Traite des êtres humains

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La traite des êtres humains regroupe plusieurs formes d'exploitations des êtres humains, les plus courantes étant la prostitution, l'esclavage et le travail forcé mais on peut aussi y inclure – entre autres – le trafic d'organes[1], la gestation pour autrui[2],[3],[4] ou la mendicité forcée[5]. Le terme de trafic d'êtres humains peut être utilisé dans la presse mais le terme juridique exact est : « traite des êtres humains ». Une journée mondiale y est associée, le 30 juillet proclamée « Journée mondiale de la dignité des victimes de la traite d'êtres humains ».

Introduction

Carte représentant le niveau de répression de la traite des êtres humains des états en 2010

D'après les statistiques de l'ONU et du Conseil de l'Europe, la traite des êtres humains générerait environ 32 milliards de dollars de chiffre d'affaires annuel et constituerait la troisième forme de trafic la plus répandue au monde, après le trafic de drogues et le trafic d'armes[5]. Chaque année, 2,5 millions de personnes, essentiellement des femmes et des enfants, tomberaient sous l'emprise des trafiquants[5].

La traite des êtres humains (TEH) est définie par la Convention du Conseil de l'Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains comme « le recrutement, le transport, le transfert, l’hébergement ou l’accueil de personnes, par la menace de recours ou le recours à la force ou à d’autres formes de contrainte, par enlèvement, fraude, tromperie, abus d’autorité ou d’une situation de vulnérabilité, ou par l’offre ou l’acceptation de paiements ou d’avantages pour obtenir le consentement d’une personne ayant autorité sur une autre aux fins d’exploitation. L’exploitation comprend, au minimum, l’exploitation de la prostitution d’autrui ou d’autres formes d’exploitation sexuelle, le travail ou les services forcés, l’esclavage ou les pratiques analogues à l’esclavage, la servitude ou le prélèvement d’organes »[6].

Ce texte précise que ce trafic est totalement interdit, même avec le consentement des victimes. Des textes additionnels y ont adjoints le commerce des enfants, dans le cas des trafics d'adoption. La traite des personnes est une forme modernisée d’esclavage qui se manifeste par l'esclavage domestique, l'exploitation sexuelle de la victime, entre autres choses. Cela peut prendre différentes formes comme la prostitution, l'exploitation du travail dans des ateliers clandestins, la mendicité forcée, les trafics d'organes ou le commerce des enfants.

La traite ne peut généralement être dissociée des flux migratoires internationaux, même si parfois elle emprunte les mêmes itinéraires. Les victimes sont majoritairement des femmes et des enfants (Trafic d'enfants), mais pas exclusivement. Globalement, le sens de ce trafic se fait des pays pauvres vers les pays riches. À ce jour, l’exploitation sexuelle (viol, proxénétisme) semble être la forme la plus développée, du moins la plus visible et la plus stigmatisante pour les victimes.

Selon les statistiques publiées par la Commission européenne (Eurostat – DG affaires intérieures) en 2013, le nombre de victimes avérées et présumées dans l’Union européenne (UE) a augmenté de 18 % entre 2008 et 2010. Parmi ces victimes, 68 % de ces victimes étaient des femmes, 17 % des hommes, 12 % des filles et 3 % des garçons[7]. Toujours selon le même rapport, la principale forme de traite dans l’UE entre 2008 et 2010 était la traite aux fins d’exploitation sexuelle (62 %), suivie du travail forcé (25 %). Le pourcentage de victimes avérées ou présumées issues de pays hors-UE et identifiées sur le territoire de l'UE est passé de 12 % en 2008 à 37 % en 2010. Les principaux pays d’origine sont la Roumanie et la Bulgarie pour les pays de l’Union, le Nigeria et la Chine en dehors de l'UE. Les pays d'Afrique sub-saharienne, le Viêt Nam, les Philippines ou encore les pays de l'Europe de l'Est comptent parmi les principaux pays d'origine des victimes de traite.

Il convient de noter que ces chiffres sont très probablement sous-estimés, étant donné que la traite est par nature un phénomène clandestin.

Si le nombre de personnes victimes de traite est en nette augmentation, le nombre de condamnations pour trafic d’êtres humains a baissé de 13 % entre 2008 et 2010 sur le territoire de l'Union, signe que les trafiquants ont de plus en plus tendance à passer entre les mailles du filet[7].

Un phénomène transnational et multiforme

Trafic d'êtres humains des pays d'origines (en jaune: nombre limité et en rouge: nombre important) et de destinations (en bleu clair: nombre important et en bleu foncé: nombre très important)

La traite des êtres humains est un phénomène transnational. Aussi la lutte contre la traite doit-elle passer par une coopération à l'échelle internationale. L'ONU s'est ainsi emparée de la question avec la création, au sein du Conseil des droits de l'Homme, du Rapporteur spécial pour la traite des personnes et du Rapporteur spécial pour les formes contemporaines d'esclavage. L'Office des Nations Unies contre la Drogue et le Crime (ONUDC) a lancé l'initiative UN.GIFT (United Nations Global Initiative to Fight Human Trafficking) en 2007, en collaboration avec l'Organisation internationale du travail (OIT), l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), le Fonds des Nations unies pour l'enfance (UNICEF), les Haut Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme (HCDH) et l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). Enfin, un groupe de travail de l'ONUDC a élaboré un Plan d'action mondial contre la traite des êtres humains, lequel a été approuvé par l'Assemblée générale des Nations unies en 2010 (résolution AG 64/293 en vue d'une application effective du Protocole de Palerme[8].

