Michèle Tribalat

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Michèle Tribalat, née en 1950[1], est une démographe française, chercheuse à l'Institut national d'études démographiques (INED)[2].

Formation

Michèle Tribalat a suivi sa scolarité à Angoulême, Vierzon puis Paris, notamment à l'Institut de démographie de l'université de Paris-I (IDUP) ; elle est titulaire d'un DEA (mémoire sur la nuptialité et la fécondité des mariages en Irlande sous la direction de Chantal Blayo)[3].

Thèmes de recherches

Elle est recrutée par l'INED en 1976 pour se consacrer à l'étude des migrations internationales[4]. Elle fait définir, pour le recensement de la population de 1990, la catégorie des "immigrés"[5], est la principale responsable de l'enquête "Mobilité géographique et insertion sociale (MGIS) de 1992, et se consacre aux problèmes liés à l’intégration et à l'assimilation des immigrés et de leurs enfants.

Ses recherches se sont traduites par la publication de plusieurs ouvrages, dont un ouvrage en collaboration avec le politologue Pierre-André Taguieff sur le Front national. Dans l'ouvrage Face au Front national : arguments pour une contre-offensive, Michèle Tribalat se livre notamment à une analyse critique du rapport de Pierre Milloz sur le coût de l'immigration en France, dont elle réfute les conclusions[6]. Elle est alors critiquée par l'extrême droite, qui lui attribue en 1999 le parodique prix Lyssenko[7]. Au cours des années suivantes, elle a poursuivi ses recherches dans les domaines auxquels elle consacre habituellement ses travaux, mais en mettant l'accent sur les questions liées à l'islam en France.

Dans son ouvrage Les Yeux grands fermés, elle se montre critique vis-à-vis de l'attitude de l'État français face au décompte de l'immigration, le solde migratoire ne représentant pas, selon elle, la réalité de la présence étrangère en France[8]. Elle met en doute notamment l'apport de l'immigration à la croissance économique, l'intégration réelle des étrangers au tissu social des pays d'accueil[9]. L'ouvrage est vivement critiqué dans le mensuel Alternatives économiques qui lui reproche de « [s'appuyer] sur des études étrangères provenant de sources politiquement très marquées », et « quand elle cite des chercheurs français, comme Éric Maurin ou Hervé Le Bras, c'est en tronquant leur œuvre pour aller dans le sens de ses partis pris[10] ».

Statistiques ethniques

Le démographe Hervé Le Bras et Michèle Tribalat s'opposent régulièrement sur les statistiques ethniques. En 2010, dans un article du Point, Hervé Le Bras conteste les travaux de Michèle Tribalat et va jusqu'à effectuer un parallèle entre les estimations de la population d'origine étrangère données par Michèle Tribalat et le protocole de Wannsee. Celle-ci, tout en corrigeant l'approximation historique d'Hervé Le Bras, condamne cette « nazification de l'adversaire » et parle de procédé « ignoble »[11]. Plus généralement, Michèle Tribalat estime que ses thèmes de recherche lui ont coûté sa carrière à l'INED, Le Figaro déplorant plus globalement que les chercheurs ne rejoignant pas une certaine vision de gauche du sujet des migrations soient systématiquement disqualifiés par certains pontes universitaires (notamment le trio Pierre Rosanvallon, François Héran et Patrick Boucheron), en particulier lorsque leurs ouvrages sont des succès d'édition. La journaliste Eugénie Bastié écrit ainsi : « Dans tous les cas de figure, le schéma de disqualification est semblable : d'abord, il s'agit de montrer le manque de scientificité de l'auteur, puis de l'accuser de ne pas tenir compte de la complexité du sujet (cette même complexité étant tout à fait récusée lorsqu'il s'agit de dénoncer le capitalisme ou une excuse sociale à la radicalisation), et enfin de lui reprocher de "faire le jeu", selon l'expression consacrée, de thèses extrêmes) »[12].

Interrogée au sujet des statistiques ethniques, elle affirme ne pas être « d’accord avec ceux qui refusent les statistiques ethniques sur la population carcérale sous prétexte que la réalité qu’elles donneront à voir — à savoir qu’une grande partie des prisonniers sont d’origine étrangère — ne plaît pas. Tout d’abord parce qu’on n’a pas attendu la statistique pour l’écrire ici et là, avec des estimations à la louche totalement hasardeuses. Au moins, une vraie étude permet de réduire la marge du fantasme »[13]. Elle affirme également ne pas se « préoccuper de l’utilisation que l’on peut faire des statistiques. [...] L’objet de la statistique, c’est connaître. Elle doit être au-dessus de la mêlée. Si on veut connaître les problèmes, il faut s’en donner les moyens »[13]. Elle publie un livre sur le sujet en février 2016.

Ouvrages

Notes et références

  1. SciencePo bibliothèque, catalogue ; Libération, 22 mars 1995.
  2. Tribalat Michèle, sur ined.fr
  3. Michèle Tribalat, "Mon cheminement vers la démographie".
  4. Statistiques ethniques, une querelle bien française. L'Artilleur, 2016, p. 86
  5. Personnes nées étrangères à l'étranger ayant immigré en France, qu'elles soient ou non devenues françaises
  6. Pierre-André Taguieff, Michèle Tribalat, Face au Front national. Arguments pour une contre-offensive, revue Mots, n°58, année 1999
  7. « Prix Lyssenko 1999 », sur www.clubdelhorloge.fr (consulté le )
  8. Michèle Tribalat: "les pouvoirs publics relativisent l'immigration", entretien, lexpress.fr, 18 mars 2010
  9. Michèle Tribalat : Une démographe qui dérange, Nicolas Journet, scienceshumaines.com, 15 juin 2011
  10. Naïri Nahapétian, « Les yeux grands fermés. L'immigration en France », sur Alternatives économiques, (consulté le )
  11. Une comparaison qui fâche, Le Point, 15 avril 2010 - Modifié le 22 avril 2010
  12. Eugénie Bastié, « Tribalat, Guilluy, Smith, victimes de l'universitairement correct ? », Le Figaro, 22-23 décembre 2018, p. 13.
  13. a et b Qui a peur des statistiques ethniques?, entretien, marianne.net, 10 mars 2009
  14. « Prix des Impertinents », sur http://www.prix-litteraires.net (consulté le )

Liens externes