Skinhead
Skinhead (des mots anglais skin « peau » et head « tête » : « cuir chevelu – à nu ») désigne à l'origine un jeune prolétaire britannique aux cheveux tondus ou non. Le phénomène skinhead est né au Royaume-Uni à la fin des années 1960. Il est apparenté à la mouvance modernist (les mods). Sa bande-son originale fut le early reggae, le ska et la soul américaine[1]. À la fois mode vestimentaire et musicale, cette première vague skinhead n'est rattachée à aucun mouvement politique tout en étant fortement influencée par ses origines ouvrières. En s'étendant au reste du monde dix ans plus tard, le phénomène skinhead a connu des évolutions importantes.
À l'origine les skinheads n'étaient en aucun cas des militants politiques ou syndicaux. Leurs points communs étaient leur origine sociale modeste, leur amour de la musique noire, en particulier jamaïcaine, et leur goût pour la bagarre. Cette mode rassemblait aussi bien des blancs que des noirs. C'est avec l'apparition du punk rock en 1977, et surtout du chômage qui frappe de plein fouet l'Europe à la fin des années 1970, que le mouvement skinhead se scinde, et qu'une partie des skinheads est séduite par les textes néonazis de la seconde formation du groupe britannique Skrewdriver, tandis que d'autres se tournent vers l'extrême gauche. Actuellement, les skinheads sont nombreux à travers le monde, mais profondément divisés, tant par leurs références musicales, que par leurs attaches idéologiques. Le clivage principal demeure l'opposition politique, entre l'extrême droite, au sein de laquelle figurent les néonazis d'une part, les apolitiques d'autre part, et les antiracistes et antinazis, ainsi que ceux qui ont fait le choix d'un engagement à l'extrême gauche par ailleurs. Il n'existe pas de mouvement global skinhead mais une mouvance hétérogène. Cette mouvance peut être définie et comprise comme un ensemble de références musicales et vestimentaires revendiquées en partie ou en totalité par des groupes d'individus aux comportements et aux idées très différents [2].
Description
Certains détails historiques semblent ancrer le phénomène skinhead dans une filiation plus ancienne bien que sujette à caution. Pendant la Première Révolution anglaise (1641-1649), les partisans du Parlement menés par Oliver Cromwell étaient appelés les round heads (têtes rondes) par leurs ennemis en raison de leur coupe de cheveux courte opposée à la longue chevelure des aristocrates partisans du roi Charles Ier d'Angleterre. La ressemblance avec les skinheads s'arrête là, car les partisans de Cromwell, même s'ils recrutaient beaucoup parmi les classes populaires, étaient avant tout des protestants puritains d'inspiration calviniste qui refusaient les prétentions absolutistes du roi et la possibilité d'un rétablissement du catholicisme en Angleterre.
Il y aurait également mention d'individus répondant à la définition et à l'appellation du skinhead dès le début du XXe siècle dans la presse du Royaume-Uni, le terme désignait de jeunes voyous issus des quartiers pauvres et aux cheveux courts, l'équivalent des « Apaches de la zone » en France. Un ouvrage édité en 1908 The Classic Slum de Robert Roberts décrit de manière troublante les corner kids, jeunes ouvriers violents vêtus de chaussures de sécurité, de chemises de travail et de bretelles, les cheveux tondus qui effraient la « bonne société » dans les quartiers malfamés du nord de l'Angleterre.
Néanmoins, dans son acception moderne claire et stricte, skinhead s'applique à un mouvement de jeunesse né à la fin des années 1960 au Royaume-Uni. Tout part de la rencontre des rude boys, jeunes noirs d'origine antillaise (surtout jamaïcaine), et des hard mods, jeunes blancs fans de scooters et de soul music. Dans son sens grand public le terme Skinhead signifie « un jeune aux cheveux rasés, vêtu de manière paramilitaire et exprimant avec violence idées racistes et néo nazis ». Pourtant la réalité des faits et leur histoire est bien plus complexe. En effet une partie des skinheads actuels dénie aux adeptes des thèses d’extrême droite le droit de s'appeler eux-mêmes skinheads et les qualifie de boneheads (littéralement « crânes d'os », ce qui familièrement signifie « crétins »).
À l'inverse, les skinheads d'extrême droite se considèrent comme les seuls skinheads authentiques dans la continuité du paki-bashing, d'un patriotisme de plus en plus exacerbé par rapport aux skins originaux. Ces skins nationalistes, voire néonazis, surnomment les skinheads antiracistes reds (littéralement « rouges»).
Ces ramifications, complexes et parfois incompréhensibles pour les non-initiés, sont celles que nous tenterons d'éclaircir ici.
Style vestimentaire
Certains prétendent que les premiers skinheads se sont tondus les cheveux pour se distinguer des hippies. Rien n'est plus faux puisque l'évolution des Mods vers les Skinheads est antérieure à la naissance des hippies britanniques. On raconte encore qu'il s'agit d'un moyen d'échapper à la police montée lors des émeutes ou des bagarres. Une raison de cette généralisation, en tout cas celle qui est avancée par les skins de l'époque dans les publications britanniques, est l'usage fréquent de cette coupe par les artistes reggae (Desmond Dekker en particulier) voire Soul, une fine raie taillée étant arborée sur le côté du crane tout comme leurs modèles. Par ailleurs beaucoup de ces jeunes sont ouvriers, ils portent les cheveux courts en raison des normes de sécurité, enfin il ne faut pas oublier que dans les familles issues de milieux populaires austères, porter les cheveux courts c'est faire partie de la société sérieuse et laborieuse. Ces explications nombreuses alimentent la mythologie skinhead : les skinheads ne veulent pas ressembler à des hippies, les skinheads sont issus de la classe ouvrière, les skinheads aiment se battre et détestent la police.
