Maison Ipatiev

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Maison Ipatiev
Дом Ипатьева
La maison Ipatiev en 1928.
Présentation
Destination initiale
Habitation et bureaux
Destination actuelle
Démolie
Fondation
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Styles
Démolition
Patrimonialité
Objet patrimonial culturel d'importance fédérale (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
État de conservation
démoli ou détruit (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
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La maison Ipatiev ou villa Ipatiev (Дом Ипатьева en russe) était une villa de la fin du XIXe siècle située à Iekaterinbourg en Russie, ainsi dénommée d'après le nom de son troisième propriétaire, où ont été séquestrés puis assassinés le tsar Nicolas II et sa famille en 1918. Détruite en 1977, une église est édifiée sur son emplacement, rue Karl Liebknecht.

Construction et usage privé[modifier | modifier le code]

La salle à manger, et au fond la porte donnant à la chambre des grandes-duchesses dans la maison d'Ipatiev.

La maison Ipatiev est construite en 1897 pour un certain Andreï Redikortsev, ingénieur des mines. Mais cet homme avait été impliqué dans une vaste affaire de corruption et avait été forcé de vendre sa maison à un autre homme : I. G. Charaviev qui travaillait également pour les mines de platine dans l’ouest de l’Oural.

C’est un peu plus tard, en 1908, que I. G. Charaviev revendit sa maison à Nicolas Ipatiev pour 6 000 roubles de l’époque. Cet homme vivait avec sa famille au premier étage, le rez-de-chaussée lui servant de bureaux pour l’entreprise de métallurgie qu’il dirigeait. C’était une maison spacieuse (18 x 31 mètres), moderne, confortable car équipée de l’électricité, du téléphone et même d’une salle de bain et de WC. Cette maison comportait également une petite terrasse donnant sur un jardin. La demeure était construite sur une double pente et une partie du rez-de-chaussée donnant sur la rue Voznessenski se révélait donc être un quasi sous-sol.

Garde de la famille impériale[modifier | modifier le code]

Nicolas II en .
Dernière photo du tsar, prise alors qu’il était prisonnier à Tobolsk.

Une vingtaine d'années après sa construction, le , les bolcheviks réquisitionnent la maison Ipatiev pour y mettre la famille Romanov en résidence forcée, obligeant le propriétaire à évacuer sous deux jours. Il s’agissait d’une réquisition passagère et il fut autorisé à stocker ses affaires dans une pièce du sous-sol (attenante à celle où sera exécutée la famille Romanov trois mois plus tard) qui fut placée sous scellés. Après le départ de Nicolas Ipatiev, la demeure fut entourée d’une double palissade de bois allant jusqu’au faîte des fenêtres, des mitrailleuses installées sur le toit transformant la bâtisse en forteresse. La villa était prête à accueillir la famille Romanov qui y fut amenée pour partie le (Nicolas, Alexandra et Maria) suivis le par le reste de la famille, restée à Tobolsk à cause d’une crise d’hémophilie du tsarévitch Alexis, qui le rendait intransportable.

La garde de la famille anciennement impériale est assurée par des hommes ayant toute la confiance du commissaire politique Constantin Iakovlev : ce sont des ouvriers travaillant dans les usines avoisinantes. Le commandant Aleksandr Avdeïev commande la garde extérieure et intérieure de la maison Ipatiev. Le logement du commandant et de dix autres gardes se situait à l’étage réservé à la famille Romanov, qu'ils soumirent à de nombreuses vexations et à d’incessants quolibets et plaisanteries sexistes à l’encontre des jeunes grandes-duchesses. Aucune intimité n’était possible pour chacun des membres de la famille de Nicolas II de Russie, qui furent dans l’obligation de partager cette villa avec leurs geôliers.

