Charte européenne des langues régionales ou minoritaires

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Charte européenne des langues régionales ou minoritaires
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Les membres de la Charte.
  • Pays ayant ratifié la Charte.
  • Pays ayant signé mais pas ratifié la Charte.
  • Pays membres du Conseil de l'Europe n'ayant pas signé la Charte.
  • Pays non membres du Conseil de l'Europe.
Présentation
Référence ETS 148
Organisation internationale Conseil de l'Europe
Langue(s) officielle(s) Certifiées conformes : anglais et français ; Nombreuses traductions officielles (liste)
Type Traité
Adoption et entrée en vigueur
Ouverture à la signature
Entrée en vigueur

Lire en ligne

Site du Conseil de l'Europe : État des signatures, résumé et texte de la Convention, site de la Charte

La Charte européenne des langues régionales ou minoritaires est un traité européen, proposé sous l'égide du Conseil de l'Europe et adopté en 1992 par son Assemblée parlementaire[N 1], destiné à protéger et favoriser les langues historiques régionales et les langues des minorités en Europe.

En 2017, vingt-cinq États l'ont signée et ratifiée, huit États l'ont signée sans la ratifier, et quatorze États ne l'ont ni signée, ni ratifiée[1]. Conformément aux autres conventions proposées par le Conseil de l'Europe, la Charte n'est pas soumise de façon obligatoire aux États.

Objectifs officiels[modifier | modifier le code]

Selon le Conseil de l'Europe, la Charte est une convention destinée d'une part à protéger et à promouvoir les langues régionales ou minoritaires en tant qu’aspect menacé du patrimoine culturel européen et d’autre part à favoriser l’emploi de ces langues dans la vie privée et publique[2].

Historique[modifier | modifier le code]

La prise en compte des langues minoritaires et régionales est une préoccupation ancienne des institutions européennes. Dès 1957, l'Assemblée parlementaire (alors dénommée Assemblée consultative) vote une résolution (no 137) en faveur de la protection des minorités nationales[3]. La recommandation 285 sur les Droits des minorités nationales, votée le , est la première à encourager la mise en place de mesures permettant aux minorités « d'employer leur propre langue »[4]. En octobre 1981, la Recommandation 928 sur les Problèmes d'éducation et de culture posés par les langues minoritaires et les dialectes en Europe aborde encore plus spécifiquement la question en suggérant l'adoption de mesures en matière de normalisation toponymique, d'enseignement des langues, de médias et d'officialisation des langues[5]. Cette dernière résolution apparaît comme importante dans l'optique de la formalisation de la future charte[6].

Le principe de rédaction d'une convention sur les langues a été par la suite acté par la Conférence des pouvoirs locaux et régionaux de l'Europe (CPLRE, actuel Congrès des pouvoirs locaux et régionaux), et la première version du texte a été le fruit d'un examen méthodique des situations linguistiques dans les différents pays, d'une audition publique et de la réflexion d'un comité d'experts, assisté par l'Assemblée parlementaire et des représentants du Parlement européen.

La Charte naît formellement dans la résolution 192 (1988) du Conseil de l'Europe, présentée lors de la 23e session de la CPLRE en mars 1988[7]. Le Comité des ministres a alors appuyé la mise en place d'un comité ad hoc d'experts chargé de présenter une charte dans l'esprit de la résolution de 1988. L'Assemblée parlementaire et la CPLRE ont participé aux travaux, de nombreux comités spécialisés du Conseil ainsi que la Commission de Venise ont été auditionnés. La charte est finalement adoptée lors de la 478e réunion des Délégués des ministres le , et proposée à la signature le 5 novembre suivant à Strasbourg[6].

