Syndrome de douleur post-herniorraphie

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Le syndrome de douleur post-herniorraphie, ou inguinodynie est une douleur ou inconfort subsistant plus de 3 mois après une chirurgie de la hernie inguinale. Les tests cliniques ont permis d'identifier que le taux de douleur chronique de l'aine (> 10 %) dépasse celui de la récidive (< 2 %) et est une mesure importante du succès. Ce risque est la raison principale pour laquelle opérer une hernie inguinale asymptomatique n'est plus recommandé aujourd'hui[1],[2].

Le problème[modifier | modifier le code]

La douleur chronique de l'aine est potentiellement invalidante avec des névralgies, paresthésies, hypoesthésies, hyperesthésies. Les patients peuvent se retrouver incapables de travailler, ont des activités physiques et sociales limitées, des troubles du sommeil et une détresse psychologique. La douleur post-opératoire de la hernie inguinale est un problème méconnu et difficile pour de nombreux chirurgiens, et aux États-Unis, 5-7 % des patients qui en souffrent engagent des poursuites judiciaires.

Incidence[modifier | modifier le code]

L'incidence précise est difficile à déterminer, le ressenti de la douleur pouvant être en partie variable. On l'estime souvent de 10 % à 20 %[3]. Une série prospective de Lichtenstein (419 patients) note qu'à 1 an de suivi, 19 % des patients ont de la douleur, 6 % avec un degré modéré ou sévère. Les prédicteurs de la douleur modérée ou sévère incluent : hernie récurrente, douleur à 1 semaine post-op, et douleur à 4 semaines post-op[4]. Une étude écossaise de 4 062 patients identifie à 3 mois post-op une incidence de 43 % de douleur moyenne et 3 % sévère ou très sévère. Le groupe sévère et très sévère est associé avec le jeune âge ou le genre féminin.

L'utilisation d'une technique avec filet versus suture a aussi été discutée. Certains résultats suggèrent moins d'inguinodynie après Shouldice (suture) qu'après Lichtenstein (filet ciel ouvert) pour les hommes jeunes[5]. D'autres études trouvent des résultats équivalents entre Shouldice et laparoscopie TEP[6]. Il doit être rappelé que l’expérience du chirurgien est cruciale pour les résultats, surtout après Shouldice ou laparoscopie (cœlioscopie), qui sont des gestes très techniques.

Étiologie[modifier | modifier le code]

La douleur neuropathique est une douleur dans la distribution sensorielle d'un nerf endommagé. Cela peut être dû à une blessure préexistante ou faite durant l'opération. Elle est souvent décrite comme poignardante et brûlante. La douleur nociceptive inclut la douleur somatique et viscérale. La douleur somatique peut être due à une inflammation chronique d'une blessure du tissu et est décrite comme étant mordante, tirante, et martelante. La douleur viscérale peut se manifester au niveau des testicules et de l'éjaculation, qui peut être associée avec la croissance du filet dans les structures du cordon spermatique.

Prévention de l'inguinodynie[modifier | modifier le code]

Gestion des nerfs[modifier | modifier le code]

Éviter le piégeage des nerfs et leur blessure est crucial. Le consensus actuel est que l'identification et la préservation routinière des nerfs est la meilleure méthode de prévention[7],[5],[8].

La transsection routinière des nerfs n'est pas une stratégie recommandée. Elle peut accroître des désordres sensoriels dans l'aire de distribution du nerfs transsecté[9].

Mais ne pas faire d'identification du tout est encore pire, et beaucoup de chirurgiens ne la font toujours pas. Par exemple, dans la pratique courante, les chirurgiens arrivent à identifier les trois nerfs inguinaux comme distincts dans moins de 40 % des cas, alors que les études montrent que cette identification peut être faite dans 70-90 % des cas[7]. Une des difficultés est que le cours des deux nerfs ilioinguinal et iliohypogastrique sont conformes à ce qui est décrit dans les livres d'anatomie dans seulement 42 % des patients. Pour autant, finalement, ces variations anatomiques sont identifiables facilement[10].

Filet (plaque)[modifier | modifier le code]

La méthode de fixation a aussi été beaucoup débattue avec des résultats variables et peu de résultats concordants. Pourtant, la colle de fibrine semble avoir un léger avantage. Les types de filets prothétiques ont aussi été étudiés, suggérant un petit avantage pour les filets de poids léger sur ceux de poids lourd, et pour les filets biologiques sur les synthétiques[11].

Sac herniaire[modifier | modifier le code]

Le rôle de la ligature du sac herniaire a aussi été discuté[12]. Quand la ligature et excision du sac sont omis, il y a moins de douleur de court terme[13],[14]. Cependant, l'impact de long terme n'a pas encore été étudié.