C’est dans la cave de la villa qu’eut lieu, dans la nuit du 16 au , le massacre à coups de baïonnette de la famille Romanov, accompagnée dans la mort par le docteur Ievgueni Botkine et par trois domestiques : le cuisinier de la famille impériale Ivan Kharitonov, le valet de chambre Alexis Trupp et la femme de chambre Anna Demidova. Les journalistes A. Summers et Tom Mangold ont mis en doute ce massacre en 1976[1], mais ces doutes ont été levés après des tests ADN dans les années 1990 et 2000 qui ont conclu à l’exécution du tsar déchu et de sa famille.

Après la reprise d’Iekaterinbourg par les Russes blancs, l’armée blanche retrouva la maison vide de toute présence humaine ; la plupart des meubles avaient servi de bois de chauffage, mais des effets personnels de l’ancienne famille impériale et de ses quatre accompagnateurs (le médecin et les domestiques) s’y trouvaient encore. La présence parmi ces effets d’un volume des Protocoles des Sages de Sion, dans la chambre de l’impératrice Alexandra, permet à l’« antisémite fanatique », Piotr Chabelski-Bork, qui se trouve à Ekaterinbourg en , d’alimenter le mythe d’un « complot juif contre la Sainte Russie », incarnée par la famille Romanov[2] dont le massacre réactive l’imaginaire du « crime rituel juif ». Les pièces de la villa où avait eu lieu le massacre furent placées sous scellés et le général tchécoslovaque Radola Gajda installa son état-major à l’étage. Son bureau se trouvait alors dans la pièce qui avait été affectée au tsar et à la tsarine[3].

Parmi les faits relevés par les enquêteurs, figure une citation modifiée de l’écrivain Heinrich Heine en allemand écrite sur les murs de la villa qui dit « Belsatzar ward in selbiger Nacht Von seinen Knechten umgebracht »[4] ce qui signifie « Dans la même nuit Balthatsar fut assassiné par ses serviteurs ».

Usages postérieurs et démolition[modifier | modifier le code]

La maison d’Ipatiev (auquel elle ne fut jamais rendue) devint plus tard un entrepôt pour stocker des archives, puis un lieu de tourisme : des photographies de groupe étant même effectuées dans la cave[5]. L'endroit fut inscrit comme monument national en 1974. Elle a été détruite trois ans plus tard, le [5],[6], sur l’ordre de Michel Souslov, membre du Politburo. Boris Eltsine, futur président de la fédération de Russie, alors Premier secrétaire du parti communiste de Sverdlovsk (nom d’Iekaterinbourg de 1924 à 1991), fut chargé de sa démolition[7].

Église de Tous-les-Saints[modifier | modifier le code]

L’église de Tous-les-Saints construite à l’emplacement de la villa.

De nos jours, il ne reste de la maison Ipatiev que quelques photographies : le terrain fut remis en 1990 à l’Église orthodoxe, qui lança en 2000 les travaux de construction de l’église de Tous-les-Saints. Celle-ci fut consacrée en 2003, 85 ans après la mort du tsar. L’église est, depuis l’inhumation du Tsar Nicolas II et de sa famille (les corps du tsar, de l'impératrice Alexandra Feodorovna et de leurs filles Olga, Tatiana et Anastasia furent retrouvés dans une fosse commune proche et canonisés en 1997 tandis que les restes du tsarevitch Alexis et de la troisième des quatre sœurs Romanov, Maria, ne furent identifiés qu’en 2008), un lieu de pèlerinage pour les nostalgiques du tsarisme, venus pour rendre un dernier hommage à la dynastie Romanov.

Références[modifier | modifier le code]

  1. Lire le Dossier Romanov, Albin Michel, Paris, 1980.
  2. Pierre-André Taguieff, La judéophobie des Modernes, p.283-284, (ISBN 2738117368)
  3. Maurice Janin, Ma mission en Sibérie 1918-1920, Payot, Paris, 1933, page 53.
  4. Heinrich Heine und die Verehrung der Russen, 27.11.2011, Welt, par WON.
  5. a et b « After 1918 », sur Ipatiev House
  6. « The Church on the blood », sur Byzantine Catholic Culture
  7. La villa Ipatiev rasée par le Politburo - article de La Voix de la Russie du 27 juillet 2012.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]