Cryptomeria japonica

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cryptomeria japonica à Madagascar

Le Cryptomère du Japon ou Cèdre du Japon (Cryptomeria japonica), en japonais 杉 (スギ : sugi), est une espèce de conifères proche parent du cyprès chauve[2] (famille des Cupressaceae) originaire d'Extrême-Orient. C'est le seul membre du genre Cryptomeria. L'espèce est présente au Japon, en Chine et en Corée, ainsi qu'à l'île de La Réunion, à Madagascar et aux Açores[3].

Historique[modifier | modifier le code]

La variété Cryptomeria japonica var. japonica est endémique du Japon, mais elle a été largement et depuis longtemps utilisée en reboisement à Taïwan et en Chine continentale[4]. Elle a été également plus récemment introduite à l'île de La Réunion pour la lutte contre l'érosion des sols et pour son utilisation notamment en ébénisterie et comme bois de charpente[5] ainsi qu'aux Açores.

Introduit en France à partir de 1842 comme essence d'ornement, son utilisation forestière s'est développée dans les années 1970-1980 sous l'impulsion de l'AFOCEL (association forêt cellulose).

La variété Cryptomeria japonica var. sinensis, parfois considérée en tant qu'espèce (Cryptomeria sinensis Sieb. ou Cryptomeria fortunei) se distingue par des rameaux grêles et pendants et serait originaire notamment du Zhejiang[6].

Description[modifier | modifier le code]

Cônes femelles et graines
(Muséum de Toulouse).

Le cryptomère du Japon est un très grand arbre à feuilles persistantes atteignant 60 mètres, avec un tronc de 4 mètres de diamètre et une écorce rouge-brun qui pèle en bandes verticales. En France, il atteint 30 à 40 mètres de hauteur.

Les feuilles sont arrangées en spirale, comme des épines, de 0,5 à 1 cm de long et les cônes lécanie, 2 à 3 cm de diamètre avec 20 à 40 écailles légèrement imbriquées qui portent, sur leur face inférieure, des bosses blanches et jaunes d'où s'échappent en saison de nombreux grains de pollen. Ce pollen serait le principal responsable du rhume des foins japonais, le kafunshō (花粉症?, litt. « maladie du pollen »). La longue persistance des branches rend indispensable l'élagage de pénétration. Il est superficiellement similaire au séquoia géant (Sequoiadendron giganteum), dont il peut être différencié par les écailles plus rapprochées du rameau[7] et des cônes plus petits (4 à 6 cm pour le séquoia), et une écorce plus dure (épaisse, molle et spongieuse pour le séquoia).

Données autoécologiques[modifier | modifier le code]

C'est une essence de lumière et de climat tempéré à hiver doux qui aime des températures moyennes annuelles entre 8 et 14 °C. Il exige une forte pluviosité, à peu près 1 000 mm par an. Sensible à la neige lourde mais résistant au vent, le cryptomère aime les sols filtrants et profonds, faiblement acides et bien alimentés en eau. Il tolère les sols faiblement calcaires si ceux-ci ne sont pas trop secs ni superficiels. Il peut être introduit dans les feuillues mélangées (flore forestière française).

Aire de répartition[modifier | modifier le code]

En France, dans le cadre de la production de biomasse, le cryptomère du Japon est implanté dans les régions Occitanie (Aude), Normandie[8], Nouvelle-Aquitaine (dont Pyrénées-Atlantiques), Bretagne et sur l'île de La Réunion[9],[3].

Sylviculture[modifier | modifier le code]

Les plantations de cryptomère du Japon se font généralement avec des plants de 2 ans repiqués d'une hauteur moyenne de 40 cm ou par boutures de deux ans. La densité est comprise entre 1 100 et 1 300 tiges/ha. La plantation doit se faire sur un sol bien préparé et avec beaucoup de soin. La première éclaircie doit être réalisée vers 15-16 ans, dès que le peuplement atteint 10 à 12 mètres de haut, il y a éclaircie sélective avec un cloisonnement d'exploitation toutes les 4 lignes. La deuxième éclaircie a lieu approximativement 8 ans plus tard, lorsque le peuplement atteint 16 à 18 mètres de hauteur. La troisième éclaircie intervient 8 à 10 ans plus tard lorsque le peuplement fait 20 à 22 mètres. Cette éclaircie ramène le peuplement à une densité comprise entre 280 et 480 tiges/ha.

Principaux ennemis[modifier | modifier le code]

Globalement résistant aux maladies, il est sensible à l'armillaire sur sol mouilleux. On signale parfois des attaques d'araignée rouge sur les individus isolés (d'après le CRPF de Bretagne).