Le look skinhead est beaucoup plus standardisé par rapport à l'individualisme forcené et en permanente évolution des Mods originaux : cheveux courts (tondus ou coupés courts, mais rarement rasés à blanc à cette époque), favoris, bretelles étroites dont les pinces sont posées parallèlement, blue-jeans Levis, modèle 501 ou Sta press (pantalon cigarette à plis permanent) ou Wrangler coupé court ou pantalons du même type. L'objet le plus connu adopté par les skinheads sont les chaussures de marque Dr. Martens. S'il s'agit à la base de chaussures orthopédiques de sécurité, les modèles sans coques sont les plus prisés. En effet les « docs coquées » sont classés comme arme et très peu de skinheads originaux se risquent à en porter contrairement aux idées reçues. Les Doc Martens — alors que curieusement des marques autant portées à l'époque telles Astronauts, Solovair ou Grafters sont tombés dans l'oubli — sont devenues la marque symbolisant à elle seule la mouvance skinhead. Un des plus gros succès des charts Pop 1969 (une reprise reggae d'un tube de Nancy Sinatra en 1966) y fait explicitement référence, en effet le refrain du These boots are made for stomping des Anglo-Jamaicains Symarip précise : « ces bottes sont faites pour stomper et c'est tout ce qu'elle font », (le stomping étant une des danses des skinheads consistant à lever et reposer lourdement ses pieds en rythme).
Les Monkey boots sont essentiellement portés par les skinhead girls (parfois affublées du terme légèrement péjoratif de birds), Doc Marten's ne proposant à l'époque pas de petites tailles pour leurs chaussures montantes. Loafers, Bowling shoes, Clarkes desert boots sont autant de reliquats de la période Mod ou plus rarement des chaussures de sport de type baskets (à l'image des kicks ou samba de chez Adidas qui se populariseront lors du revival des années 1980).
La garde-robe est assortie de vêtements conçus pour le climat de la Grande-Bretagne et inspiré notamment du style Ivy league Américain (Harrington) ou Monkey Jacket (parfois appelé Mod Jacket). Le blouson Harrington — porté par les mods, puis les skinheads et enfin, dix ans plus tard les punks —, n'est pas une marque mais un type de veste légère en toile de coton unie doublée de tissus à carreaux écossais (tartan). Le nom vient du héros de la série télévisée américaine Peyton Place, très populaire au début des années 1960, Rodney Harrington, qui portait ce vêtement. D'une manière générale et indépendamment de l’allégeance à un de ces mouvements, le Harrington est une icône vestimentaire partagée par toutes les classes et toutes les générations de Britanniques dans les années 1960 et 70.
D'autres manteaux et pardessus sont couramment utilisés par les skins selon qu'ils soient au travail, à l'école ou en soirée. On peut citer le donkey jacket(manteau d'ouvrier inclus dans le paquetage des vêtements de travail, docker, mineur ou éboueur), enfin le Crombie (emprunt au style des jeunes Jamaïcains) est considéré comme le plus élégant. Marginalement avant 1979, certains blousons tels le bombers jacket sont parfois portés.
Dans les soirées, le costume de couleur noir ou en tissus Tonic (tissu changeant légèrement de couleur à la lumière), est porté pour danser ou frimer en soirée dans certains cercles skinheads les plus « pointilleux » et représente le « Saint Graal » de ces jeunes qui peuvent ainsi dépenser leurs premières paies en les faisant tailler sur mesure (bespoke).
D'autres accessoires viennent parfaire la panoplie : écharpe de football ou aux motifs Kashmer (Paysley), en soie et à pois (Polka dot). Les casquettes plates (en feutre, en tweed, unie ou à chevrons) sont parfois portée en concurrence avec le chapeau pork-pie ou trilby pour afficher son appartenance à cette tribu urbaine. Les jeunes filles skinheads portent des pulls mohair, des mini-jupes, des costumes longs à 4 ou 5 boutons, des mocassins type Penny Loafers. La coupe de cheveux typique des skinhead girls, dite chelsea, est à l'origine une coupe « à la garçonne » telle que celle arborée par le mannequin Twiggy (cheveux coupés court sur le sommet du crane avec une frange longue sur le devant et quelques mèches longues dans le cou et sur les côtés) elle raccourcira progressivement à la fin des années 1970 seulement à l'instar de la coupe de leurs homologues masculins, de même il faut attendre cette période pour les voir adopter progressivement un look de plus en plus similaire aux hommes.
Marqueur aussi fréquemment associé aux skinheads : le tatouage. Les Britanniques de milieux modestes les affectionnent et les skinheads en font une véritable institution. Il serait vain ici de décrire par des mots la vaste gamme des tatouages spécifiquement skinhead, mais on doit considérer qu'il faut attendre le revival de 1979 pour les voir popularisés.
