Chute des régimes communistes en Europe

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Chute des régimes communistes en Europe
Description de cette image, également commentée ci-après
Chute du mur de Berlin le 9 novembre 1989.

Date 1988-1990
Lieu
Résultat Fin de la guerre froide
Réunification allemande
Chronologie
Mikhaïl Gorbatchev élu Secrétaire général du PCUS
Reprise du dialogue entre Solidarność et le PC polonais
Manifestations et arrestation de Václav Havel à Prague
Ouverture du « Rideau de fer » à la frontière austro-hongroise
Élections législatives semi-libres en Pologne
Forte augmentation de l'émigration de RDA
Proclamation de la République de Hongrie
Chute du mur de Berlin
Jivkov quitte le pouvoir en Bulgarie
Révolution de Velours en Tchécoslovaquie
Mort de Ceaușescu en Roumanie

La chute des régimes communistes en Europe désigne l’effondrement des états communistes européens du bloc de l'Est, alliés à l’URSS, ainsi que des gouvernements albanais et yougoslave, également communistes mais qui avaient rompu avec l’URSS plusieurs décennies auparavant. Ces événements se déroulent au terme d’un long processus analysé dès 1968 par Andreï Amalrik, un écrivain dissident de l’agence de presse Novosti dans Le Procès des quatre (« Процесс четырёх ») et dans son recueil d’articles L’Union soviétique survivra-t-elle en 1984 ?[a].

Selon ces analyses, le communisme vécu avec sa bureaucratie[1] figée profitant indûment d’avantages dont le peuple est privé, sa police politique hypertrophiée, improductive et coûteuse mais étouffant toute initiative, sa classe moyenne trop peu développée et ses faiblesses dans la compétition avec l’Ouest, avait depuis longtemps tourné le dos aux idéaux communistes, de sorte que pour les peuples qui le subissaient, les identités nationales, les traditions ancestrales et les religions apparaissaient comme les seuls repères porteurs d’espoir[2]. Plus tard, dans plusieurs interviews, Amalrik estima que, face à « l’impasse du présent et au danger du retour au passé », l’étouffement du « printemps de Prague » et donc du « socialisme à visage humain » qui visait à établir les libertés fondamentales, la souveraineté populaire et un état de droit, priva le bloc communiste de sa dernière « alternative d’avenir » et que dès lors, tout signe de libéralisation ne serait plus un signe d’espoir et de réforme possible[b], mais un signe d’affaiblissement et de délitement[2].

C’est pourquoi la perestroïka entamée sous l’impulsion de Mikhaïl Gorbatchev vingt ans plus/trop tard (selon les points de vue), ne déboucha pas sur une refonte de ces régimes mais sur leur effondrement général à partir de la fin de 1989. La chute du mur de Berlin, le , qui suit l’ouverture du « rideau de fer » pour les Hongrois le [3] furent les événements les plus marquants de la période : la guerre froide s'acheva ainsi sur une victoire du capitalisme par forfait du pacte de Varsovie et du CAEM, structures institutionnelles du bloc de l’Est qui cessent d’exister à l'été 1991, tandis que l’URSS elle-même disparaît en tant qu’État en décembre de la même année. Dès lors, l’économie de marché s’installe dans tous les anciens États communistes, dont une partie adopte aussi, à des degrés divers, la démocratie représentative, tandis que le nationalisme se substitue au communisme comme horizon idéologique officiel (sans pour autant en abolir l’héritage intellectuel, monumental et institutionnel ni, en Russie, la politique étrangère)[4].

Contexte et origines de la chute

Dans les années 1960, la Roumanie et l'Albanie ont pris une relative autonomie vis-à-vis de l'URSS, tandis que la Yougoslavie compte au rang des pays non-alignés.

Au milieu des années 1970, l'Union soviétique semble au faîte de sa puissance et le bloc qu'elle forme avec les six États d'Europe de l'Est membres du pacte de Varsovie semble stable et solidement ancré dans le modèle communiste tel que défini par le « grand frère » soviétique. Américains et Soviétiques dialoguent d'égal à égal et s'entendent sur des accords de limitation des armes stratégiques afin que ne puisse être rompu l'équilibre atteint. La détente stabilise les relations en Europe et permet le développement des échanges économiques entre l'Est et l'Ouest. La stabilité et les progrès économiques de l'URSS sont considérés comme acquis par les Occidentaux, qui voient dans les dirigeants des démocraties populaires des interlocuteurs valables investis d'une incontestable légitimité.

Fin de l'omnipotence soviétique en Europe de l'Est

Pourtant le système communiste, après d'indéniables progrès économiques et sociaux jusque dans les années 1970, se révèle incapable dans les années 1980 de résoudre les problèmes qui le minent et bloquent tout nouveau progrès : obsolescence de l'outil industriel, faible productivité, retard technologique, accaparement des richesses par les cadres du Parti communiste, poids trop important des dépenses militaires pour soutenir la rivalité avec l'occident, etc[5]. L'échec technique du Tu-144, copie soviétique du Concorde, mais surtout l'explosion en 1986 d'un réacteur de la centrale nucléaire de Tchernobyl, en Ukraine, illustrent ces faiblesses aux yeux du monde entier.

Aux prises avec ses propres problèmes, Gorbatchev transfère sur les dirigeants des États d'Europe de l'Est la charge de trouver des solutions à leurs problèmes politiques, sociaux et économiques en les encourageant à suivre la voie des réformes en cours en Union soviétique. L'URSS renonce à l'usage de la force pour réprimer les crises qui secouent les régimes d'Europe de l'Est et sur le plan économique elle ne peut mettre en œuvre une intégration économique et financière, comme celle qui est en chemin au sein de la CEE, et ne peut leur apporter une aide directe d'une nature comparable au plan Marshall. L'avenir de l'Union soviétique et le développement des relations avec l'Ouest sont les vraies priorités de Gorbatchev, les deux ayant comme facteur commun de réussite la nécessité de mettre fin au retour de la guerre froide constaté depuis 1975[6].

Renoncement à la Doctrine Brejnev

À Prague en août 1968, chars soviétiques entourés par des manifestants.

Entre la mainmise communiste sur l'Europe de l'Est dans les années 1945-1948 et la fin des années 1970, des crises y ont éclatées à plusieurs reprises. À chaque fois, le recours à la force, direct ou indirect par les autorités soviétiques pour y mettre fin a montré à la population et aux partisans de réformes audacieuses au sein du Parti communiste que ni la prééminence du Parti communiste (PC), ni le modèle « socialiste » à la Soviétique, ni l'appartenance au pacte de Varsovie n'étaient négociables. La doctrine Brejnev formalise à cet égard la doctrine soviétique.

Arrivé au pouvoir en 1985, Mikhaïl Gorbatchev va faire évoluer progressivement la posture de l'Union soviétique vis-à-vis de ses États satellites qui sont encouragés à conduire des réformes et sont avertis de plus en plus clairement qu'ils ne doivent pas compter sur les Soviétiques pour régler leurs problèmes intérieurs. L'incertitude demeure toutefois chez les Européens de l'Est jusque fin 1988. Gorbatchev est certes réformateur mais il demeure attaché au communisme. Il noue des relations étroites avec les dirigeants occidentaux, mais dit clairement que dans la « maison commune européenne », chacun doit respecter l'espace de l'autre. Il n'est dans son esprit pas question de démanteler le bloc de l'Est dont il pense qu'il peut trouver une voie combinant le socialisme et l'économie de marché, le « marché socialiste », différente du capitalisme libéral occidental[7].

Mikhaïl Gorbatchev s'adresse à l'Assemblée générale de l'ONU en décembre 1988.

Aussi les réformateurs communistes les plus audacieux, les intellectuels et la population de façon générale demeurent-ils dans l'incertitude dans les années 1985 à 1988 quant aux réactions soviétiques si des évènements de nature comparable au Printemps de Prague survenaient dans telle ou telle des démocraties populaires. Dans le même temps, celles-ci restent dirigées par des cliques autoritaires dont le pouvoir repose sur un appareil répressif massif et qui le plus souvent ne voient pas d'un bon œil la perestroïka et la glasnost introduites par Gorbatchev en URSS[7].

Ce contexte change radicalement fin 1988. Lors du discours qu'il prononce le à l’Assemblée générale de l’ONU, M. Gorbatchev annonce des réductions importantes des troupes soviétiques en Europe et affirme que « l'usage de la force ne peut plus constituer un instrument de la politique étrangère, (...) et que le principe du libre choix est (...) un principe universel qui ne devrait souffrir aucune exception ». Cette déclaration enterre définitivement la doctrine Brejnev[8]. Cette ligne politique est réaffirmée avec force par Gorbatchev le à l'occasion de son discours devant le Conseil de l'Europe[9],[10] et le 7 juillet lors du sommet des dirigeants du pacte de Varsovie[11]. Gorbatchev donne la priorité à la poursuite à ses relations avec l'Ouest qui seraient irrémédiablement compromises s'il faisait usage de la force comme Brejnev le fit en 1968 à Prague[6].

Encouragement mais soutien concret limité aux réformes dans les pays de l'Est

Graphique du cours du pétrole brut entre 1970 et 1990, base 100 en 1970[12].

Lorsqu'il arrive au pouvoir en 1985, Gorbatchev définit un programme ambitieux pour l’Europe de l’Est qui repose notamment sur la revitalisation économique des pays socialistes en s'appuyant sur le Comecon pour coordonner les productions, et en matière de politique étrangère sur une coordination plus étroite du pacte de Varsovie[13].