Le 20 octobre 2017, le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux adopte sa résolution 424 (2017)[8] par laquelle elle appelle les Etats à mettre en place une allocation budgétaire clairement identifiable pour la sauvegarde et la promotion des langues régionales. Elle appelle les Etats membres à œuvrer en faveur de la sauvegarde des langues régionales et minoritaires historiques, notamment par la facilitation et la promotion de leur usage écrit et oral, dans la vie privée comme dans la vie publique, en tant que ressource essentielle dont la préservation profiterait à l’économie, à la créativité, à la vitalité et au bien-être des populations régionales ou locales. Par ce texte, le CPLRE invite aussi les autorités locales et régionales des États membres du Conseil de l’Europe à prendre les mesures permettant de consolider et de développer l’enseignement des langues régionales ou minoritaires dans leurs régions, en offrant des conditions attrayantes (de préférence à travers des budgets spécifiques), contribuant ainsi à la création d’un espace européen cohérent et systématique d’apprentissage des langues régionales ou minoritaires; elle invite les autorités locales et régionales à coopérer avec les représentants des locuteurs de langues régionales ou minoritaires pour le développement et la mise en place de politiques et services les concernant et d'améliorer la coopération régionale et transfrontalière en vue d’assurer l’accès aux services fournis dans les langues régionales ou minoritaires dans les États-parents.

Contenu[modifier | modifier le code]

La Charte se divise en un préambule et cinq parties, pour un total de 23 articles.

  • Préambule : justification de la pertinence de la Charte ;
  • Partie I : dispositions générales et mention des langues concernées (art. 1 à 6) ;
  • Partie II : déclinaison des différents objectifs du texte (art. 7) ;
  • Partie III : présentation des engagements auxquels peuvent et doivent consentir les États ayant ratifié (art. 8 à 14) ;
  • Partie IV : modalités d'application de la Charte et du suivi de cette application (art. 15 à 17) ;
  • Partie V : dispositions finales (art. 18 à 23).

L'esprit de la charte (préambule)[modifier | modifier le code]

Le préambule justifie en quoi la Charte concourt aux objectifs de paix, de respect des droits de l'Homme et des libertés fondamentales du Conseil de l'Europe, notamment en se réclamant de la Convention européenne des droits de l'homme et des Accords d'Helsinki. La protection et la promotion des langues régionales et minoritaires y sont défendues comme participant au renforcement de la démocratie, de la diversité culturelle, tout en restant « dans le cadre de la souveraineté nationale et de l'intégrité territoriale ».

Langues concernées et engagements (partie I)[modifier | modifier le code]

Distribution approximative des langues parlées actuellement en Europe.

Les langues concernées par cette convention sont les langues traditionnellement employées par les ressortissants d'une partie d'un État européen. Elle s'applique essentiellement aux langues parlées par une minorité du pays[9] :

La Charte ne mentionne aucun seuil démographique, et les laisse à la libre appréciation des États[10].

Cependant, l’expression « langues régionales ou minoritaires », au sens de la Charte, « n'inclut ni les dialectes de la (des) langue(s) officielle(s) de l'État ni les langues des migrants » (Article 1 de la Charte). Ce choix sémantique a fait l'objet d'importants débats ; cette double appellation est souvent remplacée en anglais par l'expression lesser-used languages, qui permet de contourner l'arrêt d'une définition de la dimension « minoritaire » politiquement discutée. L'expression non-territorial language est également employée pour définir les langues des minorités nomades ou sans territoire spécifique, comme les Juifs d'Europe de l'Est ou les Roms[10].

La partie I explicite également la nature de l'engagement des États.

Actions imposées et proposées aux États signataires[modifier | modifier le code]

Un exemple d'action proposé par la charte : la signalisation bilingue, ici en français et en breton, à Quimper.

Les engagements que les États parties doivent respecter sont précisés dans les parties II et III. Ils se répartissent en deux catégories : des dispositions et objectifs généraux (énoncés dans la partie II du texte de la Charte), et des engagements concrets et précis, listés dans la partie III.