Le look skinhead est donc un mélange d'héritage Mod et jamaïcain auquel se sont ajoutés des vêtements de travail et progressivement des références sportswear voire de surplus militaire. Ces adolescents et ces jeunes adultes s'approprient, comme ceux d'aujourd'hui, certaines marques qui deviennent ainsi emblématiques : Fred Perry, Lonsdale, Ben Sherman, Jaytex, Arnold Palmer, Loakes, Brutus ou encore Adidas.
Histoire
Des mods aux skinheads
Les skinheads sont issus de la vague modernist. Il faut donc rappeler brièvement qui sont les mods et de quelle manière ces skins vont devenir une entité autonome, puis totalement distincte des Mods.
Dans un premier temps, il s'agit de jeunes Londoniens de la petite classe moyenne, souvent issus de familles juives ou d'origine grecque à l'avant-garde de la mode, qui s'habillent de façon à la fois luxueuse et décontractée. Ils aiment les costumes italiens, se passionnent pour le modern jazz et les musiques noires américaines, les films français... Vers 1963-1964, cet underground élitiste commence à devenir un phénomène de masse, notamment en raison de l'explosion du swinging London : de nombreux adolescents deviennent mods. Plusieurs groupes se réclamant de cette tendance émergent (parfois grâce à l'influence de managers avisés). Le mod beat, adaptation locale du rythm'n'blues puis de la soul des artistes afro-américains apparait. Les artistes réunissant les plus grands publics sont les Who, Small Faces, The Action, The Artwoods... Un des hymnes Mod les plus célèbres est « My Generation » de The Who (le paradoxe est que ce dernier groupe n'est pas considéré comme strictement Mod. La fascination des Mods va en effet prioritairement vers la musique Afro-Américaine).
Les faits divers, probablement exagérés, rendent les mods célèbres. Les batailles rangées entre mods et rockers (autre mouvement de jeunesse, axé sur les motos, les blousons de cuir et le rock'n'roll) font les gros titres des tabloïds (presse à scandale populaire), et ce qui était un confidentiel courant underground devient alors un vrai phénomène de masse. L'image des bandes de mods en scooter et de rockers à moto se donnant rendez-vous à Brighton pour de mémorables bagarres devient une image de marque et attire de nombreux jeunes sans l'élitisme très recherché des précurseurs. Cette nouvelle vague de mods méprise les rockers, les jugeant arriérés et passéistes. Les rockers trouvent les mods maniérés et dégénérés. Ces considérations ne sont qu'un prétexte à la bagarre. le mouvement Mod n'échappe pas à la culture des gangs et au hooliganisme, d'autant plus que la coupe du monde de 1966 organisée en Angleterre voit ces jeunes, bénéficiant du pouvoir d'achat des trente glorieuses, aller seuls en bande dans les stades, sans leurs parents, comme c'était le cas auparavant.
Vers 1966-1967, la scène mods a vécu et il ne reste que des jeunes scooteristes à cheveux très courts. Cette tendance pratique le hooliganisme. Les vêtements de sport ou de travail pour traîner dans la rue (polo Fred Perry, chaussures Doc Martens noires ou rouges) commencent à remplacer les costumes sur mesure. Ils prennent le contre-pied de la mode branchée de l'époque (telle la vague psychédélique ou le mouvement hippie) et affichent et fièrement leurs origines ouvrières (working class). Ces hard mods se crispent sur l'identité modernist de la période 1963-1965 : musique noire américaine (r'n'b, Soul), style urbain et moderne, scooters Vespa et surtout Lambretta.
Vivant dans les mêmes banlieues et quartiers ouvriers, les hard mods fréquentent les rude boys, ou rudies, jeunes immigrés antillais, surtout jamaïcains avec qui ils partagent le goût pour la musique noire américaine (soul, rythm'n'blues) et jamaïcaine (ska puis un nouveau courant, le rocksteady). Vers 1968, ces hard mods et ces rudies se confondent, et en septembre 1969, les grands titres de "Fleet Street " (la grande rue londonienne où sont regroupés les principaux quotidiens du pays) baptisent ces jeunes de plus en plus nombreux du nom de "Skinheads" .
