Espéranto

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Espéranto
Région Drapeau de l'Espérantie Espérantie
(120 pays du monde[1])
Nombre de locuteurs 100 000 à 2 000 000 selon les estimations
Nom des locuteurs espérantophone(s)
Catégorie langue auxiliaire internationale
Classification par famille
Étendue individuelle
Type construite
Échantillon
Article premier de la Déclaration universelle des droits de l'homme (voir le texte en français)

Artikolo 1

Ĉiuj homoj estas denaske liberaj kaj egalaj laŭ digno kaj rajtoj. Ili posedas racion kaj konsciencon, kaj devus konduti unu al alia en spirito de frateco.
Carte
Image illustrative de l’article Espéranto
Nombre de membres d’associations d’espéranto
  • 1-49 membres
  • 50-99 membres
  • 100-499 membres
  • 500-1600 membres

L’espéranto est une langue construite[2] internationale utilisée comme langue véhiculaire par des personnes provenant d’au moins 120 pays[1] à travers le monde, y compris comme langue maternelle. N’étant la langue officielle d’aucun État, l'espéranto permet d'établir un pont neutre entre cultures ; certains locuteurs nomment « Espérantie » la zone linguistique formée des lieux géographiques où ils se trouvent. Nécessitant un court apprentissage[3] pour être utilisable, l'espéranto est ainsi présenté comme solution efficace et économiquement équitable au problème de communication entre personnes de langues maternelles différentes[4].

Fondée sur une grammaire régulière sans exception, l'espéranto est une langue globalement agglutinante où les mots se combinent pour former un vocabulaire riche et précis à partir d'un nombre limité de racines lexicales et d’affixes. Ces particularités la rendent aisément adaptable aux exigences les plus variées et facilitent son apprentissage à tout âge. L’Académie d'espéranto contrôle en particulier l'introduction de mots découlant d'inventions ou de notions nouvelles et l’Association mondiale anationale publie le Plena Ilustrita Vortaro de Esperanto, dictionnaire tout en espéranto le plus vaste et reconnu internationalement.

C’est en 1887 que Ludwik Zamenhof, sous le pseudonyme Doktoro Esperanto (Docteur qui espère) qui donnera par la suite son nom à la langue, publie le projet Langue Internationale. La langue a connu un rapide développement dès les premières années, donnant lieu à des publications et des rencontres internationales. L'apparition des premières méthodes d'apprentissage en ligne au début des années 2000, puis de cours d'espéranto sur des sites d'apprentissage de masse comme sur Duolingo en 2015 suscitent un regain d’intérêt pour l'espéranto.

L’Association mondiale d’espéranto, fondée en 1908, est en relation officielle avec l’Organisation des Nations unies et l’UNESCO, qui a publié des recommandations en faveur de l’Espéranto en 1954 et 1985. L’espéranto est l’une des langues officielles de l’Académie internationale des sciences de Saint-Marin[5]. L’université Loránd Eötvös en Hongrie sanctionne son cursus universitaire d’enseignement de l’espéranto par un diplôme reconnu par le cadre européen commun de référence pour les langues[6]. Plusieurs universités proposent des cycles d’études espérantophones au Brésil, en Bulgarie, Pologne, Roumanie et Slovaquie[7].

Statut

Espéranto-France a lancé une préparation à une future épreuve écrite d'espéranto comme langue facultative au baccalauréat français et propose aux lycéens intéressés de passer un bac blanc d'espéranto. Le premier examen blanc de ce type a eu lieu le samedi [8],[9] ; cependant la date d’introduction de l'espéranto dans la liste des langues facultatives au baccalauréat dépend d’une décision du ministère de l’Éducation nationale. Le , la directrice générale de l’enseignement scolaire Florence Robine précise par une lettre[10],[11] qu’« il est tout à fait possible d’entreprendre, dans les établissements où l’enseignement de l’espéranto pourrait se développer, une démarche expérimentale à l’échelle locale ».

L’espéranto est l'une des langues officielles de l'Académie internationale des sciences de Saint-Marin (AIS) dont le but est de favoriser l'utilisation de l'espéranto dans toutes les sciences. Parmi les universités disposant de cycles d'études espérantophones[7], les plus réputées sont :

Concernant l’Université Adam-Mickiewicz de Poznań, des cours d’interlinguistique sont dispensés depuis 1997 dans le cadre de la faculté de philologie de, et un cursus de trois ans en espéranto est proposé. Il valide des crédits ECTS. C’est Ilona Koutny, membre de l’Académie d'espéranto, qui guide ce cursus.

À l'instar des autres langues, l’espéranto dispose de diplômes validant les acquis, mais seul l'institut des langues étrangères (ITK) de l'université Loránd Eötvös (ELTE) délivre des diplômes d'État sur la base du cadre européen commun de référence pour les langues (CECRL) : niveaux B1, B2 et C1. Il est à noter que parmi les trente langues proposées par ITK, l'espéranto se classe en 3e position par le nombre de candidats, après l'anglais et l'allemand. De son côté, la Ligue internationale des enseignants d'espéranto (ILEI) agit pour la promotion de l’apprentissage et propose des ressources pédagogiques aux enseignants d’espéranto.

L'Union européenne, par l'intermédiaire de l'agence croate du programme Erasmus, a décidé de soutenir financièrement le programme Lingva akcelilo, qui a pour but d'élaborer des instruments pédagogiques basés sur l'esperanto pour favoriser l'enseignement des langues[12][source insuffisante].

En Chine, l'enseignement de l'espéranto en vue de la préparation du baccalauréat a été autorisé au début de l'année 2018[13][source insuffisante].

L'UNESCO a adopté plusieurs recommandations en faveur de l'espéranto. La première a eu lieu le lors de la 8e conférence générale à Montevideo (Uruguay). De plus, la revue Le Courrier de l'Unesco est disponible en espéranto depuis 2017[14]. En 1980, l’organisation mondiale du tourisme a souligné à Manille[15] « l’importance de connaitre des langues, notamment celles à vocation internationale comme l’espéranto ».

L'espéranto n'est la langue officielle d'aucun pays, mais il est la langue de travail de plusieurs associations à but non lucratif, principalement des associations d'espéranto. La plus grande organisation d'espéranto est l'association mondiale d’espéranto, qui est en relation officielle avec les Nations unies et l'UNESCO dans un rôle consultatif[16].

Nombre de locuteurs

Congrès mondial d'espéranto de 2015 à Lille.
Congrès mondial d'espéranto de 1911 à Anvers.

Le nombre d'espérantophones est difficile à évaluer. Les estimations varient entre cent mille et dix millions[17]. Deux millions est le nombre le plus couramment repris, voire jusqu'à trois millions[18]. Toutefois, on peut affirmer en 2015 qu'il y a 120 pays[1] dans lesquels se trouvent des espérantophones.

