Vignoble et viticulture d'Alsace

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Alsace
Image illustrative de l’article Vignoble et viticulture d'Alsace
Vignoble d'Alsace vu depuis Niedermorschwihr.

Désignation(s) Alsace
Appellation(s) principale(s) alsace,
alsace grand cru et
crémant d'Alsace
Type d'appellation(s) AOC-AOP
Reconnue depuis 1945[1]
Pays Drapeau de la France France
Région parente Alsace
Localisation Bas-Rhin et Haut-Rhin
Climat tempéré continental
Ensoleillement
(moyenne annuelle)
1 724 heures par an[N 1]
Superficie plantée 15 197 hectares en 2000[N 2]
Nombre de domaines viticoles 5 683 exploitations en 2000
Cépages dominants riesling B, pinot blanc B, gewurztraminer Rs, pinot gris G, pinot noir N et sylvaner B[N 3]
Vins produits blancs, mousseux, rouges et rosés
Production 1 166 903 hectolitres en 2009[2]
Rendement moyen à l'hectare maximum variant selon l'appellation, de 55 hectolitres par hectare (alsace grand cru) à 80 hectolitres par hectare (crémant d'Alsace)[3]

Le vignoble d'Alsace est une région viticole française. Il s'étend sur toute l'Alsace, entre Strasbourg (dans le département du Bas-Rhin), au nord, et Mulhouse (département du Haut-Rhin), au sud. La surface de production est de 15 600 hectares répartis sur 119 communes. Long d'une centaine de kilomètres, et pratiquement sans discontinuité, le vignoble a une largeur allant de 1,5 à 3 kilomètres.

Les vins produits sont essentiellement des blancs (sous les appellations alsace et alsace grand cru), des mousseux (appellation crémant d'Alsace), ainsi que quelques rosés et rouges (appellation alsace). À l'heure actuelle, le vignoble d'Alsace peut produire 637 vins AOC-AOP différents (toutes appellations, dénominations, et couleurs confondues)[4].

Le vignoble produit également une eau-de-vie renommée : le marc d'Alsace.

Histoire

Période antique

Les débuts de la viticulture en Alsace sont datés de la période romaine, d'après des sources archéologiques récentes[N 4]. La région fait partie, de la fin du Ier siècle jusqu'à la crise du IIIe siècle, de la province de Germanie supérieure où se trouvent stationnées d'importantes forces militaires. La présence de ces garnisons, tout particulièrement celles composées d'un camp légionnaire situé le long du Rhin[N 5], nécessite l'importation de vin en provenance d'Hispanie puis de Narbonnaise. Ces besoins ont stimulé la naissance de la viticulture, notamment dans la vallée de la Moselle (province de Belgique) dont la production est exportée à CCAA (Cologne, capitale de la province de Germanie inférieure) et jusqu'en Bretagne[5],[6].

Les fouilles archéologiques menés depuis 1998 à Biesheim et Kunheim[N 6] ont mis au jour des raisins datés par leur contexte du Haut-Empire. Étant donné la romanisation particulièrement lente de la province de Germanie supérieure[N 7] et la faible densité de population, la petite production locale ne peut subvenir au ravitaillement des troupes y stationnant, d'où le maintien des importations[7].

À partir du début du IIIe siècle, la province est en partie conquise par les Alamans, qui traversent régulièrement le Rhin pendant toute la période du Bas-Empire romain pour piller les villes et les campagnes. Au Ve siècle, l'Alsace fait partie du royaume des Alamans, jusqu'à sa conquête par les Francs.

Période médiévale

La viticulture ne connait un nouvel essor que sous l'influence des ordres monastiques au plus tard pendant la période carolingienne. La plus ancienne source littéraire[8] mentionnant la viticulture en Alsace date du début du IXe siècle, attestant l'existence d'une production vinicole dans plus de 160 lieux.

Au Moyen Âge, les vins d'Alsace ou « vin d'Aussey » étaient réputés. Ils s'exportaient vers les pays nordiques par l'Ill puis au-delà par le Rhin.

Période moderne

Au XVIe siècle, la zone de production s'étendait sur une surface deux fois plus grande que le vignoble actuel. De nombreux bâtiments, encore conservés aujourd'hui et datant du début de la Renaissance, attestent de cette période florissante. De cette époque date aussi la première tentative d'établissement d'une sorte d'appellation d'origine contrôlée : une association de vignerons de Riquewihr décida alors de la date officielle de début des vendanges, et définit les cépages à planter.

