Bataille de Fort Necessity

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Bataille de Fort Necessity
Description de cette image, également commentée ci-après
Reconstitution de Fort Necessity.
Informations générales
Date
Lieu Près d'Uniontown, Pennsylvanie
Issue Victoire française
Belligérants
Drapeau du royaume de France Royaume de France Drapeau de la Grande-Bretagne. Grande-Bretagne
Commandants
Louis Coulon de Villiers George Washington
James Mackay (en)
Forces en présence
100 indiens
600 fantassins de marine et miliciens
100 soldats
193 miliciens et indiens
Pertes
3 morts
19 blessés
31 morts
70 blessés
192 capturés

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Coordonnées 39° 48′ 50,9″ nord, 79° 35′ 13,58″ ouest
Géolocalisation sur la carte : Pennsylvanie
(Voir situation sur carte : Pennsylvanie)
Bataille de Fort Necessity
Géolocalisation sur la carte : États-Unis
(Voir situation sur carte : États-Unis)
Bataille de Fort Necessity

La bataille de Fort Necessity, ou bataille de Great Meadows, qui a lieu le au Fort Necessity (actuel comté de Fayette, en Pennsylvanie), oppose 600 soldats français du Canada et 100 auxiliaires amérindiens, sous le commandement de Louis Coulon de Villiers, à 100 soldats britanniques et 193 miliciens de la colonie de Virginie et auxiliaires amérindiens, sous le commandement de George Washington, alors jeune lieutenant-colonel de la milice de Virginie. C'est une victoire française, la seule reddition qu'ait dû accorder George Washington au cours de sa carrière.

Avec la bataille de Jumonville Glen, qui en est la cause directe, la bataille de Fort Necessity marque le début de la guerre de la Conquête, appelée French and Indian War aux États-Unis, qui, à partir de 1756, s'intègrera dans le conflit général de la guerre de Sept Ans.

Le site de la bataille est aujourd'hui une zone préservée, Fort Necessity National Battlefield, sur la National Road, non loin de la tombe du général britannique Edward Braddock.

Contexte : la rivalité franco-britannique dans la vallée de l'Ohio[modifier | modifier le code]

Depuis l'expédition de La Galissonière dans la région de l'Ohio en juin 1749, les Français du Canada cherchent à garantir une présence durable dans cette zone en construisant une série de forts et en s'assurant du contrôle des populations amérindiennes. Mais ils sont confrontés à l'expansionnisme britannique à partir des années 1750.

En 1753, George Washington, jeune planteur enrôlé, effectue à la demande du gouverneur de Virginie Robert Dinwiddie une mission auprès de Jacques Legardeur de Saint-Pierre, commandant des forces françaises en Ohio, à Fort Le Bœuf (aujourd'hui Waterford en Pennsylvanie). Il reçoit une fin de non recevoir quant à la teneur de son message : le retrait français des territoires de la vallée de l'Ohio.

En , les Virginiens construisent un fortin, le fort Prince George (en), aux confins des rivières Ohio, Allegheny et Monongahela. En avril, les Canadiens les en délogent et bâtissent à la place Fort Duquesne[1]. Washington, promu lieutenant-colonel du régiment de Virginie, récemment créé, se trouve dans le sud de la Pennsylvanie quand il apprend la chute de Fort Prince George. Le , il prend le commandement du régiment après une chute de cheval mortelle du colonel Joshua Fry (en) et le dirige vers la vallée de l'Ohio. Il apparaît dès cette époque actif et ambitieux, désireux de se mettre en avant malgré son jeune âge.

Préliminaires[modifier | modifier le code]

La bataille de Jumonville Glen et la mort problématique de Jumonville (28 mai)[modifier | modifier le code]

Le , dans une petite gorge — qui s'appelle depuis Jumonville Glen — près de Great Meadows en Pennsylvanie, se produit ce que l'on nommera aussi l'« affaire Jumonville ».

Georges Washington fut accusé par les Français d'avoir ouvert le feu sans sommation sur un détachement d'une trentaine d'hommes, et fait exécuter Joseph Coulon de Villiers, sieur de Jumonville, commandant le détachement, alors qu'il était son prisonnier.