Apparition au Royaume-Uni
En 1969, un véritable raz-de-marée skinhead envahit le Royaume-Uni pour quelques très courts mois (il faut considérer que le gros de la vague skinhead en tant que tel s'abat outre-Manche en septembre 1969, pour être déjà dépassé par ses "séquelles" vers juin 1970). Cette "mode" skinhead explose en même temps que la musique reggae, qui est "le truc à la mode" de l'été 1969 au Royaume-Uni. De fait, pour nombre de jeunes cela ne se prolonge guère. Beaucoup n'ont été skinheads qu'un an ou deux, voire quelques mois. Cette contre-culture, en devenant soudain très à la mode, rapproche les jeunes des quartiers ouvriers, tant blancs que noirs. Les premiers skinheads écoutent de la soul, du rythm'n'blues (labels Stax, Motown ou encore Chess records), du mod beat, du ska, pourtant presque passé de mode en 1969 (tous les groupes fondateurs, comme les Skatalites), du rocksteady, mais surtout le son du moment : le reggae des artistes noirs venus des Caraïbes, tels Simaryp, Laurel Aitken, Desmond Dekker, les Upsetters, Jimmy Cliff, les Wailers de Bob Marley et Peter Tosh…
Le reggae et le rocksteady apparaissent alors comme le son skinhead par excellence. Pour les puristes, on parle de Boss Sound (probablement en référence à un titre des Symarip). Un terme sera d'ailleurs inventé au début des années 1980 pour qualifier le son de ces années 69-71 : le skinhead reggae (les personnes étrangères à la scène skinhead parlent de early Reggae). Dans la tradition moderniste, les skinheads aiment danser. Ils rivalisent de pas de danse compliqués pour frimer lors des discoes, l'équivalent des « boums » françaises, organisées dans les Maisons de jeunes ou de manière clandestine chez des particuliers contre une modeste participation ("Blues Parties"). Les chansons traitent de thèmes transposables à leur vie quotidienne : romances, sexe, danse, émeutes, problèmes de tous les jours, mais aussi de nombreux thèmes variés et souvent amusants, tels le western, le kung fu, les monstres en tout genre ou la conquête spatiale.
Les principales maisons de disques éditrices de ska et de reggae au Royaume-Uni sont Trojan Records, Pama Records et Torpedo Records. Le logo du label Trojan (un casque d'hoplite grec, comme on en portait lors de la guerre de Troie) a été repris par la suite pour désigner les skinheads traditionnels qui perpétuent l'esprit originel.
Les skinheads constituent donc à la fois une mode vestimentaire liée à des goûts musicaux, mais aussi une véritable sous-culture de jeunes avec ses comportements typiques (phénomènes de bandes, clanisme, frime, violence, esthétique, danse...) et son argot. On parle de bovver boys, littéralement "les jeunes mecs qui ne se laissent pas embrouiller", d' Aggro (agressivité, agression...) pour désigner la baston, de bashing (To bash signifie "casser la gueule"). Les leaders organisent des bandes ("crews", "fleets" ou "firms" selon l'argot urbain) où les plus élégants et respectés sont les boss skinheads (à l'instar des "Faces", Mods les plus considérés par leur pairs).
Ces gangs de jeunes qui ont régulièrement un comportement violent vont hisser le hooliganisme au rang de problème de société. Certains avancent que les skinheads sont issus du hooliganisme. C'est à la fois vrai et faux : les jeunes Britanniques des classes moyennes et populaires se comportent souvent en hooligans dans les stades de football, mais le hooliganisme est plus ancien que la mode skinhead (il date du début du XXe siècle) et les codes vestimentaires des hooligans varient beaucoup dans le temps (la plupart des hooligans actuels n'ont absolument pas le look skinhead).
L'abus d'alcool et de drogues diverses (surtout les amphétamines pour pouvoir danser toute la nuit, les skinheads étant peu portés sur les opiacés et les drogues psychédéliques), n'arrange rien à l'image des skinheads. La presse tabloïd peut dès lors stigmatiser les skinheads, comme elle l'avait fait auparavant pour les mods ou les rockers ; c'est la "nouvelle menace".
En 1969 et 1970, la mode skinhead est devenue si importante que certains artistes de rock l'adoptent afin de gonfler leur audience : c'est le cas du groupe Slade, pionnier du glam-rock, qui en 1969, influencé par l'opportunisme de son manager Chas Chandler, en adopte provisoirement les codes vestimentaires. Même s'il s'agit d'un calcul commercial, Slade peut être considéré comme un des premiers groupes skinhead composé de blancs. Fait moins connu, d'une manière plus underground et plus sincère, le groupe The Neat Change, qui compte Peter Frampton dans ses rangs, arbore ce look dès 1967, dix ans avant l'émergence du street-punk et de la oi!.
Cette première vague skinhead est donc avant tout une mode et un style musical et vestimentaire largement méconnu hors du Royaume-Uni. Il n'y a pas de skinheads à cette époque en Europe continentale ou en Amérique du Nord. Seuls certains adolescents émigrés à cette époque en famille en Australie (donnant naissance à la sous-culture sharpie) et au Canada exportent le style hors de Grande-Bretagne. Pour la plupart des journalistes britanniques, les skinheads ne sont qu'une nouvelle sorte de voyous incontrôlables (comme la France a ses « blousons noirs » à la même époque).
La mouvance skinhead n'est pas véritablement politisée pour plusieurs raisons. Les jeunes qui s'y reconnaissent sont très jeunes (14-15 ans), ne bénéficient pas du droit de vote et ont des préoccupations d'adolescents, les marqueurs idéologiques sont hérités de leur classe sociale mais si leur parents votent majoritairement pour le Labour (travailliste), l'époque n'est pas encore à une remise en cause réfléchie du système. Pareillement, s'il y a le même taux de fils d'immigrés chez les skinheads que dans la société Britannique, il est délicat de mettre en avant un antiracisme originel conscient, ou l'inverse (paki bashing) selon les critères de cette période. Deux éléments vont cependant marquer durablement l'image « éthique » des skinheads.