Mais les problèmes structurels de l'économie soviétique sont aggravés au milieu des années 1980 par la faiblesse du cours du pétrole. L'URSS possède des ressources naturelles considérables. Dans les décennies 70 et 80, elle produit entre 15 % et 20 % du pétrole extrait dans le monde ce qui la place au premier rang. Les Soviétiques bénéficient dans les années 1970 de l'envolée des prix du pétrole, mais la chute des cours au milieu des années 1980 les privent des ressources financières nécessaires pour moderniser leur économie et a fortiori pour soutenir massivement les économies du Comecon[14].

Conscient des réalités de l'Europe de l'Est — graves problèmes économiques, leadership vieillissant et mécontentement social croissant — Gorbatchev incite les dirigeants communistes à mener des réformes économiques. Il cherche toutefois à trouver le bon équilibre entre changement et stabilité, en évitant d'imposer les réformes à des systèmes politiques fragiles, déstabilisés par la brutale accélération de l'histoire en Europe depuis 1985. La RDA illustre parfaitement cette manière de faire : les relations sont mauvaises entre Gorbatchev et Honecker dès le départ, ce dernier n'hésitant pas à contester ouvertement le bien-fondé des réformes en URSS ; il faut attendre octobre 1989, dans le contexte de la célébration du quarantième anniversaire de la fondation de la RDA pour que Honecker soit poussé dehors par des membres réformateurs du SED avec l'assentiment de Gorbatchev[13].

Facteurs de la chute du communisme en Europe de l'Est

Des crises majeures ont à plusieurs reprises secoué les régimes communistes d'Europe de l'Est : le soulèvement ouvrier est-allemand du , l'insurrection de Budapest en 1956, le Printemps de Prague en 1968, ou encore l'émergence de Solidarność en Pologne, suivie de l'instauration de l'État de siège en Pologne de 1981 à 1983. Mais à chaque fois, la soumission des dirigeants des démocraties populaires à Moscou et le recours à la force ont permis d'y mettre fin. Pour autant, les facteurs de déclenchement de ces crises ne disparaissent pas et sont ceux qui, dans le contexte de la nouvelle politique voulue par Gorbatchev, sont à l'origine des évènements de 1988 et 1989 qui aboutissent à la chute de tous les régimes communistes en Europe de l'Est.

Les principaux facteurs qui expliquent leur chute sont l’état de guerre froide entre l’Est et l’Ouest, l'enfoncement économique des démocraties populaires, la résilience de la société civile et de l'esprit de liberté individuelle, l’illégitimité des partis communistes au regard des racines politiques et culturelles des pays d'Europe centrale et de l'Est, et enfin les abus et les dissensions au sein des PC[15],[16].

L’état de guerre froide entre l’Est et l’Ouest

La guerre froide, et la course aux armements avec l'Ouest qu'elle entraîne, drainent une partie considérable des ressources de l'Union soviétique, limitant sa capacité à développer la zone économique qu'elle forme avec ses États satellites et à leur fournir des moyens financiers suffisants en faveur de la modernisation de leur industrie. Symétriquement, bien que les échanges entre l'Est et l'Ouest se soient considérablement développés durant les années 1970 dans le contexte de la détente, lorsque les finances publiques et l'économie de pays comme la Pologne en particulier se dégradent dans les années 1980, l'Ouest ne leur apporte pas d'aide substantielle, demeurant dans une prudente expectative quant aux évolutions à l'Est et dans une logique de guerre où il doit y avoir un vainqueur et un vaincu.

L'enfoncement économique des démocraties populaires

Graphique comparatif du PIB par habitant en US$ 2011 de la France, la Hongrie, et la Pologne entre 1950 et 1990[17].
PIB PPP par habitant France, Hongrie et Pologne 1980-1994[18].

Sur le plan économique, le modèle communiste repose sur la collectivisation et une stricte planification d’État, ne touchant pas seulement les orientations macro-économiques, mais aussi tous les aspects de la production, de la distribution et de la consommation. Appliqué partout, le modèle économique initial laisse progressivement la place à un modèle hybride où les principes fondamentaux cohabitent avec des éléments réempruntés à l'économie de marché. La raison en est que l'usage de la répression pour maîtriser les crises et dans la durée encadrer strictement les libertés individuelles, est combiné avec des concessions d'ordre économique[19].

L'histoire économique des démocraties populairement est celle d'une succession de réformes, souvent suivies de coups d'arrêt, qui font évoluer à la marge le modèle initial mais qui ne le remettent pas fondamentalement en cause. Tous les réformateurs ont cherché un compromis entre le maintien du système centralisé et l'amélioration de son efficience. L'ouverture à l'Ouest dans le contexte de la détente a dans les années 1970 financé la modernisation de l'outil de production et soutenu artificiellement l'augmentation du niveau de vie, en Hongrie et en Pologne notamment, au prix d'un endettement qui devient un nouveau problème majeur dans les années 1980. Surtout, les difficultés de l'Union soviétique, qui est le cœur du système, fragilisent aussi les économies d'Europe de l'Est obligées de se soumettre aux décisions soviétiques relatives aux flux d'import-export, tandis qu'elles ne peuvent plus bénéficier du soutien financier dont elles auraient besoin pour continuer de survivre[19].

Les voies économiques choisies par les démocraties populaires et les résultats obtenus sur le plan du niveau de vie sont assez variables, mais partout les années 1980 sont difficiles. En 1950, le PIB par habitant représente en Pologne 46 % et en Hongrie 39 % de celui de la France ; en 1988, ces chiffres sont respectivement de 35 % et 53 %. Ils témoignent de la crise économique interminable que la Pologne traverse dans les années 70 et 80 dont la durée et la dureté sont clairement à l'origine des mouvements ouvriers qui donnent naissance à Solidarność et finiront par renverser le pouvoir communiste. En Hongrie, l'un des pays les plus réformateurs sur le plan économique, les résultats sont bien meilleurs, mais la stagnation des années 1980 en montre les limites et l'écart de niveau de vie avec la France est encore du simple au double[17],[18]. En 1988, le PIB par habitant de la RDA et de la Tchécoslovaquie se situent au premier et au second rang parmi les pays du COMECON avec respectivement 9 300 US$ et 7 600 US$. Les autorités est-allemandes vantent la réussite économique de leur pays mais celle-ci est pour partie due au développement considérable du commerce interallemand résultant de l'Ostpolitik menée par Willy Brandt au début des années 1970, et pour autant le PIB par habitant de la RDA n'est que de la moitié environ de celui de la RFA ou de la France en US$ courants[19],[20],[c],[21].

La résilience de la société civile et de l'esprit de liberté individuelle

Même si la terreur stalinienne n'a plus cours, le caractère totalitaire des régimes communistes demeure dans les années 1970 et 1980. Dans toutes les démocraties populaires, la police politique et la milice sont des institutions essentielles de la répression totalitaire exercée par ces régimes initialement pour réaliser le dessein collectiviste, puis simplement pour se maintenir au pouvoir par la violence, l'intimidation et la surveillance constante même si la terreur stalinienne n'a plus court. La Stasi en RDA, organisée sur le modèle du NKVD soviétique avec lequel elle collabore étroitement, en est l'exemple le plus connu. Dans les années 1980, la police politique ne jouit plus de la même liberté d'action totale ni de la même impunité. La société civile, souvent à travers les intellectuels comme en Tchécoslovaquie, se libère peu à peu de la paralysie dans laquelle la terreur l'avait plongée, encouragée aussi par la mobilisation croissante à l'Ouest en faveur des dissidents les plus connus et des répressions les plus violentes, maintenant que le communisme n'a plus le soutien quasi-inconditionnel de la gauche[22].

Selon les termes mêmes de la déclaration de la Charte 77, applicables à toute l'Europe communiste, « la liberté d’expression publique est réprimée par la mainmise du pouvoir central sur tous les médias, ainsi que sur l’ensemble des activités d’édition et culturelles », et « la liberté de culte est systématiquement entravée de façon arbitraire par le pouvoir qui encadre les activités du clergé » ; de plus, sur le plan politique, « le système de subordination de fait de toutes les institutions et organisations du pays aux directives politiques de l’appareil du Parti au pouvoir, ainsi qu’aux décisions arbitraires des dirigeants, est l’instrument de la limitation et souvent de la suppression complète d’un grand nombre de droits civiques » ; les citoyens sont « forcés de vivre en permanence avec la peur de perdre leur emploi et d’autres droits s’ils expriment leurs opinions »[23].

Mais plusieurs décennies de totalitarisme et d'endoctrinement n'ont pas éliminé de l'esprit de bon nombre d'Européens de l'Est que les droits humains et civiques sont inaliénables et que l'atteinte des idéaux mis en avant par les régimes communistes ne constitue pas une raison valable pour les restreindre ou pire les supprimer. L'échec du Printemps de Prague met fin aux espoirs de réforme du système communiste de l'intérieur. Les contestataires des années 1970 mènent leur action hors du PC car ils pensent que le changement ne peut venir que de la société civile. Il s'agit pour les intellectuels qui mènent cette contestation sous la forme de désobéissance civique sans violence, de développer progressivement leur assise dans la société afin d'exercer une pression toujours plus forte sur un pouvoir qui hésite à faire preuve d'autoritarisme brutal[24].

Signature des accords d'Helsinki : Helmut Schmidt (RFA) et Erich Honecker (RDA) assis côte à côte.

