Émeutes dans les banlieues françaises depuis les années 1970

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Voiture en flammes à Strasbourg, en 2005.

Les émeutes urbaines françaises sont des violences urbaines qui sont récurrentes en France depuis le début des années 1970.

Une douzaine de crimes et délits survenus dans les grands ensembles de Lyon sont évoqués au journal télévisé entre 1969 et 1981.

Les années 1970-80

Villeurbanne, banlieue de Lyon.

La presse régionale et les archives locales évoquent de premiers incidents en 1971 à Vaulx-en-Velin et « rodéos et voitures brûlées sont signalés dès 1976 » à Villeurbanne dans la banlieue Lyonnaise.

Les premières émeutes urbaines ont lieu en 1979 dans le quartier de la Grappinière à Vaulx-en-Velin, dans la banlieue de Lyon : des jeunes affrontent les forces de l'ordre et incendient des voitures. Les affrontements se multiplient, entre 1979 et 1980, à la cité Olivier-de-Serres, à Villeurbanne, avant que le maire Charles Hernu décide de raser ce « vivier à délinquance ». C'est à cette occasion qu'ont lieu les premiers affrontements entre les forces de l'ordre et des groupes. Ce sont également les premières voitures brûlées.

Les événements de 1981 dans la cité des Minguettes à Vénissieux[1] et à Rillieux-la-Pape, toujours dans la banlieue lyonnaise, connaissent la première couverture médiatique de grande ampleur. Gaston Defferre, alors ministre de l'intérieur, préconise une réponse policière ferme.

Durant l'été 1983, de rudes affrontements opposent policiers et jeunes. Pendant les affrontements, Toumi Djaïda, le jeune Président de l'association SOS Avenir Minguettes, est blessé par un policier et transporté d'urgence à l'hôpital[2]. Rodéos, incendies de voitures, dégradations urbaines, courses poursuite avec la police, sont à nouveau filmés, largement repris dans la presse.

Le 8 juin 1987, à la suite de la mort du jeune Aziz Bouguessa des affrontements éclateront en banlieue lyonnaise.

Années 1990

Après la mort, le 6 octobre 1990, de Thomas Claudio, passager d'une moto qui s'était renversée à hauteur d'un barrage de police, de nouvelles émeutes éclatent à Vaulx-en-Velin[3]. Des affrontements ont lieu avec la police, des incendies sont déclenchés et le centre commercial est pillé. Les médias font immédiatement le rapprochement avec les événements de 1981, et constatent le « problème des banlieues ».

La Grappinière à Vaulx-en-Velin

Depuis le début des années 1990, le rap français connaît un succès grandissant, en dénonçant la situation sociale et en décrivant la vie au quotidien dans les cités, et un racisme supposé des forces de l'ordre et, plus généralement, de la population française. Ainsi en 1998, le groupe de rap NTM écrit dans Odeurs de soufre : « ...qu'est-ce qu'on attend pour foutre le feu ? Juste d'être un peu plus nombreux... » et accuse le gouvernement de passivité face aux problèmes des banlieues.

En octobre 1992 à Vaulx-en-Velin, Mohamed Bahri, 18 ans, est tué par les gendarmes alors qu'il tente de forcer un barrage au volant d'une BMW volée. Trois nuits d'affrontements, coups de feu sur un commissariat et trente-trois véhicules brûlés ou endommagés. Le 30 octobre 1993 a Saint-Fons toujours en banlieue Lyonnais, de violentes échauffourées éclatent, après la mort de Mourad Tchier, 20 ans, tué par un policier à l'issue d'un rodéo à bord d'une voiture volée.

