Épice

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Une épice est une matière organique d'origine végétale odorante ou piquante, que l'on utilise pour assaisonner les plats. Les épices peuvent être issues d’écorces (cannelle), de fleurs (safran, clou de girofle), de feuilles (thé, Thym), de fruits (poivre, aneth, moutarde), de bulbes (ail, oignon, gingembre) ou de graines (fenouil, coriandre).

Elles contiennent des composés odorants (parfois nommés fautivement « arômes »), mais aussi des composés sapides et, surtout, des composés à action trigéminale, ce qui les distingue des aromates. Elles sont donc responsables des odeurs (orthonasale : par les narines; ou rétronasales : par les fosses rétronasales, qui relient la bouche au nez), des saveurs, et des stimulations du nerf trijumeau (piquants, frais...).

Les épices sont utilisées en petite quantité en cuisine, comme conservateur, assaisonnement ou colorant. Les épices sont à différencier d'autres produits utilisés pour parfumer les plats, comme les herbes aromatiques ou les fruits.

Mélange d'épices typique de Guadeloupe, le mélange Marie-Galante.

Ce sont pour la plupart des produits exotiques, ce qui explique que les épices étaient parmi les produits agricoles importés les plus coûteux, durant l'Antiquité et le Moyen Âge[1]. Un grand nombre d'épices étaient employées autrefois en médecine.

Étal d'épices à un marché de New York.

Épices communes

On peut classer les épices en différents types :

Ambiguïtés

Le sel est un assaisonnement (ou condiment) extrêmement courant, souvent considéré à tort comme une épice.

Les feuilles ou branches des plantes aromatiques, dont on peut utiliser tout ou partie de la plante, suivant son intérêt aromatique, ne sont pas classées dans les épices, mais dans les herbes et aromates, tels le basilic, le romarin, le thym, le persil, l'estragon ou le laurier.

Histoire

Les souks de Marrakech, riches en épices.

Les jeunes épices ont joué un rôle important dans l’histoire humaine. Elles faisaient partie des biens les plus précieux dans le commerce du monde antique comme médiéval. Dans la Genèse, Joseph est vendu comme esclave par ses frères à des marchands d’épices. Dans le Cantique des cantiques, le rédacteur compare sa bien-aimée à de nombreuses formes d’épices. Plus généralement, des sources de l'Égypte, de la Chine, de l'Inde et de la Mésopotamie anciennes font référence à des épices non identifiées.

La consommation d'épices, d'alliaire officinale ou « herbe à ail », avec la cuisson de la viande, est attestée en Europe dès le IVe millénaire av. J.-C.[2]. Le commerce des épices se développe surtout dans le Moyen-Orient, à partir de 2 000 ans av. J.-C. avec la cannelle, la casse du cassier et le poivre.

Une découverte archéologique suggère que l'introduction du girofle, indigène à l'île indonésienne de Ternate dans les Moluques, au Proche-Orient pourrait avoir commencé tôt. En effet, on a trouvé un clou de girofle parmi des restes calcinés sur le sol d'une cuisine incendiée du site mésopotamien de Terqa, dans l'actuelle Syrie, daté de 1700 av. J.-C.[3].

L'épopée indienne du Ramayana, peut-être écrit vers 200 av. J.-C., mentionne le girofle. Il était en tout cas connu des Romains au Ier siècle apr. J.-C., puisque Pline l'Ancien l'évoque dans ses écrits.

En Asie du Sud-Est insulaire, la muscade, originaire des îles Banda dans les Moluques, s'appelle pala, un mot sanscrit, la langue des textes sacrés de l'hindouisme, ce qui montre l'ancienneté de son usage dans la région. Des auteurs datent l'introduction de la muscade en Europe du VIe siècle apr. J.-C.[4].