Les contestataires tirent aussi le meilleur parti des accords d'Helsinki du qui marquent un tournant décisif dans la vie politique et intellectuelle des pays communistes. La Charte 77 en Tchécoslovaquie en est la parfaite illustration. La charte publiée le s'appuie sur les engagements pris à Helsinki par tous les pays européens y compris ceux du bloc communiste dans le domaine des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et dans le cas de la Tchécoslovaquie entrés légalement en vigueur [25]. Les régimes communistes ne peuvent pas accéder aux exigences de liberté des contestataires sans compromettre leur contrôle total du système politique et social en place, mais il leur est difficile d'adopter une politique répressive brutale qui contreviendrait ouvertement aux Accords d'Helsinki et serait frappée de l'opprobre internationale alors que leur situation économique ne leur permet pas de rompre avec les Occidentaux. Aussi, dans la plupart des pays, la politique suivie oscille-t-elle entre dureté et ouverture avec, à titre d'exemple, des mesures autorisant l'accès à des médias de l'Ouest ou la libéralisation du tourisme[24].

Pour fonctionner, les régimes communistes ont besoin de la collaboration volontaire ou subie d'une part importante de la population, dont les marges de manœuvre sont clairement limitées par le fait que neuf personnes actives sur dix sont des salariés de l'État. Aussi, les possibilités de non-coopération économique ou politique sont-elles réduites. C'est pourquoi les dissidents se recrutent en premier dans les milieux intellectuels. Ils donnent à leur combat d'abord une dimension morale dans le domaine de la culture et de la liberté d'expression. Au début des années 1980, les mouvements organisés d'opposition sont peu nombreux et n'avaient pas l'espoir de renverser les régimes communistes dans un avenir proche. Mais ils ne sont que les éléments visibles de courants anticommunistes souterrains beaucoup plus larges, motivés par des convictions nationalistes ou religieuses fortes[26].

L’illégitimité des Partis communistes au regard des racines politiques et culturelles des pays d'Europe centrale et de l'Est

La position constitutionnelle de jure du Parti communiste comme « parti unique et organe dirigeant de l’État », interdit de facto la constitution d’associations, syndicats ou autres structures sociales indépendantes du pouvoir, et impose un courant de l’autorité et de légitimité (souveraineté), allant du sommet (le Comité Central) vers la base (les autres structures du Parti, les citoyens).

L'absence de renouvellement de la classe dirigeante soviétique, puis l'absence d'orientation politique au sommet de l'État soviétique du fait de la rapide succession des secrétaires généraux à la tête du PCUS après la mort de Léonid Brejnev ont également contribué à cette agonie. La confiscation progressive du pouvoir par une nomenklatura conservatrice et corrompue, sous le long règne de Brejnev, empêche toute réforme. La lutte pour le pouvoir entre réformistes et conservateurs donne ensuite lieu à un immobilisme total jusqu'à l'arrivée de Gorbatchev. C'est cette phase de lent délitement qui a créé les conditions de l'accès au pouvoir de Mikhaïl Gorbatchev. Gorbatchev fut désigné pour lui succéder par le réformateur Iouri Andropov, qui devint secrétaire général du PCUS immédiatement après Léonid Brejnev et qui fut, avant cela, patron tout puissant du KGB. Toutefois, à la mort d'Andropov, la vieille garde conservatrice lui préfère Konstantin Tchernenko, qui décède rapidement, ouvrant ainsi la voie à Mikhaïl Gorbatchev, nommé en mars 1985 au poste de Secrétaire général du Parti communiste de l'Union soviétique (PCUS).

L'affaiblissement des Partis communistes

Sur le modèle soviétique, le Parti communiste a le monopole du pouvoir dans les démocraties populaires d'Europe de l'Est. Et pourtant cette maîtrise totale du pouvoir ne l'a pas mis à l'abri de générer son propre affaiblissement, soit que la population rejette de plus en plus sa bureaucratie et le détournement des richesses du pays à son profit, soit qu'émergent des courants réformateurs suffisamment forts pour déstabiliser l'édifice de l'intérieur.

Par delà les perversions staliniennes, le Parti communiste repose sur la vérité et la voie révélée par Lénine. La foi en l'enseignement révolutionnaire de Lénine a longtemps survécu chez les communistes. Lorsqu'il arrive au pouvoir, Gorbatchev lui-même y est attaché et ne se doute pas qu'en quelques années il finira par promouvoir une modèle proche de la social-démocratie. Cependant partout les réalités du pouvoir portent un coup fatal à l'ethos léniniste initial. En Europe de l'Est, très rapidement, les communistes au pouvoir profitent des privilèges que leurs fonctions leur permettent d'obtenir. La forme originelle trop idéologique et politique du communisme laisse la place à une forme bureaucratique et autoritaire, synonyme de conservatisme[22].

Cette évolution est aussi liée au modèle d'organisation du PC très centralisé et contrôlant, au sein duquel la volonté d'autoconservation de la bureaucratie de l'État-parti devient la raison d'être essentielle du régime. Avec le temps, la maturation du système est allé de pair avec un développement tentaculaire de la bureaucratie. La conjonction du pouvoir politique et du pouvoir économique aux mains de la nomenklatura favorise l'accaparement des richesses par une minorité et la corruption à tous les niveaux. Le peuple voit ces excès, mais cherche surtout à préserver la marge limitée de liberté que le régime lui laisse dans la sphère privée et se contente, en Hongrie ou en Tchécoslovaquie par exemples, de profiter d'une réelle amélioration de ses conditions matérielles de vie, sans toujours savoir le décalage important qui existe avec l'Ouest. Il en résulte néanmoins partout une fracture de plus en plus grande entre le Parti et la population, particulièrement évidente en Pologne où elle s'est massivement rebellée contre les pénuries permanentes, les hausses de prix et les efforts toujours plus insupportables qui lui sont demandés[22].

Cependant au sein même des Partis, des positions divergentes existent de plus en plus sur les politique à mener pour porter remède aux maux constatés. L'origine profonde de ces dissensions se trouve dans le fait qu'au fil des années, les PCs sont devenus plus représentatifs de la société et ont accueilli en leur sein un nombre important de jeunes diplômés, plutôt citadins, souvent porteurs d'idées réformistes. Dans les États communistes en général, et en Union soviétique en particulier, la grande majorité des spécialistes des sciences sociales sont membres du Parti. Beaucoup promeuvent des réflexions nouvelles et critiques sur le système politique et économique au sein même du parti au pouvoir. Toutefois, le système communiste est tel que, tant que les quelques hommes au sommet du Parti qui détiennent le pouvoir n'ont pas l'esprit ouvert aux idées nouvelles, celles-ci ne peuvent déboucher sur des politiques concrètes. Un tel changement au sommet de la hiérarchie politique s'était produit en 1968 lors du Printemps de Prague et se produit à nouveau vingt ans plus tard en Union soviétique rendu possible par l'arrivée au pouvoir de Gorbatchev. Ce phénomène se reproduit en 1988 en Hongrie où, après avoir poussé dehors János Kádár, les réformateurs du PC initient les changements qui aboutissent en un peu plus d'un an à la fondation d'une nouvelle République de Hongrie[27].

Chronologie générale

La chute des régimes communistes en Europe de l'Est n'est pas la conséquence de quelques évènements mais plutôt le résultat d'un long affaiblissement conduisant une fraction toujours plus importante de la classe ouvrière — supposée être la base des Partis communistes — de la jeunesse, des intellectuels, voire de réformateurs au sein même du pouvoir à rejeter l'État communiste malgré les tentatives de réforme plus ou moins ambitieuses menées dans plusieurs pays. Cependant, dans chacun des pays, la bascule d'une crise plus ou moins latente à une perte de contrôle de la situation par les autorités communistes est le résultat direct de quelques évènements. La frise chronologique ci-dessous retrace visuellement pour chaque pays la période de temps qui s'écoule entre ces évènements et l'organisation des premières élections libres qui marquent de façon irréversible la fin du système communiste en Europe de l'Est.

Václav HavelVáclav HavelÉlections législatives bulgares de 1990Todor JivkovÉlections législatives est-allemandes de 1990Élections législatives hongroises de 1990Révolution de VeloursTroisième République de HongrieRideau de ferÉlection présidentielle polonaise de 1990Gouvernement MazowieckiÉlections législatives polonaises de 1989SolidarnośćÉlections législatives roumaines de 1990Nicolae CeaușescuChute du mur de BerlinManifestations du lundiRépublique populaire socialiste d'AlbanieRépublique socialiste de RoumanieRépublique populaire de BulgarieRépublique démocratique allemandeRépublique socialiste tchécoslovaqueRépublique populaire de HongrieRépublique populaire de Pologne

La chute du mur de Berlin en novembre 1989 marque de manière symbolique la chute du bloc de l'Est. À juste titre la Pologne et la Hongrie revendiquent d'avoir ouvert la voie de ces révolutions pacifiques aux autres pays à partir de 1988.

En République populaire de Hongrie, le Parti socialiste ouvrier hongrois (PSOH) au pouvoir, sous l'impulsion de Miklós Németh, accepte le principe du multipartisme dès février 1989. L'accord intervenu entre la Hongrie et l'Autriche le d'ouvrir le rideau de fer à leur frontière[28], puis son démantèlement physique par les gardes-frontières eux-mêmes à la frontière austro-hongroise le 2 mai 1989 est un moment-clé. Cette ouverture de la frontière par les autorités hongroises soumet à l'épreuve des faits les déclarations de Mikhaïl Gorbatchev. Moscou ne dictera plus par la force de ses chars la politique à suivre en Europe de l'Est et dans sa zone d'influence. En juin, Imre Nagy et les protagonistes de l'insurrection de Budapest en octobre 1956 sont réhabilités.