Étant une langue construite, l'espéranto est généralement appris comme langue seconde, et très souvent en autodidacte par une méthode ou un cours en ligne. Il existe cependant un certain nombre d'espérantophones natifs. Le linguiste finlandais Jouko Lindstedt estime leur nombre à 1 000[19],[20].

Jouko Lindstedt évalue par l'échelle suivante la capacité à parler l'espéranto dans la communauté espérantophone :

  • 1 000 personnes ont l'espéranto comme langue maternelle ;
  • 10 000 personnes parlent l'espéranto avec un niveau proche d'une langue maternelle ;
  • 100 000 personnes parlent couramment l'espéranto ;
  • 1 000 000 personnes comprennent l'espéranto et le parlent de façon occasionnelle ;
  • 10 000 000 personnes ont plus ou moins étudié l’espéranto au cours de leur vie.[21]

Sidney S. Culbert, ancien professeur de psychologie de l'université de Washington, espérantophone lui-même, est arrivé, en comptabilisant pendant vingt ans dans de nombreux pays les espérantophones à l'aide d'une méthode par échantillonnage[22], à une estimation de 1,6 million de personnes parlant l'espéranto avec un niveau professionnel. Ses travaux ne concernaient pas que l'espéranto et faisaient partie de sa liste d'estimation des langues parlées par plus d'un million de personnes, liste publiée annuellement dans le World Almanac and Book of Facts (en). Comme dans l'Almanach, toutes ses estimations étaient arrondies au million le plus proche, c'est le nombre de deux millions d'espérantophones qui a été retenu et fréquemment repris depuis. Culbert n'a jamais publié de résultats intermédiaires détaillés pour une région ou un pays particulier, ce qui rend difficile l'analyse de la pertinence de ses résultats.

Caractéristiques linguistiques

Fundamento de Esperanto, publié en 1905.

Classification

En tant que langue construite, l'espéranto n'est généalogiquement rattaché à aucune famille de langues vivantes. Cependant, une part de sa grammaire et l'essentiel de son vocabulaire portent à le rattacher aux langues indo-européennes. Ce groupe linguistique a constitué le répertoire de base à partir duquel Ludwik Lejzer Zamenhof a puisé les racines de la langue internationale.

Cependant, la typologie morphologique de l'espéranto l'écarte significativement des langues indo-européennes, qui sont largement à dominante flexionnelle. En effet, il consiste en monèmes invariables qui se combinent sans restriction, ce qui l'apparente aux langues isolantes. En espéranto, comme en chinois, on dérive « mon » (mia), de « je » (mi) et « premier » (unua) de « un » (unu). Sa tendance à accumuler, sans en brouiller les limites, des morphèmes porteurs d'un trait grammatical distinct le rapproche aussi des langues agglutinantes.

Phonétique et écriture

L'espéranto possède vingt-huit phonèmes : cinq voyelles et vingt-trois consonnes. Ils sont transcrits au moyen d'un alphabet de vingt-huit lettres : vingt-deux lettres de l'alphabet latin (q, w, x et y ne sont pas utilisés, sauf dans les expressions mathématiques), et six lettres utilisant deux diacritiques (accent circonflexe et brève), propres à l'espéranto : ĉ, ĝ, ĥ, ĵ, ŝ, ŭ. L'orthographe est parfaitement phonologique : chaque lettre représente invariablement et exclusivement un seul phonème.

En plus de leur rôle premier de transcription, les lettres diacritées rappellent en espéranto l’orthographe ou la prononciation d’autres langues. Par exemple, poŝto « poste », rappelle graphiquement et phonétiquement le mot pošta du tchèque, du slovaque, du slovène, du serbo-croate, mais aussi par la graphie les mots français, anglais, néerlandais, allemand poste, post, post, Post, et par le son le bulgare поща (prononcé ['pɔʃtɐ]). L'espéranto aboutit souvent ainsi à un juste milieu rappelant plusieurs langues sources : ainsi ĝardeno [d͡ʒarˈdeno] rappelle le français jardin, l'allemand Garten, le néerlandais gaarden, l'italien giardino et l'anglais garden.

La langue comporte un accent tonique toujours situé sur l'avant-dernière syllabe des mots. Le système vocalique comporte cinq timbres : a e i o u, correspondant aux valeurs du français â é i ô ou, comme dans de nombreuses langues, sans distinction de quantité.

Fichier audio
Extraits du discours de Zamenhof en 1905
noicon

Le cadre sonore ci-après, permet d'écouter un court extrait du discours de Zamenhof prononcé lors du premier congrès mondial d'espéranto en 1905 à Boulogne-sur-Mer (wikisource). Cet extrait lu par Claude Piron a été enregistré lors de la rencontre commémorative de 2005 à Boulogne-sur-Mer. Ces extraits sont reproduits et traduits dans la page de description du fichier.

Les lettres diacritées peuvent poser quelques problèmes typographiques à l'imprimerie ou l'informatique (plus particulièrement avec les systèmes informatiques anciens). Pour les francophones, le clavier BÉPO et la variante Xorg du clavier AZERTY permettent d’accéder de façon native aux caractères accentués de l'espéranto. Des logiciels peuvent également être installés pour faciliter la frappe des six lettres diacritées[23].

Grammaire

Le Plena Manlibro de Esperanta Gramatiko, ouvrage de grammaire propre à l’espéranto.

La grammaire de l'espéranto se fonde sur seize principes énoncés dans le Fundamento de Esperanto, adopté comme référence intangible au premier congrès mondial d’espéranto de Boulogne-sur-Mer en 1905. Ils ne constituent cependant qu'un cadre dans lequel ont été progressivement dégagées des règles plus détaillées.

Chaque radical peut recevoir des morphèmes invariables signalant chacun un trait grammatical précis : —o pour les substantifs, —a pour les adjectifs, —e pour les adverbes dérivés, —j pour le pluriel et —n pour le cas accusatif.

La régularité de la langue permet d’en expliquer la grammaire de façon aisée sans avoir recours à la terminologie technique habituelle, parfois difficile pour certains néophytes. L’ouvrage Plena Manlibro de Esperanta Gramatiko propose ainsi un panorama complet de la grammaire espérantophone sans vocabulaire complexe.

Conjugaison

Les verbes se caractérisent par une série de seulement six désinences ou finales détachables invariables qui forment une conjugaison, avec, mêlant des valeurs temporelles pour l'indicatif et modales : —i pour l'infinitif, —is pour le passé, —as pour le présent, —os pour le futur, —us pour le conditionnel, —u pour le volitif. Ces terminaisons sont les mêmes pour toutes les personnes et tous les verbes.

Corrélatifs

L'espéranto utilise également comme déterminants un ensemble de pronoms-adjectifs assemblés systématiquement à partir d'une initiale et d'une finale caractéristiques :

D'autres finales produisent des adverbes circonstanciels : -e (lieu), -am (temps), -el (manière), -al (cause), -om (quantité). Les mots formés sur ces bases sont désignés collectivement comme corrélatifs ou (en espéranto même) tabel-vortoj[24].