Phénomène transnational par nature, la traite est aussi un phénomène protéiforme - traite aux fins d'exploitation de la prostitution et des autres formes d'exploitation sexuelle, travail forcé, servitude domestique, exploitation de la mendicité, trafic d'organes, etc. - qui s'accompagne souvent de violences physiques ou psychologiques. Pour ne parler que de cas de travail forcé, les victimes de traite dans les fazendas (grandes propriétés agricoles) brésiliennes[9] et les travailleurs asiatiques (Indiens, Pakistanais, etc.) victimes de traite dans le secteur la construction au Qatar (où le système du parrainage, ou « kafala », les lie à leurs employeurs, et rend tout changement d'entreprises impossible sans l'accord de leur patron)[10] sont autant de victimes de traite des êtres humains.

Divers moyens sont utilisés par les trafiquants afin de mieux contrôler leurs victimes. Ainsi, le système de l'usure (camata) est très pratiqué par les réseaux roumains[11]. Ceux-ci paient le voyage de leurs victimes en leur promettant un avenir meilleur dans un autre pays et, une fois la victime arrivée à destination, ils lui demandent le remboursement du prêt à des taux extrêmement élevés. La victime se retrouve dans une situation où, ayant contracté une dette qu'elle ne peut payer, elle est contrainte d'accepter une situation d'asservissement. Dans les cas de mariages à des fins d'exploitation, les trafiquants peuvent payer une contre-dot à la famille de la victime. Ainsi, si d'aventure la victime s'échappe, les trafiquants peuvent toujours réclamer le remboursement de la contre-dot à la famille de la victime. La peur de l'emprisonnement et de l'expulsion des victimes peut les empêcher de dénoncer les trafiquants, d'autant que ceux-ci confisquent souvent les papiers de victimes étrangères.

Il n'est pas rare que les victimes de traite soient recrutées et/ou exploitées par leur propre famille ou par des proches. Dans ce cas, il est particulièrement difficile pour les victimes de dénoncer leur trafiquant, attendu qu'elles ont le sentiment d'avoir un lien (réel ou supposé) avec celui-ci. D'autre part, toutes les victimes de traite ne sont pas victimes de réseaux criminels. L'infraction de traite peut, par exemple, avoir lieu dans un foyer n'entretenant aucun lien avec la criminalité organisée.

Définition dans le droit international

Aux fins de l’article 3 du Protocole additionnel à la Convention des Nations unies contre la criminalité organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants (dit « Protocole de Palerme »), l'expression « traite des êtres humains » désigne « le recrutement, le transport, le transfert, l’hébergement ou l’accueil de personnes, par la menace de recours ou le recours à la force ou à d’autres formes de contrainte, par enlèvement, fraude, tromperie, abus d’autorité ou d’une situation de vulnérabilité, ou par l’offre ou l’acceptation de paiements ou d’avantages pour obtenir le consentement d’une personne ayant autorité sur une autre aux fins d’exploitation. L’exploitation comprend, au minimum, l’exploitation de la prostitution d’autrui ou d’autres formes d’exploitation sexuelle, le travail ou les services forcés, l’esclavage ou les pratiques analogues à l’esclavage, la servitude ou le prélèvement d’organes »[12].

Il est précisé que « Le consentement d’une victime de la traite des personnes à l’exploitation envisagée, telle qu'énoncée à l'alinéa a) du présent article, est indifférent lorsque l’un quelconque des moyens énoncés à l'alinéa a) a été utilisé »[13]. Ceci signifie que la traite est une activité interdite, qu'il y ait ou non consentement de la victime.

De plus, « le recrutement, le transport, le transfert, l’hébergement ou l’accueil d’un enfant aux fins d’exploitation sont considérés comme une “traite des personnes” même s’ils ne font appel à aucun des moyens énoncés », le terme « enfant » désignant « toute personne âgée de moins de 18 ans »[14].

Le Conseil de l'Europe a adopté le 16 mai 2005 la Convention du Conseil de l'Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains qui souligne la sensibilisation contre le trafic d'êtres humains autant que contre le travail forcé et l'abus sexuel. Cette convention surnommée « Convention de Varsovie » reprend, en son article 4, la définition donnée par le Protocole de Palerme.

Juridiquement, la traite des êtres humains comporte donc trois éléments : l'action (le recrutement, transport, etc.), le moyen utilisé (l'enlèvement, la tromperie ou dol, le recours à la force ou la menace de recours à la force, etc.) et la finalité de l'exploitation (la prostitution d'autrui ou d'autres formes d'exploitation sexuelle, le travail ou les services forcées, l'esclavage ou les pratiques analogues à l'esclavage, etc.)

Si le Protocole de Palerme se concentre davantage sur la lutte contre les réseaux criminels que sur la protection des victimes, la spécificité de la Convention du Conseil de l'Europe de 2005 est qu'elle porte essentiellement sur la protection des victimes et que son approche est fondée sur les droits de l'homme[15]. Le Groupe d'experts sur la lutte contre la traite des êtres humains (GRETA) et le Comité des Parties sont les deux instances chargées de veiller à la l'application de la convention du Conseil de l'Europe de 2005.

Instruments juridiques internationaux

Plusieurs textes internationaux s'appliquent en matière de traite des êtres humains :

« 1. Nul ne peut être tenu en esclavage ni en servitude. 2. Nul ne peut être astreint à accomplir un travail forcé ou obligatoire ».

C'est sur la base de cet article que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) a posé le principe de l’obligation des États de protéger les droits humains dans l'Affaire Rantsev c. Chypre et Russie (2012). En l'espèce, la CEDH a conclu au non-respect de l'article 4 par Chypre et la Russie.

1. Nul ne peut être tenu en esclavage ni en servitude. 2. Nul ne peut être astreint à accomplir un travail forcé ou obligatoire. 3. La traite des êtres humains est interdite.