La guerre de Trente Ans mit fin à cette période faste et apporta dans la contrée la guerre, les pillages, la famine et la peste. Pratiquement tous les vignobles furent détruits. Après la fin de la guerre, la viticulture se reconstruisit, et la superficie plantée remonta jusqu'à 30 000 hectares en 1828.

Période contemporaine

Étiquette alsacienne, millésime 1884.
« Le vin de la revanche », une du Petit Journal du .

À la suite de la défaite française lors de la guerre de 1870, la République française cède une partie de son territoire à l'Empire allemand, ce qui fait que de 1871 à 1918 l'Alsace fait partie de l'Empire allemand avec la Moselle sous le nom de Reichsland Elsass-Lothringen. Pendant cette période, le pays était la plus grande région viticole allemande[9]. Le volume de production est privilégié au détriment de la qualité. De plus, avec les ravages causés par le phylloxéra et le mildiou, le développement des transports ferroviaires bon marché et de la consommation croissante de bière, le vignoble se rétrécit à une superficie de 9 500 hectares, dont 7 500 dans l'actuelle appellation alsace.

En , l'Alsace est occupée par l'Armée française, puis cédée à la France par le traité de Versailles le . En raison du maintien du droit local (correspondant aux lois françaises antérieures à 1870 et aux lois allemandes de 1871 à 1918), l'Alsace a un statut à part au sein des vignobles français, car la loi allemande du sur les vins y est appliquée jusqu'à la fin de la Seconde Guerre mondiale. La situation évolue par l'ordonnance du [1], qui définit une appellation d'origine « vins d'Alsace » ou « alsace », encadrée tardivement comme appellation d'origine contrôlée par un décret du [10], après négociation avec le comité interprofessionnel du vin d'Alsace (CIVA), créé pour l'occasion (décret du ). Le décret du [11] fait apparaître les AOC de vins de cépage. S'y sont rajoutées les appellations alsace grand cru (décret du [12]) et crémant d'Alsace (décret du [13]).

Les efforts sont depuis plutôt orientés vers la production de vins de meilleure qualité, la communication commençant à insister sur la notion de terroir. Allant dans ce sens, le décret de 2011 prévoit onze dénominations géographiques au sein de l'appellation alsace, tandis que les 51 dénominations géographiques de l'appellation alsace grand cru deviennent autant d'appellations partageant le même cahier des charges[3].

Situation géographique

Carte de distribution des vignes en Alsace.

La région de production est le rebord de la plaine du Rhin, avec une orientation nord-sud. Les vignes se développent, d'une part, sur les contreforts orientaux des Vosges, entre environ 170 mètres d'altitude (point le plus bas en plaine du centre-Alsace, autour de Dambach-la-Ville) et la limite supérieure de la culture viticole en Alsace qui culmine à 467 mètres d'altitude, au Rangen (Sud-Alsace), et 478 mètres à Osenbach, et d'autre part, dans les petites vallées qui les entaillent.

Les vins les plus prisés proviennent assez souvent de la région au nord-ouest de Colmar. L'ensemble de la zone de production est parcourue, sur une longueur de 170 kilomètres, par la Route des vins d'Alsace.

Route des vins d'Alsace

Seules 67 des 119 communes alsaciennes productrices sont sur le trajet de la Route des vins d'Alsace telle que définie en mai 1953. Cet itinéraire touristique passe à proximité de plus de trois cents domaines viticoles et 48 des 51 grands crus, traversant les départements du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, depuis Marlenheim au nord jusqu'à Thann au sud.

Colmar accueille une école viticole et un institut (l’institut viticole Oberlin), Rouffach un lycée viticole, tous trois œuvrant à l'amélioration des pratiques viticoles en Alsace.

Géologie et orographie

La plaine d'Alsace occupe la partie sud du fossé rhénan, né d'un effondrement durant l'Oligocène et le Miocène (33 à 5 millions d'années). Le vignoble est établi sur le piémont du massif des Vosges, sur la zone de fracture. Cette localisation explique la variété des sous-sols et leur succession en véritable mosaïque : calcaires, granites, schistes, gneiss ou grès.

Généralement, le haut des pentes des collines sous-vosgiennes est constitué des roches anciennes, plutoniques et métamorphiques tels que du granite, du gneiss ou de l'ardoise. Les parcelles de vignes y sont très pentues, montant jusqu'à 478 mètres d'altitude (à Osenbach). Le bas des coteaux est formé des couches de calcaires ou de marne recouvertes par du lœss, où le relief est moins accentué.