En République populaire de Pologne, le syndicat libre Solidarność est à nouveau autorisé en avril 1989. En juin, le mouvement remporte la victoire aux élections législatives semi-libres, et refuse tout accord de gouvernement avec le Parti ouvrier unifié polonais (POUP). Wojciech Jaruzelski, seul candidat autorisé, est élu Président de la République par le parlement, mais doit accepter Tadeusz Mazowiecki comme premier ministre.

Les mouvements d'opposition qui mènent dans ces deux pays la contestation du régime communiste agissent avec prudence en 1988 et début 1989, tant est encore grande la crainte d'une intervention soviétique, ce qui explique que la transition démocratique prenne plus d'un an, alors qu'elle se fait au second semestre 1989 en quelques mois en Tchécoslovaquie, Allemagne de l'Est et Bulgarie, l'effet domino jouant à plein. Seuls les régimes roumain de Nicolae Ceaușescu et albanais de Ramiz Alia résistent un peu plus longtemps au vent de changement qui parcourt tout le bloc soviétique.

Les premières élections libres depuis des décennies ont lieu en 1990 dans toutes les anciennes démocraties populaires d'Europe de l'Est, à l'exception de l'Albanie dont le changement de régime n'intervient que début 1991.

En parallèle, le « grand frère » soviétique lui-même s'effondre. En août 1991, en URSS, le putsch mené par des conservateurs contre Mikhaïl Gorbatchev échoue et Boris Eltsine, président de la Russie, décrète la dissolution et l'interdiction du Parti communiste de l'Union soviétique. Les quinze républiques de l'URSS déclarent l'une après l'autre leur indépendance à l'automne. Le , la Communauté des États indépendants (CEI) est créée à Viskouli en Biélorussie et l'Union soviétique est officiellement dissoute le  : cette métamorphose sauvegarde de manière plus souple la prépondérance russe dans douze des quinze Républiques[29].

République populaire de Pologne

Ainsi pour les Polonais, la chute du mur de Berlin commence en Pologne avec l'émergence de Solidarność en 1980, interrompue entre 1981 et 1988 par la tentative du pouvoir communiste exercé par Jaruzelski de museler l'opposition et de redresser l'économie, dont l'échec se traduit par la reprise du dialogue avec Solidarność le 31 août 1988.

Pourtant en 1986 et 1987, le pouvoir polonais peut se réjouir de l'affaiblissement des mouvements sociaux et de la reprise de ses relations avec l'Ouest. Signe aussi d'une certaine normalisation, du 8 au 14 juin 1987, Jean-Paul II effectue sa troisième visite en Pologne durant laquelle il prie sur la tombe du père Jerzy Popieluzko[30]. Le général Jaruzelsi et sont équipe, « aussi brillante que dépourvue de scrupules » selon la formule de François Fejtö, savent alterner méthodes policières et discours réformiste[31]. Ainsi, en septembre 1986, tous les prisonniers politiques sont libérés, cette mesure est symbolique pour le POUP du retour à la normale célébré durant le Xème Congrès du Parti, elle répond aussi à une exigence des Occidentaux, en particulier des États-Unis, pour un retour à des relations normales[30]. En février 1987, le président Reagan lève les sanctions décidées par les États-Unis au moment de l'instauration de la loi martiale en Pologne, annule l'interdiction de lui accorder des crédits et rétablit le statut de nation la plus favorisée[30]. Mais Solidarność n'a pas disparu et le gouvernement échoue à réformer l'économie. L'émigration est forte, plus de 600 000 polonais ont quitté le pays depuis 1980, traduisant la lassitude d'une population démoralisée qui consacre son énergie à sa survie économique, bien loin des enthousiasmes suscités par les évènements du début de la décennie[31].

L'illusion du retour à la normale ne dure pas. En 1988, la population se révolte à nouveau. Fin janvier, l'annonce de très fortes augmentations de prix, 40 % pour les produits alimentaires, 60 % pour les produits pétroliers, démontre l'incapacité des autorités à assurer un avenir meilleur. Prenant le relai des manifestations étudiantes de mars, de nouvelles grèves ouvrières se déclenchent. Le 2 mai 1988, environ 7 000 des 12 000 ouvriers des chantiers navals Lénine de Gdańsk se mettent en grève en soutien aux grévistes des aciéries de Nowa Huta et pour réclamer que Solidarność soit de nouveau légalisé[30]. Après trois mois d'accalmie, des grèves éclatent au mois d'août dans de nombreuses mines de charbon, qui s'étendent les jours suivants à des sites industriels dont à nouveau les chantiers navals de Gdańsk, les autorités instaurent le couvre-feu dans plusieurs villes, déploient des troupes et évacuent plusieurs sites. Le 31 août, Lech Wałęsa rencontre des représentants du pouvoir dont le ministre des Affaires intérieures, Czesław Kiszczak, une première depuis l'interdiction du syndicat Solidarność[30]. Le POUP choisit Mieczysław Rakowski pour former un nouveau gouvernement afin de faire face à la crise sociale et économique du pays. Le pouvoir temporise. L'ouverture de la « table ronde » prévue le 17 octobre 1988 entre le parti au pouvoir, Solidarność et d'autres mouvements est reportée sine die, en raison de dissensions au sein des instances dirigeantes sur la posture à adopter vis-à-vis du syndicat. Le 30 novembre, des millions de polonais regardent à la télévision le débat sans précédent entre le dirigeant des syndicats officiels et Lech Wałęsa dont la position d'interlocuteur incontournable en sort considérablement renforcée.

Logo de Solidarność peint sur un char T-55 renversé, photo prise à Prague en 1990.

Les évènements vont dès lors se précipiter. Opérant le 18 janvier 1989 un tournant majeur par rapport à ses positions traditionnelles, le POUP autorise Solidarność à reprendre ses activités pour une période probatoire de deux ans, à l'issue de laquelle sa légalisation définitive pourra être décidée, et se déclare prêt à reconnaître de nouveaux syndicats à la condition qu'ils soutiennent sa politique économique[30]. Le 27 janvier, le gouvernement polonais, Solidarność et l'Église catholique de Pologne s'accordent sur l'ouverture d'un « table ronde » pour négocier des réformes politiques et économiques. Ouverte le 6 février, cette table ronde s'achève le 5 avril 1989 par un accord de compromis portant sur la liberté syndicale, des réformes politiques incluant notamment l'organisation d'élections partiellement libres, et la politique sociale et économique[30]. Solidarność remporte le premier tour des élections législatives semi-libres : ses candidats gagnent 92 des 100 sièges au Sénat, et 160 des 161 sièges libres sur les 460 que le Sejm compte au total, au second tour, le 18 juin, il remporte le dernier siège libre au Sejm et 7 des 8 sièges non pourvus au Sénat. L'ampleur de la victoire de Solidarność rend caduc l'espoir des communistes de conserver le pouvoir. Les deux parties font preuve d'un profond sens des réalités et des intérêts du pays. Lech Wałęsa tient compte des réactions que l'élection d'un Président non-communiste auraient provoquées à Moscou, et soutient l'élection de Jaruzelski à cette nouvelle fonction le 19 juillet[32]. Le 15 août 1989, Lech Wałęsa réitère sa proposition de former un gouvernement de coalition, assortie toutefois de concessions destinées à rassurer l'Union soviétique en proposant que le POUP garde les ministères de l'Intérieur et de la Défense et en affirmant que la Pologne restera au sein du Pacte de Varsovie. Le général Wojciech Jaruzelski accepte finalement la proposition de Lech Wałęsa de former un gouvernement de coalition dirigé par Tadeusz Mazowiecki, le Sejm approuve sa nomination le 24 août par 378 votes pour, 4 contre et 41 abstentions. Tadeusz Mazowiecki, un des leaders de Solidarność, intellectuel catholique, journaliste, devient le premier Premier ministre non-communiste en Pologne depuis 43 ans et en Europe de l'Est depuis 40 ans. Wojciech Jaruzelski démissionne. Lech Wałęsa, élu président, lui succède le 21 décembre 1990[30].

République populaire de Hongrie

La chute du régime communiste en Hongrie résulte d'une dynamique très différente de celle de la Pologne. Bien qu'il doive son pouvoir aux Soviétiques faisant suite à l'écrasement de la révolution de 1956, János Kádár a réussi à imposer une sorte de compromis historique : privée de liberté, la population bénéficie d'un modèle économique relativement libéral et la politique agricole est un succès. Une classe moyenne émerge, la société se modernise et s'embourgeoise. Grâce à l'image d'un communisme à visage presque humain, Kádár prend aussi avantage du dégel Est-Ouest. Néanmoins l'économie marque le pas à partir de 1985[33].

Conquête du PSOH par les réformateurs et émergence d'une opposition politique

Manifestation devant le siège de la TV d'État à Budapest, le 15 mars 1989.