Le Principe 11 des Principes de Jogjakarta insiste également sur la nécessité d'« instaurer des mesures, des services et des programmes judiciaires, éducatifs et sociaux afin d'agir sur les facteurs qui augmentent la vulnérabilité à la traite, au commerce et à toute forme d'exploitation, y compris, mais pas uniquement, l'exploitation sexuelle, en lien avec l'orientation sexuelle ou l'identité de genre, réelle ou perçue, y compris des facteurs tels que l'exclusion sociale, la discrimination, le rejet par la famille ou la communauté culturelle, le manque d'indépendance financière, le fait de ne pas avoir de logis, les comportements sociaux discriminatoires qui entraînent une estime de soi diminuée et le manque de protection contre la discrimination dans l'accès au logement, à l'emploi et aux services sociaux »[16] pour la protection contre les trafics d'êtres humains.

Les différentes formes de traites

Traites négrières

Les traites négrières, également appelées traite des Nègres ou traite des Noirs, désignent des commerces d'esclaves dont ont été victimes, par millions, les populations de l'Afrique de l'ouestAfrique centrale et l'Afrique australe durant plusieurs siècles[17].

On en distingue trois types :

Traite des esclaves de Barbarie

La Traite des esclaves de Barbarie est un trafic concernant les hommes, femmes et enfants en mer Méditerranée, principalement chrétiens européens blancs.

Trafic de femmes

Situation législative pour la prévention contre le trafic de femmes dans le monde.
Gris - pas de données
Vert - Trafic illégal et rare
Jaune - Trafic illégal mais des problèmes existent encore
Violet - Trafic illégal mais pratiqué
Bleu - Trafic illégal de façon limité et pratiqué
Rouge - Trafic non illégal et pratiqué[19].

Traite des blanches

La traite des Blanches est un trafic de femmes concernant les femmes d'origine européenne ou autres (femmes « blanches »). Il correspond à un esclavage sexuel.

Trafic d'enfants

Trafic d'organes

Parmi les formes de trafic d'êtres humains figurent aussi le trafic d'organes qui consiste à vendre illégalement des organes, ou tout tissu humain, prélevés sur des personnes vivantes ou décédées.

Trafic de migrants

Il convient de distinguer la traite des êtres humains et le trafic de migrants.

L’article 3 du Protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer, additionnel à la Convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée (2000) définit le trafic illicite de migrants comme suit : « L’expression « trafic illicite de migrants » désigne le fait d’assurer, afin d’en tirer, directement ou indirectement, un avantage financier ou un autre avantage matériel, l’entrée illégale dans un État Partie d’une personne qui n’est ni un ressortissant ni un résident permanent de cet État »[20].

Juridiquement, le trafic illicite de migrants est donc distinct de la traite des êtres humains, même si en pratique ces deux phénomènes sont en partie liés, puisque victimes de traite et migrants illicites empruntent les mêmes itinéraires et que les causes à l'origine de ces deux phénomènes sont souvent les mêmes (exemple : personnes fuyant un pays en guerre).

Les Anglo-saxons utilisent deux termes bien distincts pour exprimer l’un ou l’autre: pour le trafic illégal de migrants ils parlent de smuggling et pour la traite des êtres humains ils utilisent le terme trafficking.

Ce qui différencie l’un de l’autre ce sont les finalités des trafiquants. Les premiers (people smugglers = passeurs) s’en tiendront à un contrat consistant à faire passer des frontières jusqu’à la destination finale en échange d’une somme définie à l’avance. Une fois cela fait, autant les passeurs que les migrants ne chercheront pas à se revoir. Il en va tout autrement la traite des êtres humains. Les organisations criminelles vont créer un lien de dépendance durable chez leurs victimes, même si elles peuvent parfois utiliser les filières d’immigration clandestines. Il y a perte de liberté à l'instar de l'esclavage, qui est une des variantes de la traite. Tous les stratagèmes seront bons pour les exploiter le plus longtemps possible avec un maximum de profits.

La Convention du Conseil de l'Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains définit le trafic de clandestins comme « le fait d’assurer, afin d’en tirer, directement ou indirectement, un avantage financier ou un autre avantage matériel, l’entrée illégale dans un État Partie d’une personne qui n’est ni un ressortissant ni un résident permanent de cet État »[21].

Cela signifie en clair que ces trafiquants-passeurs sont obligatoirement des personnes qui exercent cette activité dans un but purement lucratif.

Cela ne concerne donc pas les personnes qui, bénévolement, pour des raisons idéologiques ou philosophiques font passer des frontières à des gens menacés (exemple des filières d'évasion de la Résistance pendant la Seconde Guerre mondiale). La différence est de taille : les trafiquants-passeurs sont des malfaiteurs au sens international, alors que les passeurs bénévoles seront vus, en fonction des affinités politiques, comme des patriotes ou des philanthropes par certains, et des ennemis, des rebelles, voire des terroristes par d'autres. La nuance introduite par le bénévolat est donc importante.

Les trafiquants-passeurs font preuve, par ailleurs, d'une totale indifférence vis-à-vis de leurs « clients » qu'ils considèrent, traitent et exploitent comme du bétail. Ces derniers en sont totalement dépendants, leurs familles au pays d'origine ayant souvent même dû emprunter des sommes énormes afin de financer leur passage.

Dans la quasi-totalité des cas, la traite s'accompagne de violences diverses, éventuellement de viols, tortures ou d'actes de barbarie.

En Libye

En 2016, le photojournaliste Narciso Contreras, revient, grâce au soutien du Prix Carmignac du photojournalisme, avec les premières preuves d’esclavage en Libye[22],[23],[24].

En novembre 2017, des journalistes de la chaîne américaine CNN filment des scènes de vente de migrants comme esclaves en Libye. L'ONU condamne une situation "inhumaine". La Libye promet une enquête[25].

