Trapiche (moulin)

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Moulin à sucre à traction bovine à Galette-Chambon dans la plaine du Cul-de-Sac en Haïti
Trapiche à Santo Antão (Cap-Vert)

Le trapiche (ou engenho[1]) est un moulin traditionnel utilisé pour extraire les sucs de la canne à sucre en vue de sa distillation – parfois aussi de l'olive. Par extension le terme peut aussi désigner le lieu sur lequel se trouve l'installation, c'est-à-dire la ferme (finca-trapiche)[2], ou par la suite l'atelier.

Automatisée dans les pays plus industrialisés, l'extraction du jus de canne à l'aide du trapiche se poursuit au Cap-Vert, particulièrement sur les îles de Santo Antão et Santiago, où il reste nécessaire à la fabrication du grogue, le rhum local.

En Amérique du Sud une forme de trapiche était aussi utilisée pour l'extraction du minerai[3].

Étymologie et définition[modifier | modifier le code]

Dans son Nouveau dictionnaire français-espagnol et espagnol-français[4] de 1775, Nicolas de Séjournant propose une étymologie latine, trapetum, et donne la définition suivante : « Rouleaux qui servent à écraser les cannes de sucre, dans les moulins à sucre ».

Fonctionnement[modifier | modifier le code]

À l'origine le trapiche est une sorte de pressoir en bois constitué de trois cylindres métalliques tournant en sens contraire[5]. Grâce à un levier en bois légèrement arqué (parfois appelé almanjarra[6]) et à un système d'engrenages, ils sont actionnés par la rotation d'une paire de bœufs ou de mules, guidés par un homme connu sous le nom de kolador di boi au Cap-Vert. Deux autres personnes font passer la canne à sucre entre les cylindres qui la broient et permettent l'écoulement du jus.


Histoire[modifier | modifier le code]

Dans les archipels de la Macaronésie comme en Amérique latine, l'histoire de la canne à sucre est étroitement liée à celle de la colonisation et de l'esclavage[7]. Sa culture se développe entre le XVIe et le XIXe siècle.

Plusieurs gravures anciennes, dont une planche de la série « Œconomie rustique-Sucrerie » de l'Encyclopédie de Diderot et d'Alembert, illustrent cette technique aussi rudimentaire que répandue.

Au Cap-Vert, sous l'ère coloniale, le trapiche est d'abord actionné par des esclaves, avant le recours à la force animale. De cette période, sur l'île de Santo Antão, datent les « cantigas-de-curral-de-trapiche » (ou aboios), des chants destinés à encourager les bœufs ou les hommes[8].


Notes[modifier | modifier le code]

  1. (en) Gilberto Freyre (trad. du portugais par Samuel Putnam), The masters and the slaves [« Casa-grande & sensala. »], Berkeley, University of California Press, , 537 p. (ISBN 978-0-520-05665-7, lire en ligne), p. 499
  2. (fr) Élizabeth Lopez et José Muchnik, Petites entreprises et grands enjeux : le développement agroalimentaire local, L'Harmattan, Paris, Montréal, 1997, vol. 1 p. 337 (ISBN 2-7384-5169-1)
  3. (es) Diccionario de la lengua española, Espasa Calpe, 2001 (22e éd.) [1]
  4. (fr) Nicolas de Séjournant, Nouveau dictionnaire français-espagnol et espagnol-français, Jombert, éd. 1789, tome 1, p. 468 [2]
  5. (fr) Sabrina Requedaz et Laurent Delucchi, Cap-Vert, Éditions Olizane, Genève, 2011 (6e éd.), p. 221-222 (ISBN 978-2-88086-394-4)
  6. (fr) Reinhart P. A. Dozy, Supplément aux dictionnaires arabes, vol. 1, Gorgias Press, Piscataway, NJ, 2007 (1re éd. 1881), p. 180 (ISBN 9781593335182)
  7. (fr) Yves Demarly et Monique Sibi, Amélioration des plantes et biotechnologies, J. Libbey Eurotext, Montrouge, 1996 (2e éd.), p. 51 (ISBN 2-7420-0102-6)
  8. Vladimir Monteiro (préf. Jean-Yves Loude), Les musiques du Cap-Vert, Paris, Chandeigne, coll. « lusitane », , 156 p. (ISBN 978-2-906462-48-9, lire en ligne), p. 84

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • (en) « Trapiche », in Maya atlas : the struggle to preserve Maya land in southern Belize, North Atlantic Books, Berkeley, Calif., 1997, p. 29 (ISBN 1-556-43256-9)
  • (fr) Michèle Guicharnaud-Tollis (dir.) Le sucre dans l'espace caraïbe hispanophone aux XIXe et XXe siècles : stratégies et représentations : actes du colloque organisé à Pau, 14 et , l'Harmattan, Paris, 1998, 398 p. (ISBN 2-7384-7275-3)
  • (fr) Élizabeth Lopez et José Muchnik, « Ferme-trapiche (finca-trapiche) : entreprise charnière de la production de la panela », in Petites entreprises et grands enjeux : le développement agroalimentaire local, L'Harmattan, Paris, Montréal, 1997, vol. 1 p. 327-334 (ISBN 2-7384-5169-1)

Liens externes[modifier | modifier le code]