L'usage fréquent des couleurs nationales (Union Jack pour l'ensemble des Britanniques ou Saint Georges Cross pour les Anglais) par les skinheads de cette époque est interprété comme un glissement vers le nationalisme, voire le fascisme. Cette affirmation est très exagérée, même si les jeunes Britanniques font souvent preuve d'un patriotisme très cocardier, tel qu'on peut le rencontrer dans les tribunes des stades de football (jingoism, équivalent du mot français « chauvinisme »). Les mods arboraient auparavant les couleurs nationales pour le côté « pop art » et les punks feront de même par la suite, par désespoir social et ironie. Cette fierté d'appartenir à la nation britannique est même selon certains un élément unificateur pour les jeunes Britanniques blancs et les Antillais noirs venus de la Jamaïque ou de Sainte-Lucie (États du Commonwealth, dont les habitants sont assimilés aux Britanniques puisque sujets de la même reine).
Il est vrai qu'une partie des skinheads de cette époque (qu'ils soient noirs ou blancs) fait preuve de violence à l'encontre des jeunes Indiens et Pakistanais, dont le style vestimentaire et les goûts musicaux les rapprochent selon eux des hippies (alors que ce serait plutôt l'inverse). Ils organisent régulièrement de véritables ratonnades à leur encontre : le paki bashing. Cette violence, bien que largement non théorisée, n'empêche pas les ponts entre certains skinheads et Enoch Powell (homme politique conservateur, populiste et anti-immigrés).
À l'opposé de l'échiquier politique, une minorité de skins est proche des centrales syndicales de la gauche travailliste, particulièrement dans le nord de L'Angleterre. De même, les bagarres entre bandes de skins de différents quartiers prennent une signification toute différente dans le Belfast déchiré par le conflit entre protestants et catholiques (chaque camp ayant des adolescents suivant ce "mode de vie").
Vers 1970, la vague skinhead s'essouffle. De nouvelles tendances musicales apparaissent, comme le glam rock, et une évolution du reggae vers le mouvement rastafari éloigne les skins d'une musique qui leur « parle » moins, de par son mysticisme et sa revendication afro-identitaire. Lassés d'être interdits de stades et de se voir refuser l'entrée dans les clubs de par leur comportement discutable, les "rescapés" adoptent un style qui incorpore des éléments vestimentaires classiques à un look plus élégant (souvent inspiré des parrains de la pègre britanniques), les cheveux repoussent et on parle maintenant des suedeheads (crâne de velours) : les skins peuvent désormais se fondre dans la masse plus facilement.
Le mouvement skinhead originel n'a donc qu'une durée de vie de quelques mois, nombre de hard mods le laissant tomber par dégoût dès que celui-ci est identifié par le plus grand journal britannique comme une entité à part du mouvement mod, le 3 septembre 1969. La vague skinhead se prolonge encore pendant environ une année, puis elle se diluera les cinq années suivantes dans le hooliganisme, les scènes Northern Soul ou scooteriste...
Réapparition et politisation
Après 1971, l'esprit skinhead ne disparaît pas pour autant et survit à travers les suedeheads puis les smoothies (ces derniers portent les cheveux assez longs). Les deux adoptent le style bootboy lorsqu'ils descendent dans la rue : blue jean retroussé, Doc Marten's montantes, bretelles… C'est un style vestimentaire assez proche de celui arboré dans le film de Stanley Kubrick Orange mécanique. Coïncidence troublante, les jeunes décrits dans le roman d'Anthony Burgess, dont s'inspire le film, portent déjà cet uniforme plus de dix ans auparavant. L'œuvre est violente, mais le message est plus subtil qu'il n'y paraît : il s'agit en fait d'une critique des théories comportementalistes et une caricature des aspects les plus ridicules des sociétés modernes. Par la suite, ce film constituera une source d'inspiration pour de nombreux groupes punks et surtout skinheads, contribuant à forger l'image du jeune rebelle violent, incontrôlable mais cyniquement lucide.
Les mods ne font plus la une, mais restent nombreux, en particulier dans le nord de l'Angleterre où ils constituent les premiers bataillons de Soul Boys, à l'origine d'un fort engouement pour une scène musicale particulière, la Northern soul. Sans être un style musical précis, il s'agit de la redécouverte sur les pistes de danse de morceaux de soul rares et énergiques sortis de manière confidentielle par des labels existant en marge du « poids lourd » du genre, Motown.
Les codes musicaux changent. Chez les bootboys, le reggae, le rocksteady et le ska ont laissé la place au glam rock (cf. David Bowie, T-Rex, Slade ou The New York Dolls), au pub rock (cf. Dr. Feelgood et Elvis Costello) puis au punk-rock (genre musical inventé aux États-Unis par les Stooges, encore les New York Dolls ou les Ramones, nés en 1974 et célèbres dès 1976). Nombre des premiers punks britanniques (fin 1976-début 1977) ont le style bootboy, à commencer par les Clash (par ailleurs fans déclarés de reggae et de pub rock).
Cette explosion médiatique punk de 1977 redonne une certaine vigueur à d'autres tribus urbaines. Les skinheads et même les mods réapparaissent et se mêlent aux punks. Ils sont alors peu nombreux, noyés dans la masse punk qui constitue l'essentiel des « tribus urbaines » du moment. Le film Quadrophenia (1979) et le groupe The Jam participent à la relance du courant modernist et de certains de ses avatars (look, musique, scooters…).
