Tour Perret (Grenoble)

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Tour Perret
Le parc Paul-Mistral et la tour Perret (à droite) en 2007.
Histoire
Ancien(s) nom(s)
« Tour pour regarder les montagnes »[1]
Architecte
Auguste et Gustave Perret architectes
Ingénieur
Perret frères, entreprise de béton armé
Construction
20 mai 1924 - 4 mai 1925 (11 mois)
Ouverture
Inauguration
6 septembre 1925, par le président du Conseil Paul Painlevé, le maire de Grenoble Paul Mistral, le président de l'Exposition Marius Blanchet.
Coût
385 000 francs (de 1924)[5],[6]
Rénovation
ragréage de façade en 1951 (peu efficace dans la durée)[2]
Fermeture
1960[3]
Usage
Architecture
Style
Tour en béton armé (ossaturisme)
Matériau
Patrimonialité
Hauteur
Flèche : 108 mètres
Toit : 85 mètres
Étages
RDC + 3 terrasses[4]
Nombre dʼascenseurs
2
Administration
Contracteur
Touring Club de France
Propriétaire
Localisation
Pays
France
Ville
Quartier
Adresse
Parc Paul-Mistral
Coordonnées
Localisation sur la carte de Grenoble
voir sur la carte de Grenoble
Localisation sur la carte de France
voir sur la carte de France

La tour Perret est une tour d'observation située à Grenoble dans le parc Paul-Mistral. Édifice emblématique de la ville, c'est aussi la première tour en béton armé construite au monde[7]. Elle a été classée au titre des monuments historiques en 1998[8]. C'est également le seul vestige restant de l'Exposition Internationale de la Houille Blanche et du Tourisme de 1925[9].

Architecture[modifier | modifier le code]

La tour Perret a été construite par l'architecte et entrepreneur Auguste Perret en 1924 en prévision de l'Exposition internationale de la houille blanche de 1925 sur la production, le transport et la distribution de l'énergie électrique, et le tourisme, seconde source d'activité économique dans les Alpes au début du siècle[10].

Haute de 95 mètres et de section octogonale, elle repose sur des fondations de 15 mètres[11] constituées de soixante-douze pieux de béton armé[11], réunis au sommet par une dalle et s'appuyant sur une couche dure de graviers. L'ossature se compose de huit poteaux verticaux[8]. Le diamètre de la tour est de 8 mètres à la base[12]. Le dernier étage est accessible par des escaliers hélicoïdaux (visibles dans la partie terminale ajourée) ou par un ascenseur[8].

La tour est le produit d'une pensée architecturale et structurelle particulièrement moderne et précise. C'est une structure de béton armé dont les coffrages sont modulaires et répétitifs, et les remplissages préfabriqués sont des remplois qui viennent de l'église Notre-Dame du Raincy[11].

Aussi appelée « tour d'orientation », non parce que les quatre points cardinaux sont moulés au sommet, mais parce qu'une table d'orientation, prévue par le Touring club de France, en fait le tour au niveau « 60 m » (soit, 35 m avant le sommet), elle permettait de situer les bâtiments de l'Exposition internationale de la houille blanche et du tourisme qui se déroulait à ses pieds sur une superficie de vingt hectares. Elle permettait également aux touristes de situer les montagnes alentour, tout en offrant le plaisir d'un panorama unique sur les Alpes[8], ainsi que sur Grenoble car sa hauteur, parmi les autres immeubles de la ville, n'est comparable qu'à celles des trois tours de l'Île-Verte (98 m).

Historique[modifier | modifier le code]

Auguste Perret, avec l'aide de Marie Dormoy, critique d'art, vint à Grenoble pendant deux ans, faire des conférences et rencontrer les milieux politiques et artistiques modernes, afin de faire apprécier son « ordre du béton armé » ; en référence aux ordres de l'architecture grecque antique[13].

L’Isère constituant alors une place forte de l’industrie française du ciment, ses « édiles » ne pouvaient qu’être réceptifs à ce genre de discours[14].