Par exemple :

  • kiu signifie « qui » ou « quel » ;
  • ĉiu signifie « chacun » ou « chaque » ;
  • neniu signifie « personne » ou « aucun » ;
  • iam signifie « à un moment » ;
  • ĉiam signifie « toujours » ;
  • neniam signifie « jamais ».

Particules invariables

L'espéranto recourt également à diverses particules invariables dans l'organisation de la phrase : il s'agit de conjonctions de coordination (kaj « et », « ou », do « donc », sed « mais »…) ou de subordination (ke « que », ĉar « parce que », dum « pendant que », se « si »…) qui précisent les rapports entre propositions, et des adverbes simples à valeur spatiale, temporelle, logique ou modale. Par exemple, ne marque la négation, et ĉu marque l'interrogation globale.

Syntaxe de phrase

L'ordre des mots est relativement libre en espéranto : grâce à la marque -n du complément d'objet (accusatif), toutes les constructions (SOV, VSO, OSV, etc.) sont acceptées ; l’ordre le plus fréquent est toutefois sujet-verbe-objet suivi du complément circonstanciel. L'usage d'autres dispositions est courant notamment en cas de mise en relief afin de placer l'élément le plus important en début de phrase. Il existe cependant certaines règles et tendances bien établies[25] :

  • l'article défini se place au début du groupe nominal ;
  • l'adjectif précède généralement le substantif ;
  • les prépositions se placent au début du groupe prépositionnel ;
  • les adverbes précèdent généralement l'expression qu'ils modifient ;
  • les conjonctions précèdent la proposition qu'elles introduisent.

D'une manière générale, on peut dire que l'ordre des syntagmes est libre mais que la disposition des morphèmes à l'intérieur d'un syntagme est fixée par l'usage.

Certaines tendances expressives peuvent sembler peu communes par rapport à l'usage du français :

  • les prépositions sont volontiers préfixées au verbe, produisant des doublets entre formulation intransitive avec groupe prépositionnel et formulation transitive à verbe préfixé : Ni diskutos pri la afero ~ Ni pridiskutos la aferon. « Nous discuterons de l'affaire. » (Tous les verbes à préposition préfixée ne forment cependant pas doublet : par exemple, altiri « attirer » diffère de tiri al « tirer à ».) ;
  • un syntagme peut facilement se condenser en mot composé : Knabo kun bluaj okuloj. ~ Bluokula knabo. « Un garçon aux yeux bleus. » ;
  • l'emploi de l'adverbe dérivé (issu de l'usage poétique) est très étendu dans la langue courante (orale comme écrite).

Du fait de l'absence de restriction sur la combinaison des monèmes, une même phrase peut se formuler de multiples façons :

  • mi enigis ĉion en la komputilon. ~ Mi enkomputiligis ĉion. ~ Mi ĉion enkomputiligis. « J'ai tout introduit dans l'ordinateur. » ;
  • mi iros al la hotelo per biciklo. ~ Mi alhotelos bicikle. ~ Mi biciklos hotelen. « J'irai à l'hôtel à vélo. » ;
  • mi iros al la kongreso per aŭto. ~ Mi alkongresos aŭte. ~ Mi aŭtos kongresen. « J'irai au congrès en voiture. » ;
  • ni estas de la sama opinio. ~ Ni havas la saman opinion ~ Ni samopinias. « Nous sommes du même avis. ».

L'espéranto peut ainsi alternativement se montrer synthétique ou analytique.

Vocabulaire

Dictionnaire.

Sources lexicales

Au même titre que la majorité des langues européennes dont le français qui tirent leurs racines en partie du latin et du grec et qui empruntent à l’anglais ou à d’autres langues, l’espéranto est une langue construite a posteriori : elle tire ses bases lexicales de langues existantes. Les principales sources sont, par importance décroissante[26] :

Les mots provenant d'autres langues désignent surtout des réalités culturelles spécifiques : boaco « renne » (du same), jogo « yoga » (du sanskrit), haŝioj « baguettes (pour manger) » (du japonais), etc.

Les morphèmes grammaticaux doivent beaucoup au latin et dans une moindre mesure au grec ancien. Une partie est construite a priori sans référence évidente à des langues existantes, ou profondément remaniée à partir d'éléments rappelant ceux de langues préexistantes, comme la série des corrélatifs.

Zamenhof a suivi diverses méthodes pour adapter ses sources lexicales à l'espéranto : adaptation phonétique orthographique, à partir de la prononciation (ex. : trotuaro du français trottoir) ou à partir de la forme écrite (ex. : birdo de l’anglais bird « oiseau »). Lorsque plusieurs de ses sources comportaient des mots proches par la forme et le sens, Zamenhof a souvent créé un moyen terme (ex. : ĉefo « chef »).

Le vocabulaire de l'espéranto comprenait quelques centaines de radicaux dans le Fundamento de Esperanto de 1905. En 2002, après un siècle d'usage, le plus grand dictionnaire monolingue en espéranto (Plena Ilustrita Vortaro de Esperanto), en comprend 16 780 correspondant à 46 890 éléments lexicaux.

Formation des mots

La formation des mots espéranto est traditionnellement décrite en termes de dérivation lexicale par affixes et de composition. Cette distinction est cependant relative, dans la mesure où les « affixes » sont susceptibles de s’employer aussi comme radicaux indépendants : ainsi le diminutif -et- forme l’adjectif eta « petit (avec idée de faiblesse) », le collectif -ar- forme le nom aro « groupe », le causatif -ig- forme le verbe igi « faire, rendre », etc.

Les deux principes essentiels de formation des mots sont :

  • l’invariabilité des radicaux : contrairement à ce qui peut se passer par exemple en français, en anglais, en allemand… la dérivation ne provoque aucune altération interne des monèmes : vidi « voir », vido « vue », nevidebla « invisible »
  • l’ordre de composition où l’élément déterminant précède le déterminé : kanto-birdo « oiseau chanteur » et birdo-kanto « chant d’oiseau », vel-ŝipo « bateau à voile, voilier » et ŝip-velo « voile de bateau », cent-jaro « centenaire (= centième année) » et jar-cento « siècle (= centaine d’années) ». Pour l'initiation à la langue, Zamenhof recommandait de séparer par un petit tiret les différents radicaux, mais dans l'écriture courante, ces petits tirets sont ensuite supprimés.