La contestation politique en Hongrie est essentiellement le fait de l'intelligentsia, sans jamais atteindre les dimensions de masse du mouvement d'opposition polonais, et pour l'essentiel sans inclure la classe ouvrière. Cette contestation se développe au départ au sein de groupes d'intellectuels d'opposition, puis elle gagne le Parti socialiste ouvrier hongrois (PSOH). Viellissant et devenu impopulaire, Kádár cède sa place le 22 mai 1988 à Károly Grósz, réformateur prudent, qui fait entrer au Politburo deux hommes partisans de réformes beaucoup plus radicales, Rezső Nyers et Imre Pozsgay[33]. Mais le 16 juin 1988, Grósz fait sévèrement réprimer les manifestations en commémoration du trentième anniversaire de l'exécution d'Imre Nagy[33]. À l'automne 1988, le pays compte plusieurs dizaines de mouvements et partis, tandis que les médias ne respectent plus les consignes du Parti. Tenant d'une ligne de réformes radicales, Miklós Németh devient le 24 novembre président du Conseil des ministres de Hongrie en remplacement de Károly Grósz qui demeure secrétaire général du Parti socialiste ouvrier hongrois et s'affirme encore le 28 novembre partisan du maintien du système politique à parti unique[30]. Les désaccords sont profonds entre conservateurs et réformateurs au sein du PSOH. Dans un entretien publié le 13 décembre dans Newsweek, Miklós Németh estime que les réformes politiques hongroises déboucheront à terme sur une démocratie parlementaire de type occidental, il mentionne que la stabilisation de l'économie pourrait prendre jusqu'à quatre ans[30]. L'inflation atteint 16 % en 1988 et le gouvernement annonce début janvier de fortes hausses du prix des produits alimentaires, dont le syndicat officiel demande qu'elles soient compensées par des hausses de salaires.

Le processus de réforme politique s'accélère début 1989. Le 11 février, le Comité central du Parti socialiste ouvrier hongrois (PSOH) accepte le principe d'une transition vers le multipartisme, assortie de conditions et sur un calendrier de plusieurs années. Réuni à nouveau les 20 et 21 février, le CC adopte le projet d'une nouvelle constitution qui prévoit l'abandon du rôle dirigeant du parti et fait dépendre l'avenir politique du pays du résultat d'élections libres. Le 23 mars, l'Assemblée nationale adopte un projet de loi qui autorise la grève.

Si les conservateurs sont progressivement exclus des organes dirigeants du PSOH, ils contrôlent encore le ministère de l'Intérieur, la milice et une partie du corps des officiers de l'armée. Aussi, comme en Pologne, les acteurs du changement se retrouvent-ils face au dilemme « compromis ou confrontation ».

Fin de l'interprétation officielle de la révolte de 1956

Comme en 1956, les opposants sont encouragés par les évènements en Pologne. Fin 1988 et début 1989, l'opposition met en question la légitimité du pouvoir autour du sujet extrêmement symbolique de la réhabilitation d'Imre Nagy[34]. Début décembre, des organisations étudiantes organisent les premières conférences sur la révolution de 1956. Le 28 janvier, Imre Pozsgay déclare que « l'insurrection de 1956 était une insurrection populaire et non une contre-révolution », anticipant les conclusions du rapport commandité par le PSOH qui rejette fermement l'interprétation du soulèvement de 1956 comme étant une contre-révolution, et qui indique que le « soulèvement populaire contre le pouvoir d'Etat existant » était la conséquence directe de l'ordre donné par le gouvernement aux forces armées d'ouvrir le feu sur des manifestants à Budapest le soir du 23 octobre[34],[30]. Le grandiose hommage posthume à Imre Nagy, le 16 juin, marque symboliquement la fin du pouvoir communiste : le PSOH espère en faire un moment de réconciliation nationale, mais le président de la FIDESZ, Viktor Orbán, prononce un discours qui est un véritable réquisitoire contre le communisme, réclame des excuses du gouvernement soviétique et le châtiment de ses complices hongrois, dont János Kádár[34].

« Table ronde » et fin de la République populaire

Place Lajos Kossuth, près du Parlement, le 23 octobre 1989, jour de proclamation de la République.

S'inspirant du modèle polonais, le PSOH et les partis naissants d'opposition s'accordent pour la tenue d'une « table ronde », associant aussi des représentants de la société civile, qui se déroule du 13 juin au 18 septembre. Les principaux partis d'opposition sont le Forum démocrate hongrois (MDF) et l'Alliance des démocrates libres (SZDSZ). Les discussions débouchent sur un accord qui prévoit la tenue d'élections libres, l'instauration d'un parlement monocaméral et d'une présidence forte dotée du pouvoir de choisir son Premier ministre, ainsi que la légalisation et l'octroi de droits aux partis politiques[30],[34].

Le 7 octobre, le PSOH s'auto-dissout et son aile modérée fonde le Parti socialiste hongrois (MSZP) avec un programme de socialisme démocratique. Le 23 octobre, jour anniversaire du soulèvement de 1956, après l'adoption de l'Acte N° XXXI révisant la constitution de 1949, par le parlement encore composé exclusivement de députés élus sous l'ère communiste, le président hongrois Matyas Szürös déclare la fin de la République populaire de Hongrie et proclame la Troisième République de Hongrie. Miklós Németh demeure à titre provisoire Premier ministre, poste qu'il occupera jusqu'au 23 mai 1990[30],[34].

Ouverture du « Rideau de fer » à la frontière avec l'Autriche

Tout au long de cette période de bouleversement politique, le gouvernement hongrois recherche l'appui des pays de l'Ouest. Il multiplie les contacts diplomatiques, utilise les réformes qu'il mène pour obtenir des aides de la RFA en particulier. Il espère que le rehaussement de son prestige international sera un atout sur le plan intérieur. Dans ce cadre de cette stratégie de relations extérieures, la Hongrie se rapproche de l'Autriche. La première brèche dans le rideau de fer n'est pas le fait de la chute du mur de Berlin mais de l'ouverture de la frontière entre la Hongrie et l'Autriche résultant d'un accord passé entre les deux gouvernements le 13 février 1989. Le 2 mai, la Hongrie commence à démanteler les clôtures installées le long de sa frontière avec l'Autriche. Selon des informations provenant d'Allemagne de l'Ouest le 18 juillet, au moins 60 ressortissants est-allemands ont réussi à gagner l'Autriche depuis le début des travaux de démolition des installations empêchant le franchissement de la frontière entre la Hongrie et l'Autriche. Un mois plus tard, selon Reuters, ce sont plus de 1 100 ressortissants de RDA qui ont fui en Autriche via la Hongrie depuis le début du mois d'août[30].

Le 25 août, lors d'une rencontre secrète, les dirigeants de la RFA et de la Hongrie s'accordent pour que les citoyens est-allemands puissent librement franchir la frontière austro-hongroise en échange de l'octroi de crédits importants par la RFA. Les Hongrois décident ainsi de ne plus respecter un accord de 1968 entre les pays du pacte de Varsovie qui exclut qu’un citoyen du bloc de l’Est d’où qu’il vienne puisse passer à l’Ouest. Le 10 septembre 1989, la Hongrie ouvre officiellement sa frontière avec l'Autriche, permettant ainsi aux Allemands de l'Est de fuir à l'Ouest, affaiblissant ainsi le régime communiste de la RDA[30].

La décision hongroise a été prise en toute indépendance, sans consulter les Soviétiques et malgré les protestations vigoureuses de Berlin-Est. Cette décision est un facteur déterminant de la bascule du pouvoir en Tchécoslovaquie et en RDA, où les dirigeants communistesaffichent encore au milieu de l'été 1989 une grande confiance dans leur avenir[34].

République socialiste tchécoslovaque

Vingt ans après l'écrasement du Printemps de Prague, les conservateurs contrôlent toujours solidement le Parti communiste tchécoslovaque. Le Premier ministre Lubomír Štrougal, partisan de réformes, est remplacé en octobre 1988 par Ladislav Adamec qui amorce quelques transformations économiques mais continue de réprimer toutes les contestations[30]. Anesthésiée par des années de « normalisation », la population demeure passive, et la dissidence active n'est le fait que d'un petit nombre de mouvements d'intellectuels parmi lesquels, malgré les arrestations et le harcèlement continu de ses leaders, la Charte 77 réussit à poursuivre ses activités, grâce au soutien de l'opinion publique occidentale, mais aussi de l'encouragement des milieux d'opposition polonais et hongrois[35],[36].

Montée de la dissidence des intellectuels

Václav Havel et des manifestants devant le monument à la lutte pour la liberté et la démocratie, place Venceslas.

En plus grand nombre, des voix dissidentes s'élèvent en 1988 pour réclamer la réhabilitation du Printemps de Prague dont elles soulignent les points communs avec la Perestroïka[36]. Témoignage de l'exploitation des accords d'Helsinki par la dissidence en vue de promouvoir le respect des libertés et des droits de l'homme, le Comité Helsinki tchécoslovaque (en) est créé le [30]. Lors de sa visite officielle en Tchécoslovaquie, F. Mitterrand convie le 9 décembre 1988 plusieurs dissidents tchécoslovaques, dont Václav Havel, à un petit déjeuner souvent considéré comme la première reconnaissance officielle de la dissidence tchécoslovaque par un pays d’Europe occidentale[37],[38].

Le début de l'année 1989 marque un tournant dans l'intensité de la contestation. Le quelques milliers de manifestants se rassemblent place Venceslas à Prague pour commémorer l'anniversaire de la mort de l'étudiant Jan Palach qui s'est immolé par le feu vingt ans auparavant pour protester contre l'invasion soviétique. L'intervention brutale des forces de l'ordre qui procèdent à plus de 90 arrestations provoque de nouvelles manifestations pendant plusieurs jours dans le centre de la ville. Huit cents personnes sont arrêtées, dont Václav Havel et d'autres dissidents de premier plan, condamnés jusqu'à un an d'emprisonnement[39]. L'Église catholique condamne l'attitude des autorités durant ces évènements de janvier[30]. Malgré quelques signes d'assouplissement politique et d'ouverture économique, le pouvoir doit faire face à une effervescence croissante des milieux intellectuels. Le 2 février, plus de 1 000 artistes signent un appel réclamant la libération de tous les prisonniers politiques. Le 12 février, 670 universitaires adressent à Adamec une lettre condamnant la répression des manifestations de janvier. En réponse, le pouvoir qualifie d'actes terroristes les initiatives qui florissent en faveur des droits de l'homme et en soutien à Václav Havel. En avril, depuis Moscou, le Premier secrétaire du PCT, Milouš Jakeš, réaffirme qu'aucune réhabilitation d'A. Dubček, ni aucune révision de la politique du Parti au sujet des évènements de 1968 ne sont envisagées, dont il rejette toute similitude avec la Perestroïka[30],[39].