Il s'avéra en outre que ce dernier était en mission de plénipotentiaire, donc sans intention belliqueuse, les deux camps étant toujours officiellement en paix. Les Français accuseront Washington de meurtre.

L'affaire eu un retentissement jusqu'en Europe, et peut être considéré comme le premier coup de feu de la guerre de Sept Ans.

Le repli de Washington à Fort Necessity (juin)[modifier | modifier le code]

Dans l'immédiat, Washington se prépare aux représailles françaises. Il se replie à Great Meadows, alors une étendue de terre ouverte[2], et rassemble ses troupes dispersées. Il ordonne la construction d'une palissade circulaire autour d'un petit bâtiment existant, qu'il nomme laconiquement Fort Necessity (« Fort de la Nécessité »). Il pense que cette construction peut lui donner un avantage tactique, les Français étant obligés d'avancer à découvert jusqu'au fortin. Mais il évalue mal certains paramètres, comme la pente du terrain (le fortin est en fait dans une dépression inondable) et sa distance avec la zone arborée.

Le , il reçoit des renforts, 100 soldats britanniques sous le commandement du capitaine James Mackay, ainsi que du ravitaillement. Washington entre immédiatement en conflit avec Mackay sur le commandement de la petite garnison : Mackay n'est que capitaine, mais dans l'armée britannique, ce qui le place statutairement au-dessus de Washington, lieutenant-colonel de la milice coloniale. Ce dernier refuse de recevoir des ordres de Mackay, qui établit un cantonnement séparé. Finalement, un accord de partage du commandement est signé, mais mal conçu, il sera des plus gênant pendant la bataille.

Autre point de friction : les coloniaux, à l'origine présents à Great Meadows pour la construction d'une piste à chariots, demandent l'aide des soldats pour creuser les tranchées défensives. Mais ceux-ci refusent, à moins d'obtenir un supplément de solde.

La contre-attaque française (28 juin)[modifier | modifier le code]

le , Claude-Pierre Pécaudy de Contrecœur, commandant de Fort Duquesne, prévenu par le seul rescapé, envoie un détachement de plusieurs centaines d'hommes (des Troupes de la Marine et des miliciens) à la poursuite de Washington, sous le commandement du frère de Jumonville, Louis Coulon de Villiers. Dans leur marche, les poursuivants trouvent à Jumonville Glen les cadavres des victimes abandonnés à même le sol. Leur fureur est à son comble.

Le moral des défenseurs de Fort Necessity tombe quand ils apprennent le ralliement des puissantes tribus Shawnee et Lenape aux Français. Les alliés amérindiens des Britanniques, incluant le groupe du chef sénéca « Half King » qui était à Jumonville Glen, estimant impossible la défense de Fort Necessity, se retirent. Il reste à Washington 193 hommes et 100 soldats. Lui-même hésite, mais la proximité des Français lui interdit un repli en bon ordre.

Fort Necessity (Fort de la Nécessité - reconstitution)
Fort Necessity National Battlefield, États-Unis

La bataille de Fort Necessity et la reddition de Washington (3 juillet)[modifier | modifier le code]

Washington tenant conseil dans le fort avant sa reddition.

Le à 11 h, la colonne française de 600 militaires et miliciens appuyée par une centaine d'amérindiens arrive et engage immédiatement une attaque vigoureuse. Ils parviennent à faire feu depuis une ligne d'arbres à couvert et surélevée ; l'intérieur du fort est ainsi exposé aux tirs et le choix de Great Meadows s'avère d'entrée un désastre. Les munitions s'épuisent et il commence à pleuvoir fortement, l'eau inondant les tranchées creusées puis le reste du site.

À 20 h, Washington demande sa reddition. On dénombre 31 morts du côté anglais et 3 chez les Français.

La communication est lente et difficile : aucun Anglais ne parle français et vice versa. Cependant, un milicien d'origine hollandaise connaît suffisamment les deux langues pour échanger des informations lapidaires.

