Église catholique en Tunisie

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

L'Église catholique en Tunisie (en arabe : الكنيسة الكاثوليكية في تونس, translittéré : alkanisat alkathulikiat fi tunis), désigne l'organisme institutionnel et sa communauté locale ayant pour religion le catholicisme en Tunisie.

L'Église catholique en Tunisie est formée d'une seule circonscription ecclésiastique qui n'est pas soumise à une juridiction nationale au sein d'une Église nationale mais est soumise à la juridiction universelle du pape, évêque de Rome, au sein de l'« Église universelle[1] ».

En étroite communion avec le Saint-Siège, l'archevêque de Tunis est membre d'une instance de concertation, la conférence des évêques de la région Nord de l'Afrique (C.E.R.N.A.), qui réunit les épiscopats du Maroc, de l'Algérie, de la Tunisie, de la Libye et du Sahara occidental.

L'Église catholique est autorisée en Tunisie.

L'Église catholique est une communauté religieuse minoritaire de ce pays.

Législation en matière religieuse[modifier | modifier le code]

La charia autour de la Tunisie
  • Pays membre de l'Organisation de la coopération islamique où la charia ne joue pas un rôle dans le système judiciaire
  • Pays où la charia s'applique aux questions de statut personnel (mariage, divorce, héritage et autorité parentale)
  • Pays où la charia s'applique intégralement, aussi bien aux questions de statut personnel qu'aux procédures pénales
  • Pays avec des variations régionales dans l'application de la charia

La Constitution de la Tunisie stipule que[2] [3],[4]:

  • Préambule : « Exprimant l'attachement aux enseignements de l'islam (...) notre identité arabo-musulmane. Afin de consolider notre appartenance à la Ummah islamique (...) œuvrant à soutenir l'Union maghrébine (...) entre les peuples musulmans »
  • Art. 1 : « La Tunisie est un État libre, l'islam est sa religion »
  • Art. 2 : « La Tunisie est un État à caractère civil »
  • Art. 4 : « Le drapeau comporte un croissant rouge »
  • Art. 6 : « L'État est le gardien de la religion. Il garantit la liberté de croyance et de conscience et le libre exercice des cultes; il est le garant de la neutralité des lieux de culte par rapport à toute instrumentalisation partisane. L'État s'engage à diffuser les valeurs de modération et de tolérance, à protéger le sacré et à interdire d'y porter atteinte. Il s'engage à interdire les campagnes d'accusation d'apostasie [Takfir] et l'incitation à la haine et à la violence. Il s'engage également à s'y opposer »
  • Art. 39 : « L'État veille à enraciner l'identité arabo-musulmane »
  • Art. 74 : « La candidature à la présidence de la République est un droit pour tout électeur musulman ».

La Constitution de 2014 maintient la religion islamique comme la religion d'État mais après d’âpres débats, elle ne fait pas référence au droit islamique, la charia[5],[6] qui veille au respect des hadiths[7] (propos attribués à Mahomet et rapportés par divers témoins) interdisant l'apostasie sous peine de mort[8].

La Constitution tunisienne ne restreint donc pas la conversion d'un musulman à la foi catholique[9], ni le prosélytisme[10] d'une religion autre que l'islam.

La liberté de religion[11] pour l’Église catholique est encadrée par le modus vivendi de 1964 entre le Saint-Siège et la Tunisie : l’Église catholique est officiellement reconnue et autorisée à gérer des lieux de cultes et des institutions sociales mais n'est pas autorisée à exprimer publiquement sa foi catholique, comme par exemple par des processions publiques, ni de faire du prosélytisme[12].

Si la charia n’est pas mentionnée comme une source de droit, elle est néanmoins en partie incorporée aux lois réglementant le statut personnel (mariage et succession), car selon Fadhel Achour, secrétaire général de l’Union des imams, la laïcité en Tunisie est impossible parce que la Tunisie est historiquement « une nation musulmane »[13],[14].

En Tunisie, les deux mariages existent, religieux et civil. L'interdiction à une Tunisienne musulmane d'épouser un catholique (Tunisien ou non) est prescrite par le Coran :

« ne donnez point vos filles aux idolâtres, jusqu’à ce qu’ils aient embrassé votre croyance » - sourate n°2, verset n°221[15],[16].