Václav Havel est libéré le après avoir purgé la moitié de sa peine de prison, dans les semaines qui suivent il s'exprime dans de nombreux médias sur son analyse de la situation politique dans le pays. La première session de la Conférence sur la dimension humaine de la CSCE à Paris du 30 mai au 23 juin 1989 met en lumière les contradictions des dirigeants tchécoslovaques qui affirment que la démocratisation est en cours dans tous les domaines mais qui dans le même temps interdisent aux dissidents de s'y rendre[40]. Comme en RDA et à Cuba, la presse officielle publie des articles positifs sur la répression des manifestations de la place Tian'anmen en Chine.

Le , 1 800 intellectuels et artistes signent une pétition connue sous le nom de « Juste quelques mots »[41] dans laquelle ils réclament la libération des prisonniers politiques, la liberté de réunion, la légalisation des groupes indépendants du PCT, des informations complètes, honnêtes et précises dans les médias, le respect de la liberté de religion, la protection de la nature et l’ouverture de discussions libres sur les principaux problèmes de la Tchécoslovaquie depuis la fin de la guerre mondiale. Le quotidien du Parti, Rudé právo, accuse les signataires de la pétition d'activités subversives visant à la restauration du capitalisme. Une violente campagne médiatique se développe, en même temps que le nombre de signataires de cette pétition atteint 20 000 fin août. Plusieurs dizaines de milliers de personnes manifestent le en commémoration de l'invasion des forces du pacte de Varsovie en 1968[39]. Le , Radio Free Europe diffuse l'enregistrement pirate de propos tenus par Milouš Jakeš dont l'incohérence et la platitude deviennent rapidement un sujet de plaisanterie dans le pays[30].

Le pouvoir doit aussi faire face à des difficultés liées à ses voisins. Fin septembre, plusieurs milliers d'Allemands de l'Est trouvent refuge à l'ambassade de l'Allemagne de l'Ouest à Prague. Un accord intervient le 30 entre les trois pays concernés, qui permet à ces réfugiés de gagner la RFA à bord de trains. Le flux des réfugiés augmente durant les semaines suivantes, développant dans la population tchécoslovaque le sentiment que les régimes communistes d'Europe de l'Est ne maîtrisent plus la situation. Au 8 novembre, veille de la chute du Mur, plusieurs dizaines de milliers de réfugiés est-allemands ont pu émigrer en RFA via la Tchécoslovaquie. Alarmés, les dirigeants tchécoslovaques demandent aux dirigeants est-allemands d'ouvrir leur frontière avec la RFA[42],[30].

En octobre, le pouvoir continue de refuser en bloc toutes les demandes des mouvements d'opposition. Figé dans son conservatisme, le PCT rejette les transformations en cours en Pologne et en Hongrie, considérant qu'il s'agit seulement de « vendre aux enchères le capitalisme », et met en avant la « prospérité de la Tchécoslovaquie et de la RDA, sans inflation, sans famine, sans insécurité et sans conflits sociaux », en concluant qu'il n'est « aucunement besoin d'un quelconque retour à l'économie mixte ou au pluralisme bourgeois »[39].

Le 23 octobre, dans un communiqué commun, plusieurs mouvements indépendants dont la Charte 77 appellent à manifester le 28 pour le 71e anniversaire de l'indépendance de la Tchécoslovaquie. Le jour dit, entre 10 000 et 20 000 manifestants se rassemblent place Venceslas pour réclamer des élections libres. La police les dispersent et procède à 355 arrestations. À partir du 11 novembre, des manifestations spontanées ont lieu en Bohème pour protester contre la situation écologique catastrophique[30]. De nouveaux mouvements d'opposition naissent chaque semaine et leurs leaders osent de plus en plus ouvertement critiquer le régime en place.

Révolution de velours

La foule dans la rue à Prague durant la Révolution de Velours.

Selon l'analyse de F. Fejtö, « tout dialogue avec les représentants de l'opposition ayant été refusé jusqu'au dernier moment, il n'est donc pas étonnant que ce soit à la rue que revint la tâche de briser le cercle vicieux »[39].

L'explosion populaire se produit le . Près de 50 000 étudiants et lycéens se rassemblent en hommage à un jeune Pragois tué par les nazis en 1939. La foule scande « Liberté » et « Prague, soulève-toi ! ». La manifestation, la plus importante depuis vingt ans, est durement réprimée, mais le mouvement de révolte ne s'arrêtera plus. La rumeur, démentie par la suite, de la mort d'un manifestant déclenche une grève générale des étudiants, rejoints par les lycéens et de nombreux artistes. Le 19 novembre, 300 leaders de mouvements d'opposition se réunissent pour constituer le Forum civique et placent Václav Havel à sa tête. Les manifestations deviennent quotidiennes, drainant de plus en plus de participants. Le 20 novembre, entre 100 et 200 000 personnes manifestent à Prague contre le régime, tandis que d'autres rassemblements d'importance ont lieu à Brno, Ostrava et Bratislava, et que la grève des étudiants et des artistes se poursuit. Le 21 novembre, le Premier ministre cède à la pression de la rue et accepte de rencontrer des représentants de l'opposition ; plus de 200 000 manifestants acclament Václav Havel, autorisé pour la première fois à s'exprimer au peuple, lorsqu'il apparaît au balcon du journal Svobodné Slovo pour rendre compte des résultats des discussions. Le cardinal Tomasek encourage les catholiques à poursuivre leurs protestations non-violentes contre le régime. Le , 250 000 personnes se rassemblent place Venceslas. Un porte-parole lit une déclaration d'Alexander Dubček qui réclame la démission du gouvernement, le nom de l'ancien dirigeant du Printemps de Prague est scandé par la foule.

Le 24, au cours d'une réunion à huis clos du Comité central du PCT, le Politburo démissionne en bloc. Au même moment, Alexander Dubček, au côté de Václav Havel, est acclamé par trois cent mille personnes. Le 26, les négociations reprennent entre le Forum civique et le Premier ministre, Ladislav Adamec. Le 27, la grève générale de deux heures sur les lieux de travail est massivement suivie à travers tout le pays. Le 28, Adamec annonce qu'il accepte les demandes de l'opposition relatives au pluralisme politique et à la formation d'un nouveau gouvernement. Les changements demandés dans la constitution sont votés dès le lendemain 29 novembre par l'Assemblée fédérale à l'unanimité[30].

La Révolution de Velours provoque l'effondrement du régime en seulement treize jours sans violence notable. Le 10 décembre, le premier gouvernement non-communiste est formé. Alexander Dubček est élu à la tête du parlement le 28 décembre ; le lendemain, Václav Havel est élu Président de la République[30].

République démocratique allemande (Allemagne de l'Est)

Manifestations le 4 novembre 1989 à Berlin-Est.
Manifestation à Rostock, en RDA, pendant la période du « tournant ».
Chute du mur de Berlin.

Les images spectaculaires de la chute du mur de Berlin dans la nuit du au incarnent la fin de l'Europe communiste. Cette chute du régime est-allemand en une nuit, sans violence, résulte de sa fragilisation et de sa perte progressive de contrôle des évènements en République démocratique allemande (RDA) dans les mois qui la précédent[43].

Les manifestations du lundi à Leipzig à partir du 4 septembre sont généralement considérés comme le point de départ de l'effondrement de la RDA, qui doit aussi faire face depuis le début de l'été à l'hémorragie de ses ressortissants via les « pays frères », la Hongrie et la Tchécoslovaquie principalement, et la Pologne dans une moindre mesure. Le , lors du piquenique paneuropéen à la frontière austro-hongroise, des milliers d'Allemands de l'est passent à l'ouest en franchissant une simple barrière de bois. L'ouverture du rideau de fer déstabilise le régime est-allemand.

Le , jour où le Parti socialiste ouvrier hongrois s'auto-dissout, les manifestations populaires prennent de l'ampleur en République démocratique allemande, alors que le régime fête son 40e anniversaire. Le gouvernement est dépassé : le 19 octobre, Erich Honecker est contraint à la démission par le bureau politique du Parti socialiste unifié d'Allemagne (SED). Egon Krenz lui succède.

Le au soir, l'ouverture des frontières de la RDA est annoncée. Plusieurs milliers de personnes se dirigent vers le mur de Berlin. Les policiers est-allemands chargés de garder la frontière n'ont pas été avertis et contactent Moscou qui leur demande de ne pas réagir. La foule en liesse monte sur le Mur et commence à le détruire. Le symbole de la séparation de l'Europe et de la guerre froide est détruit. La chute du Mur est un symbole d'autant plus fort qu'il permet la réunification d'un peuple séparé.

Le , la Chambre du peuple retire de la constitution de la RDA les dispositions qui donnent la direction exclusive du pays au « Parti marxiste-léniniste », i.e. le SED, et au Front national de la RDA qui regroupe l'ensemble des partis et organisations politiques autorisés[44],[d]. Le 3 décembre, Egon Krenz démissionne avec la totalité de la direction du SED. Le 16 décembre, le parti, réuni en congrès, s'auto-dissout et devient le Parti du socialisme démocratique[45].