L'hybridation des mods et des punks porte le nom de hard-mods, repris du terme déjà utilisé à la fin des années 1960 pour désigner les proto-skinheads. Après 1979 cependant, le punk-rock en voie d'extinction ou de récupération selon les groupes n'a plus la faveur des médias de masse, et le look punk d'une certaine frange se radicalise : les punks deviennent not dead (de l'expression punk's not dead – le punk n'est pas mort), en écho à une chanson du groupe Crass eng qui créé la polémique avec son titre provocateur Punk is Dead. C'est l'époque où apparaissent blousons en cuir cloutés avec slogans ou noms de groupes peints et crêtes iroquoises colorées. Certains sont surnommés à cette époque the posers (les poseurs) en raison de leurs prestations photographiques, généralement rémunérées, sur les cartes postales.
Le fossé s'accroît entre jeunes membres de groupes issus des écoles d'arts (tel Joe Strummer des Clash) et jeunes des quartiers défavorisés qui ont adhéré à l'explosion punk avant de voir celle-ci récupérée par le mainstream, l'industrie discographique et médiatique destinée à la grande masse. Beaucoup de punks de la première vague adoptent alors le style skinhead, ce qui passe à la fois comme un retour aux sources et une radicalisation. Le phénomène skinhead connaît une nouvelle jeunesse. Cette scission donne naissance à une forme de punk plus axée sur les préoccupations de la rue, les réalités sociales et économiques, et on parle alors de reality punk, puis de Oi ! music, c’est-à-dire une forme liée à la culture cockney (l'argot populaire), rude voire violente, et de là, à une forme radicale de punk-rock. L'expression « street-punk » sera utilisée à partir des années 1990 pour se dissocier de la connotation sulfureuse du terme Oi! music, mais il désigne le même sous-genre musical.
On retrouve dans cette musique la base du punk-rock, mais aussi l'influence des chants de supporters de football et les styles glam-rock ou pub rock des années précédentes. Les groupes punks 77 disaient rejeter les autres courants, les groupes Oi! assument au contraire leur amour de groupes tels que les Who, Mott the Hoople, Slade, Small Faces ou Animals, vus comme des fondateurs et des références essentialistes. La violence de la musique (ce n'est pas toujours le cas, certains groupes étant même réputés pour être des groupes « mélodiques ») et aussi la force qui se dégage des refrains repris en chœur peut évoquer les tribunes des stades ou encore les chants de marche militaires. Oi !, dans l'argot cockney, est la contraction de l'apostrophe : Hey you ! (Hey, toi !). Ce punk-rock "de la rue" désigne aussi bien la musique de groupes punks que skinheads ou issus du mélange des deux. Les deux groupes précurseurs de la oi ! sont Sham 69 et Slaughter and the Dogs, arrivent par la suite Menace, Cock Sparrer (qui existe depuis 1973, mais produisait alors un pub-rock teinté ensuite de punk-rock suite à un changement de line-up), puis viendront enfin la masse des groupes considérés comme tels, Cockney Rejects (les spécialistes de l'apostrophe Oi ! scandée, devenue cri de ralliement), The Business, The 4 Skins, Last Resort, The Oppressed, Blitz, Angelic Upstarts…
Paradoxalement, si le terme Oi! music est assimilé aux seuls skinheads, très peu des membres des groupes qui portent cette étiquette sont skinheads. Une partie est punk ou assimilée, et la plupart sont en fait des herberts, à savoir des jeunes issus de milieux modestes qui arborent un look minimaliste et passe-partout. Par exemple, les Sham 69, groupe emblématique de nombreux skinheads, n'ont jamais adopté un look skinhead (le chanteur porte les cheveux mi-longs, même s'il a lui-même été skinhead dans son adolescence). Les vidéos de la fin des années 1970 montrent souvent ce look "herbert" (mi-punk ou skinhead, mi-monsieur tout le monde). Les membres de Blitz ou de The Oppressed affichent quant à eux une apparence skinhead beaucoup plus standardisée (cheveux rasés ou tondus, chaussures montantes, polos Fredc Perry, bretelles...).
Cette époque connaît aussi un revival ska, rocksteady et skinhead reggae qui contribue à (re-)populariser le style skinhead avec des groupes comme Madness, The Specials, The Selecter de chez Two-Tone Records, ou encore TheBad Manners. Ces musiciens adoptent un style vestimentaire plutôt modernist ou hard mod (la Grande-Bretagne vit en effet à la même période un fort « revival Mod »), mais le public comme certains musiciens de ces groupes sont largement skinheads. De nombreux artistes jamaïcains tombés dans l'oubli refont alors surface (par exemple le chanteur Laurel Aitken, godfather of ska music, ou le tromboniste Rico Rodriguez). Cette version du ska et du reggae énergisée par le bouillonnement punk constitue avec le phénomène Oi! Music le fond sonore de cette deuxième vague skinhead.
Mais en 1979, contrairement à 1969, la quasi-totalité des skinheads sont blancs. C'est aussi à cette époque qu'apparaît l'habitude de se raser le crâne et que le slogan ACAB (All the Cops Are Bastards – Tous les flics sont des bâtards) fait son apparition, marquant une nette néo-radicalisation. À partir de cette année 1979, la mode skinhead dépasse le Royaume-Uni et touche l'Amérique du Nord et l'Europe de l’Ouest (en France, la première compilation skin-punk Chaos en France - Vol 1 sort en 1982 sur le lablel Chaos Records créé par des membres des groupes Komintern Sect et Reich Orgasm, d'autres compilations suivront).