Objectifs généraux (partie II)[modifier | modifier le code]

Les États ayant signé et ratifié la charte s'engagent à respecter les huit principes suivants[11]  :

  • reconnaître les langues régionales ou minoritaires en tant qu’expression de la richesse culturelle ;
  • respecter l’aire géographique de chaque langue régionale ou minoritaire ;
  • entreprendre une action résolue de promotion de ces langues ;
  • faciliter et encourager l’usage oral et écrit dans la vie publique et dans la vie privée ;
  • mettre à disposition de formes et de moyens adéquats d’enseignement à tous les stades appropriés ;
  • promouvoir des échanges transfrontaliers ;
  • interdire toute forme de distinction, discrimination, exclusion, restriction ou préférence injustifiées portant sur la pratique d’une langue régionale ou minoritaire et ayant pour but de décourager ou de mettre en danger le maintien ou le développement de celle-ci ;
  • promouvoir la compréhension mutuelle entre tous les groupes linguistiques du pays.

Engagements concrets (partie III)[modifier | modifier le code]

La charte propose un grand nombre d'actions différentes que les États signataires peuvent entreprendre pour protéger et favoriser les langues historiques régionales et de minorités. Les États doivent entreprendre au moins trente-cinq de ces actions, réparties en sept thématiques.

  • Enseignement (art. 8)
  • Justice (art. 9)
  • Autorités administratives et services publics (art. 10)
  • Médias (art. 11)
  • Activités et équipements culturels (art. 12)
  • Vie économique et sociale (art. 13)
  • Échanges transfrontaliers (art. 14)

Parmi ces différentes mesures, se trouvent l'ouverture d'écoles spécialisées dans l'enseignement d'une langue protégée (art. 8), la mise en place d'une signalisation routière bilingue (art. 10, parag. 2, lettre g)[12], l'utilisation de la langue dans la sphère judiciaire (art. 9, parag. 1), le soutien financier aux médias en langues régionales (art. 11) ou encore la possibilité d'être soigné par un personnel qualifié pour utiliser lesdites langues (art. 13, parag. 2, lettre c).

Articulation des deux niveaux[modifier | modifier le code]

En raison de la diversité des situations nationales et des contextes politiques, culturels et juridiques, et parce qu'ils en ont la liberté, certains États ne respectent la Charte qu'au titre des objectifs généraux (partie II). De même, au sein même d'un État, une langue peut ne bénéficier du niveau de protection que de la partie II, tandis qu'une autre sera également soumise à des mesures de la partie III[N 2]. Enfin, au sein d'une même langue au sein d'un même État, la situation peut varier selon les régions[N 3],[13].

Procédure[modifier | modifier le code]

Adhésion[modifier | modifier le code]

Tous les pays membres du Conseil de l'Europe sans exception peuvent signer cette Charte, même s'ils ne possèdent aucune langue régionale et minoritaire (c'est le cas pour le Luxembourg par exemple). Les États peuvent choisir de reconnaître les langues qu'ils souhaitent mais celles-ci doivent être en accord avec les règles fixées par la Charte. En outre, les États peuvent décider d'ajouter d'autres langues par la suite, outre celles déjà proposées lors de la ratification.

Démarche d'application[modifier | modifier le code]

L'application de la Charte n'entre en vigueur qu'après signature et ratification, qui traduisent la mise en œuvre de mesures concrètes par les États.

Compte tenu de la très grande disparité des situations linguistiques, logistiques et économiques selon les États, le texte de la Charte permet une grande flexibilité dans l'application des engagements. Cette souplesse permet aussi de ménager les sensibilités dans les contextes où la question linguistique suscite les controverses et les tensions[14]. Les principes généraux énoncés dans la partie II peuvent ainsi s'appliquer à tous les contextes, tandis que les mesures énoncées dans la partie III sont plus précises et s'appliquent à des contextes plus spécifiques[11].

Suivi[modifier | modifier le code]

À l'instar de ce qu'il pratique pour l'ensemble de ses conventions, le Conseil de l'Europe a mis en place un mécanisme de suivi destiné à évaluer l'application effective de la Charte par les États qui se sont engagés à la mettre en application[15]. Ce suivi s'effectue par le biais de trois dispositifs : la remise d'un rapport périodique triennal par les États, la veille active d'un comité d'experts et du Comité des ministres du Conseil, et les rapports biennaux du Secrétaire général du Conseil. Les modalités du suivi sont détaillées dans la partie IV du texte de la Charte. Des guides linguistiques proposent en outre un aperçu global des dispositions appliquées aux langues couvertes par la Charte[16].