La traite des êtres humains en France

La France est touchée par le phénomène de la traite des êtres humains, non pas en tant que pays d'origine des victimes, mais en tant que pays destinataire et de plus en plus, en tant que pays de transit[26]. Le démantèlement, en 2010, du réseau Hamidovic (réseau bosnien de pickpocket et d'exploitation de la mendicité qui employait des mineurs dans le métro parisien) a prouvé l'étendue du phénomène. Recrutées dans la région de Tuzla, les jeunes filles victimes du réseau étaient mariées à un homme appartenant au réseau et vivant à l'étranger, en échange d'une contre-dot[27]. Lorsque la victime s'échappait des griffes de son trafiquant, celui-ci pouvait, grâce à ce système, réclamer le remboursement de la contre-dot à la famille de la jeune fille.

En l'espèce, ces mineures ne se sont pas vues proposer de solutions d'hébergement et d’accompagnement. Le fait que les mineures victimes continuaient à voler et à mendier dans la rue dans les mois qui suivirent le démantèlement du réseau (et qu'elles devaient rapporter toujours plus d'argent à leurs nouveaux trafiquants) révèlerait les limites de mesures fondées uniquement sur la répression[28].

Si l'Office central pour la répression de la traite des êtres humains (OCRTEH) publie des statistiques relatives à la traite à des fins d'exploitation sexuelle, le rapport du GRETA du 28 janvier 2013 a rappelé que la France ne dispose toujours pas de statistiques sur la traite au sens large[29]. D'autre part s'agissant de la prostitution et de l'exploitation sexuelle, celle-ci a de moins en moins lieu dans la rue et tend, depuis 2005, à investir des lieux fermés (jugés plus sûrs) tels que les salons de massages, sex shops, bars à hôtesse, etc.[30].

La secrétaire générale de la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH), Magali Lafourcade, estime que « les magistrats condamnent encore peu sous l’angle de la traite »[31].

Signature et ratification des textes internationaux

La France a ratifié la Convention des Nations unies pour la répression de la traite des êtres humains et de l'exploitation de la prostitution d'autrui en 1960. En 2003, elle a ratifié la Convention de l'ONU contre la criminalité transnationale organisée et, en 2004, elle a ratifié le protocole de Palerme. La France est également partie à la Convention des Nations unies relatives aux droits de l'enfant et à son Protocole facultatif concernant la vente des enfants, la prostitution d’enfants et la pornographie mettant en scène des enfants. En 2008, elle a ratifié la Convention de Varsovie du Conseil de l'Europe. Elle est également partie à la Convention européenne des droits de l'homme et à diverses conventions de l'OIT.

Les dispositions du code pénal

La loi no 2003-239 a introduit l'infraction de traite dans le droit pénal français. Depuis 2003, les articles 225-4-1 et suivants du code pénal portent sur l'infraction de traite des êtres humains. La définition de la traite des êtres humains par le droit pénal a été modifiée depuis par la loi no 2013-711 du 5 août 2013. Cette loi transpose la directive 2011/36/UE (laquelle a remplacé la décision-cadre 2002/629/JAI) et adapte également le droit français à la Convention de Varsovie.

  • Définition dans le code pénal avant la loi du 5 août 2013 :

La définition de la traite des êtres humains dans le code pénal français était différente de celle du Protocole de Palerme et de la Convention du Conseil de Varsovie. Ainsi, le code pénal ne faisait pas expressément mention de l'exploitation aux fins de travail ou de services forcés, d'esclavage ou de pratiques analogues à l'esclavage, de servitude et de prélèvements d'organes. Il ne prévoyait pas non plus le moyen prévu par l'article 4 de la Convention du Conseil de l'Europe de 2005, à savoir « l'offre ou l'acceptation de paiements ou d'avantages pour obtenir le consentement d'une personne ayant autorité sur une autre aux fins d'exploitation ». En revanche, il prévoyait un élément général constitutif de l'infraction de traite qui n'est pas retenu par la Convention de 2005 : « en échange d'une rémunération ou de tout autre avantage ou d'une promesse de rémunération ou d'avantage ». Le GRETA, dans son rapport du 28 janvier 2013, note que cette condition est de nature à constituer « un obstacle à la qualification de l'infraction de traite et pourrait avoir pour conséquence que des cas de traite ne soient pas reconnus comme tels »[32]. En outre, les moyens définis en droit international constituaient des circonstances aggravantes dans le droit pénal français. Le GRETA a exhorté la France (dans son rapport du 28 janvier 2013) à mettre son droit pénal en conformité avec les textes internationaux auxquels elle a souscrit[33].

Le recours à l'infraction de traite demeure relativement peu usité dans la pratique, contrairement à l'infraction de proxénétisme, les infractions relatives aux conditions de travail et d'hébergement contraires à la dignité humaine et au travail non rétribué, et les infractions relatives à l'exploitation de la mendicité[34]. Ces infractions (excepté l'infraction de proxénétisme) prévoient pourtant un régime de sanction moins sévère que l'infraction de traite[34].

À noter que la France a été condamnée à deux reprises par la Cour européenne des droits de l'homme, lors des affaires Siliadin c. France (2005) et C. N. et V. c. France (2012) parce que son droit pénal n'offrait pas suffisamment de garanties aux victimes de traite.

L'article 225-4-1 définissait la traite comme suit :

« I. - La traite des êtres humains est le fait de recruter une personne, de la transporter, de la transférer, de l'héberger ou de l'accueillir à des fins d'exploitation dans l'une des circonstances suivantes :

  1. Soit avec l'emploi de menace, de contrainte, de violence ou de manœuvre dolosive visant la victime, sa famille ou une personne en relation habituelle avec la victime ;
  2. Soit par un ascendant légitime, naturel ou adoptif de cette personne ou par une personne qui a autorité sur elle ou abuse de l'autorité que lui confèrent ses fonctions ;
  3. Soit par abus d'une situation de vulnérabilité due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, apparente ou connue de son auteur ;
  4. Soit en échange ou par l'octroi d'une rémunération ou de tout autre avantage ou d'une promesse de rémunération ou d'avantage.