En théorie, il n’existe pas d’autre limite que sémantique à la combinatoire des radicaux. Il en résulte un certain schématisme qui aboutit à la formation systématique de longues séries sur le même modèle, parfois sans équivalent direct dans d’autres langues. Par exemple :

  • à côté de sam-land-ano « compatriote », littéralement membre du même pays, et sam-klas-ano « camarade de classe », il existe sam-ide-ano « partisan du même idéal » et sam-aĝ-ulo « personne du même âge »
  • pour exprimer le fait de prendre une couleur, le français possède « rougir, jaunir, verdir, bleuir, blanchir, brunir, noircir ». L’espéranto possède comme équivalents respectifs ruĝ-iĝi, flaviĝi, verdiĝi, bluiĝi, blankiĝi, bruniĝi, nigriĝi mais le procédé y est illimité : griziĝi « devenir gris », oranĝiĝi « devenir orange », etc.
  • il est possible de former le contraire de n’importe quelle notion par le préfixe très fréquent mal- : ĝoja « gai » ~ malĝoja « triste », helpi « aider » ~ malhelpi « gêner », multe « beaucoup » ~ malmulte « peu », etc.[27]

Ce schématisme a pour effet de diminuer le nombre de radicaux nécessaires à l’expression au profit de dérivés, réduisant ainsi la composante immotivée du lexique. Le procédé pouvant parfois paraître lourd, la langue littéraire a cependant introduit quelques radicaux alternatifs à titre de variantes stylistiques : par exemple olda « vieux » peut doubler maljuna (formé sur juna « jeune ») ou malnova (formé sur nova « neuf, nouveau »). L’usage courant tend cependant à préférer les dérivés[28],[29],[30].

Le système de dérivation s’adapte aisément aux besoins en mots nouveaux. Ainsi, du mot reto (« réseau, filet »), on a extrait le radical ret- pour former tout un ensemble de mots liés à Internet : retadreso (« adresse de courriel »), retpirato (« pirate informatique »), etc.

Exemples

Phrases simples

Le tableau ci-dessous présente quelques mots et phrases ainsi que leurs transcriptions en alphabet phonétique international :

Français Espéranto IPA
Salut, bonjour Saluton [sa.ˈlu.ton]
Oui Jes [ˈjes]
Non Ne [ˈne]
Bonsoir Bonan vesperon [ˈbo.nan ves.ˈpe.ron]
Bonne nuit Bonan nokton [ˈbo.nan ˈnok.ton]
À plus (tard) Ĝis (la) revido [ˈdʒis (la) re.ˈvi.do]
Comment vous appelez-vous ? Kio estas via nomo? [ˈki.o ˌes.tas ˌvi.a ˈno.mo]
Je m’appelle Marc. Mia nomo estas Marko [ˌmi.a ˈno.mo ˌes.tas ˈmar.ko]
Comment allez-vous ? Kiel vi fartas? [ˈki.el vi ˈfar.tas]
Je vais bien. Mi fartas bone [mi ˈfar.tas ˈbo.ne]
Parlez-vous espéranto ? Ĉu vi parolas Esperante? [ˈtʃu vi pa.ˈro.las ˌes.pe.ˈran.te]
Je ne vous comprends pas. Mi ne komprenas vin [mi ˌne kom.ˈpre.nas ˌvin]
Bien Bone [ˈbo.ne]
Merci Dankon [ˈdan.kon]
De rien Ne dankinde [ˌne.dan.ˈkin.de]
S’il vous plaît Bonvolu [bon.ˈvo.lu]
Pardon, excusez-moi Pardonu min [par.ˈdo.nu ˈmin]
À vos souhaits ! Sanon! [ˈsa.non]
Félicitations Gratulon [ɡra.ˈtu.lon]
Je t’aime. Mi amas vin [mi ˈa.mas ˌvin]
Une bière, s’il vous plaît. Unu bieron, mi petas [ˈu.nu bi.ˈe.ron, mi ˈpe.tas]
Où sont les toilettes ? Kie estas la necesejo? [ˈki.e ˈes.tas ˈla ˌne.tse.ˈse.jo]
Qu’est-ce que c’est ? Kio estas tio? [ˈki.o ˌes.tas ˈti.o]
C’est un chien. Tio estas hundo [ˈti.o ˌes.tas ˈhun.do]
Je suis débutant en espéranto. Mi estas komencanto de Esperanto [mi ˈes.tas ˌko.men.ˈtsan.to de ˌes.pe.ˈran.to]

Texte analysé en constituants

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Texte analysé
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Lastaj vortoj
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La akcento estas sur la antaŭlasta silabo. La kernon de la silabo formas vokalo. Vokaloj ludas grandan rolon en la ritmo de la parolo. Substantivoj finas per -o, adjektivoj per -a. La signo de la pluralo estas -j. La pluralo de « lasta vorto » estas « lastaj vortoj ».

« -o » = substantifs
« -a » = adjectifs
« -j » = pluriel
« -n » = accusatif

Traduction : L'accent tonique est sur l'avant-dernière syllabe. Le cœur de la syllabe est formé par une voyelle. Les voyelles jouent un grand rôle dans le rythme de la parole. Les substantifs finissent par -o, les adjectifs par -a. La marque du pluriel est -j. Le pluriel de « lasta vorto » (« dernier mot ») est « lastaj vortoj ».

Histoire

Photographie de Ludwik Lejzer Zamenhof à l'âge de 20 ans (1879)
Langue Internationale, premier manuel d'apprentissage (Ludwik Lejzer Zamenhof, 1887, édition française)
Coupon à retourner à Zamenhof : « Je soussigné, promets d’apprendre la langue internationale proposée par le docteur Esperanto, s’il se trouve que dix millions de personnes ont formulé publiquement la même promesse. »

L'idée d'une langue équitable pour la communication internationale germa à Białystok au cours des années 1870, dans la tête d'un enfant juif polonais nommé Ludwik Lejzer Zamenhof. Quelques années plus tard, à l'âge de 19 ans, il ébaucha son premier projet qu'il présenta à ses camarades de lycée. Ce n'est qu'après ses études en ophtalmologie qu'il publia en langue russe, à Varsovie, le 26 juillet 1887, l'ouvrage Langue Internationale, premier manuel d'apprentissage. Il fut suivi au cours des deux années suivantes de versions dans plusieurs autres langues. Dans ce manuel, Zamenhof avait défini ainsi le but de la Langue Internationale :

« Qu’on puisse l’apprendre, comme qui dirait, en passant [et] aussitôt en profiter pour se faire comprendre des personnes de différentes nations, soit qu’elle trouve l’approbation universelle, soit qu’elle ne la trouve pas [et que l’on trouve] les moyens de surmonter l’indifférence de la plupart des hommes, et de forcer les masses à faire usage de la langue présentée, comme d’une langue vivante, mais non pas uniquement à l’aide du dictionnaire. ».

Très vite, l'espéranto rencontra un vif succès, dépassant même les espérances de son initiateur. Le nombre de personnes qui apprirent la langue augmenta rapidement, au départ principalement dans la Russie impériale et en Europe de l'Est, ensuite en Europe occidentale et aux Amériques. L'espéranto pénétra au Japon à la suite de la guerre russo-japonaise de 1904-1905. En Chine, les premiers cours furent donnés à Shanghai dès 1906 et à Canton dès 1908. Durant ces premières années, l'espéranto fut essentiellement une langue écrite, les échanges se faisant essentiellement par correspondance et par l'intermédiaire de périodiques spécialisés.