Rapport périodique des États parties[modifier | modifier le code]

Les États signataires ont ainsi pour obligation de fournir tous les trois ans au Secrétaire général du Conseil de l'Europe un rapport où sont consignées les mesures politiques précises mises en œuvre pour respecter les engagements initiaux. Ces rapports sont rendus publics. Chaque séquence triennale correspond à un « cycle de suivi ».

Organes de veille : Comité d'experts et Comité des Ministres[modifier | modifier le code]

Le Comité des ministres du Conseil de l'Europe (ici en 2016) est chargé d'adresser aux États-parties les recommandations que le Comité d'experts de la Charte juge indispensables pour la bonne application des engagements.

C'est principalement à un Comité d'experts indépendants qu'est attribuée la tâche du suivi. C'est cet organe qui est chargé de l'examen du rapport périodique fourni par l'État. Mis en place conformément à l'article 17 de la Charte, le Comité est composé d'autant de membres qu'il y a d'États parties. Ces membres sont désignés par le Comité des ministres du Conseil de l'Europe, parmi une liste présentée par l'État de personnes jugées compétentes[17].

S'il l'estime utile, par exemple s'il juge certains éléments du rapport périodique trop évasifs, le Comité peut adresser un certain nombre de questions à l'État concerné, voire effectuer une visite sur le terrain pour apprécier au mieux l'application des engagements liés à la Charte. C'est également le Comité qui répond aux sollicitations des acteurs externes (organisations non gouvernementales) qui peuvent l'interpeler au sujet de l'application de la Charte par l'État[18].

En 2017, le Comité d'experts est composé de 25 membres, soit autant que le nombre d'États ayant signé et ratifié la Charte. Le Comité est présidé depuis 2013 par la Croate Vesna Crnić-Grotić, professeure de droit international à l'Université de Rijeka, et ses deux vice-présidents sont l'Allemand Stefan Oeter (de), professeur de droit à l'Université de Hambourg et le linguiste suédois Jarmo Lainio (sv)[19].

Si le Comité d'experts constate des manquements dans l'application, il peut énoncer des recommandations aux États dans un rapport qu'il réalise lui-même et qu'il adresse alors au Comité des ministres. C'est à ce dernier d'évaluer l'intérêt de rendre ou non public ce rapport, et de décider de la nature des recommandations à transmettre aux États pour que ces derniers se mettent en conformité avec les obligations découlant de la Charte. Une médiation peut ensuite être décidée par le Conseil de l'Europe  ; elle se tient sous la houlette d'un membre du Comité d'experts, associe les autorités politiques nationales et les représentants de minorités, et doit permettre de dégager des pistes de résolution[15]. Une telle médiation a été mise en place en 2009 en Serbie.

Rapport biennal du Secrétaire général du Conseil[modifier | modifier le code]

Tous les deux ans depuis 2000, le Secrétaire général du Conseil de l'Europe publie un rapport détaillé sur l'application de la Charte, qui est présenté aux élus de l'Assemblée parlementaire[20].

Promotion de la ratification[modifier | modifier le code]

Le Conseil de l'Europe mène une politique active de promotion de la ratification, notamment à l'égard des États qui s'étaient initialement engagés à le faire et/ou qui ont signé la Charte sans pour autant la ratifier. Pour ce faire, il met à disposition une assistance juridique chargée de conseiller les autorités intéressées et développe des campagnes de communication[21].

Dans cet exercice de lobbying, le Conseil est soutenu par un ensemble d'organisations non gouvernementales engagées sur les questions linguistiques et les enjeux liés aux droits de l'homme, mais aussi par des acteurs locaux et nationaux, notamment des élus favorables à la ratification qui peuvent décider la mise en place de versions infra-nationales de la Charte pour concrétiser leurs engagements et ainsi inciter les responsables nationaux à s'inspirer de ces expériences pour enclencher une ratification nationale. En France, par exemple, plusieurs collectivités alsaciennes ont voté des « Chartes locales »[22].

