Théorie de la séduction généralisée

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La théorie de la séduction généralisée est posée par Jean Laplanche en 1987 dans son ouvrage Nouveaux fondements pour la psychanalyse.
Jean Laplanche renoue dans cette théorie avec la première « théorie de la séduction » abandonnée par Freud en 1897, en l'élargissant à une « situation anthropologique fondamentale » de séduction « originaire » de l' infans par l'adulte pourvu d'un « inconscient ».

De la théorie de la séduction à la théorie de la séduction généralisée[modifier | modifier le code]

Jean Laplanche reprend la première théorie de la séduction que Freud élabore au contact des hystériques femmes puis qu'il abandonne en 1897. Laplanche élargit la notion de « séduction » par l'autre parental à une « situation anthropologique fondamentale » de séduction « originaire » de l'infans par l'adulte pourvu d'un « inconscient ». L'enfant doit traduire après coup les messages donnés par ses proches ou parents: ces messages sont dits « énigmatiques » par J. Laplanche au sens où ils sont « compromis avec l'inconscient » de l'autre (adulte).

Jonction avec Ferenczi[modifier | modifier le code]

La théorie de J. Laplanche ajoute au texte de Ferenczi sur la "Confusion des langues" que l'inconscient parental « véhicule un sens à lui-même ignoré »[1].
Dans la théorie de la séduction généralisée, l'enfant (de la sexualité infantile) est le seul herméneute qui vaille aux yeux de Laplanche parce qu'il a « à traduire » les messages énigmatiques (Formulation de Laplanche) donnés par les proches ou parents, c'est-à-dire les messages « compromis avec l'inconscient » (Formulation ultérieure de Laplanche) de l'autre (adulte).

D'une théorie à l'autre[modifier | modifier le code]

La première « théorie de la séduction », qui fut élaborée par Freud dans les années 1895-1897, « se situe uniquement dans le domaine des psychonévroses ». Dans cette théorie apparaissaient la notion de traumatisme « en deux temps » et, avec celui-ci, le concept d'après-coup: il y avait 1) la « scène de séduction de l'enfant par un adulte »; 2) « la réactivation “après coup” de cette scène » plus tard. Dans la « théorie de la séduction généralisée », Laplanche étend « la théorie de la séduction freudienne à la genèse de l'inconscient en général »: il s'agit chez Jean Laplanche de l'inconscient comme « refoulé ». Le « message », adressé par l'adulte à l'enfant de la sexualité infantile, est « à traduire » par celui-ci parce qu'il est « énigmatique », c'est-à-dire « compromis avec l'inconscient de l'autre (adulte) ». La « notion de traduction » donne un « modèle » du refoulement. Pour Laplanche, « l'Inconscient ne saurait être considéré comme uniquement pathologique. Il fait partie de l'humaine condition ». La « relation parent-enfant » doit à ses yeux « être considérée au-delà des particularités psychopathologiques qui se révèlent parfois dans telle relation d'abus sexuels pervers ». Entre le petit enfant et l'adulte, existe en effet « une essentielle dissymétrie »: la façon dont l'adulte, qui s'est « constitué un Inconscient », s'adresse à l'enfant, « en gestes ou en paroles, est nécessairement infiltée par cet Inconscient »[2].

Une « traduction » psychique élargie[modifier | modifier le code]

La théorie de la séduction généralisée renoue donc du même coup avec la lettre 52/112 de Freud à Wilhelm Fliess, des débuts de la psychanalyse, sur la « traduction » psychique[3].
Freud évoque dans cette lettre des fueros, ou « restes inconscients » demeurés intraduits, que J. Laplanche reprend dans sa propre théorie au titre d' « "objets-sources" de la pulsion »[4].
La notion de « traduction » permet, selon Laplanche, « de donner du refoulement un modèle moins mécanique que le pur jeu de forces qui est proposé dans la pensée psychanalytique classique »[2].

La « catégorie » de message[modifier | modifier le code]

Laplanche introduit en psychanalyse la « catégorie » de « message » adressé à l'enfant par « l'autre » adulte que représente(nt) le(s) parent(s) ou le(s) « proche(s) » du socius : d'où la notion de « message compromis avec l'inconscient » de l'autre (adulte), que l'enfant a « à traduire ».