C'est une contre-culture particulièrement vivace dans les années 1980, même si elle n'attire pas, loin s'en faut, la majorité des jeunes. En France, le street-punk des Camera silens, des Komintern Sect ou de La Souris Déglinguée attire un large public skinhead. Il y a aussi certains groupes un peu plus undergound comme Wunderbach (archétype du groupe skunk, c'est-à-dire skin/punk), R.A.S , L'Infanterie Sauvage, Swingo Porkies ou encore les très nationalistes (proches du groupuscule néo-fasciste l'Œuvre Française) Tolbiac's Toads de Paris. Les skinheads sont nombreux à évoluer en marge de la scène dite « alternative » des années 1980, même si Les Garçons Bouchers (en particulier le multi-instrumentiste François Hadji-Lazaro) ou François Thilloy dit Fanfan des Bérurier Noir s'affichent en skinheads. Ce dernier fondera d'ailleurs Molodoi, où cette influence est davantage marquée et assumée. Au Québec, il faut évoquer le groupe Banlieue Rouge. À New York et ailleurs aux États-Unis, les précurseurs de la musique hard-core sont généralement issus des skinheads. Agnostic Front, Sick Of It All, Madball, MOD, Black Flag, Anti Héroes… revendiquent encore aujourd'hui leurs liens avec cette mouvance. Récemment, le leader du groupe Agnostic Front, Roger Miret, a initié la compilation The real Oi!, où de nombreux groupes hard-core reprennent les classiques de la Oi! anglaise.
Cette seconde époque skinhead est aussi marquée par la politisation du mouvement. Sans que ce disque en soit la seule cause, Strength Thru Oi!, une compilation sortie en mai 1981, cause quelques controverses. Ce qui devait être la compilation phare de cette nouvelle vague punk surnommé Oi! : du punk pour les jeunes ouvriers est à la base d'un scandale sans précédent dans l'industrie discographique britannique. Les groupes participant ne sont pas d'extrême droite, même si certains groupes assument un discours très ambigu. Mais depuis plusieurs mois, les journalistes épinglent les actes xénophobes ou racistes de certains skinheads. Or le titre de la compilation est calqué sur strength thru joy (de l'allemand Kraft durch Freude, la force par la joie), organisme des loisirs nazis du Troisième Reich. Puis la presse révèle qu'une personne représentée sur la pochette, Nicky Crane est un néo-nazi emprisonné pour violences racistes, la production ne tentera même pas de gommer les tatouages gênants du modèle. Pour l'opinion publique britannique, il semble désormais évident que les skinheads sont des activistes d'extrême droite. Le 3 juillet 1981, un concert à la Hamborough Tavern de Southall, où jouent The Business, The 4-Skins, et The Last Resort, est incendié par des jeunes Asiatiques armés d'un nombre conséquent de cocktails molotov.
Il semble qu'il ait fallut quelques minutes de tensions avec un groupes de spectateurs dans l’après-midi pour que la soirée se transforme en ce qui restera une des plus chaudes émeutes de l'histoire de l'Angleterre (on comptera dans les jours qui suivront 14 morts dans l'extension de ces évènements). Par la suite, malgré un reportage télévisé à la BBC qui donne la parole à des skinheads opposés à l'extrême droite et tente de démontrer que les groupes Oi! concernés ne sont pas néonazis, la majorité des journalistes continuent d'associer la scène Oi! à l'extrême droite.
Surfant sur cette vague de tension, dans une stratégie d'occupation du champ socioculturel, l'extrême droite cherche à s'implanter. Déjà certains skinheads à la fin des années soixante étaient sensibles au discours de Enoch Powell. À la fin des années 1970, le National Front et le British Movement font des efforts conséquents pour séduire les jeunes punks et skinheads blancs touchés de plein fouet par les effet de la crise. Elle intègre dans ses rangs les plus jeunes d'entre eux, cet entrisme a pour conséquence d'emmener des jeunes sensibles au discours de droite à adopter le style de vie skinhead sans en avoir les références culturelles et historiques. De 1979 à 1980 il existe même un éphémère Punk Front qui travaille activement à la diffusion des du National Front parmi la scène punk. Le British National Party, né en 1982, suit la même trajectoire politique quelques années plus tard. Précisons qu'encore aujourd'hui, malgré une tentative de diluer son discours, ce parti refuse l'adhésion des Britanniques de couleur. Les provocations de quelques punks, comme Sid Vicious qui portait souvent un t-shirt à croix gammée(cela par pure provocation car il vomissait sur la croix gammée de son t-shirt lors de ses concert, voir le films des Sex Pistols"the great rock n roll swindle". Ian Stuart, chanteur du groupe punk Skrewdriver, est un exemple typique de cette dérive. Skrewdriver était un groupe glam-punk parfaitement apolitique (comme l'immense majorité des groupes punks à cette époque), mais particulièrement provocateur, né en 1976. Après un split de courte durée Ian Stuart (qui jusque là cachait son engagement auprès du National Front depuis 1975) reconstitue le groupe en 1979, mais sous une forme politisée