Depuis 1969, le CSP (Code du statut personnel) à propos du mariage entre une musulmane et un non-musulman a été interprété par les tribunaux comme une reconnaissance de l'interdiction donnée par le droit musulman en la matière[17]. Ce raisonnement a été approuvé le par une circulaire du ministère de la Justice qui, afin « d'éloigner les côtés négatifs de l'Occident »[18], a fait interdire les mariages entre musulmanes et non-musulmans[19] et a jugé nul les mariages mixtes où le conjoint ne s'est pas converti à l'islam[20] et où une attestation de conversion n'est pas fournie[18].

Pour qu'un mariage civil soit retranscrit et reconnu en Tunisie, toute Tunisienne musulmane épousant un catholique (ou autre non-musulman) devaient fournir le certificat de conversion à l'islam de leur mari. Mais même si depuis le 13 septembre 2017, une loi a aboli la circulaire, les huissiers-notaires refusent de marier sans certificat[21],[22].

En matière successorale, avant 2017, les tribunaux refusaient tout droit à l'héritage aux personnes non-musulmanes mariés à l'étranger à une personne musulmane[20]. Si l'héritière est musulmane, elle hérite de la moitié de ce qui revient à un homme[23]:

« au fils, une part équivalente à celle de deux filles » - sourate 4, verset 11 [24],[25].

En matière politique, les catholiques tunisiens n'ont pas de représentation.

Catholicisme[modifier | modifier le code]

L'Église catholique utilise un seul rite liturgique en Tunisie, le rite latin.

La cathédrale Saint-Vincent-de-Paul de Tunis est depuis 1964 la seule cathédrale catholique de la Tunisie.

Diocèses[modifier | modifier le code]

L’Église catholique en Tunisie ne comprend actuellement qu’un seul archevêché, dans la capitale, Tunis :

Il n'y a pas de juridictions catholiques de rite oriental, ni de juridictions pré-diocésaines ou autres juridictions exemptées en Tunisie.

Comme cet unique épiscopat n'a aucune conférence nationale, il participe à la conférence des évêques de la région Nord de l'Afrique (C.E.R.N.A.) avec les épiscopats des circonscriptions ecclésiastiques en Algérie, Libye, Maroc, Tunisie et au Sahara occidental, formant la conférence du "Grand Maghreb" (région arabe à l'ouest de l’Égypte).

Il existe également une nonciature apostolique (représentation diplomatique du pape au niveau des ambassades d'État) en Tunisie, qui cependant dépend de la nonciature apostolique de l'Algérie voisine (à Alger).

Toutes les anciennes juridictions disparues sont les précurseurs des sièges actuels (territorial (résidentiel) ou, pour la plupart, titulaires)[26].

Archidiocèse[modifier | modifier le code]

En Tunisie, les catholiques ne disposent que d'un seul diocèse - l'archidiocèse de Tunis. En conséquence, la seule cathédrale catholique est celle de Saint-Vincent de Paul à Tunis. L'archidiocèse de Tunis gère 12 églises, 9 écoles, plusieurs bibliothèques et 2 dispensaires[27]. En plus de célébrer des offices religieux, l’Église catholique a ouvert un monastère, organisé des activités culturelles et organisé des œuvres de bienfaisance dans l’ensemble du pays[27]. À l'occasion, des groupes religieux catholiques organisent des offices dans des résidences privées ou dans d'autres lieux[27].

Sièges titulaires[modifier | modifier le code]

Ecclésia[modifier | modifier le code]

La Tunisie compte environ 20 000 catholiques dans ce pays à dominance islamique. Les catholiques constituent la majorité (environ 20 000 sur 25 000) des chrétiens du pays[27]. Cependant, seulement environ 500 de ces catholiques pratiquent régulièrement[27].

Dialogue interreligieux[modifier | modifier le code]

Le pape Jean-Paul II s'est rendu en Tunisie le 15 avril 1996 pour apporter son soutien à l'Église et a appelé à un dialogue pacifique entre musulmans et chrétiens en Afrique du Nord[28],[29].