Le , l'Alliance pour l'Allemagne conservatrice qui rassemble la CDU est-allemande et deux autres partis, remporte les premières élections législatives libres de la RDA avec 48 % des suffrages, contre 22 % pour les sociaux-démocrates du SPD et 16 % pour le Parti du socialisme démocratique issu du SED. La réunification allemande est une réalité le [46].

République populaire de Bulgarie

Todor Jivkov participe en 1963 à un Congrès du Parti communiste est-allemand (SED)

La Bulgarie est durant des décennies le bon élève du bloc de l'Est, épousant toujours le point de vue de Moscou, appliquant au pied de la lettre ou du moins faisant semblant d'appliquer les réformes inspirées par le « grand frère » soviétique, dont — dernières en date — la perestroïka et la glasnost impulsées par Gorbatchev. Lorsqu'il reçoit François Mitterrand en janvier 1989, Jivkov se dit certain qu'en « Bulgarie, il n'y aura pas d'autres partis au pouvoir que nous ». Mais les déclarations répétées du pouvoir sur le pluralisme socialiste, quelques réformes mineures et les tentatives pour récupérer au sein du PC les initiatives en faveur de l'écologie ou des droits de l'homme ne suffisent pas à museler une opposition qui prend forme depuis fin 1987. Les manifestations qui ont lieu du 20 au 23 mai 1989 contre la politique, instaurée depuis 1984 par le gouvernement bulgare, d'assimilation forcée de la population d'origine turque de religion musulmane sont durement réprimées. Le 25 mai, la Turquie demande à ses alliés de l'OTAN d'imposer des sanctions économiques et culturelles à la Bulgarie. Plus de 80 000 personnes d'ethnie turque quittent la Bulgarie pour la Turquie durant le mois de juin, après les répressions policières des manifestations protestants contre leur assimilation forcée. Début juillet, le gouvernement bulgare décrète une « mobilisation civile générale » pour pallier l'exode massif vers la Turquie : tous les hommes âgés de 18 à 60 ans et les femmes âgées de 17 à 55 ans peuvent être enrôlées dans des « bataillons de travail » qui sont envoyés partout dans le pays, dans le but en particulier d'assurer les récoltes compromises par le départ de nombreux paysans d'ethnie turque. Le 23 octobre 1989, profitant d'une conférence de la CSCE sur l'environnement à Sofia, des groupes dissidents, comme Ecoglasnost fondé en avril dernier, manifestent dans plusieurs villes, mais sont finalement sévèrement réprimés par la police. Le 3 novembre, une nouvelle manifestation du mouvement Ecoglasnost rassemble 9 000 manifestants à Sofia[47],[30].

Petar Mladenov, alors ministre des Affaires étrangères, rencontre Nicolae Ceaușescu en 1978

Fin octobre, les dissensions au sommet de l'État deviennent visibles, des médias rapportent que le ministre des Affaires étrangères, Petar Mladenov, en désaccord avec Todor Jivkov sur la politique de répression, a menacé de démissionner et s'est assuré du soutien de Moscou à son égard. Après avoir dirigé la République populaire de Bulgarie pendant plus de 35 ans, un record dans les pays communistes, Todor Jivkov est forcé à la démission le , sous la pression des réformateurs, comme Andrei Lukanov, qui se sont assurés le soutien de Moscou. Jivkov est remplacé par Petar Mladenov au poste de Secrétaire général du PC bulgare, qui déclare vouloir engager des réformes politiques et économiques[48],[30].

Début décembre, l'Union des Forces Démocratiques en Bulgarie se forme, qui rassemble plusieurs mouvements indépendants anticommunistes, dont Ecoglasnost. Le 8 décembre, le CC renouvelle largement le Politburo en faisant sortir les conservateurs les plus radicaux. Le 13 décembre, mis sous pression par les manifestations organisées par l'Union des Forces Démocratiques, le Comité central du PC bulgare expulse Jivkov, Mladenov soutient l'organisation d'élections libres et la fin du rôle dirigeant du PC bulgare. Le15 janvier 1990, l'Assemblée nationale bulgare supprime dans la Constitution l'article relatif au rôle dirigeant du PC bulgare, ouvrant ainsi la voie au multipartisme, la « Table ronde » avec l'opposition commence ses travaux. Début février, le Congrès du PC bulgare s'achève par l'adoption d'une ligne réformiste, l'acceptation du multipartisme, mais sans renoncement à son caractère marxiste. Dans la foulée, Andrei Lukanov est élu Premier ministre, il constitue le 8 décembre un gouvernement entièrement composé de communistes après que l'Union nationale agraire a décidé de reprendre son indépendance vis-à-vis du PC. La stratégie du PC bulgare, calquée sur celle de Gorbatchev, est de conserver le contrôle de la pérestroïka en pratiquant un pluralisme politique limité et en promettant le passage à l'économie de marché. Cependant l'opposition, dont le soutien dans la société civile s'élargit et qui est encouragée par les évènements dans les autres pays d'Europe de l'Est, réclame une véritable démocratisation et des élections libres. Le 25 février 1990, la plus grande manifestation à date à Sofia rassemble 200 000 personnes, tandis que l'Union des Forces Démocratiques (UFD) accuse le PC bulgare de torpiller les travaux de la « Table ronde ». Le 3 mars, jour de la libération de l'Empire Ottoman en 1878, redevient jour de fête nationale à la place du 9 septembre qui commémorait la prise de pouvoir par les communistes en 1944. Fin mars, les discussions de la « Table ronde » aboutissent à un accord sur la tenue d'élections législatives et des modifications de la constitution. Le 3 avril 1990, le PC bulgare se rebaptise le Parti socialiste bulgare et abandonne toute référence au marxisme-léninisme. Les premières élections législatives libres en Bulgarie, les 10 et 17 juin 1990, sont remportées par le Parti socialiste bulgare, seul exemple dans les pays d'Europe de l'Est où le parti au pouvoir réussit à conserver la majorité, Andrey Lukanov conserve son poste de Premier ministre. La stratégie des leaders réformistes communistes semble réussir[48],[49],[30].

Mais la radicalisation politique et sociale s'amplifie, sur fond d'une grave crise économique comme la Bulgarie n'en a jamais connu qui conduit au rationnement des produits de première nécessité et des produits pétroliers. Le pouvoir est également affaibli par la démission de Petar Mladenov de la présidence, après la révélations de propos qu'il a tenus le 14 décembre 1989 suggérant que les chars soient envoyés pour réprimer les manifestations. Un compromis avec l'opposition aboutit à l'élection de Jeliou Jelev à la présidence le 1er août. Un quasi consensus est aussi trouvé à l'Assemblée nationale pour voter la transformation de la République populaire de Bulgarie en République de Bulgarie le 15 novembre. Mais, face à la grève générale, aux manifestations et au boycott de l'Assemblée nationale par l'opposition, le gouvernement bulgare dirigé par Andrei Lukanov formé par les ex-communistes, démissionne le 29 novembre 1990. Bien que majoritaire au Parlement, le gouvernement du Parti socialiste bulgare tombe en raison du refus général de son programme de réformes économiques libérales et de la contestation de sa légitimité à diriger le pays eu égard à son passé communiste. Un accord est trouvé pour organiser de nouvelles élections en 1991. Un gouvernement intérimaire de coalition est formé. Le 25 février 1991, le procès de Todor Jivkov pour détournement de fonds s'ouvre à Sofia. Jivkov est le premier ancien leader communiste en Europe de l'Est à être ainsi jugé dans un procès public. Le 13 juillet, une nouvelle constitution est adoptée qui dote la République de Bulgarie d'un régime parlementaire multipartite, assure la séparation des pouvoirs et instaure l'élection du Président au suffrage universel. Les nouvelles élections législatives sont remportées par l'Union des Forces Démocratiques qui forme un gouvernement de coalition avec le Mouvement des Droits et des Libertés, dirigé par Filip Dimitrov. Le nouveau gouvernement entre en fonction le 8 novembre 1991[49],[30].

République socialiste de Roumanie

Manifestation à Bucarest en décembre 1989.
Statue de Lénine démontée, déposée au palais de Mogoșoaia (Roumanie) : à sa place se dresse aujourd'hui le monument à la Résistance anticommuniste roumaine.

La chute des régimes du bloc de l'Est est pacifique, sauf en République socialiste de Roumanie où le gouvernement, au lieu d'assouplir sa politique, renforce la rigueur économique, accentuant les disettes et les pénuries d'énergie, de fournitures et de services, et aussi la répression exercée par la Securitate, police politique qui fait régner la terreur. En visite à Bucarest en 1986, Gorbatchev ne parvient pas à convaincre Nicolae Ceaușescu d'adopter la voie des réformes : le désespoir monte dans la population, l'année suivante des mineurs font grève et la ville de Brașov se soulève pour piller les entrepôts alimentaires de la nomenklatura, qui s'inquiète. Regroupés autour d'Ion Iliescu, de Petre Roman et de plusieurs généraux de l'armée et de la Securitate, des cadres du Parti communiste roumain décident, voyant l'effondrement des autres régimes du bloc de l'Est, de renverser Ceaușescu[50].

Le 21 décembre 1989 a lieu un rassemblement populaire organisé pour soutenir le régime, l'événement étant filmé. Mais soudain, en plein discours, le dictateur est hué par des protestataires sans que les troupes de la Securitate qui encadraient la manifestation réagissent. Le désarroi du dictateur apparait en direct. Le lendemain, le bâtiment du Comité central est attaqué : Ceaușescu, lâché par la nomenklatura, prend la fuite.