Signatures et ratifications par pays[modifier | modifier le code]

Pays Date de
signature[1]
Date de
ratification
Date
d'entrée
en vigueur
Langues concernées
par l'instrument
de ratification[N 4]
Langues minoritaires
non concernées
Albanie
Allemagne
Dispositions spécifiques :
[23]
luxembourgeois
Andorre espagnol[24]
Arménie [25]
Autriche
Dispositions spécifiques :
Azerbaïdjan [27]
Belgique
Bosnie-Herzégovine

Dispositions spécifiques : romani[28]

Bulgarie
Chypre
Dispositions spécifiques :
[29]
Croatie [30],[31]
Danemark allemand (sud du Jutland)[32]
Espagne Les langues régionales ou minoritaires considérées sont les langues reconnues comme officielles dans les statuts d'autonomie des communautés autonomes du Pays basque, de Catalogne, des îles Baléares, de Galice, de la Communauté valencienne et de Navarre (voir ci-dessous)[33].
Estonie russe[24]
Finlande
France [35] Voir ci-dessous une liste des langues potentiellement concernées
Géorgie
Grèce
Hongrie
Irlande
Islande
Italie
Lettonie
Liechtenstein Il n'y a pas de langues régionales ou minoritaires[37] alémanique[24]
Lituanie
Luxembourg
Macédoine
Malte
Moldavie
Monaco
Monténégro
Norvège sami[38] kvène
Pays-Bas
Pologne
Portugal
Roumanie
Royaume-Uni
Russie Nombreuses langues
Saint-Marin émilien-romagnol[24]
Serbie macédonien
Slovaquie
Slovénie
Suède
Suisse
Tchéquie
Dispositions spécifiques :
Turquie
Ukraine rusyn

Légende : Pays : pays ayant signé et ratifié la charte, Pays : pays ayant simplement signé la charte, Pays : pays n'ayant ni signé, ni ratifié la charte.
Les langues soulignées sont les langues citées dans les déclarations des États.

Observations[modifier | modifier le code]

Allemagne[modifier | modifier le code]

Belgique[modifier | modifier le code]

En 2011, dans le cadre de l'examen périodique universel du Conseil des droits de l'homme des Nations unies, la Hongrie a recommandé à la Belgique de ratifier cette charte. La Belgique a mis cette recommandation en suspens[53].

Le , la Communauté française de Belgique (Fédération Wallonie-Bruxelles) a reconnu le statut de « langue régionale endogène » à plusieurs langues régionales de Wallonie, et a été mis en place un Conseil des langues régionales endogènes (wa)[54], épaulé par le Service des Langues régionales endogènes de la Communauté française[55]. Cependant, cette décision n'entraine aucune disposition politique automatique, et le français demeure seule langue officielle et acceptée dans l'administration.

Les langues concernées en région wallonne sont le wallon, gaumais, picard, champenois pour les langues romanes et le luxembourgeois pour seul langue germanique (pays d'Arlon et de Saint-Vith).

Croatie[modifier | modifier le code]

Danemark[modifier | modifier le code]

Le Danemark considère que le féroïen dans les îles Féroé et le groenlandais au Groenland jouissent d'un haut degré de protection et qu'ainsi les dispositions de la Charte ne lui sont pas applicables[32],[56].