Affiche de la Compagnie des chemins de fer PLM pour l'Exposition internationale de la houille blanche de 1925 : au centre la tour Perret, à droite le palais du tourisme, à gauche le palais des transports et industries touristiques le long du futur boulevard Jean-Pain.

Aussi, lorsqu’au début des années 1920 il est décidé d’organiser à Grenoble une Exposition internationale de la houille blanche, c’est tout naturellement que l’on confie à Auguste Perret le soin d’ériger une tour qui devait être le symbole de la manifestation. Il était alors habituel dans ce genre d'évènement de construire un tel édifice au milieu des pavillons qui permettait aux visiteurs de s’orienter et de fixer un point de rendez-vous facile à trouver. Souvent, comme ce fut le cas de la tour Eiffel pour l’exposition universelle de Paris de 1889, ces bâtiments seront les seuls à survivre à la manifestation qui avait motivé leur création[15].

Si personne ne semble avoir critiqué l’esthétique avant-gardiste de l’ouvrage, sa structure creuse et sa légèreté suscitèrent par contre quelques craintes quant à sa solidité et Auguste Perret dut refaire ses calculs devant un parterre d'experts pour démontrer la vanité de ces inquiétudes. Son coût, quant à lui, se limitait à 385 000 francs de l’époque (soit environ 130 000 euros de 2015) ce qui apparaissait alors modique comparé aux résultats que l’on en attendait[15].

Durant l'exposition, du au , un projecteur a été installé au sommet pour éclairer les bâtiments[10].

Lors de son inauguration, le , par le président du conseil Paul Painlevé, Édouard Herriot et André Hesse, plus de deux mille visiteurs monteront dans la tour en empruntant les ascenseurs qui desservent la plateforme d'orientation située à 60 m[10]. Au moment du repas et durant tout le temps de celui-ci, Édouard Herriot et André Hesse redescendent les derniers et restent bloqués dans l'ascenseur sans que les employés de la tour ne s'en aperçoivent, provoquant ainsi une certaine panique dans les services de police[10].

L'Exposition internationale de la houille blanche de 1925 eut un énorme succès. Plus d'un million de visiteurs vinrent dans la ville (85 000 habitants à l'époque) qui fit des bénéfices malgré des énormes travaux entrepris. La tour fut à la fois l'édifice le moins coûteux et le symbole de l'exposition.

En 1929, une antenne de TSF a été installée[10] au sommet de la tour afin de retransmettre les émissions de radio de « Alpes-Grenoble »[16].

Aujourd'hui, la tour est la seule construction restante de cette exposition[17].

Classement[modifier | modifier le code]

La tour Perret est inscrite à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques en 1975 et obtient le 17 mars 1997 l'accord de la municipalité pour le classement définitif[17].

Aujourd'hui[modifier | modifier le code]

Son état dégradé lui a valu d'être fermée au public en 1960[18]. Elle a été classée au titre des monuments historiques en 1998[8]. Actuellement, le sommet de la tour est illuminé en hiver et reste utilisé comme support pour les feux d'artifice du 14 juillet.

Sans véritable entretien depuis sa construction, la dégradation de la tour risque de devenir irréversible : des ferraillages sont dénudés ou cassés et l'oxydation de l'armature métallique fait éclater le béton armé. En 2005, l'étude préalable d'Alain Tillier, architecte en chef des monuments historiques estime le coût de la restauration à 4,6 millions d'euros.

Depuis, aucune réparation n'a été entreprise et la tour s'est encore dégradée. En 2012, l'étude Mouton a estimé le coût de la restauration à 6 millions d'euros (intérieure et extérieure) dont 60 % du coût serait supporté par une subvention de l’État et du département puisque la tour est un monument historique[19]. Dans ces études, la restauration comprend également la réouverture de la tour au public avec des mises aux normes de sécurité.