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Références[modifier | modifier le code]

  1. « Catéchisme de l'Église Catholique », sur vatican.va (consulté le )
  2. « Tunisie Constitution du 27 janvier 2014. », sur mjp.univ-perp.fr, (consulté le )
  3. « Constitution de la République Tunisienne », sur wipo.int, (consulté le )
  4. « Constitution de la République Tunisienne de 2014 », sur legislation.tn, Journal Officiel de la République Tunisienne, (consulté le )
  5. « L’islam dans les Constitutions des pays du monde musulman », sur la-croix.com, (consulté le )
  6. « La Tunisie tourne le dos à la charia », lemonde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  7. « Le sang d'un musulman peut être versé pour celui qui s'éloigne de l'islam et quitte les musulmans », Sahîh Bukhari, vol. 9, livre 83, numéro 17, rapporté par Abdullah ou encore « Celui qui change de religion, tuez-le », Sahîh Bukhari, vol. 9, livre 84, numéro 57, rapporté par A'krama Mouli Ibn Abbas
  8. (en) Human Rights Watch | 350 Fifth Avenue et 34th Floor | New York, « The Problem with Tunisia’s New Constitution », sur Human Rights Watch, (consulté le )
  9. « Observatoire de la liberté religieuse Tunisie », sur liberte-religieuse.org
  10. « Prosélytisme », sur la-croix.com, (consulté le )
  11. (en) « Freedom in the World 2015 Tunisia », sur freedomhouse.org, (consulté le )
  12. Amandacomacn, « Des nouvelles de la l’AED: Tunisie », sur Aide à l'Église en Détresse, (consulté le )
  13. (en) Alessandra Bocchi, « How religiously free is the Arab world's most democratic country? », sur alaraby (consulté le )
  14. (en) « Bureau of Democracy, Human Rights and Labor International Religious Freedom Report for 2014 Tunisia », sur state.gov, (consulté le )
  15. Verset 221 de la sourate 2 du Coran (Wikisource).
  16. Verset 221 de la sourate 2 du Coran (Wikisource).
  17. Mohamed-Chérif Férjani, Islamisme, laïcité, et droits de l'homme, éd. L'Harmattan, Paris, 1991, p. 278 (ISBN 2738410251).
  18. a et b Claude Liauzu, Histoire des migrations en Méditerranée occidentale, éd. Complexe, Bruxelles, 1996, p. 236 (ISBN 2870276087).
  19. [PDF] Franck Frégosi et Malika Zeghal, Religion et politique au Maghreb : les exemples tunisien et marocain, éd. Institut français de relations internationales, Paris, mars 2005, p. 20.
  20. a et b Sophie Bessis, « Le féminisme institutionnel en Tunisie : le féminisme bourguibien », CLIO HFS, n°9/1999, 22 mai 2006.
  21. « En Tunisie, le mariage des femmes avec des non-musulmans n'est plus interdit », sur leparisien.fr, Le Parisien, (consulté le )
  22. « Le parcours du combattant d’une Tunisienne pour épouser un non musulman », sur leparisien.fr, le Parisien, (consulté le )
  23. « Tunisie : « L’égalité entre femmes et hommes dans l’héritage est un droit, et non une faveur » », sur npa2009.org, 2018-03-23cet19:583600 (consulté le )
  24. Verset 11 de la sourate 4 du Coran (Wikisource).
  25. Verset 11 de la sourate 4 du Coran (Wikisource).
  26. http://www.gcatholic.org/dioceses/country/TN-type.htm GCatholic – data for all sections
  27. a b c d et e International Religious Freedom Report 2007: Tunisia. United States Bureau of Democracy, Human Rights and Labor (en) (September 14, 2007). This article incorporates text from this source, which is in the public domain.
  28. William D. Montalbano, Pope Seeks Tolerance in Visit to Tunisia. Los Angeles Times. April 13, 1966
  29. William D. Montalbano. Pope Urges Dialogue With Muslims. Los Angeles Times. April 15, 1996. There are an estimated 8.5 million Muslims in Tunisia

Liens externes[modifier | modifier le code]