Espagne[modifier | modifier le code]

Dans la déclaration en français de l'Espagne au Conseil de l'Europe[33], il est écrit :

« L’Espagne déclare que, aux fins prévues dans les articles cités, sont considérées comme langues régionales ou minoritaires, les langues reconnues comme officielles dans les Statuts de l’Autonomie des Communautés Autonomes du Pays basque, de la Catalogne, des Iles Baléares, de la Galicie, de Valence et de Navarre.
L’Espagne déclare également, aux mêmes fins, que l’on considère comme langues régionales ou minoritaires celles que les Statuts de l’Autonomie protègent et sauvegardent dans les territoires où elles se parlent traditionnellement. »

La constitution espagnole de 1978 reconnait dans son préambule et à son article 3 que le Castillan est la langue nationale et que les communautés autonomes ont le droit d'adopter une ou des langues officielles, ces dernières devenant de jure langue co-officielle[57]

Les langues suivantes sont donc officiellement reconnues :

Dans son communiqué du , le Comité des ministres du Conseil de l'Europe a salué le « niveau très élevé de protection des langues co-officielles » mis en place par les autorités espagnoles, tout en constatant de nombreuses difficultés dans la mise en place de personnels habilités à assurer dans les langues concernées les services requis par la Charte[58].

Finlande[modifier | modifier le code]

France[modifier | modifier le code]

La France a signé la Charte le 7 mai 1999. Le Conseil économique et social des Nations unies a, en 2008, « suggéré » et « recommandé » à la France d'« envisager » la ratification de cette Charte[59].

L'Assemblée nationale a adopté en janvier 2014 un amendement constitutionnel permettant la ratification du traité, ce qui est une promesse de campagne de François Hollande, devenu Président de la République en 2012[60]. Le Sénat devait débattre de l’amendement proposé entre le 27 octobre et le 3 novembre 2015.

Ce « possible » traité concernait uniquement les langues qui sont encore parlées et non celles qui ont disparu. Étaient concernées : « le basque, le breton, le catalan, le corse, le néerlandais (flamand occidental et néerlandais standard), l’allemand (dialectes de l’allemand et allemand standard, langue régionale d’Alsace-Moselle) et l’occitan »[61].

Le texte est finalement rejeté par le Sénat le [62].

Le rapport du comité consultatif pour la promotion des langues régionales et de la pluralité linguistique interne a établi en 2013 une liste des langues susceptibles d'être concernées par la charte[63] :

France métropolitaine :

Outre-mer :

Langues « non territoriales » :

Luxembourg[modifier | modifier le code]

Le Luxembourg a ratifié la charte mais n'a pas fait de déclaration particulière. Les langues officielles du Luxembourg sont le luxembourgeois, le français et l'allemand.

Russie[modifier | modifier le code]

Serbie[modifier | modifier le code]

Le , une conférence de médiation s'est tenue à Novi Sad, à l'instigation du Conseil de l'Europe et du Vojvodina Centre for Human Rights, en prolongement du mécanisme de suivi mis en place pour évaluer la bonne application des engagements de l'État. Elle a servi de prétexte à l'énonciation de recommandations à destination des autorités politiques du pays, devant faciliter et améliorer l'application locale de la Charte[64].

Suisse[modifier | modifier le code]

La Suisse a ratifié la charte, le , bien qu'elle n'ait aucune langue régionale ou minoritaire [réf. nécessaire] puisque toutes les langues nationales du pays sont langues officielles (allemand, français, italien, romanche) ; elle l'a fait pour le cas, prévu dans l'art. 3 al. 1 de la charte, de « langue officielle moins répandue » et a pour cela reconnu les langues suivantes[65] :

Depuis le , elle reconnait également d’autres langues minorisées[66]. :

Les recommandations du Conseil de l’Europe étant de reconnaitre l’arpitan comme langue régionale ou minoritaire, le Conseil fédéral a logiquement élargi cette reconnaissance au franc-comtois.

Ukraine[modifier | modifier le code]

Contrairement aux autres États ayant ratifié la Charte, l'Ukraine a choisi de reconnaître les langues de l'ensemble des minorités présentes sur son territoire mais a préféré reconnaître l'hébreu, plutôt que le yiddish, pour sa minorité juive.

État non membre[modifier | modifier le code]

La Biélorussie, État non-membre du Conseil de l'Europe, mais candidat à l'adhésion, et bien que pouvant le faire, n'a pas signé la charte.