L'exploitation mentionnée au premier alinéa du présent I est le fait de mettre la victime à sa disposition ou à la disposition d'un tiers, même non identifié, afin soit de permettre la commission contre la victime des infractions de proxénétisme, d'agression ou d'atteintes sexuelles, de réduction en esclavage, de soumission à du travail ou à des services forcés, de réduction en servitude, de prélèvement de l'un de ses organes, d'exploitation de la mendicité, de conditions de travail ou d'hébergement contraires à sa dignité, soit de contraindre la victime à commettre tout crime ou délit.

La traite des êtres humains est punie de sept ans d'emprisonnement et de 150 000  d'amende ».

Les articles 225-4-2 et suivants prévoient en outre le régime des circonstances aggravantes :

Article 225-4-2 :

« I. - L'infraction prévue au I de l'article 225-4-1 est punie de dix ans d'emprisonnement et de 1 500 000  d'amende lorsqu'elle est commise dans deux des circonstances mentionnées aux 1° à 4° du même I ou avec l'une des circonstances supplémentaires suivantes :

  1. À l'égard de plusieurs personnes ;
  2. À l'égard d'une personne qui se trouvait hors du territoire de la République ou lors de son arrivée sur le territoire de la République ;
  3. Lorsque la personne a été mise en contact avec l'auteur des faits grâce à l'utilisation, pour la diffusion de messages à destination d'un public non déterminé, d'un réseau de communication électronique ;
  4. Dans des circonstances qui exposent directement la personne à l'égard de laquelle l'infraction est commise à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente ;
  5. Avec l'emploi de violences qui ont causé à la victime une incapacité totale de travail de plus de huit jours ;
  6. Par une personne appelée à participer, par ses fonctions, à la lutte contre la traite ou au maintien de l'ordre public ;
  7. Lorsque l'infraction a placé la victime dans une situation matérielle ou psychologique grave.

II. - L'infraction prévue au II de l'article 225-4-1 est punie de quinze ans de réclusion criminelle et de 1 500 000  d'amende lorsqu'elle a été commise dans l'une des circonstances mentionnées aux 1° à 4° du I du même article 225-4-1 ou dans l'une des circonstances mentionnées aux 1° à 7° du I du présent article ».

Article 225-4-3 :

« L'infraction prévue à l'article 225-4-1 est punie de vingt ans de réclusion criminelle et de 3 000 000 euros d'amende lorsqu'elle est commise en bande organisée ».

Article 225-4-4 :

« L'infraction prévue à l'article 225-4-1 commise en recourant à des tortures ou à des actes de barbarie est punie de la réclusion criminelle à perpétuité et de 4 500 000 euros d'amende ».

  • Définition dans le code pénal depuis la loi du 5 août 2013 :

La loi no 2013-711 modifiant les articles 225-4-1 et 225-4-2 adapte notre droit pénal aux engagements internationaux de la France et transpose la directive no 2011/36/UE dans le droit interne. Elle introduit les infractions d'exploitation dans le code pénal, à savoir : la réduction en esclavage, la soumission au travail ou à des services forcés, la réduction en servitude et le prélèvement d'organes. L'absence de consentement, c'est-à-dire « l'enlèvement, la fraude, la tromperie, l'abus d'autorité ou d'une situation de vulnérabilité ou encore l'offre ou l'acceptation de paiements ou d'avantages pour obtenir le consentement d'une personne ayant autorité sur une autre aux fins d'exploitation » ne constitue plus une circonstance aggravante, mais fait partie de la définition même de la traite. Étant donné qu'il y a presque toujours échange de rémunération ou d'avantages dans les phénomènes de traite des êtres humains, le fait d'inclure l'offre ou l'échange de rémunérations (qui est une circonstance alternative, comme les autres) dans la définition de la traite permet d'établir qu'il y a eu traite des êtres humains alors même que les autres circonstances (l'emploi de menace, contraintes, etc.) n'ont pas été prouvées.

Article 225-4-1

« I. - La traite des êtres humains est le fait de recruter une personne, de la transporter, de la transférer, de l'héberger ou de l'accueillir à des fins d'exploitation dans l'une des circonstances suivantes :

  1. Soit avec l'emploi de menace, de contrainte, de violence ou de manœuvre dolosive visant la victime, sa famille ou une personne en relation habituelle avec la victime ;
  2. Soit par un ascendant légitime, naturel ou adoptif de cette personne ou par une personne qui a autorité sur elle ou abuse de l'autorité que lui confèrent ses fonctions ;
  3. Soit par abus d'une situation de vulnérabilité due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, apparente ou connue de son auteur ;
  4. Soit en échange ou par l'octroi d'une rémunération ou de tout autre avantage ou d'une promesse de rémunération ou d'avantage.

L'exploitation mentionnée au premier alinéa du présent I est le fait de mettre la victime à sa disposition ou à la disposition d'un tiers, même non identifié, afin soit de permettre la commission contre la victime des infractions de proxénétisme, d'agression ou d'atteintes sexuelles, de réduction en esclavage, de soumission à du travail ou à des services forcés, de réduction en servitude, de prélèvement de l'un de ses organes, d'exploitation de la mendicité, de conditions de travail ou d'hébergement contraires à sa dignité, soit de contraindre la victime à commettre tout crime ou délit.

La traite des êtres humains est punie de sept ans d'emprisonnement et de 150 000  d'amende.

II. - La traite des êtres humains à l'égard d'un mineur est constituée même si elle n'est commise dans aucune des circonstances prévues aux 1° à 4° du I.

Elle est punie de dix ans d'emprisonnement et de 1 500 000  d'amende.