Enfin, la plaine est composée d'une épaisse couche d'alluvions déposées par le Rhin (limon et graviers), c'est une zone beaucoup plus fertile que les deux premières, avec une importante nappe phréatique à moins de cinq mètres de profondeur[14].

Climatologie

À l'ouest, les Vosges protègent du vent et de la pluie la région de production des vins d'Alsace. Les vents d'ouest dominants perdent leur humidité sur le versant occidental des Vosges et parviennent sous forme de foehn, secs et chauds, dans la plaine d'Alsace. La quantité moyenne de précipitations est la plus faible de tous les vignobles français.

De ce fait, le climat est plus tempéré (avec une température annuelle moyenne plus haute de 1,5 °C) que ce qui serait attendu à cette latitude. Le climat est continental et sec avec des printemps chauds, des étés secs et ensoleillés, de longs automnes et des hivers froids.

La station météo de Strasbourg (150 mètres d'altitude) se trouve à l'extrémité nord de l'aire d'appellation, mais au bord du Rhin. Ses valeurs climatiques de 1961 à 1990 sont :

Relevés à Strasbourg 1961-1990
Mois jan. fév. mars avril mai juin jui. août sep. oct. nov. déc. année
Température minimale moyenne (°C) −1,7 −0,9 1,6 4,6 8,6 11,7 13,4 13,1 10,3 6,5 2,1 −0,7 5,7
Température moyenne (°C) 0,9 2,5 6 9,6 13,8 17 19,1 18,6 15,5 10,6 5,2 1,9 10,1
Température maximale moyenne (°C) 3,5 5,8 10,4 14,6 19 22,2 24,7 24,2 20,8 14,7 8,2 4,5 14,4
Ensoleillement (h) 42 78 122 161 197 212 240 215 168 101 58 43 1 637
Précipitations (mm) 33,1 34,3 36,6 48 74,5 74,6 56,8 67,8 55,5 43 46,6 39,9 610,5
Source : www.infoclimat.fr : Strasbourg (1961-1990)[15].


La station météo de Colmar (209 mètres d'altitude) se trouve au milieu de l'aire d'appellation, mais en plaine. Ses valeurs climatiques de 1961 à 1990 sont :

Relevés à Colmar 1961-1990
Mois jan. fév. mars avril mai juin jui. août sep. oct. nov. déc. année
Température minimale moyenne (°C) −2,1 −1,1 1,4 4,5 8,3 11,5 13,3 12,9 10,2 6,3 1,8 −1 5,5
Température moyenne (°C) 0,9 2,6 6,1 9,7 13,8 17,1 19,3 18,8 15,8 10,9 5,3 1,9 10,2
Température maximale moyenne (°C) 3,8 6,3 10,8 15 19,3 22,7 25,3 24,7 21,5 15,5 8,7 4,8 14,9
Ensoleillement (h) 53 83 128 165 200 223 246 222 176 117 68 52 1 724
Précipitations (mm) 35,5 32,2 37,7 46,7 67 67,2 59,3 63,3 46,7 37,9 47,7 40,2 581,4
Source : www.infoclimat.fr : Colmar (1961-1990)[16].


La station météo de l'aéroport de Basel-Mulhouse-Freiburg (267 mètres d'altitude) se trouve à l'extrémité sud de l'aire d'appellation, encore une fois en plaine. Ses valeurs climatiques de 1961 à 1990 sont :

Relevés à Bâle-Mulhouse 1961-1990
Mois jan. fév. mars avril mai juin jui. août sep. oct. nov. déc. année
Température minimale moyenne (°C) −2,2 −1,1 1,4 4,3 8,3 11,5 13,5 13,2 10,6 6,7 1,9 −1,1 5,6
Température moyenne (°C) 0,8 2,5 5,9 9,4 13,5 16,9 19,2 18,7 15,7 11,1 5,3 1,8 10,1
Température maximale moyenne (°C) 3,8 6,2 10,3 14,4 18,8 22,2 24,8 24,1 20,9 15,4 8,8 4,8 14,6
Ensoleillement (h) 65 86 124 164 197 218 250 222 175 126 80 61 1 768
Précipitations (mm) 53,9 50,5 49,5 58,5 76,3 73,6 62,9 79,9 54,7 49,2 58,1 54,5 721,7
Source : www.infoclimat.fr : Bâle-Mulhouse (1961-1990)[17].


Vignoble

Vignoble d'Alsace.
Vignoble du Kœnigsbourg (avec Sélestat au troisième plan).
Vignoble vu depuis Kaysersberg.