Le premier congrès mondial d’espéranto se déroula en 1905 à Boulogne-sur-Mer. Ce premier congrès marqua un tournant important pour l'espéranto. La langue qui était jusqu'alors essentiellement écrite fut dès lors de plus en plus utilisée pour des échanges directs, notamment lors de rencontres internationales et des congrès qui se déroulent depuis chaque année, mis à part les interruptions dues aux deux guerres mondiales. C'est au cours du premier congrès de 1905 que fut publié le Fundamento de Esperanto fixant les bases de la langue.

La Première Guerre mondiale mit un frein au développement de l'espéranto, qui reprit cependant au cours des années 1920 dans l’enthousiasme généré par les espoirs de paix issus de la création de la Société des Nations. Mais les années 1930 avec la montée en puissance des régimes totalitaires, puis la Seconde Guerre mondiale marquèrent un nouveau coup d'arrêt au développement de l'espéranto.

Malgré des conditions difficiles liées aux bouleversements politiques de l'après-guerre, l'apprentissage de l'espéranto a redémarré à partir des années 1950 essentiellement grâce à l'apparition de nombreuses associations et clubs d'espéranto. Au cours de cette deuxième moitié du XXe siècle, les publications en espéranto connaissent un certain succès et les rencontres espérantophones se multiplient.

C'est surtout avec la généralisation d'Internet et à l'initiative de jeunes espérantophones que les années 2000 sont le début d'un renouveau de l'espéranto. Des méthodes d'apprentissage en ligne souvent gratuites sont apparues et de nouveaux usages se sont développés au travers des réseaux sociaux et des échanges directs.

Apprentissage de l'espéranto

Un livre d'étude pour apprenants confirmés (B1/B2).

L'apprentissage de l'espéranto repose en grande partie sur l'utilisation de méthodes autodidactes ou de cours traditionnels via des associations ou des clubs locaux. Toutefois, quelques établissements d'enseignement ont introduit des cours d'espéranto à leur programme.

Au début des années 2000, l'apparition de méthodes d'apprentissage en ligne de l'espéranto, souvent gratuites, les plus connues étant lernu! et Kurso de Esperanto (eo) (kurso.com.br), a permis de toucher un public nouveau, en particulier parmi les jeunes. Le , le site d’apprentissage de langues en ligne, Duolingo, met en ligne la version bêta d'apprentissage de l'espéranto. En 2017, la méthode compte plus d’un million d’apprenants[31]. Viendront aussi des applications d’apprentissage pour téléphone portable, comme L’espéranto en 12 jours, une adaptation de la Zagreba metodo.

Tests de niveaux et CECR

Les tests de niveaux en espéranto sont organisés suivant deux filières :

Actuellement seul l'institut des langues de l'université Eötvös Loránd (Budapest, Hongrie) délivre des diplômes officiels de connaissance de l'espéranto. Depuis 2009, ces diplômes sont fondés sur le cadre européen commun de référence pour les langues (CECR) et disponibles dans les niveaux B1, B2 et C1. Près de 2 000 personnes possèdent un tel diplôme à travers le monde : en 2017, environ 570 au niveau B1, 590 au B2 et 820 au C1[32].

La Ligue internationale des enseignants d'espéranto (ILEI) propose quant à elle des examens qui testent non seulement la maîtrise de la langue, mais également la connaissance de la culture véhiculée par l’espéranto : associations, principaux acteurs, Espérantieetc.

Intérêt pédagogique de l'espéranto

L’Institut de pédagogie cybernétique de Paderborn (Allemagne) a comparé les durées d’apprentissage de plusieurs groupes d’élèves francophones, de niveau baccalauréat, pour atteindre un niveau comparable dans quatre langues différentes : l’espéranto, l’anglais, l’allemand et l’italien. Les résultats sont les suivants : pour atteindre ce niveau, 2 000 heures d’études de l’allemand produisaient un niveau linguistique équivalent à 1 500 heures d’étude de l’anglais, 1 000 heures d’étude de l’italien et 150 heures d’étude de l’espéranto[33],[34].

Ces études furent reprises et confirmées par d'autres études dans[35][source insuffisante] le rapport remis au ministère italien de l'enseignement public (ministère de l'instruction), ainsi que dans le Rapport Grin.

Cette facilité de l'espéranto fut constatée par Inazō Nitobe, membre de l’Académie Impériale du Japon, homme de science, Secrétaire général adjoint de la Société des Nations, qui avait participé au congrès mondial d’espéranto de Prague en 1921 pour se rendre compte par lui-même de l’efficacité de cette langue. Dans un rapport intitulé Esperanto as an International Auxiliary Language (L’espéranto comme langue auxiliaire internationale), publié en 1922, il avait écrit : « On peut affirmer avec une certitude absolue que l’espéranto est de huit à dix fois plus facile que n’importe quelle langue étrangère et qu’il est possible d’acquérir une parfaite élocution sans quitter son propre pays. Ceci est en soi un résultat très appréciable. »[36][source insuffisante].

Lorsque l'on a déjà appris une langue étrangère, l'apprentissage d'une nouvelle langue étrangère est plus facile, d'où l'intérêt de commencer par une langue étrangère facile. Des études menées sur des échantillons comparatifs d'élèves ont montré que les élèves qui avaient d'abord étudié l'espéranto avant de passer à l'étude d'une langue étrangère atteignaient un meilleur niveau, dans cette langue, que le groupe témoin qui pendant la même durée n'avait étudié que cette langue étrangère.

Du point de vue de la graphie, l’espéranto fait partie des langues dites « transparentes » : comme pour le croate, le serbe, l'espagnol, l'italien, le slovène ou le tchèque, la correspondance entre graphèmes et phonèmes est simple, stable et régulière. Une langue complètement transparente suit deux principes : à un phonème correspond une seule graphie ; à une seule graphie correspond un seul phonème. À l’opposé, les langues dites « opaques » comme l'anglais ou « semi-opaques » comme le français ont des règles de correspondance grapho-phonémique complexes et irrégulières[37].

Un dyslexique utilisant une langue « opaque » devient souvent dysorthographique. Il est préférable de choisir l'apprentissage d’une langue transparente pour faciliter l'apprentissage des langues chez les enfants dyslexiques[38]. L'espéranto permettrait d'aider les dyslexiques en milieu scolaire[39].

D'autre part, l'espéranto peut aider grâce à sa construction signalant pour chaque mot un trait grammatical précis, à faire comprendre les liens entre la « fonction dans la phrase » et l'« orthographe grammaticale » de chaque mot.