Les marchands indonésiens allaient jusqu'en Chine, en Inde, au Moyen-Orient et sur la côte est de l'Afrique. Les marchands arabes contrôlaient les routes entre le Proche-Orient et l'Inde jusqu'à l'époque romaine avec la découverte des voies maritimes. Puis la ville d'Alexandrie, en Égypte, devient le centre du commerce des épices grâce à son port. Du XIIIe siècle au XVe siècle, la ville de Venise exerce le monopole du commerce de l'épice avec le Moyen-Orient.

Une idée commune veut que la cuisine médiévale utilise beaucoup d'épices pour masquer le goût des viandes avariées. Cette idée est issue des historiens du XIXe siècle, qui ont mal analysé les recettes et banquets médiévaux, alors que la viande est consommée à cette époque très fraîche et que ces épices, produits de luxe, sont réservées à l'aristocratie, excepté chez les apothicaires-épiciers qui délivrent des remèdes à base d'épices pour toutes les classes sociales[5]. Elles sont cependant considérées avoir des vertus médicinales, selon la théorie des humeurs, et leurs propriétés antimicrobiennes, provenant notamment de leurs huiles essentielles, sont utilisées pour la conservation de la viande, pratique qui se développe lorsque certaines épices comme le poivre deviennent populaires à partir du XVe siècle[6].

Le contrôle des routes commerciales et des régions agricoles productrices d'épices fut la principale raison de l’expédition du navigateur portugais, Vasco de Gama, vers l’Inde. L'Espagne et le Portugal souhaitaient contourner le quasi-monopole exercé par Venise sur l'est de la Méditerranée. À peu près à la même époque, Christophe Colomb, après avoir abordé au Nouveau Monde, fit miroiter à ses investisseurs la possibilité de s'approvisionner en épices.

C'est Afonso de Albuquerque (1453-1515) qui permettra aux Portugais de prendre le contrôle des voies maritimes arabes vers l'Inde. En 1506, il prend l'archipel de Socotra à l'entrée de la Mer Rouge et, en 1507, Ormuz à l'entrée du golfe Persique. Devenu vice-roi des Indes, il prend Goa en Inde, en 1510, et Malacca sur la péninsule malaise, en 1511. Les Portugais peuvent désormais commercer directement avec le Siam, la Chine et les Moluques. La route de la soie est doublée par les voies maritimes portugaises, amenant ainsi par Lisbonne en Europe les trésors de l'Orient, dont les épices tant convoitées.

Mélanges communs d’épices

Le vrai quatre-épices n'est pas un mélange d'épices, mais correspond à un mélange qui imite les épices.

Production (2003-2004)

Production[7]
Pays ?
Production (tonnes) Proportion
Inde 1 600 000 86 %
Chine 66 000 4 %
Bangladesh 48 000 3 %
Pakistan 45 300 2 %
Turquie 33 000 2 %
Népal 15 500 1 %
Autres pays 60 900 3 %
Total 1 868 700 100 %

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Notes et références

  1. Comme le précise l'historien français, Jacques Heers, « contrairement à ce que disent nos livres, qui insistent tellement sur les condiments, [les] soieries valaient bien plus que les épices elles-mêmes : pour le même poids, la soie coûtait au moins dix fois plus que le poivre », dans Jacques Heers, Perrin, 2008, p. 62.
  2. Pierre Barthélémy, « Archéologie : l’homme préhistorique mangeait épicé », Passeurs de sciences,‎ (lire en ligne).
  3. Buccellati et Buccellati (1983).
  4. Burkill (1966).
  5. Aline Durel, L'Imaginaire des épices. Italie médiévale, orient lointain, Éditions L'Harmattan, , p. 79.
  6. (en) Frédéric Thomas, Simon P. Daoust et Michel Raymond, « Can we understand modern humans without considering pathogens? », Evolutionary Applications, vol. 5, no 4,‎ , p. 368-379 (DOI 10.1111/j.1752-4571.2011.00231.x).
  7. Chiffres 2003-2004, données de FAOSTAT (FAO).