Le 27 janvier 1994, de violentes émeutes éclatent dans le quartier des sapins de Rouen[4] en réponse à la mort de Ibrahim Sy abattu par un gendarme alors qu'il était dans une voiture, en compagnie de deux autres jeunes. Il s'apprêtait, semble-t-il, à commettre un vol sur le parking d'un hôtel du Val-de-Reuil. Les images des émeutes servent en partie au générique de début du film La Haine. Ce climat de tension grandissant apparaît au cinéma dans La Haine de Mathieu Kassovitz en 1995, puis dans Ma 6-T va crack-er de Jean-François Richet en 1997. Le 18 avril 1994 à Bron Rhône, dans la banlieue est lyonnaise, Khafif Amamra, 20 ans, pris en chasse par la police, se tue au volant d'une Golf volée. Violents incidents. Le 14 avril 1994 a Vaulx-en-Velin, Bron et Rillieux-la-Pape. Deux jeunes sont tués dans l'accident d'une BMW volée. Une semaine d'émeutes. Deux gymnases incendiés, tentative d'incendie d'un collège. Le poste de police de Bron est attaqué avec une voiture-bélier. Une pharmacie est attaquée à coups de cocktails Molotov.

Le dimanche 1er octobre 1995, dans la banlieue lyonnaise, une nuit agitée suit la mort de Khaled Kelkal. Les incidents démarrent à Vaulx-en-Velin où environ deux cents jeunes affrontent les forces de l'ordre par petits groupes, puis s'étendent au reste de la banlieue lyonnaise : Givors, Venissieux, Bron, Saint-Priest, Villeurbanne, Meyzieu ... 36 véhicules incendiés et 19 interpellations.

En novembre 1997, dans la nuit du 2 au 3, de violentes émeutes éclatent dans le quartier de La Duchère à Lyon après la mort du jeune Fabrice Fernandez, 24 ans, abattu le 18 décembre 1997, d’une balle en pleine tête tirée à bout portant, alors qu’il était interrogé, assis menottes aux poignets, dans les locaux du commissariat du neuvième arrondissement de Lyon, rue Berjon à Vaise. Le 17 décembre, à Fontainebleau, un homme est tué par la police d'une balle dans la tête pour avoir forcé un barrage avec son ami. Le passager serait sorti de la voiture après avoir vu son ami mort devant lui et il aurait été frappé jusqu'au moment où un automobiliste arrêtera la police. Il s'ensuivra une semaine d'émeutes à Dammarie-lès-Lys, dans la banlieue de Melun, dont la victime est originaire[5].

Janvier 1998 : Émeutes dans le centre commercial de la Part-Dieu, 300 a 400 jeunes venus des banlieues et cités de Lyon affrontent les forces de l'ordre. Bilan: quinze interpellations, sept personnes légèrement blessées par des jets de pierres, dont quatre fonctionnaires de police et un vieil homme de 77 ans, cinq vitrines de magasins, un Quick, une parfumerie, un restaurant, des boutiques de chaussures et de vêtements pour enfants ont été brisées, ainsi que des vitres de portes d'accès au centre commercial et d'une tour de bureaux.

Le 13 décembre 1998, Habib Ould Mohamed dit « Pipo », meurt des suites d'une bavure, lors d'un flagrant délit de vol de voiture, à Toulouse. S'ensuivent de violents affrontement entre émeutiers et CRS qui dureront du 13 au 22 décembre. Plus d'une centaine de voitures seront incendiées et les locaux de la Caisse d’allocations familiales et du commissariat de quartier seront dévastés par les flammes[6].

Dans la nuit du 31 janvier 1999, une voiture GPL enflammée explose sur un parking de Vénissieux, après une échauffourées dans le quartier des Minguettes, Six des pompiers venus maîtriser le sinistre sont gravement blessés, dont un a une jambe arrachée. Le phénomène des violences urbaines fait l'objet d'un suivi très attentif. Dans le département du Rhône, 1790 faits de violence urbaine ont été dénombrés au cours du 1er semestre 1999,

Années 2000

Voiture brûlée - décembre 2007

Les exemples d'incidents graves survenus le plus souvent dans les banlieues de grandes villes sont légions depuis les incidents de 2005 et 2007 (voir articles détaillés).

Montauban une émeute éclate en décembre après la mort d'un cambrioleur abattu par le propriétaire des lieux.