L'influence allemande a, au cours des siècles, entraîné la mise en place d'une viticulture très différente de celle des autres régions viticoles françaises. Elle est, encore aujourd'hui, remarquable par les cépages utilisés et les méthodes de production.

Encépagement

Les principaux cépages sont aussi cultivés en Allemagne : riesling B, gewurztraminer Rs et sylvaner B. On utilise aussi le pinot gris G (anciennement connu sous le nom de « tokay d'Alsace », mais cette dénomination n'est plus autorisée), le muscat blanc à petits grains B, le muscat rose à petits grains Rs, le muscat ottonel B et le pinot blanc B (ou klevner, à ne pas confondre avec le klevener de Heiligenstein Rs). Le pinot noir N est le seul cépage rouge ou rosé de la région. Il est à la base des dénominations pinot noir, rouge d'Ottrott, rouge du Stephansberg, etc.

L'edelzwicker, tout comme le gentil est un assemblage de plusieurs cépages.

Le crémant d'Alsace est un vin blanc effervescent à base de pinot blanc et de pinot gris, vinifié depuis le XIXe siècle selon la méthode champenoise. Sont également utilisés l'auxerrois B, le chardonnay B (qui n'est produit que pour la fabrication du crémant), le riesling B et le pinot noir N (production du blanc de noir).

Une petite production concerne le vin de paille et le vin de glace.

Le chasselas est surtout consommé comme raisin de table et n'est que très rarement vinifié.

Le riesling B (3 382 hectares en 2009) est le cépage le plus caractéristique d'Alsace. À la différence de la variété allemande, il peut donner des vins franchement secs, qui vieillissent bien, comme des demi-secs (moelleux) de vendanges tardives.

Le pinot blanc B et l'auxerrois (3 331 hectares ensemble en 2009), aussi appelé klevner, donnent des vins blancs secs et frais. Une grande partie de la production est destinée à la production du vin mousseux commercialisé sous le nom de crémant d'Alsace.

Le gewurztraminer Rs (2 928 hectares en 2009) occupe une surface croissante. Il a un caractère très marqué et peut, les bonnes années, donner des vins amples et généreux.

Le pinot gris G (2 356 hectares en 2009), aussi appelé autrefois tokay d'Alsace, est moins abondant. Le lien avec la variété hongroise du tokay est assez difficile à établir et le nom n'est plus utilisé officiellement pour éviter la confusion.

Le pinot noir N (1 521 hectares en 2009) est l'unique raisin rouge d'Alsace, utilisé pour faire des vins rosés et des vins rouges plus ou moins colorés.

Le sylvaner B (1 335 hectares en 2009) abonde dans les zones les moins prestigieuses de la région. Il donne des vins frais et simples. À noter qu'il est le protagoniste des premières pages du roman de Julio Cortázar, 62 Modelo para armar.

Les muscats (358 hectares en 2009), c'est-à-dire du muscat blanc à petits grains B, du muscat rose à petits grains Rs et du muscat Ottonel B, produisent un vin au fruité très caractéristique mais sec, contrairement aux vins de muscat méridionaux.

Le chardonnay B (141 hectares), le chasselas B (97 hectares en 2009) et le savagnin Rs (43 hectares en 2009), ce dernier étant un cousin du gewurztraminer appelé localement klevener de Heiligenstein, sont devenus confidentiels[18].

La roussanne est un cépage récemment introduit dans le vignoble[réf. nécessaire] par quelques jeunes vignerons novateurs. Ces vins issus de roussanne ne ressemblent pas aux autres vins d'Alsace, on peut les comparer à des vins de la vallée du Rhône (saint-péray).

Méthodes culturales

Rendements

La limite de rendement de l'appellation alsace était de cent hectolitres par hectare en 1945, tous cépages confondus, auquel se rajoute à partir de 1974 un plafond limite de classement (PLC, volume de réserve fixé annuellement par l'INAO) de + 20 % (soit un rendement plafond de 120 hectolitres par hectare)[1].

Depuis les années 1990, le rendement annuel à l'hectare autorisé dans l'appellation alsace est passé à 80 hectolitres par hectare, avec un plafond de + 10 % (soit un rendement plafond de 88 hectolitres par hectare). Les rendements pour le crémant sont de 80 hectolitres par hectare, avec un butoir à 100 hectolitres par hectare. Les conditions de production sont plus drastiques pour les appellations alsace grand cru, dont le rendement a été limité à 55 hectolitres par hectare, avec butoir à 66 hectolitres par hectare.