À la différence de Freud[modifier | modifier le code]

La théorie de la séduction généralisée met l'accent sur des « éléments peu présents dans la pensée de Freud »: d'une part, la notion de message, d'autre part la « priorité de l'autre adulte » émetteur du message reçu par l'enfant. La notion de « traduction » donne un « modèle » renouvelé du « refoulement »[2].

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Lettre 52/112 de Freud à Fliess[modifier | modifier le code]

  • Sigmund Freud, Lettres à Wilhelm Fliess 1887-1904, Édition complète, Traduit de l'allemand par Françoise Kahn et François Robert, Paris, PUF, 2006, (ISBN 2 13 054995 0).

Textes de Jean Laplanche[modifier | modifier le code]

Ouvrages collectifs et actes de Colloques[modifier | modifier le code]

Articles et revues[modifier | modifier le code]

  • Article « Séduction  » dans J. Laplanche et J.-B. Pontalis,Vocabulaire de la psychanalyse, Paris, PUF,1967.
  • Revue Psychiatrie française, Vol. XXXVII 3/06, ; Vol. XXXVIII, Théorie de la séduction : validation, réfutation, .
  • Laplanche, J. (1997). Freud e a sexualidade: o desvio biologizante. (L. Magalhães, Trad.) Rio de Janeiro: Jorge Zahar.
  • André Green, Ilse Grubrich-Simitis, Jean Laplanche, Jean-G. Schimek et C. Chabert, C. Dejours, J.-C. Rolland, dans Libres cahiers pour la psychanalyse - Études, « Sur la théorie de la séduction », Paris, Editions In Press, 2003, (ISBN 2-84835-008-3).
  • Journées internationales Jean Laplanche des années 2000:
    • Recension des Journées de Lanzarote de 2006 in Circulo Brasileiro de Psicanalise, Revista : « Uma análise epistemológica da teoria da sedução generalizada Contribuições atuais para a cientificidade da psicanálise » par F.de Andrade e L. Palavras-Chave[5].
  • Revue Psychiatrie française, Vol. XXXVIII, Théorie de la séduction : validation, réfutation, Décembre 2007.
  • François Auger, Hervé Bénony, « La théorie de la séduction généralisée et son corollaire, la théorie de la traduction », Évolution psychiatrique, 76(3), 2011, p. 403-418 [lire en ligne]
  • Patrick Merot, « Jean Laplanche », in Alain de Mijolla (dir.), Dictionnaire international de la psychanalyse, Paris, Hachette-Littérature, Édition mise à jour 2013, (ISBN 9782818503393) p. XIV.

Livres et travaux de recherche[modifier | modifier le code]

  • Dominique Scarfone : Jean Laplanche, Psychanalystes d’aujourd’hui, P.U.F., 1997, (ISBN 2130484050).
  • Luiz Carlos Tarelho, Paranoïa et théorie de la séduction généralisée, Paris, P.U.F., Collection « Voix nouvelles en psychanalyse » (dirigée par Jean Laplanche),1999.
  • Mi-Kyung Yi, Herméneutique et psychanalyse, si proches... si étrangères, Paris, P.U.F. Collection « Voix nouvelles en psychanalyse » (dirigée par Jean Laplanche),2000, (ISBN 2 13 050813 8)

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Jean Laplanche, "Nouveaux fondements pour la psychanalyse. La séduction originaire", Paris, PUF, 1987, p. 124.
  2. a b et c J. Laplanche, "Séduction généralisée (théorie de la-), Dictionnaire international de la psychanalyse (dir. A. de Mijolla), p. 1634-1635.
  3. Sigmund Freud, Lettres à Wilhelm Fliess 1887-1904, Édition complète, Traduit de l'allemand par Françoise Kahn et François Robert, Paris, PUF, 2006, Lettre 112 [52] du 6 décembre 1896, p. 263-273.
  4. J. Laplanche, Nouveaux fondements, p. 128.
  5. Recension des Journées de Lanzarote 2006: [1]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

  • Recension des Journées de Lanzarote de 2006, Circulo Brasileiro de Psicanalise[2]
  • Colloque de Cerisy, 2014: « La séduction à l'origine; l'œuvre de Jean Laplanche  » [3]