Des manifestants réussissent à prendre le bâtiment de la télévision à 13 h puis fraternisent avec les militaires. Formé par des cadres communistes favorables à un changement de régime, le Front de salut national est constitué autour d'Ion Iliescu. Le 25 décembre, Ceaușescu et sa femme Elena sont capturés avant d'être jugés, condamnés et exécutés au terme d'une procédure expéditive que le régime réservait à ses opposants[50]. Le soir même, des images de leur corps sont diffusées à la télévision. Dans les jours qui suivent, des combats violents ont lieu à Bucarest, opposant des groupes de civils et des militaires tous persuadés de « lutter pour la révolution », car Iliescu avait déclaré à la télévision que des « terroristes partisans de Ceaușescu voulaient mettre le pays à feu et à sang », et avait appelé la population et la troupe « aux armes pour défendre la démocratie »... c'est-à-dire en pratique, le Front de salut national qui prend le contrôle de toute la logistique de l'État. On n'a retrouvé ultérieurement aucune trace des prétendus « terroristes de Ceaușescu »[50]. Les premières élections libres sont remportées par Iliescu à une large majorité. La révolution en Roumanie est la plus violente, avec 1 104 morts et 1 761 blessés[50], les médias roumains contrôlés par le FSN et l'agence de presse yougoslave Tanjug ayant diffusé de fausses informations sur les évènements, avec notamment l'affaire des charniers de Timișoara.

République populaire socialiste d'Albanie

En décembre 1990, la République populaire socialiste d'Albanie s'ouvre à son tour à la démocratie : le Parti du travail d'Albanie remporte les premières élections pluralistes en mars 1991, mais une grève générale provoque la chute du nouveau gouvernement. Le parti s'auto-dissout en juin pour devenir le Parti socialiste d'Albanie. De nouvelles élections législatives, en mars 1992, sont remportées par le Parti démocrate d'Albanie. Le président de la République Ramiz Alia démissionne le 3 avril. Le 9 avril, Sali Berisha est élu par le parlement, devenant le premier président albanais démocratiquement élu.

Épilogue : la dislocation de l'Union soviétique

La lutte entre « réformateurs gorbatchéviens » et « conservateurs » était toujours en cours lors de la dislocation de l'URSS, en 1991. Sur le terrain et au quotidien, cette lutte se traduisait par de nombreuses résistances bureaucratiques aux réformes tentées par Gorbatchev. Factuellement, les « conservateurs » (qui eux-mêmes s'auto-définissaient comme des « préservateurs ») organisèrent l'été 1991 un putsch militaire qui échoua, mais affaiblit Gorbatchev et favorisa Boris Eltsine et ses homologues des autres républiques. Après 1991, la lutte s'est poursuivie dans les États successeurs de l'URSS sous de nouvelles formes, la nomenklatura adoptant une forme d'économie de marché très peu sociale, destinée à assurer sa propre privatisation comme oligarques et « nouveaux-riches » (новоричи), assortie d'une idéologie populiste où se mêlent éléments nationalistes, panslavistes, religieux et néo-staliniens, tout mais surtout pas le socialisme à visage humain espéré par les réformateurs. Ces derniers n'eurent d'autre choix que de se tourner vers les valeurs d'État de droit promues de l'Union européenne, apparaissant comme plus démocratiques et humanistes que celles des régimes post-soviétiques[51].

Premières années du post-communisme (1990-1994)

Premiers pas du multipartisme

L'appel de l'Europe de l'Ouest

Pauvreté et difficultés économiques

Dans les années 1990, les statistiques des pays d'Europe de l'Est ne sont plus truquées à des fins de propagande et dévoilent la considérable pauvreté des populations qui affecte particulièrement les enfants. Pour l'Unicef, si la fin du communisme avait soulevé « l’espoir que leurs besoins seraient satisfaits à court terme, cet espoir a été largement trahi ». En Europe centrale, la proportion d'enfants vivant dans la pauvreté double au cours des années 1990. Dans la Russie de Boris Eltsine, cette proportion finit par dépasser les 75 %. En outre, les guerres en ex-Yougoslavie et en Asie centrale provoquent l'exil de plus de deux millions d'enfants[52].

Les guerres yougoslaves

En janvier 1990, en République fédérative socialiste de Yougoslavie, le congrès de la Ligue des communistes de Yougoslavie est interrompu au bout de trois jours et ajourné sine die : le parti cesse ensuite d'exister alors que toutes ses composantes locales se transforment en partis socialistes ou sociaux-démocrates. Dans le courant de l'année, les différentes républiques de la fédération tiennent leurs premières élections libres et pluralistes, où les ex-communistes perdent partout la majorité, sauf en Serbie et au Monténégro. En 1991 commencent les guerres de Yougoslavie qui aboutissent à la dislocation progressive du pays. La Yougoslavie, rebaptisée en 1992 République fédérale de Yougoslavie, disparaît définitivement en 2003.

Notes

  1. Ces ouvrages clandestins parviennent par des voies détournées en Occident. Le procès des quatre, co-écrit avec Pavel Litvinov, consacré au procès des quatre littéraires des samizdat : Alexandre Ginsburg, Iouri Galanskov, Alekseï Dobrovolski (ru) et Vera Lachkova (ru), est publié à Amsterdam par la Fondation Herzen en 1971. L’Union soviétique survivra-t-elle en 1984 ? paraît en France en 1970 : voir Pascal Cauchy, « Les scénarios imaginés pour la fin de l'URSS », La Nouvelle Revue d'histoire, no 80 de septembre - octobre 2015, p. 46-47.
  2. Le « socialisme à visage humain » du « printemps de Prague » n'est pas la seule tentative de réforme économique et démocratique du communisme réel : dès les années 1920 en URSS, la « nouvelle politique économique » de Vladimir Ilitch Lénine aurait pu déboucher sur de telles réformes, de même que la déstalinisation dans les années 1950, la « nouvelle voie » d'Imre Nagy en Hongrie ou encore les réformes préconisées par l'économiste soviétique Evseï Liberman et qui furent partiellement introduites à la fin des années 1960 dans la Roumanie de Ceaușescu : à chaque fois, la « ligne dure » des apparatchiks craignant de perdre leurs pouvoirs, et plus largement de la nomenklatura craignant de perdre ses avantages, l'a emporté contre les « réformistes » et a fait échouer, parfois très violemment (Budapest en 1956, Prague en 1968), les innovations qui auraient pu mener le communisme réel à la réussite et l'installer durablement comme régime économique et politique (Emmanuelle Cosse, Marion Rousset, Sophie Courval : forum Qu’est-ce qui a échoué ? La chute du Mur reste pour beaucoup un symbole de l’échec du communisme. Cette expérience constitue-t-elle la fin du communisme ou celle du soviétisme ? dans Regards no 66, novembre 2009, sur [1]).
  3. Les comparaisons statistiques précises sont rendues difficiles tant les différences sont grandes entre les systèmes économiques de l'Ouest et de l'Est et tant les statistiques officielles à l'Est sont sujettes à caution. Concernant le PIB par habitant tout particulièrement, les données en US$ courants (ou constants) et en parité de pouvoir d'achat (PPA ou PPP) reposent pour les pays de l'Est sur des analyses et des extrapolations. Elles sont donc des ordres de grandeur. Concernant l'Allemagne, le gouvernement publie chaque année des statistiques détaillées sur l'évolution comparée des Länder de l'Est et de l'Ouest. En 1991, le PIB par habitant en € courant est de 9 442 € pour ceux de l'Est et de 22 030 € pour ceux de l'Ouest, montrant bien l'écart considérable qui existait entre les deux Allemagne.
  4. Avant modification par la Volkskammer, la constitution de 1968, revue en 1974, de la RDA a les apparences d'une constitution démocratique. Mais certains articles verrouillent le rôle du Parti communiste et des autres partis sous son contrôle et explicitent la relation indéfectible avec l'URSS. L'Article 1 dispose que « La République démocratique allemande est un État socialiste d'ouvriers et de paysans. L'Article 6 dispose que « La RDA est alliée à jamais et irrévocablement à l'URSS. Cette alliance étroite et fraternelle garantit au peuple de la RDA de nouveaux progrès sur la voie du socialisme et de la paix ».

Sources

Références

  1. Mikhaïl Voslenski, lui, préférait le terme nomenklatura.
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Bibliographie

Ouvrages

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  • Hélène Carrère d'Encausse, Six années qui ont changé le monde (1985-1991), Fayard, , 418 p. (ISBN 978-2213699141). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article.
  • Laurent Chamontin, L'empire sans limites : Pouvoir et société dans le monde russe, Éditions de l'aube, , 2e éd., 272 p. (ISBN 978-2815923095).
  • François Fejtö et Ewa Kulesza-Mietkowski, La fin des démocraties populaires : Les chemins du post-communisme, Seuil, coll. « Points Histoire », , 590 p. (ISBN 978-2020311854).
  • Tony Judt (trad. Pierre-Emmanuel Dauzat), Après-guerre - Une histoire de l'Europe depuis 1945, Librairie Arthème Fayard, coll. « Pluriel », , Édition du Kindle (ISBN 978-2818504772).
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  • Jean-François Soulet, Histoire de l'Europe de l'Est de la Seconde Guerre mondiale à nos jours, Armand Colin, coll. « U », , 304 p. (ISBN 978-2200248994).

Documents historiques

Autres documents

Compléments

Articles connexes

Liens externes