Le rendement réellement pratiqué en 2009 est en moyenne de 74,9 hectolitres par hectare pour l'ensemble des trois appellations alsaciennes[19]. Ces rendements sont supérieurs à ceux pratiqués dans les autres vignobles français, où la moyenne pour l'ensemble des AOC est d'environ 50 hectolitres par hectare en 2009[20].

Vins

Vinification

En général, la vinification se fait en blanc, en utilisant les méthodes traditionnelles. Les vins vieillissent entre six et douze mois dans de grands fûts de chêne.

En blanc

À l'arrivée au chai, le raisin est foulé et pressé pour séparer le moût du marc de raisin. Les pressoirs pneumatiques remplacent progressivement les pressoirs horizontaux à plateau. Le moût est mis en cuve en stabulation pour le dépôt des bourbes. Le soutirage du jus clair est le débourbage. Les bourbes peuvent être filtrées pour donner aussi un bon vin.

La fermentation alcoolique débute sous l'action de levures indigènes ou de levures sélectionnées introduites lors du levurage. Cette opération transforme le sucre du raisin en éthanol. La maîtrise de la température de fermentation par un système de réfrigération permet d'exprimer le potentiel aromatique du produit.

La fermentation achevée, le vin est soutiré afin d'éliminer les lies. La fermentation malolactique n'est généralement pas réalisée, bloquée par un sulfitage du vin. Ce dernier peut être stocké en cuve pour le préparer à l'embouteillage ou élevé en barrique ou foudres de bois de chêne.

Le vin est soutiré, filtré et stabilisé avant le conditionnement exclusivement en bouteilles[21],[22].

En rosé et en rouge

La coloration du moût nécessite une macération du grain de raisin dans le jus ; en effet, le pinot noir est un cépage rouge à jus blanc. Seule la pellicule comporte les anthocyanes colorantes.

Dans le cas du vin rosé, la macération ne dure que quelques heures. Elle est interrompue dès que la couleur désirée est atteinte. La suite de la vinification se fait de la même manière que pour la vinification en blanc[23].

Dans le cas du vin rouge, la macération dure le temps de la fermentation alcoolique. Outre la couleur, elle permet de solubiliser les tanins. Le pressurage intervient à ce moment-là pour séparer le vin du marc de raisin[23]. Le vin subit alors la fermentation malolactique. Elle transforme l'acide malique à deux groupes carboxyle, en acide lactique qui n'en comporte qu'un. L'opération conduit à une désacidification naturelle du vin ; elle arrondit le vin, le rend plus souple et moins âpre.

Appellation alsace

Bouteilles de tokay-pinot-gris, riesling, pinot-gris, muscat, gewurztraminer et vendange tardive.
Bouteille de pinot gris de Hugel et fils.

L'appellation couvre en 2009 11 703 hectares (75,2 % du vignoble) sur lesquels ont été produits 868 334 hectolitres de vins (74,4 % de la production de l'ensemble du vignoble)[2]. L'AOC alsace mentionne habituellement le nom du cépage ou celui d'edelzwicker comme « dénomination de cépage » selon l'INAO. L'étiquette peut également mentionner un lieu-dit. L'edelzwicker (« coupage noble ») est un assemblage de cépages réalisé selon l'inspiration du viticulteur ; il est souvent à base de sylvaner.

Les différentes dénominations de cépage sont :

L'edelzwicker est un assemblage de plusieurs des cépages ci-dessus.

Dans les cas du gewurztraminer, du muscat, du pinot gris et du riesling, il existe des mentions correspondant à des vins moelleux voire liquoreux : les « vendanges tardives » et les « sélections de grains nobles ».

Appellations alsace grand cru

En 2009, l'appellation alsace grand cru couvre 850 hectares (5,4 % de la surface du vignoble) sur lesquels ont été produits 48 294 hectolitres de vins (4,1 % de la production de l'ensemble du vignoble)[2]. L'AOC alsace grand cru a été créée en 1975 mais les 25 premiers crus n'ont été définis qu'en 1983, suivis par 25 autres en 1992 et un dernier en 2007. Il existe 51 lieux-dits délimités pouvant bénéficier chacun d'une appellation grand cru, les dénominations étant devenues des appellations en 2011.

Seuls six cépages sont autorisés à l'origine dans les AOC alsace grand cru : le riesling B, le gewurztraminer Rs, le pinot gris G et les muscats (muscat blanc à petits grains B, muscat rose à petits grains Rs et muscat ottonel B). Toutefois, le décret du autorise l’utilisation du cépage sylvaner B dans le grand cru Zotzenberg. Le pinot blanc B, le pinot noir N et le chasselas B sont également autorisés dans les vins d’assemblage de l’AOC alsace grand cru Altenberg de Bergheim. Le décret du autorise également les vins d’assemblage dans l'alsace grand cru Kaefferkopf.

