatou Tabwemassana 155 6,7 %

Malekula : 5 députés

Candidat Parti Voix % Résultat
Jimmy Simeon VP 1366 19,6 % élu
Keith Obed VP 1170 16,9 % élu
Sethy Regenvanu VP 1100 15,9 % élu
Gérard Leymang Namangi-Aute 1044 15,0 % élu
Aimé Maléré Namangi-Aute 941 13,6 % élu
A. Rantes VP 804 11,6 %
J.P. Arnhabat VP 244 3,6 %
S. Shem sans étiquette 145 2,1 %
P. Barthélémy sans étiquette 128 1,9 %

Paama : 1 député

Candidat Parti Voix % Résultat
Edward Harris VP 687 70,0 % élu
D. Isso PFNH 265 27,0 %
H. Collins sans étiquette 30 3,1 %

Pentecôte : 3 députés

Candidat Parti Voix % Résultat
Walter Lini VP 1393 34,1 % élu
Vincent Boulekone sans étiquette 1042 25,5 % élu
Samuel Bule VP 646 15,8 % élu
J. Melten VP 539 13,2 %
F. Buleuru Parti modéré 462 11,3 %

Port-Vila : 4 députés

Candidat Parti Voix % Résultat
Kalpokor Kalsakau VP 1344 28,3 % élu
Guy Prévot PFNH 1293 27,2 % élu
Albert Sande VP 1113 23,4 % élu
Maxime Carlot sans étiquette 714 15,0 % élu
P. Wawasse sans étiquette 187 3,9 %
W. Tulangi Natatok 97 2,0 %

Santo rurale : 5 députés

Candidat Parti Voix % Résultat
Alfred Maliu PFNH 830 13,9 % élu
Harry Karaeru PFNH 801 13,4 % élu
Thomas Reuben VP 767 12,8 % élu
Jole Antas VP 757 12,7 % élu
War Nalan PFNH 755 12,6 % élu
Sela Molisa VP 757 12,1 %
M. Tacetamata VP 706 11,8 %
Ravou Panpan PFNH 635 10,6 %

îles Shepherd : 2 députés

Candidat Parti Voix % Résultat
Kenneth Tariliu VP 853 49,4 % élu
Fred Timakata VP 659 38,2 % élu
W.H. Roy sans étiquette 213 12,3 %

Tanna : 5 députés

Candidat Parti Voix % Résultat
Alexis Yolou Mouvement John Frum 1050 19,1 % élu
Willie Korisa VP 994 18,1 % élu
Charley Nako Kapiel 968 17,6 % élu
John Louhman VP 959 17,4 % élu
Gideon Nampas VP 831 15,1 % élu
T. Naprapor « Kastom » 683 12,4 %
P. Saba Kapiel 17 0,3 %

Suites[modifier | modifier le code]

Alexis Yolou, député de Tanna pour le mouvement John Frum, est tué le à l'âge de 30 ans, presque certainement assassiné par des activistes du Vanua'aku Pati en raison de son militantisme contre l'indépendance et en faveur du séparatisme des îles Taféa[10],[11]. Jean-Marie Léyé, de l'Union des partis modérés, remporte l'élection partielle pour ce siège le [12],[13].

En juillet 1980, au moment de l'indépendance du pays, Ati George Sokomanu, député d'Éfaté pour le Vanua'aku Pati, démissionne du Parlement pour être élu président de la République[14]. Dick Poilapa, du Vanua'aku Pati, remporte l'élection partielle pour ce siège le [12],[13].

Georges Cronsteadt et Guy Prévot, respectivement député de Luganville pour l'Union des Partis modérés et député de Port-Vila pour le Parti fédéral des Nouvelles-Hébrides, qui ont la nationalité française, sont déchus et expulsés du pays par le gouvernement en après la répression du mouvement sécessionniste sur Espiritu Santo, que la France est accusée d'avoir soutenu[9]. Sela Molisa et Barak Sopé, tous deux du Vanua'aku Pati, remportent respectivement ces sièges lors des élections partielles le et le [12],[13].

Entre septembre et novembre 1980 se tiennent les procès des participants à la sécession de Santo. Trois députés sont condamnés à des peines de prison ferme : Alfred Maliu et Albert Ravutia cinq ans chacun et Aimé Maléré deux ans et demi. L'ancien député Jimmy Stevens est quant à lui condamné à quatorze ans et demi de prison[15]. Le député Thomas Tungu est condamné à deux ans de prison ferme pour recel de biens volés à Luganville pendant la sécession[16]. Le député, pasteur et chef coutumier Amos Andeng, de l'île d'Ambrym, est arrêté à son tour à la fin de l'année 1980, et condamné lui aussi à une peine de prison ferme pour complicité dans les événements sécessionnistes à Santo[17],[18]. Enfin, au début de l'année 1981, le député Charlie Nako est condamné à une peine de prison avec sursis pour incitation à l'émeute et participation à des émeutes à Tanna ; le futur député et futur président de la République Jean-Marie Léyé est condamné à cette même occasion à un an de prison ferme pour incitation à la sécession à Tanna[19].

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Élise Huffer, Grands hommes et petites îles : La politique extérieure de Fidji, de Tonga et du Vanuatu, Paris : Orstom, 1993, (ISBN 2-7099-1125-6).
  2. (en) William F.S. Miles, Bridging Mental Boundaries in a Postcolonial Microcosm: Identity and Development in Vanuatu, Honolulu : University of Hawaii Press, 1998, (ISBN 0-8248-2048-7).
  3. a et b Vanuatu : élections du , Union interparlementaire.
  4. É. Huffer, op.cit.
  5. W.F.S. Miles, op.cit.
  6. a et b (en) Les partis politiques du Vanuatu, Université du Pacifique Sud.
  7. Charles Zorgbibe (1981) "Vanuatu, naissance d'un état", Économica, p. 110–115.
  8. a et b Zorian Stech, Une confrontation comme nulle autre dans le Pacifique : la France, la Grande- Bretagne et la vie politique au condominium franco-britannique des Nouvelles- Hébrides (1945-1980), thèse de doctorat, université de Montréal, avril 2017, p. xiii-xviii.
  9. a et b (en) "Boulekone on 'surviving colonial mentality'", Pacific Islands Monthly, vol. 52, no 3, mars 1981, p. 14.
  10. (en) Joël Bonnemaison, The Tree and the Canoe: History and Ethnogeography of Tanna, University of Hawaii Press, 1994, p. 296-299.
  11. (en) "A close look at Port Vila's 'Four O'Clock Follies'", Pacific Islands Monthly, août 1980, p. 18.
  12. a b et c « Conseil des élections », Journal officiel de la république de Vanuatu, , p. 10.
  13. a b et c (en) "Pacific Report", Pacific Islands Monthly, vol. 53, no 10, octobre 1982, p. 5.
  14. (en) "Pacific Report", Pacific Islands Monthly, vol. 53, no 9, septembre 1982, p. 6.
  15. Zorian Stech, Une confrontation comme nulle autre dans le Pacifique, op. cit., p. 345-347.
  16. (en) Michael G. Morgan, The politics of memory among the Churches of Christ in northern Vanuatu, thèse de doctorat, Université nationale australienne, 2003, p. 205.
  17. « Querelles tribales et répression », Le Monde, .
  18. (en) "Vanuatu Opposition MPs take their seats", Pacific Islands Monthly, vol. 52, no 9, septembre 1981, p. 6.
  19. Howard Van Trease et Michelle Craw, La politique mélanesienne: Stael Blong Vanuatu, université du Pacifique Sud, 1995, p. 56.