En 2011 et 2012, Cédric Avenier, chercheur au laboratoire AE&CC de l'école nationale supérieure d'architecture de Grenoble, relance l'intérêt pour cette tour dans les milieux scientifiques et culturels[20],[21]. Il en tire un ouvrage, L'Ordre du béton. La tour Perret de Grenoble, édité en , pour offrir un outil de discussion artistique et architectural au public et aux décideurs politiques[22]. L'état des connaissances historiques, culturelles et scientifiques, permettent de réaliser un chantier pilote pour la restauration des bétons armés anciens, une problématique technique et éthique du XXIe siècle.

Le , la pétition « Sauvons la tour Perret de Grenoble »[23] est lancée, elle recueille plus de cinq cents signatures dès la première semaine et est relayée par plusieurs journaux locaux[24],[25],[26],[27].

Le , l'association « Ensemble pour la tour Perret de Grenoble » (ETPG) est créée pour promouvoir la sauvegarde et la restauration de la tour Perret, pour diffuser le plus largement possible son histoire et son intérêt patrimonial et pour veiller et contribuer à sa mise en valeur[2].

Lors des élections municipales de , plusieurs partis se sont engagés en faveur de la restauration : la liste « Croire en Grenoble » (UMP, UDI, AEI)[28],[2], la liste « Imagine Grenoble » (Modem)[29],[2], la liste « Aimer Grenoble pour vous » (PS, PCF, Cap21, MRC, PRG, GE, GO Citoyenneté)[30],[2], la liste « Grenoble une ville pour tous » (EELV, PG, Les Alternatifs, GA, ADES, Réseau Citoyen)[31],[2],[32],[33]. Régulièrement, les médias locaux sensibilisent l'opinion publique sur l'importance d'une restauration à prévoir[34].

Le , le conseil municipal de la ville de Grenoble vote un projet de réhabilitation de la tour Perret qui doit s'étendre jusqu'en 2021[35],[36], année de sa réouverture prévisionnelle. Le , le maire annonce son ouverture pour 2022[37].

D'après la mairie, la tour devait faire l'objet d'un « chantier-test » pour le choix des techniques en 2020 avant le chantier principal en 2021-2022 et la fin de la restauration puis la réouverture au public en 2024[18].