Critiques[modifier | modifier le code]

La Charte est critiquée et combattue dans certains pays, notamment la France, par certains responsables politiques et chercheurs défendant des positions souverainistes, qui y voient l'expression d'une revendication communautariste et une atteinte à l'unité nationale[67]. L'essayiste et éditrice Françoise Morvan voit dans le mouvement favorable à la ratification du texte l'expression d'une idéologie ethniste et raciste[68] ; elle évoque les travaux des germanistes Lionel Boisson et Yvonne Bollmann qui affirment que la Charte aurait été portée par l'Union fédéraliste des communautés ethniques européennes dont les fondements idéologiques s'appuieraient sur le pangermanisme[68]. Ces théories sont cependant qualifiées de « rumeur ou de manipulation idéologique » par un universitaire comme Philippe Blanchet[69].

La difficulté de mettre en place des mesures concrètes de protection constituerait un argument pour les États refusant de ratifier la Charte après l'avoir signée[70].

L'absence de ratification de la Charte par l'Estonie, la Lettonie et la Lituanie est attribuée par le Parlement européen au passé soviétique des pays baltes, qui peinent à reconnaître l'importante minorité russophone qui y réside[10].

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. La Charte correspond au 148e texte de la série des traités européens du Conseil (elle est dite « ETS 148 » ou « traité 148 »).
  2. À titre d'exemple, en Croatie, l'allemand ou l'istro-roumain bénéficient du niveau de protection lié aux seuls engagements de principe de la partie II, tandis que l'italien ou le ruthène bénéficient en outre d'engagements formulés dans la partie III.
  3. À titre d'exemple, en Allemagne, le bas allemand et le romani ne bénéficient du niveau de protection découlant des engagements de la partie III que dans une portion du territoire national.
  4. Le nom des langues est celui utilisé dans la version française des déclarations des États.

Références[modifier | modifier le code]