Claude Piron qui fut pendant 5 ans traducteur-interprète au siège de l’ONU à New York pour l’anglais, le chinois, l’espagnol et le russe : « Un cours d'espéranto organisé dans une optique propédeutique améliore considérablement le succès des élèves dans l'étude des langues étrangères. […] Il m'a déconditionné des habitudes arbitraires de ma langue maternelle sans que je doive me reconditionner d'emblée selon les habitudes arbitraires d'un peuple étranger, bref, il m'a donné une avance sur mes camarades que je n'ai jamais perdue[40] ».

Espéranto et militantisme

80e congrès de l'association mondiale anationale de 2007.

L'espéranto est soutenu par un réseau de militants regroupés dans de nombreuses associations. Au niveau international, ce réseau d'associations nationales et d'associations thématiques est fédéré par l'association mondiale d’espéranto.

L'ensemble des militants favorables à l'espéranto est souvent désigné comme Le mouvement espérantophone ou même tout simplement Le mouvement espérantiste. Toutefois, cette appellation est trompeuse dans la mesure où les espérantophones ne constituent pas un ensemble homogène. Dans les faits, les motivations, les aspirations et les idées des espérantophones reflètent la diversité des opinions présentes dans le monde. Il est également à noter que seule une minorité d’espérantophones sont membres d'associations d'espéranto.

De façon générale, l'essentiel du militantisme consiste à promouvoir l'apprentissage de l'espéranto et son usage dans la communication internationale. La défense de cet objectif s'appuie sur différentes études et rapports montrant les avantages de l’espéranto pour cet usage :

  • équité dans les échanges, car aucun locuteur n'a l'avantage d'utiliser, voire d'imposer sa langue nationale, une forme de courtoisie pour assurer une neutralité linguistique maximale.
  • plus grande facilité d'apprentissage, comparé aux autres langues ;
  • avantages économiques, par rapport à d'autres solutions comme le tout-anglais, comme le montre le rapport Grin.

Un exemple de cet objectif militant est l'apparition récente du mouvement Europe Démocratie Espéranto qui promeut l'usage de l'espéranto comme langue commune équitable en Europe en complément des langues officielles.

En , le ministère français de l’Éducation nationale accepte que l’espéranto puisse être enseigné à titre expérimental. Cette décision fait suite à une demande de militants encouragés par le résultat considéré par ces mêmes militants comme un succès d'une pétition lancée par des associations pro-espéranto pour son ajout comme langue optionnelle au bac, qui avait recueilli 33 300 signatures[41], mais qui n'est de la part du ministère, que l'application de dispositions générales concernant n'importe quelle langue.

Culture espérantophone

Évolution des usages de la langue

Carte des hébergements proposés par le Pasporta Servo en 2015.

L’espéranto a longtemps été une langue plus écrite que parlée. Dès le début, toutefois, son usage oral a été assuré par les clubs d'espéranto, disséminés un peu partout en Europe, en Asie orientale et dans quelques pays d'Amérique. Les personnes intéressées s'y retrouvaient une fois par semaine ou par mois pour pratiquer la langue et accueillir des voyageurs étrangers qui l'avaient apprise. Au début du XXe siècle sont apparus de nombreux écrivains, hommes et femmes, poètes…, qui, ayant adopté l'espéranto comme langue de leurs écrits, lui ont donné sa littérature. Dans la résistance à l'occupation japonaise, des artistes coréens, notamment des réalisateurs qui seront à l'origine du cinéma nord-coréen, choisissent ainsi de se regrouper en 1925 dans une association ayant choisi un nom en espéranto : la Korea Artista Proletaria Federacio (KAPF), ou Association coréenne des artistes prolétariens.

En fait, l'usage oral de la langue, de la simple conversation à la musique, s'est surtout développé lorsque les voyages sont devenus plus accessibles et que les rencontres internationales espérantophones se sont multipliées. La mise en place de services d'hébergement chez l'habitant, comme le Pasporta Servo, et l'apparition de l'enregistrement sonore sur cassette, de même que les programmes de conversation téléphonique par ordinateur (voix sur IP), ont contribué à faire progresser l'utilisation orale de la langue. Avec l'Internet, l'espéranto a trouvé un nouveau vecteur de communication, tant pour la langue écrite que pour la langue parlée[42]. Il est à noter que la version de Wikipédia en espéranto a dépassé le cap de 200 000 articles le . Amikumu[43][source insuffisante], une application mobile gratuite destinée à faciliter les contacts entre espérantophones est lancée le .

Il faut également noter qu'avec l'accroissement du nombre de locuteurs, l'espéranto est devenu la langue maternelle d'enfants issus de couples espérantophones.

En défendant son idée à travers l’Europe, le Docteur Zamenhof s'est attiré la sympathie de nombreuses personnalités politiques, telles que Gandhi ainsi que la communauté internationale du Bahaïsme.

Littérature

Service de librairie lors d'un congrès (Reykjavik - 2013).

La littérature en espéranto se compose à la fois d'œuvres originales et d'œuvres traduites. Quelques ouvrages originaux :

Parmi les œuvres traduites, on trouve des ouvrages aussi divers que Le Petit Prince, la Bible, le Coran, le Manifeste du parti communiste, une biographie du peintre Camille Pissarro par son fils Ludovic-Rodo.

La majorité des ventes d'ouvrages en espéranto est réalisée par les associations espérantophones. L'une des plus importantes librairies d'ouvrages en espéranto est le libro-servo de l’association mondiale d’espéranto, qui compte plus de 6 000 références[44][source insuffisante].

Presse

Il existe de nombreuses publications originales en espéranto. Parmi les plus connues, on trouve :

À côté de la presse papier, on trouve un certain nombre de sites de presse uniquement disponibles en version électronique. Les plus connus sont :

Deux revues paraissent en France et en français : Le Monde de l'Espéranto et Espéranto info.

Musique

Clip de la chanson en espéranto La fina venk’ par i.d.c. (Éric Languillat).

La musique espérantophone est presque aussi ancienne que l'espéranto. La Espero, qui deviendra l'hymne du mouvement espérantophone, a été écrit par Zamenhof, peu après la publication du premier manuel, Langue Internationale, paru en 1887.

La musique espérantophone a suivi les évolutions technologiques, avec l’apparition des premiers vinyles dans les années 1960, puis l'apparition des musiques rock dans les années 1980, puis des disques compacts dans les années 1990 et enfin des formats électroniques téléchargeables via Internet depuis les années 2000.

Actuellement[Quand ?] les musiciens espérantistes les plus connus sont JoMo (Jean-Marc Leclercq) de France, Martin Wiese de Suède, Jonny M d’Allemagne, Kim J. Henriksen du Danemark, Ĵomart et Nataŝa du Kazakhstan et de Russie, Georgo Handzlik de Pologne, les groupes Kajto dont les membres principaux sont néerlandais, Dolchamar de Finlande, La Pafklik (eo) de France, La Perdita Generacio de Suède.

La musique espérantophone est naturellement mise en scène lors des différentes rencontres internationales[45].