Article 225-4-2

I. - L'infraction prévue au I de l'article 225-4-1 est punie de dix ans d'emprisonnement et de 1 500 000  d'amende lorsqu'elle est commise dans deux des circonstances mentionnées aux 1° à 4° du même I ou avec l'une des circonstances supplémentaires suivantes :


  1. À l'égard de plusieurs personnes ;
  2. À l'égard d'une personne qui se trouvait hors du territoire de la République ou lors de son arrivée sur le territoire de la République ;
  3. Lorsque la personne a été mise en contact avec l'auteur des faits grâce à l'utilisation, pour la diffusion de messages à destination d'un public non déterminé, d'un réseau de communication électronique ;
  4. Dans des circonstances qui exposent directement la personne à l'égard de laquelle l'infraction est commise à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente ;
  5. Avec l'emploi de violences qui ont causé à la victime une incapacité totale de travail de plus de huit jours ;
  6. Par une personne appelée à participer, par ses fonctions, à la lutte contre la traite ou au maintien de l'ordre public ;
  7. Lorsque l'infraction a placé la victime dans une situation matérielle ou psychologique grave.

II. - L'infraction prévue au II de l'article 225-4-1 est punie de quinze ans de réclusion criminelle et de 1 500 000  d'amende lorsqu'elle a été commise dans l'une des circonstances mentionnées aux 1° à 4° du I du même article 225-4-1 ou dans l'une des circonstances mentionnées aux 1° à 7° du I du présent article. »

Si la modification des articles 225-4-1 et 225-4-2 a permis d'introduire les notions d'esclavage, de réduction en servitude et de travail forcé dans la définition même de la traite (en tant que finalités de l'exploitation), il restait à créer des infractions spécifiques pour chacune de ces formes d'exploitation. C'est ce qui a été fait avec la loi du 5 août 2013. Le crime d'esclavage est ainsi défini par l'article 224-1 du code pénal et est puni de vingt ans de réclusion criminelle. Aux termes de l'article 225-14-2 du code pénal, la servitude est punie de dix ans de réclusion. Elle se distingue du travail forcé en ce que les victimes de servitude ont le sentiment que leur condition d'asservissement est immuable. La création de cette nouvelle infraction permet à la France de répondre aux critiques que lui avait adressées la CEDH dans ses arrêts Siliadin et C. N. et V. c. France. Le travail forcé est quant à lui défini par l'article 225-14-1 du code pénal et est puni de sept ans d'emprisonnement et de 200 000 euros d'amende.

Les institutions luttant contre la traite en France

La MIPROF (Mission interministérielle pour la protection des femmes victimes de violences et la lutte contre la traite des êtres humains) dont la création est décidée par le Comité interministériel aux droits des femmes le 30 novembre 2012 et entérinée par le décret no 2013-7 du 3 janvier 2013, a vocation à faire de la lutte contre la traite des êtres humains une politique publique à part entière, en concertation avec la société civile. La MIPROF est placée sous l'autorité du ministère des Droits des femmes.

Outre le ministère des Droits des femmes, plusieurs ministères sont impliqués dans la lutte contre la traite des êtres humains : le ministère de l'Intérieur, le ministère de la Justice, le ministère des Affaires sociales, le ministère des Affaires étrangères, etc.

Les offices et bureaux ayant à connaître de cas de traite d'êtres humains sont les suivants :

Au ministère de l'Intérieur :

  • L'Office central pour la répression de la traite des êtres humains (OCRTEH) qui lutte contre l'exploitation sexuelle et le proxénétisme. L'OCRTEH est notamment chargé de la coordination des Brigades de répression du proxénétisme (BRP). Il est l'un des offices de la Direction centrale de la Police judiciaire (DCPJ) au sein de la Direction générale de la Police nationale (DGPN).
  • L'Office central pour la répression de l'immigration irrégulière et de l'emploi d'étrangers sans titres (OCRIEST), créé au sein de la Direction centrale de la Police aux frontières (DCPAF) de la DGPN.
  • L'Office central de lutte contre la délinquance itinérante (OCLDI), rattaché à la sous-direction de la police judiciaire (SDPJ) de la direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN).
  • L'Office central de lutte contre le travail illégal (OCLTI), rattaché à la SDPJ de la DGGN.
  • L'Office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique (OCLAESP), compétent en matière de traite aux fins de prélèvement d'organes. Il est rattaché à la SDPJ de la DGGN.
  • L'Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l'information et de la communication (OCLCTIC), compétent en matière de lutte contre la criminalité, et donc (entre autres) en matière de lutte contre l'exploitation sexuelle sur internet et la pédopornographie. L'OCLCTIC gère le service de signalement www.internet-signalement.gouv.fr où tout citoyen peut signaler des contenus illicites. Les données de ce service sont analysées par la Plateforme d'harmonisation, d'analyse, de recoupement et d'orientation des signalements (PHAROS) qui transmet ces informations aux services compétents. L'OCLCTIC est rattaché à la DCPJ de la DGPN.
  • L'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), chargé notamment de l'aide au retour des victimes de traite étrangères.
  • L'Office central pour la répression des violences faites aux personnes (OCRVP).
  • La Délégation aux victimes (DAV).
  • Le Bureau de l'immigration familiale.
  • L'Unité de coordination opérationnelle de la lutte contre le trafic et l'exploitation des migrants (UCOLTEM), rattachée à la DCPAF de la DGPN.

Au ministère de la Justice :

  • Le Bureau de l'aide aux victimes et de la politique associative.
  • Les Juridictions interrégionales spécialisées (JIRS) chargées de la lutte contre la criminalité organisée et la délinquance financière d'une très grande complexité. Créées en 2004, les huit JIRS sont composées de magistrats de l’instruction et du parquet.