  1. a et b État des signatures et ratifications du traité 148
  2. « Les objectifs de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires », sur coe.int (consulté le ).
  3. « Résolution 136 (1957) - Situation des minorités nationales en Europe », sur assembly.coe.int (consulté le ).
  4. « Recommandation 285 (1961) - Droits des minorités nationales », sur assembly.coe.int (consulté le ).
  5. « Recommandation 928 (1981) - Problèmes d'éducation et de culture posés par les langues minoritaires et les dialectes en Europe », sur assembly.coe.int (consulté le ).
  6. a et b Charte européenne des langues régionales ou minoritaires: rapport explicatif, Éditions du Conseil de l'Europe, Strasbourg, 1993.
  7. (en + fr) « Résolution 192 (1988) sur les langues régionales ou minoritaires en Europe », sur wcd.coe.int, (consulté le ).
  8. « Texte de la résolution 427(2017) »
  9. « A quelles langues la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires s’applique-t-elle ? », sur coe.int (consulté le ).
  10. a b et c (en) « Regional and minority languages in the European Union », sur europarl.europa.eu, (consulté le ).
  11. a et b « Signatures et ratifications de la Charte européenne des Langues régionales ou minoritaires », sur coe.int (consulté le ).
  12. Détails du traité no 148 : Charte européenne des langues régionales ou minoritaires
  13. « Etats parties à la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires et leurs langues régionales ou minoritaires (listé par langue p.6) », sur rm.coe.int, (consulté le ).
  14. Christian Hounnouvi-Coffi, « Espagne, régionalismes et minorités : politiques de préservation et expectatives autour de patrimoines linguistiques localisés », Mémoire(s), identité(s), marginalité(s) dans le monde occidental contemporain En ligne, 13 | 2015, mis en ligne le 30 juin 2015, consulté le 2 mars 2017.
  15. a et b « Mécanismes de suivi de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires », sur coe.int (consulté le ).
  16. « Guides linguistiques », sur coe.int (consulté le ).
  17. « Le Comité d'Experts de la Charte européenne des Langues régionales ou minoritaires », sur coe.int (consulté le ).
  18. « Le rôle des ONG dans le mécanisme de contrôle de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires », sur coe.int (consulté le ).
  19. « Membres du Comité d'Experts », sur coe.int (consulté le ).
  20. « Rapports du Secrétaire Général sur l'application de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires », sur coe.int (consulté le ).
  21. « Ressources », sur coe.int (consulté le ).
  22. « Promotion de la ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires en France », sur coe.int (consulté le ).
  23. Déclaration de l'Allemagne au Conseil de l'Europe
  24. a b c d e f g h i j k l m n o p q r s t u v w x y z aa ab ac ad ae af ag ah ai aj ak al am an ao ap aq ar as et at Langue signalée dans la liste du site geocities.ws
  25. Déclaration de l'Arménie au Conseil de l'Europe
  26. Déclaration de l'Autriche au Conseil de l'Europe
  27. Déclaration de l'Azerbaïdjan au Conseil de l'Europe
  28. Déclaration de la Bosnie-Herzégovine au Conseil de l'Europe
  29. Déclaration de Chypre au Conseil de l'Europe
  30. Déclaration de la Croatie au Conseil de l'Europe
  31. Réserve exprimée par la Croatie
  32. a et b Déclaration du Danemark au Conseil de l'Europe
  33. a et b Déclaration de l'Espagne au Conseil de l'Europe
  34. Déclaration de la Finlande au Conseil de l'Europe
  35. Déclaration de la France au Conseil de l'Europe
  36. Déclaration de la Hongrie au Conseil de l'Europe
  37. Déclaration du Liechtenstein au Conseil de l'Europe
  38. Déclaration de la Norvège au Conseil de l'Europe
  39. Déclaration des Pays-Bas au Conseil de l'Europe
  40. Autre déclaration des Pays-Bas au Conseil de l'Europe
  41. Déclaration de la Pologne au Conseil de l'Europe
  42. Déclaration de la Roumanie au Conseil de l'Europe
  43. Déclaration du Royaume-Uni au Conseil de l'Europe
  44. Autre déclaration du Royaume-Uni au Conseil de l'Europe
  45. Déclaration de la Serbie au Conseil de l'Europe
  46. Déclaration de la Slovaquie au Conseil de l'Europe
  47. Déclaration de la Slovénie au Conseil de l'Europe
  48. Déclaration de la Suède au Conseil de l'Europe
  49. Déclaration de la Suisse au Conseil de l'Europe
  50. Charte européenne des langues régionales ou minoritaires : 7ème rapport de la Suisse
  51. Déclaration de la Tchéquie au Conseil de l'Europe
  52. Déclaration de l'Ukraine au Conseil de l'Europe
  53. « Convention sur les minorités: la Belgique répondra en septembre », rtbf.be
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  70. (en) Aline Sierp, « Minority Language Protection in Italy: Linguistic Minorities and the Media », sur jcer.net (consulté le ).

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Mario d'Angelo, Paul Vespérini, Les politiques culturelles en Europe: Régions et décentralisation culturelle, Éditions du Conseil de l'Europe, Strasbourg, 2000 (traduit en anglais Cultural Policies in Europe: Regions and Cultural Decentralisation).
  • Pierre Hillard, Minorités et régionalismes, aborde la question du processus d'élaboration de la Charte qui, selon lui, s'est fait en liaison avec la Convention-cadre pour la protection des minorités.
  • (en) Snježana Kordić, « Ideology Against Language : The Current Situation in South Slavic Countries », dans Motoki Nomachi et Tomasz Kamusella, Languages and Nationalism Instead of Empires, London, Routledge, coll. « Routledge Histories of Central and Eastern Europe », , 268 p., PDF (ISBN 978-0-367-47191-0, OCLC 1390118985, DOI 10.4324/9781003034025-11, S2CID 259576119, présentation en ligne), p. 167–179
  • Alain Viaut, "Apport et réception française de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires : approche sociolinguistique", Revue d'Etudes Comparatives Est-Ouest, CNRS, 2002, 33 (1), pp. 9–48 ⟨lire en ligne

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]