C'est ensuite au tour de Montbéliard dans le Doubs le 12 juillet 2000. Puis, la mort d'un jeune braqueur de banque, de Strasbourg le 18 octobre 2002, après la mort par noyade d'un jeune homme de 17 ans poursuivit par la Police pour un cambriolage, provoquera des émeutes d'une extrême violence qui dureront une semaine entière. Puis le 3 mars 2003, la ZUP de Valdegour à Nîmes connaît elle aussi des émeutes après la mort d'un cambrioleur qui tentait d'échapper aux gendarmes.

L'incendie de voitures est devenu une espèce de « rite » du nouvel an dans certaines villes françaises depuis 1995 (naissance du phénomène à Strasbourg), surtout dans l'Est (Strasbourg qui voit l'incendie de quelque 200 à 300 véhicules chaque nouvel an). On peut aussi citer ce qui s'est passé le 25 décembre 2003 dans le centre pénitentiaire du Pontet, près d'Avignon : un jeune majeur de 18 ans, Sofiane, est retrouvé mort pendu dans sa cellule individuelle. Emprisonné depuis 10 jours pour une affaire de viol collectif sur une jeune femme de 27 ans dans une cave d'une cité sensible d'Avignon (Monclar), sa famille et ses amis réfutent la thèse du suicide et crient au meurtre. Les cités d'Avignon s'embrasent, des violences urbaines éclatent, 70 CRS sont alors appelés en renfort.[réf. souhaitée]

Explications

Les raisons mises en avant sont nombreuses pour expliquer de tels phénomènes, la hausse de l'immobilier par exemple qui fin 2005 atteint son plus haut niveau, ce qui pèse sur le pouvoir d'achat des moins riches, ceux pour qui le loyer représente le poste le plus important de leurs dépenses, et ce bien que dans les cités où les HLM représentent l'essentiel de l'habitat, la hausse soit en proportion plus faible. Il est vrai aussi que l'absence dans certains quartiers de moyens de développement a exacerbé les problèmes d'intégration à la ville de ces quartiers considérés comme difficiles qui sont bien souvent excentrés, coupés des centres-villes.

Depuis 2005

Lors des dix premiers mois de 2005 en France, plus de 28 000 véhicules ont été incendiés, surtout dans l'une des 750 zones urbaines « sensibles » (à statut spécial).

Début 2005, une émeute éclate dans le quartier de la Goutte-d'Or à Paris (18e arrondissement), à la suite d'une bavure policière : voitures incendiées, poubelles et scooters renversés dans les rues. La nuit, quatorze jeunes sont interpellés[7].

La Rue Caillié à Paris (quartier Stalingrad).

Le 20 juin 2005, un enfant est tué par une balle lors d'une fusillade entre deux bandes rivales à la cité des 4000 à La Courneuve. Nicolas Sarkozy, ministre de l'Intérieur, déclare lors de son déplacement sur place vouloir « nettoyer la cité au kärcher ». Le 25 octobre, lors d'un déplacement à Argenteuil, Nicolas Sarkozy reprend le mot « racaille » prononcé à propos de personnes qui jetaient des projectiles à destination de son groupe, mot prononcé par une femme du quartier qui lui aurait dit : « Monsieur Sarkozy, il faut nous débarrasser de cette racaille ». Ce qui est ressenti par certains habitants des quartiers sensibles comme une insulte humiliante, l'impression que l'on assimile tous les habitants aux quelques délinquants et criminels, une provocation et une incitation à la violence et à l'exclusion. Pour d'autres habitants il s'agit d'une promesse de prendre en compte leur souffrance.

En octobre 2005, à la suite de la mort dans un transformateur d'EDF de deux adolescents qui avaient été poursuivis par la police alors qu'ils rentraient chez eux après un match de foot, éclatent des émeutes dans les banlieues de villes de toute la France. Cet évènement replace les banlieues au cœur du débat (voir l'article dédié). Cet évènement remet en question la politique sociale, la politique de la ville, et la politique d'éducation et d'intégration menée en France.