Évaluation et traitement[modifier | modifier le code]

Gestion non chirurgicale[modifier | modifier le code]

L'évaluation et le traitement peuvent être délicats. Les examens et imageries pour prévenir des récidives occultes sont importants. Suivant cela, l'utilisation d'anti-inflammatoires, de blocages nerveux, neuromodulateurs et clinique de la douleur[pas clair] doivent être considérés[15]. Sans récidive, l'intervention doit être reportée d'au moins un an car la douleur décroit avec le temps.

Triple neurectomie et/ou retrait du filet[modifier | modifier le code]

Si l’opération est choisie, retrait du filet +/- triple neurectomie peut être considérée, de petites études suggérant de bons résultats[16],[17],[18],[19]. La plus grande serie, comprenant 415 patients, le plus souvent après Lichtenstein ou Shouldice, demontre des améliorations significatives suivant la triple neurectomie[20].

Cependant, la triple neurectomie standard ne traite pas d'une inguinodynie consécutive à une neuropathie du nerf génito-fémoral et du segment prépéritonéal de sa branche génitale. Mais l'extension de la triple neurectomie standard pour inclure le nerf génito-fémoral a donné de bons résultats, sur une petite série de 16 patients[21].

Le retrait du filet doit être considéré en dernier ressort. Les filets sont faciles à placer mais difficiles à enlever, à cause de leur incorporation dans le péritoine. Le retrait doit être fait par un chirurgien hautement spécialisé.

Conclusion[modifier | modifier le code]

La douleur chronique de l'aine est bien plus répandue que la récidive, et peut être moins fréquente et importante après une laparoscopie bien faite. La douleur se réduit souvent avec des mesures conservatives. Suivant une évaluation complète du patient et des essais de traitements non chirurgicaux, la chirurgie peut être considérée. Différents algorithmes de traitement existent avec des résultats prometteurs.

Références[modifier | modifier le code]