L'« affaire Jumonville »[modifier | modifier le code]

Les « aveux » de Washington[modifier | modifier le code]

Outre sa reddition, George Washington évite le jugement pour meurtre car il signe des aveux complets où il reconnait l'assassinat de Joseph Coulon de Jumonville[3] :

« …Comme notre intention [l'intention des français] n'a jamais été de troubler la Paix et la Bonne armonie qui régnoit entre les deux Princes amis, mais seulement de venger L'assasin qui a été fait sur un de nos officier porteur d'une sommation et sur son escorte, comme aussy d'empecher aucun Etablissement sur les terres du Roy mon maitre… (extrait)[4] »

Le , la garnison britannique et ses chefs sont autorisés à partir vers le Maryland dans l'honneur[pas clair]. Les Français brûlent le fortin et retournent à Fort Duquesne avec 2 prisonniers pris en garantie (les Anglais détiennent encore les prisonniers de Jumonville Glen), Robert Stobo[5] et Jacob Van Braam.

La rétractation[modifier | modifier le code]

Une fois libre, Washington nia les faits, arguant ne pas comprendre le français, langue dans laquelle est rédigé le texte, qui par ailleurs aborde plusieurs sujets. Il affirma que la traduction qu'on lui donna pour qualifier l’acte était « death of » (mort de) ou « killing » (tuerie) mais pas « assassination » (assassinat). Contraint de se justifier maladroitement, l'affaire faillit ruiner sa réputation.

Suites[modifier | modifier le code]

Un an plus tard, George Washington fait partie de l'expédition Braddock contre Fort Duquesne, comme simple aide de camp du général Braddock, et repasse devant les restes de Fort Necessity.

Cette expédition est un nouveau désastre, mais il y gagne le surnom de Hero of the Monongahela.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Ils en seront chassés en 1758 par les anglais qui bâtiront Fort Pitt, qui deviendra plus tard la ville de Pittsburgh. L'emplacement de Fort Duquesne y est tracé dans le sol à Point State Park.
  2. Great Meadows signifie « grands prés ».
  3. « Fort Necessity », sur George Washington's Mount Vernon.
  4. (fr + en) Texte de la capitulation de Fort Necessity Fort Necessity National Battlefield Museum.
  5. (fr) Cf. L'histoire de Robert Stobo dans le Dictionnaire biographique du Canada en ligne.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • (fr) Edmond Dziembowski, La guerre de Sept Ans, Paris, éditions Perrin, coll. « Tempus », , 851 p. (ISBN 978-2-262-07502-6)
  • (fr + en) Dictionnaire biographique du Canada en ligne
  • (fr) Marc de Villiers Du Terrage, Les dernières années de la Louisiane française, Paris, 1905.
  • (fr) Amédée Gosselin, Notes sur la famille Coulon de Villiers, BRH, XII, 1906.
  • (fr) Papiers Contrecœur et autres documents concernant le conflit anglo-français sur l'Ohio de 1745 à 1756, Édition Fernand Grenier, Les Presses Universitaires Laval, Québec, 1952.
  • Edmond Dziembowski, La guerre de Sept Ans, Paris, éditions Perrin, coll. « Tempus », , 851 p. (ISBN 978-2-262-07502-6)
  • (fr) Laurent Veyssière (dir.) et Bertrand Fonck (dir.), La guerre de Sept Ans en Nouvelle-France, Québec, Septentrion (Canada) et PUPS (France), , 360 p. (ISBN 978-2-89448-703-7)
  • (en) Francis Parkman, Montcalm and Wolfe, The Riveting Story of the Heroes of the French and Indian War, 1884.
  • (en) Frederick Tilberg, Fort Necessity National Battlefield Site, 1956, U.S. Dept. of Interior, États-Unis.
  • (en) G.F.G Stanley, New France, 1968.
  • (en) Francis Jennings, Empire of Fortune: Crowns, Colonies, and Tribes in the Seven Years War in America, Norton, 1988.
  • (en) Fred Anderson, Crucible of War : The Seven Years War and the Fate of Empire in British North America, 1754-1766, 2000.
  • (en) Will H. Lowdermilk, History of Cumberland, Clearfield Co., October 1997, (ISBN 0-8063-7983-9)