En 2025, la Tour Perret fêtera son 100e anniversaire.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Avenier 2013, p. 43.
  2. a b c d e et f « Blog Sauvons la tour Perret, pétition pour la sauvegarde de la tour », sur sauvonslatourperret.blogspot.fr, (consulté le ).
  3. « La tour Perret en quelques dates] sur City Local News : « 1960 [...] il est décidé de fermer l’édifice au public, l’escalier et les ascenseurs étant devenus quasiment impraticables. » ».
  4. « La tour Perret] ».
  5. « Faisons de la tour Perret un chantier pilote !] GRE City Local News, 18 septembre 2013 ».
  6. Avenier 2013, p. 27.
  7. « Tour Perret - Grenoble »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), sur patrimoine-en-isere.fr.
  8. a b c d et e Notice no PA00117204, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture
  9. « TITRE MANQUANT »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), sur grenoble-tourisme.com.
  10. a b c d et e Avenier 2013, p. 37.
  11. a b et c Avenier 2013, p. 33.
  12. Avenier 2013, p. 31.
  13. Richard Juillet, « Le 21 mai 1925 : la tour Perret est inaugurée à Grenoble »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), Culture - Histoire, sur isere-magazine.fr, conseil général de l'Isère, (consulté le ).
  14. Avenier 2010, p. 23-30.
  15. a et b Cédric Avenier et Éric Moulinier, « Racontez-nous la vraie histoire de la Tour Perret... », Le Dauphiné libéré, Grenoble, no 21826,‎ (ISSN 1760-6314).
  16. « 100 ans de Radio - La radio en région Rhône-Alpes : le poste "Alpes-Grenoble“ », sur 100ansderadio.free.fr (consulté le )
  17. a et b Union des habitants du quartier Exposition-Bajatière, La Bajatière : Histoire d'un quartier de Grenoble, Grenoble, , 1re éd., 32 p. Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'articleVoir et modifier les données sur Wikidata
  18. a et b Ville de Grenoble, « Tour Perret », sur grenoble.fr (consulté le ) : « … la ville entreprend sa restauration afin de rendre son sommet et sa vue accessibles à tous. En 2024, une fois ouverte au public, elle sera aussi le lieu d’événements et d’animations variés. ».
  19. « Sauvons la tour Perret : pétition », sur sauvonslatourperret.blogspot.com, (consulté le )
  20. Avenier et Coste 2011.
  21. Avenier et Coste 2012.
  22. Avenier 2013.
  23. Fédération des associations patrimoniales de l'Isère, « Sauvons la tour Perret de Grenoble », sur Petitionenligne.fr, (consulté le )
  24. « ISERE SUD. Grenoble: une pétition pour "sauver la Tour Perret" », sur ledauphine.com, (consulté le )
  25. « Une pétition pour "sauver la tour Perret" »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), sur citylocalnews.com (GRE City Local News), .
  26. « Il faut sauver la tour Perret », sur 20minutes.fr, (consulté le ).
  27. « Tour Perret : la polemique relancée », sur placegrenet.fr (Place Gre'net'), (consulté le ).
  28. « Liste Croire en Grenoble (UMP, UDI, AEI), Matthieu Chamussy, Voir p. 4 et p. 11] ».
  29. « Liste Imagine Grenoble (Modem), Philippe de Longevialle, Voir p. 7] » [archive du ].
  30. « Liste Aimer Grenoble pour vous (PS, PCF, Cap21, MRC, PRG, GE, GO Citoyenneté), Jérôme Safar, Voir p. 42] ».
  31. « Liste Grenoble une ville pour tous (EELV, PG, Les Alternatifs, GA, ADES, Réseau Citoyen), Éric Piolle, Voir point 87] ».
  32. « Réponse à Ensemble pour la Tour Perret de Grenoble] ».
  33. « La Tour Perret sera restaurée en 2014 »] Place Gre'net, 17 octobre 2013 ».
  34. « Et si on réhabilitait la tour Perret de Grenoble ? »] France 3 Alpes du 20 mai 2015 ».
  35. « Vidéos - Voyage à l'intérieur et au sommet de la tour Perret à Grenoble », sur francebleu.fr, (consulté le ).
  36. « À Grenoble, la première tour en béton d’Europe va enfin être restaurée », sur immobilier.lefigaro.fr, (consulté le ).
  37. « Grenoble : ce qu'Eric Piolle a dit à nos lecteurs », sur ledauphine.com, (consulté le ).

Annexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • .Articles d'Yves Morin, correspondant de presse aux "Affiches de Grenoble et du Dauphiné" : Trente-neuf esquisses pour l'hommage à Perret - La Tour retrouve droit de cité, 19/11/1986, in Les Affiches de Grenoble et du Dauphiné, p. 27, et À propos de l'hommage grenoblois à Auguste Perret - Une tour au concours, 31/10/1986, in Les Affiches de Grenoble et du Dauphiné.
  • Ouvrages de Cédric Avenier :
    • Les Ciments de l'Isère : deux siècles d'innovation, Grenoble, Le Dauphiné libéré, coll. « Les patrimoines », , 80 p. (ISBN 9782811000080, présentation en ligne).
    • (en) Avec Anne Coste, The Perret Tower : symbol of the 1925 International Hydro-electric Power Exhibition in Grenoble, and of the Cement and Concrete Industry, Engineering History and Heritage, Londres, ICE Publishing, .
    • Avec Anne Coste, The Perret Tower : architecture, art and press (relations d’Auguste Perret avec le milieu artistique de son époque : projet de la tour d’orientation de Grenoble), Paris, 4th international Congress on Construction History, .
    • L'Ordre du béton : la tour Perret de Grenoble, ENSA Grenoble, CRAterre éditions, coll. « Cultures constructives », , 48 p.

Article connexe[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

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