Dotâr

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Les savoir-faire traditionnels liés à la fabrication et à la pratique du dotâr *
Image illustrative de l’article Dotâr
Dotârs.
Pays * Drapeau de l'Iran Iran
Liste Liste représentative
Année d’inscription 2019
* Descriptif officiel UNESCO

La fabrication artisanale du dutar et l’art de pratiquer la musique traditionnelle associée au chant *
Pays * Drapeau du Turkménistan Turkménistan
Liste Liste représentative
Année d’inscription 2021
* Descriptif officiel UNESCO

Le dotâr, dutâr, dutar, doutâr ou dotara (« deux cordes » en persan) est un luth traditionnel à long manche trouvé en Asie centrale et en Iran. Son origine est probablement le tambur du Khorassan décrit par Al-Farabi (Xe siècle) dans son essai Kitab Al Musiqi Al Kabir (en) (Livre de la grande musique). Longtemps réservé aux nomades et bardes bakhshis, il est devenu au XIXe siècle un instrument acceptable dans les musiques savantes de l'Ouzbékistan, du Tadjikistan, du Turkménistan et des Ouïghours[1].

Il existe aussi des instruments au nom similaire mais très différents, en Inde et au Bangladesh, plus proche du rabâb ou du sarod, et en Afghanistan, plus proche du sitar indien.

Les savoir-faire traditionnels liés à la fabrication et à la pratique du dotâr sont inscrits sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l'humanité en [2].

Lutherie[modifier | modifier le code]

Il existe deux variétés de dotâr :

À celle-ci se greffe un manche très long et fin (en poirier, noyer ou abricotier). S'y ajoute une table d'harmonie légère en hêtre ou murier, percée de très petites ouïes à peine visibles. Les 2 cordes (en métal, en soie ou en nylon), l'une aiguë et l'autre grave (à l'octave ou la quinte), reposent sur un tout petit chevalet. Elles sont accordées au moyen de petites chevilles au bout du manche. Il y a une quinzaine de frettes en boyaux, non amovibles, et placées selon une échelle chromatique. Le manche est souvent décoré avec de la marqueterie ou des appliques d'os.

Jeu[modifier | modifier le code]

Joueur de dotâr ouzbek.

Le musicien tient l'instrument contre lui et utilise rarement un plectre (mezrap) préférant jouer avec ses doigts. La technique est très complexe et rappelle celle de la guitare flamenca dont elle est peut-être une source. En effet, le joueur parvient à jouer une succession très rapide de notes, non seulement par un mouvement de la main ou d'un doigt, mais en effectuant aussi des moulinets ascendants et descendants des doigts de la main droite, les pulpes, bien à plat en éventail, sur les cordes, tout en y appliquant des effets rythmiques. Parfois le dos des ongles est utilisé, ainsi que le pouce de la main gauche, changeant ainsi la tonalité du bourdon. Les quatre doigts de la main gauche sont très agiles sur les deux cordes, le long du manche.

Compte tenu du petit volume de la caisse et de la proximité des rares cordes, cet instrument n'a guère d'emphase sonore. Il faut donc sans cesse relancer le son au moyen d'une caresse en moulinet, sinon il s'éteint très vite.

Il peut être joué seul ou en ensemble ou encore accompagné de percussions (daf ou doyre), mais le plus souvent, il accompagne le chant. Les femmes en jouent tout autant que les hommes.

Alors que le répertoire est essentiellement folklorique, il peut aussi toucher les musiques savantes, celles du maqôm ouïghour notamment.

Les artistes les plus représentatifs sont :

Homonymes[modifier | modifier le code]

Le dutâr herati[modifier | modifier le code]

Ce luth se rencontre dans la région d'Herat, en Afghanistan et est très proche du tambur afghan, qui est plus épais et plus grand. C'est un instrument apparu récemment : il a été mis au point vers 1965 par un musicien de la radio d'État originaire d'Hérat, Mohammad Karim Herawi, afin d'adapter le dutar au répertoire musical afghan[3].

Lutherie[modifier | modifier le code]

Long de 130 cm et taillé dans un bloc de bois de murier (avec une très fine épaisseur de 2 mm), il est un peu plus petit que ses cousins, et en outre décoré à l'aide de pièces de marqueterie et d'appliques en os. La table d'harmonie en murier est percée de très fines ouïes, et est soutenue par un barrage en croix. Le long manche est parfois taillé dans une autre pièce et collé, puis percé afin d'accueillir jusqu'à 14 chevilles à friction, en outre d'ornements en marqueterie. Il a de nombreuses frettes en nylon noué offrant un jeu chromatique.

Il est monté d'une corde de jeu, de trois cordes de bourdons et de dix cordes sympathiques, toutes en métal. Elles passent sur un chevalet en os taillé afin de permettre un jeu rythmique en surhaussant certaines cordes.

Jeu[modifier | modifier le code]

On en joue avec un mezrab ou onglet en métal, posé sur l'index droit, la musique folklorique mais aussi la musique hindoustanie. Il accompagne souvent le rabâb ou le chant.

Le dotara bengali[modifier | modifier le code]

Dotara bengali

Il s'agit aussi d'un luth, rencontré au Bengale, mais de toute autre nature car il ressemble plus à un petit sarod.

Lutherie[modifier | modifier le code]

Son corps long de 80 cm, comprenant une caisse de résonance, un manche et un chevillier, est entièrement taillé dans une pièce de bois monoxyle. La table d'harmonie est en peau de chèvre collée, alors que le manche est recouvert d'une touche en métal non frettée. Le chevillier se termine par une sculpture de tête d'oiseau (paon ou cygne).

Il est monté de cinq cordes en métal, sur des chevilles à l'ancienne (friction) placées de part et d'autre du chevillier ouvert. Elles sont attachées par des clous à l'arrière de la caisse de résonance, passant sur toute la longueur de la peau, où un petit chevalet en bois les soutient. Il y a parfois des cordes de bourdons supplémentaires voire des cordes sympathiques. L'accord est : Sol - Do# - sol - sol - do.

Jeu[modifier | modifier le code]

On en joue avec un petit plectre en noix de coco (le java) attaché à la caisse de résonance par une cordelette. Le dotara est muni aussi d'une bandoulière pour pouvoir en jouer debout, notamment par la communauté Baul qui en accompagne ses danses, ainsi que les musiciens folkloriques des régions montagneuses du nord de l'Inde.

Annexes[modifier | modifier le code]

Références[modifier | modifier le code]

  1. Clara Arnaud (Grand Prix 2009 de la fondation Zellidja), Sur les chemins de Chine : récit de voyage, Montfort-en-Chalosse, Gaïa éditions, coll. « Kayak », dl octobre 2018 (1re éd. 2010), 262 p. (ISBN 978-2-84720-884-9 et 2847208844, OCLC 1061218188, lire en ligne), p. 61
  2. « Trente cinq nouveaux éléments inscrits sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité », sur UNESCO, (consulté le )
  3. John Baily, Afghanistan, rubâb et dutâr, disque Ocora, 1995

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Jean During, The dotâr family in Central Asia. Organological and musicological survey (en ligne)

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]