Appellation crémant d'Alsace

L'appellation couvre en 2009 3 017 hectares (19,4 % du vignoble), sur lesquels ont été produits 250 275 hectolitres de vins (21,5 % de la production de l'ensemble du vignoble)[2]. L'AOC crémant d'Alsace regroupe des vins effervescents à base de pinot blanc B, pinot noir N, pinot gris G, riesling B ou chardonnay B élaborés sur une méthode traditionnelle comme en Champagne. Ils sont blancs, parfois rosés. L'appellation date de 1976.

Mentions particulières

Baies de riesling B touchées par la pourriture noble.

Depuis 1984[24], les vins d'appellation d'origine contrôlée alsace et alsace grand cru peuvent être déclarés et présentés avec l'une des mentions vendanges tardives ou sélection de grains nobles s'ils correspondent à des conditions strictes (vendanges manuelles, teneurs en sucre minimales, vins issus uniquement des cépages gewurztraminer, pinot gris, riesling et muscat). Vendanges tardives (Spätlese en allemand) indique que la vendange s'est faite au moment de la maturation optimale du raisin (pas forcément plus tard que la récolte normale). La dénomination s'applique aux principaux cépages, gewurztraminer, pinot gris, riesling ou muscat : ce sont alors des vins demi-secs. L'indication sélection de grains nobles s'applique aux vins faits à partir de raisins atteint de pourriture noble. Ceux-ci sont produits les années chaudes : ce sont des vins doux et capiteux qui peuvent vieillir longtemps.

Économie

Les étiquettes des vins d'Alsace sont plus simples que les autres étiquettes françaises. Elles font apparaître le cépage et le nom du propriétaire et, souvent, le nom de la vigne et du village, surtout dans le cas d'un grand cru.

La vente des vins d'Alsace en fûts ou autres Bag-In-Box est interdite, seule la commercialisation en bouteilles est autorisée[21]. Celles-ci, hautes et élancées, sont désignées sous le nom de flûtes à cause de leur forme.

D'après le CIVA (Conseil Interprofessionnel des Vins d'Alsace), la production annuelle en 2010 est de 1,15 million d'hectolitres (150 millions de bouteilles dont 90 % de blancs) réalisée par 4 700 producteurs de raisins, la commercialisation est faite par 16 caves coopératives (38 %), 50 négoces (42 %) et 900 vignerons indépendants (20 %), la distribution se fait à 80 % par les circuits alimentaires (GMS, commerces traditionnels, magasins spécialisés et ventes directes[25]), 20 % en restauration. Le vignoble d'Alsace représente 18 % de la production française de vins blancs AOC hors effervescents, 31 % des vins blancs AOC consommés à domicile hors effervescents en France, 30 % du marché des mousseux AOC (hors champagne) consommés à domicile sont les crémants d’Alsace. Le marché français représente 75 % des ventes, l'export se ventile en Europe (77 %), États-Unis (6 %), Canada (6 %) et Asie (4 %)[26],[27].