Radio

Les premières émissions de radio en Espéranto datent de 1922 et furent émises à Newark Ce lien renvoie vers une page d'homonymie (États-Unis[Où ?]) et Londres (Royaume-Uni). En 2012, les émissions sont principalement des podcasts, mais certaines radios diffusent une émission hebdomadaire comme Radio Havana Cuba, ou Radio libertaire à Paris.

La première radio diffusant entièrement en espéranto, Muzaiko, est apparue le . Elle émet sur Internet grâce à la technologie de lecture en continu. Son programme se compose de musique espérantophone, d'interviews, et d'informations généralistes[46].

Radioamateurs

Sur les bandes radioamateurs l'espéranto est utilisé aux fréquences[47] :

Cinéma

L'essentiel des films tournés originellement en espéranto sont des courts métrages.

Seuls trois longs métrages ont été tournés directement en espéranto :

Plusieurs films ont par ailleurs été doublés ou sous-titrés en espéranto[45].

Dans le film de Charlie Chaplin, Le Dictateur, les plaques des magasins du ghetto juif sont en espéranto, catalogué comme « langue juive internationale » par Hitler dans Mein Kampf[48].

Il est aussi possible d'entendre de l'espéranto dans la version originale du film Bienvenue à Gattaca. En effet, les haut-parleurs de l'entreprise dans laquelle travaille le protagoniste de l'histoire font les annonces d'abord en espéranto puis en anglais[48].

L'espéranto en contexte professionnel

Bien qu'il soit couramment utilisé dans un contexte associatif, l'usage de l'espéranto dans un contexte professionnel est jusqu'à présent resté relativement limité. On peut citer l'exemple de l'association Réinsertion et Espéranto qui de 1997 à 2008 forma et embaucha en CDI à Montpellier des jeunes chômeurs avec l'espéranto dans le cadre du dispositif Emplois-jeunes.

Afin d'encourager l'usage de l'espéranto, dans un contexte professionnel, quelques chefs d'entreprises se sont regroupés au sein d'une association, Entreprise-Esperanto[49] dont l'objectif est d'accompagner les entreprises ayant des besoins de communication internationale et qui souhaitent utiliser l'espéranto.

Évolutions et dérivés de l'espéranto

Dès l'origine de l'espéranto, des propositions de réformes de la langue sont proposées, y compris par Zamenhof lui-même. Cependant, la communauté espérantophone fut toujours très réticente à de telles réformes et tous les projets échouèrent.

De fait, le projet de réforme le plus connu est celui qui fut présenté par Louis de Beaufront et Louis Couturat en 1908. À l'époque, il provoqua une crise au sein du mouvement espérantophone. Les partisans de ce projet quittèrent le mouvement pour créer une nouvelle langue construite : l'ido. Au xxie siècle, l’ido ne compte que quelques centaines de locuteurs, même si on trouve quelques sites en ido, dont Wikipédia.

D'autres propositions de réforme d'ampleur plus limitée virent le jour ultérieurement notamment le riisme, mais n'obtinrent que des soutiens limités.

De fait, l'espéranto parlé aujourd'hui est très proche de ce qu'il était à l'origine[réf. nécessaire].

Utilisation du mot espéranto en tant que métaphore

Le nom espéranto fonctionne comme un nom propre quand il désigne la langue même, mais est parfois utilisé comme nom commun (dans une sorte d'antonomase) pour représenter une langue commune ou un moyen commun dans un domaine donné où cette mise en commun ne va pas de soi. Cette utilisation du mot espéranto peut aussi bien être prise dans un sens positif que dans un sens négatif.

Dans le domaine de l'informatique, Java fut qualifié d'« espéranto des langages de programmation »[50], en particulier à cause de sa simplicité et de son universalité (indépendance par rapport au système d'exploitation), métaphore reprise pour XML, qualifié à son tour d'espéranto du système d'information[51].

En Allemagne et en Autriche, les opposants à l'euro le décrivirent comme Esperantogeld ou Esperantowährung (Geld = « argent » ; Währung = « Monnaie »)[52], voulant dire par là qu'un tel projet international était intrinsèquement voué à l'échec.

Autobus ayant pour terminus Esperanto à Varsovie.