Symbolisme et utilisation[modifier | modifier le code]

Le sugi 杉 est l'arbre national du Japon, où il est communément planté autour des temples, avec de nombreux sujets impressionnants plantés il y a des siècles. Sargent (1894; la flore de la forêt au Japon) rapporte les circonstances d'un daimyo qui était trop pauvre pour donner une lanterne en pierre aux funérailles du shogun Ieyasu Tokugawa (1543-1616) à Nikko, mais demanda à la place à être autorisé à planter une allée de sugi. Les visiteurs dans l'avenir pourraient être protégés de la chaleur du soleil. L'offre fut acceptée ; l'avenue qui existe encore s'étend sur plus de 65 km.

Le sugi est également le bois local le plus répandu dans les constructions traditionnelles. Il est notamment utilisé pour les poteaux décoratifs dans les pièces de style japonais. Dans les montagnes du nord de Kyoto, il est connu comme kitayama sugi et cultivé pour former des poteaux parfaits, bien droits aux fibres rectilignes, de manière à répondre aux exigences des charpentiers japonais[10].

Le cryptomère du Japon est souvent décrit et figuré dans la littérature japonaise. Ainsi, par exemple, dans le roman Kyôto du prix Nobel Yasunari Kawabata, dont un des personnages habite et travaille dans une forêt de cryptomères située dans les montagnes du nord de Kyoto, là où est née la tradition du kitayama sugi.

Il est aussi planté abondamment en Corée et en Chine, et comme arbre ornemental dans les autres pays à climat tempéré (il craint le gel). L'une des formes les plus populaires est la version cultivée Elegans[8] qui a la particularité de garder son feuillage juvénile toute sa vie, au lieu de développer son feuillage adulte lorsqu'il atteint l'âge d'un an.

Le bois est parfumé, d'une couleur rose-rouge, léger mais fort, imputrescible et résistant à la décomposition[réf. nécessaire]. Il est souvent utilisé au Japon pour tous les types de construction ainsi qu'en panneaux d'intérieur, parfois traité selon la technique du Yakisugi.

En pot, notamment comme sapin de Noël ou en bonsaï, il a besoin de beaucoup d'humidité et jaunit s'il en manque ou si on le place en plein soleil.

Au Japon, l'arbre est responsable du kafunshō (花粉症?, maladie du pollen), une pollinose qui touchait en 2015 25 millions de personnes, dont 40 % des habitants de Tokyo. Il serait notamment présent sur 22 000 des 31 000 hectares de forêt que compte la métropole de Tokyo[11]. Les Japonais s'en protègent avec des masques chirurgicaux et des lunettes de protection[12].

Galerie

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Tropicos.org. Missouri Botanical Garden., consulté le 2 août 2020
  2. (en) The gymnosperm database : Arbre phylogénétique de la famille des Cupressaceae, sur conifers.org (consulté le 12 août 2016)
  3. a et b [PDF] Fiche de l'essence : Cryptoméria, page 1/3, publié le par l'unité de recherche BioWooEB, sur le site tropix.cirad.fr (consulté le 17 juillet 2019)
  4. (en) The gymnosperm database : Cryptomeria japonica, sur conifers.org (consulté le 12 août 2016)
  5. « Développement durable : l’ONF et la production de bois à La Réunion (2/5) », France Info,‎ (lire en ligne, consulté le )
  6. Eugène-Francis Debazac, Manuel des conifères, Gap, Éditions de l'École nationale des eaux et forêts, (réimpr. février 1991 (2e édition)), 173 p. (ISBN 2-85710-029-9, présentation en ligne) (consulté le 12 août 2016)
  7. Jean-Claude Rameau et Dominique Mansion, Gérard Dumé, Institut pour le Développement Forestier, Flore forestière française : Plaines et collines : guide écologique illustré, Paris, Forêt privée française, (réimpr. 2008), 1785 p. (ISBN 2-904740-16-3 et 9782904740169, présentation en ligne), p. 311 (consulté le 12 août 2016)
  8. a et b Un spécimen elegans est planté dans le jardin du château de Houlbec dans le département de l'Eure.
  9. [PDF] Bilan des introductions et perspectives d'utilisation du Cryptomère du Japon (Cryptomeria japonica), page 3/12, publié le sur le site bretagne-paysdelaloire.cnpf.fr (Réseaux d'expérimentations et études thématiques) (consulté le 17 juillet 2019)
  10. Benoît Jacquet, Teruaki Matsuzaki et Manuel Tardits, Le charpentier et l'architecte : une histoire de la construction en bois au Japon, Lausanne, Presses polytechniques et universitaires romandes, , 432 p. (ISBN 978-2-88915-289-6 et 2-88915-289-8, OCLC 1126674177, lire en ligne)
  11. KAFUNSHO – Deux fois plus de pollen attendu cette année sur Tokyo, Le Petit Journal, le lundi 16 février 2015.
  12. Richard Lloyd Parry, Japon : le vénérable cèdre et ses 20 millions de victimes, The Independent sur Courrier International, le 1er octobre 2003.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

Genre Cryptomeria[modifier | modifier le code]

Espèce Cryptomeria japonica[modifier | modifier le code]