La nature transnationale de la traite nécessite une coopération à l'échelle internationale. La Section centrale de coopération opérationnelle de police (SCCOPOL) est ainsi chargée de la coordination opérationnelle de police à l'échelle internationale. Les Commissions Rogatoires Internationales (CRI) et les Équipes Communes d'Enquête (ECE) ainsi que la coopération avec Europol, Eurojust et Interpol sont autant de moyens de coordonner la lutte contre la traite à l'échelle européenne et internationale.

Au ministère des Affaires étrangères :

  • Le Conseiller technique sur la lutte contre la traite en Europe du Sud-Est. Il est rattaché à la représentation permanente de la France auprès de l'ONU et de l'OSCE à Vienne.
  • L'ambassadeur itinérant chargé de la lutte contre la criminalité, lequel, depuis 2010, a vu son mandat élargi aux affaires de traite.
  • La Mission de la gouvernance démocratique.

Le Pôle régional de lutte contre la criminalité organisée, placé auprès de l'ambassade de France en Croatie.

La Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) est depuis 2014 le Rapporteur national indépendant sur la lutte contre la traite des êtres humains, chargé d'évaluer la politique publique menée en France et de rendre compte auprès de la Commission européenne, comme auprès des mécanismes compétents des Nations unies et du Conseil de l'Europe.

La protection des victimes de traite en France

Aux fins de l'article L 316-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), les victimes ayant déposé plainte ou les témoins étrangers peuvent se voir délivrer une carte de séjour temporaire et une autorisation de travailler :

« Sauf si sa présence constitue une menace à l'ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée à l'étranger qui dépose plainte contre une personne qu'il accuse d'avoir commis à son encontre les infractions visées aux articles 225-4-1 à 225-4-6 et 225-5 à 225-10 du code pénal ou témoigne dans une procédure pénale concernant une personne poursuivie pour ces mêmes infractions. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. Cette carte de séjour temporaire ouvre droit à l'exercice d'une activité professionnelle. Elle est renouvelée pendant toute la durée de la procédure pénale, sous réserve que les conditions prévues pour sa délivrance continuent d'être satisfaites. ».

Néanmoins, les préfectures peuvent refuser ou différer la délivrance des titres de séjour, des autorisations de travail ou des récépissés de période de réflexion et de rétablissement aux victimes de traite. Les refus ou les délais dans la délivrance desdits documents ont pour conséquence d'entraver l'accès des victimes à leurs droits (Couverture maladie universelle ou Aide médicale d’État, Allocation temporaire d'attente ou encore droit à l'indemnisation)[35].

Si les victimes de traite peuvent bénéficier d'un hébergement sécurisé avec le réseau Ac-Sé, les possibilités d'hébergement/logement avec un personnel et des dispositifs d'assistance et d'accompagnement adaptés demeurent insuffisants[35].

En matière de protection des enfants, les acteurs compétents sont pléthoriques : Aide sociale à l'enfance (ASE), Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), Procureur de la république, Juge des enfants, etc. Les enfants victimes de traite ne bénéficient pas systématiquement d'une prise en charge par l'ASE et de dispositifs d'hébergement et d’accompagnement adaptés[35]. En sus, les enfants victimes de traite forcés de commettre des vols à la tire ou des cambriolages sont fréquemment considérés comme des délinquants par les services de police (ce qui contrevient au principe de non-sanction des victimes tel qu'il est exprimé par l'article 26 de la Convention de Varsovie). Bien souvent, les enfants victimes de traite ne disposent pas d’administrateurs ad hoc juridiquement compétents[36]. Enfin, les enfants victimes de traite ne bénéficient pas du statut de victime de traite, ce qui signifie qu'ils sont souvent menacés d'expulsion lorsqu'ils atteignent leur majorité[37].

À noter que la France s'est dotée d'un Plan d'action national contre la lutte contre la traite des êtres humains pour la période 2014 - 2016 à la suite de la présentation de celui-ci en Conseil des ministres par Najat Vallaud-Belkacem, ministre des Droits des femmes, de la Ville, de la Jeunesse et des Sports, le 14 mai 2014.

La traite des êtres humains en Amérique latine

Campagne de lutte

Une campagne baptisée Call and Live (Appeler et vivre) a été lancée en 2006. Elle est animée, entre autres, par le chanteur Ricky Martin, ambassadeur de l'Unicef. Elle permet, en appelant une ligne téléphonique spéciale, d'obtenir des informations et de l'aide pour lutter contre le trafic d'êtres humains. Cette campagne fonctionne au Pérou et sera bientôt[Quand ?] lancée au Costa Rica, en Équateur, au Salvador et au Nicaragua. Des projets pourraient aussi concerner le Mexique et les communautés hispaniques dans la région de Washington.

Voir aussi

Études sur la traite des êtres humains

  • Commission nationale consultative des droits de l'homme - CNCDH (2010), La traite et l'exploitation des êtres humains en France, La Documentation française.
  • Fondation Scelles (2012), Rapport mondial sur l'exploitation sexuelle, la prostitution au cœur du crime organisé, Éditions ECONOMICA
  • Groupe d'experts sur la lutte contre la traite des êtres humains - GRETA (2013), Rapport concernant la mise en œuvre de la Convention du Conseil de l'Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains par la France.
  • Peyroux, Olivier (2013), Délinquants et Victimes, la traite des enfants d'Europe de l'Est en France, avant-propos de Robert Badinter, AAPM - Éditions Non lieu.
  • Plouffe-Malette, Kristine (2013), Protection des victimes de traite des êtres humains, approches internationales et européennes, préface d'Olivier Delas, Éditions Bruylant.
  • Shelley, Louise (2010), Human Trafficking, A Global Perspective, Cambridge University Press
  • Celhia de Lavarène,Un visa pour l'enfer, Fayard, 2006
  • Clesse, Charles-Eric (2013), La traite des êtres humains. Etude de la loi belge éclairée des lois française, luxembourgeoise et suisse, Bruxelles, Larcier
  • Clesse, Charles-Eric et alii (2014) La traite des êtres humains et le travail forcé, Bruxelles, Larcier