Notes et références

  1. a b et c (fr) « Qu’est-ce que l’UEA ? » : page en espéranto de l’association mondiale d'espéranto
  2. Rem. "Au lieu de créer, Zamenhof a dégagé des langues européennes les éléments communs de vocabulaire et de structure qu'elles renferment", Antoine Meillet, “Les langues dans l'Europe nouvelle“, p. 277.
  3. « Après une demi-heure je pouvais parler plus l'espéranto que le japonais, que j'avais étudié pendant quatre ans dans l’école secondaire » in Richard Delamore (eo), « Kiel la esperantistoj povas denove avangardi? », Kontakto 277 (2017:1), p. 20, TEJO.
  4. Le rapport Grin rédigé en 2005 met en lumière les coûts économiques en lien avec l’utilisation d’une langue internationale comme l’espéranto. Rapport sur le site de la documentation française
  5. « Parlerons-nous bientôt une langue universelle grâce aux ordinateurs ? », sur lesinrocks.com, (consulté le )
  6. (en) « Esperanto as a second language », sur itk.hu, (consulté le )
  7. a et b (it)L’Esperanto nella scienza all’epoca di internet, Amri Wandel, Eccademia di Esperanto (Membro del consiglio dell’UEA per le questioni scientifiche e tecniche). URL consulté le 2 avril 2009.
  8. « Des lycéens à l’épreuve de l’espéranto », article du publié dans le Journal de la Haute-Marne.
  9. « Bac blanc d’espéranto », article du sur le site Internet Esperanto.Paris.
  10. « Le Ministère de l’Éducation nationale incite les établissements scolaires à mettre en place des expérimentations d’enseignement de l’espéranto », article du no 599 du magazine Le Monde de l'Espéranto, p. 5.
  11. « L’espéranto dans les collèges et lycées en  ? », sur le site du Groupement des enseignants espérantophones.
  12. [1].
  13. [2].
  14. (eo) « Unesko-Kuriero Aprilo-Junio 2017 » [PDF], sur http://uea.org/, 13 juillet 2017 à 20:54 (consulté le Date invalide (20 juillet 2017 à 11:24)).
  15. (eo) Mireille Grosjean, « Esperanto instruado-edukado en tutmonda skalo », in Internacia Pedagogia Revuo (eo) no 47-17/3, p. 19, .
  16. UNESCO, « L’Association Universelle d’Esperanto (UEA) se joint à la célébration », Journée mondiale du livre et du droit d'auteur, sur UNESCO (consulté le ).
  17. Christian Lavarenne, « Interview avec Georges Kersaudy », sur Freelang, (consulté le ).
  18. Jacques Joguin, Parlons Esperanto, la langue internationale, Paris, L'Harmattan, , 304 p. (ISBN 2-7475-0355-0, lire en ligne), p. 9
  19. (en) Jouko Lindstedt, Native Esperanto as a Test Case for Natural Language [PDF], University of Helsinki - Department of Slavonic and Baltic Languages and Literatures, .
  20. Lindstedt, Jouko. "Re: Kiom?" (posting). DENASK-L@helsinki.fi, .
  21. « L'espéranto : une langue mondiale vouée à l'échec ? », sur AJETTS, (consulté le )
  22. (en) Three letters about his method for estimating the number of Esperanto speakers La présentation la plus détaillée de la méthodologie utilisée se trouve dans une lettre qu'il a écrite en 1989 à David Wolff: Culbert, Sidney S..
  23. Amiketo est un logiciel pour taper les lettres accentuées de l’espéranto, pour Windows, Mac OS et Linux.
  24. Littéralement « mots de tableau », d'après la forme sous laquelle sont souvent présentés ces outils grammaticaux.
  25. Joguin 2001, p. 106-107.
  26. Janton 1994, p. 56.
  27. Voir aussi Négation (linguistique)#En espéranto.
  28. Janton 1994, p. 85 et Joguin 2001, p. 260.
  29. Création de termes (vortfarado).
  30. Quelques problèmes de la traduction.
  31. (en) Josh Salisbury, « ‘Saluton!’: the surprise return of Esperanto », sur The Guardian, (consulté le ).
  32. (eo) Statistiques concernant les diplômes délivrés en accord avec le CECRL, sur le site Edukado.net (eo).
  33. Comment apprendre l'espéranto.
  34. Rapport Grin, p. 81.
  35. [PDF].
  36. [PDF].
  37. G. Dehaene-Lambertz Entretien avec E. Gentaz[PDF]. Sciences cognitives, Apprendre à lire avec les doigts, Médecine & enfance, .
  38. Les troubles spécifiques du langage oral et écrit[doc] ecoles.ac-rouen / Établissement d'éducation motrice « Denis Cordonnier ».
  39. Roduit Charles, « Intégration scolaire : l’espoir de l’espéranto », Unpublished,‎ (DOI 10.13140/rg.2.2.11163.87847, lire en ligne, consulté le ).
  40. Claude Piron, Tremplin.
  41. La Dépêche du Midi, « Un appel pour l'espéranto au bac », sur La Dépêche du Midi, (consulté le ).
  42. Répertoire de sites en Espéranto.
  43. [3].
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  45. a et b (eo) Rogier Huurman, « Rekorda partopreno en Junulara Esperanto-Semajno », Libera Folio, (consulté le ).
  46. Muzaiko, radio espérantophone.
  47. Des rendez-vous espérantophones.
  48. a et b (en) Kelly Wang, « Esperanto Pop Culture is Alive and Kicking », sur listenandlearn.org, (consulté le ).
  49. http://entreprise-esperanto.org Le site de l'association Entreprise Esperanto
  50. Java : l'espéranto des produits numériques ; Loukil R. et Mahé T. ; Industries et techniques (ISSN 0150-6617) ; 1998, no 789, p. 58-60.
  51. XML, l'esperanto du système d'information.
  52. L'euro, une monnaie 'esperanto' ?

Annexes

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Bibliographie

Document utilisé pour la rédaction de l’article : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

Ouvrages généraux

Historique

  • René Centassi et Henri Masson, L'Homme qui a défié Babel, Paris, Ramsay, coll. « Le livre des mots », (ISBN 978-2-84114-114-2)
    Biographie de l'initiateur de l'espéranto. On y trouve également quelques notions de grammaire.
  • Louis Couturat et Léopold Leau, Histoire de la langue universelle, Paris, Hachette, , 2e éd. (1re éd. 1903) (lire en ligne [PDF]).
    Traité présentant plusieurs dizaines de langues construites ou d'idées à leur sujet, de Descartes à Peano. Introduit la distinction entre systèmes a priori, systèmes mixtes et systèmes a posteriori. La reproduction en fac-simile publiée par G. Olms, coll. « Documenta Semiotica », Hildesheim, New York, 2001, (ISBN 978-3-487-06885-5) contient aussi celle de la suite de cet ouvrage, Les nouvelles langues internationales (dont l'édition originale non datée fut publiée à compte d'auteur), avec un appendice bibliographique par Reinhard Haupenthal.
  • François Lo Jacomo, Liberté ou autorité dans l'évolution de l'espéranto (Thèse de 3e cycle en linguistique soutenue à l'université Paris-V sous la direction d'André Martinet), , 384 p. Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article.
  • Xavier Vanandruel, Dirk Dumon, Gassy Marin, Tour du vieux monde d'un anarchiste espérantiste : 1928-1938, Artisans-Voyageurs, coll. « Les Géonautes », 2017, présentation en ligne.

Dictionnaires, apprentissage

  • (eo) Plena Ilustrita Vortaro de Esperanto, Paris, SAT, .
  • (fr + eo) Dictionnaire Pratique Français-Espéranto Esperanto-Français, Paris, SAT-Amikaro, , ~520 (ISBN 978-2-9525753-6-2).
  • Le cours de Z. Mraihy et Th. Saladin est divisé en trois tomes :
    • Zohra Mraihy et Thierry Saladin, L'Espéranto, t. 1 : L'essentiel, Vichy, Aedis, coll. « Petit guide », (ISBN 978-2-84259-263-9).
    • Zohra Mraihy et Thierry Saladin, L'Espéranto, t. 2 : La conversation, Vichy, Aedis, coll. « Petit guide », (ISBN 2-84259-264-6).
    • Zohra Mraihy et Thierry Saladin, L'Espéranto, t. 3 : L'imagier, Vichy, Aedis, coll. « Petit guide », (ISBN 2-84259-326-X).
  • Cours rationnel et complet d'espéranto, Paris, SAT-Amikaro, .
  • Jean Thierry, L'Espéranto sans peine, Assimil, .
  • Renée Triolle, Espéranto Express, Paris, Dauphin, (ISBN 978-2-7163-1310-0).

Apologétique

  • André Cherpillod, L'Espéranto, une valeur culturelle, une valeur pédagogique, Courgenard, La Blanchetière, .
  • André Cherpillod, L'Espéranto de A à Z, Courgenard, La Blanchetière, .
  • Mark Fettes (trad. de l'anglais), Quelle langue pour l'Europe ? : L'Europe subira-t-elle toujours la malédiction de Babel ? [« Europe's Babylon: towards a single European language? »], Rotterdam, UEA, coll. « Documents sur l'espéranto » (no 26), (lire en ligne).
    Analyse linguistique, culturelle et politique de différents candidats au rang de langue internationale, de l'anglais à l'espéranto en passant par l'anglais basic et l'interlingua. Prix Maxwell 1990.
  • Yvonne Lassagne-Sicard, Que vive la langue française et que vive l'espéranto !, Paris, Arcam, (ISBN 978-2-86476-386-4).

Témoignages

Articles connexes

Liens externes