  1. (en) M. P. Simons, T. Aufenacker, M. Bay-Nielsen, J. L. Bouillot, G. Campanelli, J. Conze, D. Lange, R. Fortelny et T. Heikkinen, « European Hernia Society guidelines on the treatment of inguinal hernia in adult patients », Hernia, vol. 13, no 4,‎ (PMID 19636493, PMCID PMC2719730, DOI 10.1007/s10029-009-0529-7)
  2. (en) Jacob Rosenberg, Thue Bisgaard, Henrik Kehlet, Pål Wara, Torsten Asmussen, Poul Juul, Lasse Strand, Finn Heidemann Andersen et Morten Bay-Nielsen, « Danish Hernia Database recommendations for the management of inguinal and femoral hernia in adults », Danish Medical Bulletin, vol. 58, no 2,‎ , p. C4243 (PMID 21299930, lire en ligne)
  3. Henri Vuilleumier, Dritan Abrazhda, Martin Hübner, Nicolas Demartines et Antonio Foletti, « Algies après cure de hernie inguinale : que faire ? », Revue Médicale Suisse, vol. 6, no 254,‎ , p. 1288–91 (PMID 20672684, lire en ligne)
  4. (en) T. Callesen, K. Bech et H. Kehlet, « Prospective study of chronic pain after groin hernia repair », British Journal of Surgery, vol. 86, no 12,‎ , p. 1528–31 (PMID 10594500, DOI 10.1046/j.1365-2168.1999.01320.x)
  5. a et b (it) Sergio Alfieri, Fabio Rotondi, Dario Di Miceli, Andrea Di Giorgio, Marco Pericoli Ridolfini, Uberto Fumagalli, Antonio Salzano, Francesco Paolo Prete et Antonio Spadari, « Il dolore cronico dopo ernioplastica inguinale con protesi: il possibile ruolo della manipolazione chirurgica dei nervi del canale inguinale », Chirurgia Italiana, vol. 58, no 1,‎ , p. 23–31 (PMID 21365287, lire en ligne)
  6. (en) I Wennström, P Berggren, L Åkerud et J Järhult, « Equal results with laparoscopic and Shouldice repairs of primary inguinal hernia in men. Report from a prospective randomised study », Scandinavian Journal of Surgery, vol. 93, no 1,‎ , p. 34–6 (PMID 15116817, lire en ligne)
  7. a et b (en) S. Alfieri, P. K. Amid, G. Campanelli, G. Izard, H. Kehlet, A. R. Wijsmuller, D. Di Miceli et G. B. Doglietto, « International guidelines for prevention and management of post-operative chronic pain following inguinal hernia surgery », Hernia, vol. 15, no 3,‎ , p. 239–49 (PMID 21365287, DOI 10.1007/s10029-011-0798-9)
  8. (en) Erik Ballert, « Chronic Postoperative Inguinodynia: A pain in the * &%^ »,
  9. (en) Marcello Picchio, Domenico Palimento, Ugo Attanasio, Pietro Filippo Matarazzo, Chiara Bambini et Angelo Caliendo, « Randomized Controlled Trial of Preservation or Elective Division of Ilioinguinal Nerve on Open Inguinal Hernia Repair with Polypropylene Mesh », Archives of Surgery, vol. 139, no 7,‎ , p. 755–9 (PMID 15249409, DOI 10.1001/archsurg.139.7.755)
  10. (en) A. K. R. Al-dabbagh, « Anatomical variations of the inguinal nerves and risks of injury in 110 hernia repairs », Surgical and Radiologic Anatomy, vol. 24, no 2,‎ , p. 102–7 (PMID 12197017, DOI 10.1007/s00276-002-0006-9)
  11. (en) Luca Ansaloni, Fausto Catena, Federico Coccolini, Filippo Gazzotti, Luigi d'Alessandro et Antonio Daniele Pinna, « Inguinal hernia repair with porcine small intestine submucosa: 3-year follow-up results of a randomized controlled trial of Lichtenstein's repair with polypropylene mesh versus Surgisis Inguinal Hernia Matrix », The American Journal of Surgery, vol. 198, no 3,‎ , p. 303–12 (PMID 19285658, DOI 10.1016/j.amjsurg.2008.09.021)
  12. (en) Bijan Mohammadhosseini, « Risk Factors for Persistent Postherniorrhaphy Pain: Unresolved », Anesthesiology, vol. 113, no 5,‎ , p. 1243–4 (PMID 20966668, DOI 10.1097/ALN.0b013e3181f69604)
  13. (en) AG Shulman, PK Amid et IL Lichtenstein, « Ligation of hernial sac. A needless step in adult hernioplasty », International surgery, vol. 78, no 2,‎ , p. 152–3 (PMID 8354615)
  14. (en) S. Delikoukos, L. Lavant, G. Hlias, K. Palogos et D. Gikas, « The role of hernia sac ligation in postoperative pain in patients with elective tension-free indirect inguinal hernia repair: A prospective randomized study », Hernia, vol. 11, no 5,‎ , p. 425–8 (PMID 17594052, DOI 10.1007/s10029-007-0249-9)
  15. (en) George S. Ferzli, Eric D. Edwards et George E. Khoury, « Chronic Pain after Inguinal Herniorrhaphy », Journal of the American College of Surgeons, vol. 205, no 2,‎ , p. 333–41 (PMID 17660082, DOI 10.1016/j.jamcollsurg.2007.02.081)
  16. (en) P. Palumbo, A. Minicucci, A. G. Nasti, I. Simonelli, F. Vietri et A. M. Angelici, « Treatment for persistent chronic neuralgia after inguinal hernioplasty », Hernia, vol. 11, no 6,‎ , p. 527–31 (PMID 17668147, DOI 10.1007/s10029-007-0268-6)
  17. (en) S. Delikoukos, F. Fafoulakis, G. Christodoulidis, T. Theodoropoulos et C. Hatzitheofilou, « Re-operation due to severe late-onset persisting groin pain following anterior inguinal hernia repair with mesh », Hernia, vol. 12, no 6,‎ , p. 593–5 (PMID 18542838, DOI 10.1007/s10029-008-0392-y)
  18. (en) Henri Vuilleumier, Martin Hübner et Nicolas Demartines, « Neuropathy After Herniorrhaphy: Indication for Surgical Treatment and Outcome », World Journal of Surgery, vol. 33, no 4,‎ , p. 841–5 (PMID 19156462, DOI 10.1007/s00268-008-9869-1)
  19. (en) Eske K. Aasvang et Henrik Kehlet, « The Effect of Mesh Removal and Selective Neurectomy on Persistent Postherniotomy Pain », Annals of Surgery, vol. 249, no 2,‎ , p. 327–34 (PMID 19212190, DOI 10.1097/SLA.0b013e31818eec49)
  20. (en) Parviz K. Amid et Jonathan R. Hiatt, « New Understanding of the Causes and Surgical Treatment of Postherniorrhaphy Inguinodynia and Orchalgia », Journal of the American College of Surgeons, vol. 205, no 2,‎ , p. 381–5 (PMID 17660088, DOI 10.1016/j.jamcollsurg.2007.04.001)
  21. (en) Parviz K. Amid et David C. Chen, « Surgical Treatment of Chronic Groin and Testicular Pain after Laparoscopic and Open Preperitoneal Inguinal Hernia Repair », Journal of the American College of Surgeons, vol. 213, no 4,‎ , p. 531–6 (PMID 21784668, DOI 10.1016/j.jamcollsurg.2011.06.424)