Notes et références

Notes

  1. 1 637 heures de soleil par an à Strasbourg, 1 724 heures à Colmar et 1 768 heures à Mulhouse.
  2. 8 793 hectares de vignes (AOC+VDT) dans le Haut-Rhin et 6 404 hectares dans le Bas-Rhin en 2000, y compris les vignes à raisin de table (quantité négligeable en Alsace), mais sans compter les pépinières et les vignes-mères de porte-greffes. Source : [PDF] « recensement agricole 2000 », sur http://agreste.agriculture.gouv.fr/.
  3. a et b Le code international d'écriture des cépages mentionne de signaler la couleur du raisin : B = blanc, N = noir, Rs = rose, G = gris.
  4. Les historiens plus anciens font remonter la naissance de la viticulture alsacienne au haut Moyen Âge, tel que par exemple Roger Dion, Histoire de la vigne et du vin en France : des origines au XIXe siècle, Paris, éd. du CNRS, (1re éd. 1959), XII+768 (ISBN 978-2-271-06952-8), p. 161-166.
  5. Les camps légionnaires de la province sont ceux de Mogontiacum (Mayence), d’Argentorate (Strasbourg) et de Vindonissa (Windisch), avec des vexillations notamment à Oedenburg (Biesheim). Ces camps sont placés le long du Rhin pour faciliter leur approvisionnement, tandis que le limes est défendu par les auxiliaires. Source : Jean-Pierre Martin, Les provinces romaines d'Europe centrale et occidentale : Évolution et administration du Norique, de la Rhétie, des provinces alpestres, des Gaules, des Germanies, de la Bretagne et des provinces hispaniques de 31 avant J.-C. à 235 après J.-C., Paris, éditions SEDES, (réimpr. 2), 233 p. (ISBN 2-7181-3254-X), p. 47-48.
  6. Les fouilles du site d'Oedenburg, un camp de vexillation et un vicus situés sur les communes de Biesheim et de Kunheim dans le Haut-Rhin, ont fourni une foule d'informations sur l'alimentation (fosses à déchets et latrines) du Ier au IIIe siècle : orge, amidonnier, épeautre, millet, noisette, lin, pavot, olive, chanvre, amarante, arroche, chou, lentille, pois, fève, carotte, endive, pourpier, calebasse, anis, poivre, aneth, coriandre, fraise des bois, prunelle, aubépine, framboise, mûre, sureau, melon, concombre, figue, mûre, cerise, prune, pruneau, pêche et... raisin. Une partie de ces produits alimentaires sont importés (la totalité de l'approvisionnement en olive, calebasse, melon, figue, pêche et poivre ; on a même trouvé des maquereaux). « On relèvera la découverte de raisin (Vitis vinifera). Outre des milliers de pépins, nous avons aussi trouvé des fragments du fruit. Les points noirs observés à leur surface montrent, selon une communication orale de J. Wiethold, qu’il pourrait s’agir de raisins secs. Certains pépins sont mal développés, caractère que l’on retrouve dans la vigne cultivée. À notre connaissance, il s’agit de trouvailles uniques. » Il n'est pas fait mention de pressoir. Source : [PDF] Michel Reddé et al., « Oedenburg, une agglomération d'époque romaine sur le Rhin supérieur », sur http://www.persee.fr/, p. 63.
  7. Les cités de droit romain sont particulièrement rares dans la province de Germanie supérieure, avec au Ier siècle seulement les colonies d’Augusta Raurica (Augst) et de Noviodunum (Nyon), auxquels se rajoute sous les Flaviens celle d’Aventicum (Avenches).

Références

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  2. a b c et d [PDF] « Le vignoble d'Alsace en quelques chiffres », sur http://www.vinsalsace.com/
  3. a et b [PDF] Direction générale des politiques agricole, agroalimentaire et des territoires, « Cahier des charges des trois appellations », sur http://agriculture.gouv.fr/, homologué par le « décret no 2011-1373 du 25 octobre 2011 modifiant l'ordonnance n° 45-2675 du 2 novembre 1945 relative à la définition des appellations d'origine contrôlées des vins d'Alsace et homologuant les cahiers des charges des appellations d'origine contrôlées « Alsace » ou « Vin d'Alsace » et « Crémant d'Alsace » et des cinquante et une appellations « Alsace grand cru » », JORF, no 0251,‎ , p. 18196.
  4. Placido Llorca, « Liste des vins de France », sur Vin-Vigne, (consulté le )
  5. (de) Peter Rothenhöfer, Die Wirtschaftsstrukturen im südlichen Niedergermanien : Entwicklung eines Wirtchaftraumes an der Peripherie des Imperium Romanum, Rahden/Westf., (ISBN 978-3-89646-135-3).
  6. Michel Kaplan (dir.), Le monde romain, éditions Bréal, Rosny, 1995 (ISBN 2-85394-809-9), p. 241.
  7. Werner Eck, La romanisation de la Germanie, Paris, éditions errance, (ISBN 978-2-87772-366-4), p. 67.
  8. Armold le Noir (Ermoldus Nigellus) (trad. Edmond Faral), Poème sur Louis le Pieux et épîtres au roi Pépin, Paris, Libr. ancienne Honoré Champion, , XXXV+267, in-16 (BNF 34018118).
  9. Rudolf Nickenig, 100 Jahre Deutscher Weinbauverband Schriften zur Weingeschichte Nr. 181, Wiesbaden, 2013.
  10. Décret du 3 octobre 1962 concernant l'appellation contrôlée vins d'Alsace ou alsace : obligation de mentionner appellation contrôlée sur les vins d'Alsace, publié au « JORF du 7 octobre 1962 », sur http://www.legifrance.gouv.fr.
  11. « Décret no 71-554 du 30 juin 1971 concernant l'appellation contrôlée « Vin d'Alsace » ou « Alsace » », sur http://www.legifrance.gouv.fr/.
  12. Décret du 20 novembre 1975 relatif à l'appellation alsace grand cru, publié au « JORF du 25 novembre 1975 », sur http://www.legifrance.gouv.fr.
  13. Décret du 24 août 1976 relatif à l'appellation crémant d'Alsace, publié au « JORF du 28 août 1976 », sur http://www.legifrance.gouv.fr.
  14. « Présentation de la nappe phréatique de la plaine d'Alsace », sur http://aprona.net/, proposant aussi une carte avec indication de la profondeur de la nappe.
  15. « Archives climatologiques mensuelles de Strasbourg de 1961 à 1990 », sur http://www.infoclimat.fr/.
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  18. [PDF] « Tableau d'évolution des surfaces en production par cépage (p. 3) », sur http://www.vinsalsace.com.
  19. 1 166 903 hectolitres divisés par 15 570 hectares. Source : [PDF] « Le vignoble d'Alsace en quelques chiffres », sur http://www.vinsalsace.com/.
  20. « Tableau des statistiques agricoles annuelles sur la production de vins en France, (données provisoires pour 2009) », sur http://agreste.maapar.lbn.fr/.
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  22. « La vinification en blanc », sur http://www.vinsalsace.com/ (consulté le ).
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  25. En moyenne 10 % dont 3 % aux touristes étrangers.
  26. [PDF] « Les vins d'Alsace : chiffres du CIVA », sur http://www.vinsalsace.com/.
  27. « Le Vignoble d'Alsace en quelques chiffres »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?).