Le 10 novembre 2005, quatorze jours après le début des émeutes, Nicolas Sarkozy déclare dans l'émission À vous de juger « Quand je dis ce sont des voyous ou des racailles, je persiste et je signe ».

Au soir du premier tour de l’élection présidentielle française de 2007, le 22 avril au soir, des individus avaient déjà mis le feu à une soixantaine de véhicules dans le nord-est de Paris[8].

Près de la place de la Bastille, plusieurs actes de vandalisme sont commis (véhicules brûlés) ainsi que des attaques contre les forces de l'ordre.

Lors du second tour, avant les résultats, une trentaine de voitures ont été brûlées à Paris la veille au soir du dimanche du second tour des élections dans les 3e, 9e, 10e, 13e et 18e arrondissements. La capitale française est généralement épargnée par ces incidents, comme durant les émeutes d'automne 2005[9].

Après l'annonce des résultats, des incidents ont été relevés à la Bastille à Paris, à Bordeaux, à Lille sur la place centrale, à Clermont-Ferrand, à Toulouse, à Nantes, à Lyon, à la Courneuve, à Dugny, à Rennes, à Strasbourg et à Brest (liste non exhaustive). Dans certaines villes, les rassemblements partent en manifestations improvisées. Elles sont dispersées par les forces de police et de gendarmerie déployées pour l'occasion. Certains rassemblements donneront lieu à des altercations et affrontements avec les forces de l'ordre, parfois consécutifs à des actes de vandalisme ou des débuts d'émeutes. De nombreuses voitures (367 selon les chiffres officiels du Ministère de l'Intérieur) ont aussi été brûlées de même que des locaux, en particulier une permanence de l'UMP. Dans certaines villes les événements se reproduisent aux soirs du 7 et du 8 mai.

Le 25 novembre 2007, ont lieu les émeutes à Villiers-le-Bel : à la suite de la mort de deux jeunes ayant percutés une voiture de police dans cette commune, une nouvelle flambée de violences urbaines voit le jour, avec notamment 40 policiers et pompiers blessés le 25 novembre, et au moins 60 le 26.

Mercredi 8 juillet 2009, des épaves calcinées de véhicules témoignent d'une première nuit d'émeute à Firminy, banlieue de Saint-Étienne, après la tentative de suicide de Mohamed Benmouna, 21 ans, au commissariat du Chambon-Feugerolles, localité voisine. Après trois nuits d'émeutes à Firminy et dans les cités voisines, le centre commerciale est incendié, et un appel au calme de la famille sera entendu par la banlieue sud de Saint-Étienne.[réf. nécessaire]

Années 2010

Grenoble

En juillet 2010, des affrontements[10] éclatent entre la police et des "jeunes" de Grenoble à la suite de la mort d'un habitant du quartier de la Villeneuve de Grenoble lors d'une course poursuite avec la police alors qu'il venait, avec un complice, de braquer le casino d'Uriage-les-Bains le 16 juillet. Les émeutes ne sont pas très importantes (entre 30 et 60 jeunes selon les sources), mais la police a été visée à deux ou trois reprises par des armes à feu. Ces évènements seront déclencheurs d'un changement du préfet de l'Isère et d'un discours politique sécuritaire de la part du président Nicolas Sarkozy[11] qui avec le sujet des "Roms" marqueront la politique en France durant l'été 2010.

Trappes

En juillet 2013, le contrôle d’identité d’une femme intégralement voilée dégénère en émeutes en banlieue parisienne, à Trappes[12] : elle et son époux sont arrêtés et placés en détention. Des violences éclatent alors devant le commissariat de police. Une centaine de CRS sont envoyés en renfort. 4 policiers sont blessés et 6 personnes ont été interpellés. Le mari, accusé d'avoir tenté d'étrangler un policier est placé sous contrôle judiciaire. À la suite de cet incident, Manuel Valls annonce un renforcement de 300 policiers supplémentaires dans les villes de ce secteur, où la tension monte.

Références

Annexes

Articles connexes

Liens externes