Émail de grès

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Un émail de grès est un émail céramique de haute température. Les émaux composés dans l’atelier du céramiste présentent une immense palette de glaçures, de textures et de coloris. En outre, la diversité des superpositions possibles enrichissent à l’infini les résultats au défournement.

Pourtant, les composés chimiques qui les constituent se réduisent à quelques matières premières : c'est en jouant sur leurs proportions que l'artisan crée des émaux différents.

Recherche[modifier | modifier le code]

Le travail de Daniel de Montmollin[1] a orienté les investigations de nombre d’artistes. Il a déterminé les combinaisons chimiques possibles et celles à exclure (mauvaise fusion, aspect inesthétique, matière inégale etc.). Dans son article de référence « Pratique des émaux 1 300 °C », ses expérimentations sont schématisées par une centaine de diagrammes.

Différence entre formule et recette[modifier | modifier le code]

Daniel de Montmollin travaille selon des formules chimiques : ses émaux sont identifiés en additions de molécules. Une de ses disciples, Lisa Brizzolara, a transcrit ses expériences en recettes de produits commercialisés dont elle a concrètement établi les masses molaires. Ses tableurs de conversion formule/recette facilitent grandement le décryptage des expériences du frère de Taizé.[réf. nécessaire]

Paramètres[modifier | modifier le code]

L'objet étant le grès, la cuisson s’entend « haute température », soit en moyenne 1 280 °C. De nombreux chemins sont possibles pour atteindre ce point : durée de montée en température, nombre de paliers, temps de refroidissement, atmosphère du four (réductrice ou oxydante) etc. La manière de mener une cuisson est déterminante pour l’aspect final de la glaçure.

Fusion des ingrédients en émail[modifier | modifier le code]

La formule d’un émail peut s’analyser en trois éléments :

Les molécules des ingrédients de base sont chimiquement composées d’un ou plusieurs éléments métalliques et d’un atome d’oxygène (oxyde métallique simple), et s’écrivent donc sous la forme « RO ». Ils font office de fondants.

ex. : ZnO, MnO, KNaO (présent dans le feldspath), CaO (présent dans la chaux), MgO etc.

Les amphotères possèdent à la fois des caractères basiques et des caractères acides. Ce sont des trioxydes, chimiquement composés de deux atomes métalliques et de trois atomes d’oxygène, sous la forme « R2O3 ».

ex. : B2O3, Al2O3 etc.

Les ingrédients acides sont des dioxydes métalliques et s’écrivent donc « RO2 ».

ex. : SiO2

De la formule chimique au catalogue du fournisseur[modifier | modifier le code]

Dans les produits commercialisés, ces éléments chimiques se trouvent en mélange.

ex. : dans le feldspath, on retrouve notamment SiO2, Al2O3, Na2O et K2O (recombinés en KNaO).

ZnO, MnO, KNaO, MgO se trouvent mélangés dans la silice

En revanche, CaO est tout seul dans la chaux.

La wollastonite est composée de CaO et SiO2.

Pour corriger une formule en recette, il est nécessaire de considérer que le total des ingrédients de base égale 1 (une mole). Un émail ne comporte jamais moins de 1,5 mole de silice pour une mole de base.

L’exemple suivant n’est qu’une hypothèse qui permet de comprendre comment on compose un émail et le poids nécessaire de chacun des produits, en fonction des éléments chimiques qui les constituent :

Formule Base Amphotère Acide
La wollastonite apporte CaO et Si02 en parts presque égales ⇒ 0,4 CaO 0,48 SiO2
Oxyde de zinc 0,2 ZnO
Le feldspath potassique apporte 1 KNaO + 1,05 Al2O3 + 6,35 SiO2 0,4 KNaO 1,05 Al2O3 6,35 SiO2
Base = 1 mole 1
On ajoute 3 parts de silice pour obtenir un rapport total de 1 alumine / 10 silice 3 SiO2
Le kaolin apporte 1 part de Al2O3 et 2 parts de SiO2 0,2 Al2O3 0,4 SiO2
Total = 1,25 Al2O3 10,23 SiO2
Recette Quantité (en moles) Multipliée par le poids moléculaire (en grammes par mole) Résultat (en grammes)
Wollastonite 0,4 100 40
Feldspath 0,4 577 230
Oxyde de zinc 0,2 81 16
Silice 3 61 183

C’est ce travail de conversion formule/recette qu’a effectué Lisa Brizzolara pour une large gamme d’émaux classifiés parmi les tenmoku, rouges de fer, gouttes d’huile, céladon, blanc magnésien, émaux de rutile et de titane.

Différentes recettes expérimentées[modifier | modifier le code]

Le tableau suivant cerne l’amplitude des combinaisons de produits possibles, le total de chaque recette devant totaliser 100, à l’exception du rutile et du titane qui sont en sus.

Type Feldspath Chaux Talc Kaolin Silice Cendre d'os Oxyde de Fer Commentaires
Tenmoku 0 à 93 0 à 31 0 0 à 31 0 à 31 0 7 brun clair à presque noir. Résultat plus nuancé en cuisson réductrice et sur un tesson texturé. Excellente sous couche.
Blanc Magnésien 11 à 24 8 à 16 11 à 24 10 à 43 26 à 27 0 0 Opaque, couvrant, animé. Reflets jaunes grâce à la magnésie.
Rouge de Fer 47 à 53 3 6 à 7 4 à 8 14 à 24 6 à 7 10 à 11 Reflets du cuivre au vermillon, nuancés de brun.
Gouttes d'huile 57 à 68 2 à 5 4 à 8 1 à 8 0 2 à 22 6 à 9 Cuisson exclusivement oxydante. Tache noires à violettes sur un fond rouge à brun.
Céladon 0 à 97 0 à 33 0 0 à 33 0 à 31 0 3 Cuisson exclusivement réductrice.
Du blanc au jaune 18 à 47 11 à 26 3 à 16 6 à 18 24 à 34 0 0 + 8 à 20% titane
Du blanc au rose 18 à 47 11 à 26 3 à 16 6 à 18 24 à 34 0 0 + 8 à 20% rutile

Différentes superpositions d’émaux[modifier | modifier le code]

Le jeu des combinaisons élargit sans limite l’éventail des quelques émaux vus précédemment. Les photos suivantes illustrent les superpositions possibles de glaçures.

Il faut toutefois garder à l’esprit que lorsqu’il applique trois couches d’émaux, le céramiste doit avoir le geste suffisamment preste pour ne pas excéder 1,5 mm d’épaisseur – vérification à l’aiguille à manche. Plus l’émail est épais, plus la montée en température doit être lente et/ou comporter des paliers.

Les émaux riches en oxydes de fer constituent une excellente sous-couche. Le fer remonte à la surface au cours de la fusion en formant des taches, des anneaux, des reflets. En troisième passage, le blanc magnésien révèle de nouvelles nuances. Il gagne à être appliqué sur certaines zones et non sur la totalité d’une pièce.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Daniel de Montmollin, « Pratique des émaux 1 300 °C », La Revue de la Céramique et du verre, 1997

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Elisabeth Lambercy, Les Matières premières céramiques et leur transformation par le feu, Banon, ARgile, coll. « Granit », , 510 p. (ISBN 2-909758-08-7).

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]