Voir aussi

Bibliographie

  • Jacques Fanet, Les terroirs du vin, éditions Hachette, Paris, 2008, 240 pages (ISBN 978-2-01-237501-7).
  • Alsace : riesling, gewurztraminer, sylvaner, La Revue du vin de France et Le Figaro, Paris, 2008, 96 pages (ISBN 978-2-8105-0062-8).
  • Vignoble d'Alsace, éditions Benoît France et CIVA, Paris, 2007, carte 88 x 55 cm au 1/120000 (ISBN 978-2-84354-158-2).
  • Vins d'Alsace : carte touristique, Institut géographique nationale, Paris, 2006, carte 96 x 66 cm au 1/125000 (ISBN 978-2-7585-0182-4).
  • Robert Oz Clarke (en) et Margaret Rand, Guide des cépages, éditions Gallimard, Paris, 2005, 320 pages (ISBN 2-74-241643-9).
  • Petit Larousse des vins, éditions Larousse, Paris, 2005 (ISBN 2-03-560452-4).
  • Jacques-Louis Delpal, Les vins d'Alsace, une promenade viticole et les meilleures adresses, éditions Artémis, Chamalières, 2004, 159 pages (ISBN 978-2844162502).
  • Serge Dubs et Denis Rizenthaler, Les grands crus d'Alsace, éditions Serpenoise, Metz, 2002, 288 pages (ISBN 2-87692-567-2).
  • Claude Muller, Les vins d'Alsace, histoire d'un vignoble, éditions Coprur, Strasbourg, 1999, 192 pages (ISBN 978-2842080082).
  • Le vignoble d'Alsace : la route des vins, Mitra productions, Illkirch, 1995, carte 90 x 34 cm au 1/180000 (BNF 40658287).
  • Guide des grands crus d'Alsace, Centre d'information des vins d'Alsace, Colmar, 1994, 50 pages (BNF 36691659).
  • Jean-Louis Stolz, L'ampélographie des vins d'Alsace, édition Coprur, Strasbourg, 1994, 199 pages (ISBN 2-903297-82-7).
  • Bernadette Burn et Gilles Schmidt, Alsace, clos et grands crus, collection Le Grand Bernard des vins de France, éditions Jacques Legrand, Paris, 1989, 190 pages (ISBN 2-905969-24-5).
  • Jean-Louis Stolz, Einleitung zum Elementar-Handbuch des elsässischen Ackerbauers, Strassburg, 1863, 8 pages in-octavo (BNF 31410323).
  • Jean-Louis Stolz, Ampélographie rhénane, ou Description caractéristique, historique, synonymique, agronomique et économique des cépages les plus estimés et les plus cultivés dans la vallée du Rhin, depuis Bâle jusqu'à Coblence et dans plusieurs contrées viticoles de l'Allemagne méridionale, Paris, 1852, 264 pages in-quarto (BNF 31410321).
  • Jean-Louis Stolz, Manuel élémentaire du cultivateur alsacien, Strasbourg, 1842, 479 pages in-12 (BNF 31410325).

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