Liens externes

Articles connexes

Bibliographie

Références

  1. ONU, Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants (dit « Protocole de Palerme »), 15/11/2000, Doc. A/55/383, lire en ligne à partir de la page 374.
  2. « Code civil | Legifrance », sur www.legifrance.gouv.fr (consulté le )
  3. « GPA: «Ne rien faire, c'est laisser s’installer le trafic international des mères» », sur Libération.fr, (consulté le )
  4. « BLOG - La GPA est une violence faite aux femmes et une marchandisation des êtres humains », sur Le Huffington Post, (consulté le )
  5. a b et c Ministère des Affaires étrangères (France), « Lutte contre la traite des êtres humains : La France et la lutte contre la traite des êtres humains », sur France Diplomatie, Paris, (consulté le ).
  6. Annexe II de la Convention
  7. a et b Commission européenne, Eurostat – DG affaires intérieures (2013), Trafficking in human beings, p. 13
  8. Ministère des Affaires étrangères de la France (2014), La France et la lutte contre la traite des êtres humains, http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/politique-etrangere-de-la-france/droits-de-l-homme/lutte-contre-la-traite-des-etres/
  9. Organisation Internationale du Travail - OIT (2004), Attentes à Correntes : le travail forcé au Brésil, Magazine Travail no 50, http://www.ilo.org/global/publications/magazines-and-journals/world-of-work-magazine/articles/WCMS_081506/lang--fr/index.htm
  10. l'Humanité (2013), Kafala, ou comment les salariés deviennent esclaves de leur compagnie, https://www.humanite.fr/monde/kafala-ou-comment-les-salaries-deviennent-esclaves-551072
  11. Peyroux, Olivier (2013), Délinquants et Victimes, la traite des enfants d'Europe de l'Est en France, avant-propos de Robert Badinter, AAPM - Éditions Non lieu, p. 92
  12. Protocole additionnel à la Convention des Nations unies contre la criminalité organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants (2000), Article 3 "Terminologie", alinéa a)
  13. Protocole additionnel à la Convention des Nations unies contre la criminalité organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants (2000), Article 3 « Terminologie », alinéa b)
  14. Protocole additionnel à la Convention des Nations unies contre la criminalité organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants (2000), Article 3 "Terminologie", alinéa c)
  15. Groupe d'experts sur la lutte contre la traite des êtres humains, GRETA (2013), Rapport concernant la mise en œuvre de la Convention du Conseil de l'Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains par la France, p. 5
  16. Les Principes de Jogjakarta, Principe 11. Le droit à la protection contre toute forme d'exploitation, de commerce et de traite d'être humains
  17. Laurent Carroué, Didié Collet et Claude Ruiz, Les Amériques, Éditions Bréal (ISBN 2749505305, lire en ligne), p. 32
  18. Melchior Mbonimpa, Idéologies de l'indépendance africaine, L'Harmattan, , 247 p. (ISBN 2738404308, lire en ligne), p. 33
  19. (en) WomanStats Maps, Woman Stats Project.
  20. Protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer, additionnel à la Convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée (2000), Article 3 "Terminologie", alinéa a)
  21. Annexe III de la Convention
  22. « "Migrants : les esclaves de Libye" », sur Paris Match,
  23. « "Libye: l’enfer des migrants victimes du trafic humain, vu par Narciso Contreras" », sur France TV,
  24. « "La Libye est devenue la plaque tournante d’un gigantesque trafic d’êtres humains" », sur Télérama,
  25. « Libye : des migrants vendus aux enchères comme esclaves », Le Monde.fr,‎ (ISSN 1950-6244, lire en ligne, consulté le )
  26. Groupe d'experts sur la lutte contre la traite des êtres humains - GRETA (2013), Rapport concernant la mise en œuvre de la Convention du Conseil de l'Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains par la France, p. 10
  27. Peyroux, Olivier (2013), Délinquants et Victimes, la traite des enfants d'Europe de l'Est en France, avant-propos de Robert Badinter, AAPM - Éditions Non lieu, p. 23
  28. Ibid., p. 19
  29. Groupe d'experts sur la lutte contre la traite des êtres humains - GRETA (2013) Rapport concernant la mise en œuvre de la Convention du Conseil de l'Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains par la France, p. 10
  30. Peyroux, Olivier (2013), Délinquants et Victimes, la traite des enfants d'Europe de l'Est en France, avant-propos de Robert Badinter, AAPM - Éditions Non lieu, p. 41
  31. « La justice peu pressée d'appeler l'esclavage par son nom », sur lemonde.fr (consulté le )
  32. Groupe d'experts sur la lutte contre la traite des êtres humains, GRETA (2013), Rapport concernant la mise en œuvre de la Convention du Conseil de l'Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains par la France, p. 20
  33. Ibid. p. 21
  34. a et b Groupe d'experts sur la lutte contre la traite des êtres humains - GRETA (2013), Rapport concernant la mise en œuvre de la Convention du Conseil de l'Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains par la France, p. 54
  35. a b et c Collectif "Ensemble contre la traite des êtres humains" (2014), Bientôt un Plan d'action national contre la traite en France ?, http://www.contrelatraite.org/article.php3?id_article=193
  36. Commission nationale consultative des droits de l'homme - CNCDH (2010), La traite et l'exploitation des êtres humains en France, La Documentation française, p. 204
  37. Collectif "Ensemble contre la traite des êtres humains" (2014), Bientôt un Plan d'action national contre la traite des êtres humains en France ?, http://www.contrelatraite.org/article.php3?id_article=193