ouvertement néonazie, puis il crée Blood and Honour après la scission du White Noise Club (scission causée, comme c'est souvent le cas, sur un différend d'ordre financier) au milieu des années 1980. C'est un mouvement nationaliste, raciste et en particulier antisémite. Ian Stuart ne cache plus sa fascination pour Hitler et apporte directement son soutien aux associations néonazies, aussi bien au Royaume-Uni qu'en Allemagne. Il est suivi par une partie des skinheads et certains punks qui adoptent un comportement de plus en plus violent et basculent vers l'extrême droite. Beaucoup sont des hooligans fascinés par la violence sous toutes ses formes. Ils hurlent Sieg Heil! ou Heil Hitler dans les concerts et déclenchent de fréquentes rixes avec les autres skinheads ou les punks dans les rues des métropoles européennes. Mais leurs principales cibles sont les noirs ou les immigrés. Le paki bashing reprend, motivé par le racisme. Ian Stuart Donaldson ne cache pas ses arrières pensées politiques lorsqu'il déclare à la télévision belge : « si nous attirons l'attention des jeunes lors de nos concerts alors ceux-ci pourront s'impliquer dans le parti nationaliste. »
Idéologiquement ces premiers skinheads et punks néonazis ratissent très large dans leurs influences: rescapés du nazisme britannique des années trente qui servent de mentors, antisémites de tout poil, xénophobes échaudés par l'immigration débordante, anticommunistes qui dénoncent les États soviétiques, hooligans ultra-violents, se mélangent pour ces punks et skinheads dépourvus de repères idéologiques qui aiment provoquer en arborant des insignes nazis. Le contexte extrêmement dur de la Grande-Bretagne thatcheriste précipite le phénomène.
Écœurés par une évolution de plus en plus xénophobes de cette contre-culture et fidèles à leurs musiques noires, les skinheads non-racistes se regroupent à partir de 1979-80 dans Skinheads Against the Nazis (SKAN, impulsé et contrôlé par le Socialist Worker's Party, trotskiste) groupe basé dans l'East End (pourtant bastion des skins d’extrême droite) qui aura un écho quasi nul. En parallèle certains individus ou bandes participeront activement à la campagne Rock against Racism initié par l'Antinazi League, ils constituent les premiers noyaux qui n'ont pas encore été nommés Redskins[3] (voir par ailleurs).
Enfin certaines Firms de skins (London Trojan Skins, Glasgow Spy Kids) tenteront de faire survivre, non sans mal, le style traditionnel. Faute de trouver un espace d'expression et une coordination suffisante au grand jour, ces derniers seront réduits à l'underground. Ils sont cependant les fondateurs du courant traditionnel qui essaimera jusqu'à nos jours.
Mais c'est aux États-Unis que va naître le premier réseau international de skins antiracistes avec l'acronyme SHARP (SkinHeads Against Racial Prejudice). Ce mouvement, fondé à New York en 1987, est lui-même issu d'un groupe de skinheads de Cincinnati appelé Baldies Against Racism (Les rasés contre le racisme) depuis 1985. La figure emblématique du mouvement SHARP est Roddy Moreno, leader du groupe de Oi ! gallois The Oppressed et importateur en 1988 du SHARP au Royaume-Uni. The Oppressed chantent Work together, hymne à la classe ouvrière de toutes les origines, et scandent leur hymne "Antifascist Oi !" dans tout le Royaume-Uni. Mais avant que les « pare-feux » ne se mettent à fonctionner, l'image des skinheads, et même de certains groupes emblématiques de la scène, a eu à pâtir de la dérive vers le néonazisme d'une partie d'entre eux. Ainsi les Sham 69 sont désespérés que de nombreux skinheads d'extrême droite fréquentent leurs concerts (la SHAM Army, cohorte de fans du groupe, étant même gangrenée par ceux-ci). Son chanteur Jimmy Pursey décide alors de remettre les pendules à l'heure en faisant jouer le groupe dans les festivals RAR (Rock Against Racism) ou, par exemple, contre l'apartheid en Afrique du Sud.
Ces festivals seront les points de ralliement des skinheads proches des mouvements antifascistes radicaux ou de l’extrême gauche. Les Sham 69 adaptent le chant révolutionnaire chilien El pueblo unido jamas sera vencido (Le peuple uni ne sera jamais vaincu) en If the kids are united they will never be defeated (Si les jeunes sont unis, ils ne seront jamais battus). Ces groupes réaffirment leur fierté d'appartenir à la classe ouvrière et de partager ses valeurs : fraternité, solidarité, luttes sociales… À la même époque les Dead Kennedys (groupe punk californien) dénoncent la dérive des punks et skinheads nazis dans le morceau Nazi punks Fuck off !.
Certains skinheads antiracistes sont engagés au sein du SWP, Socialist Worker's Party, organisation marxiste révolutionnaire trotskiste qui participe aux mouvements en réaction à la politique libérale du gouvernement Thatcher (remise en cause d'acquis sociaux, restructurations dans l'industrie et les mines…). Ils sont appelés reds (rouges) par les nationalistes qui les accusent de vouloir faire basculer l'Occident dans la sphère soviétique. Certains sont effectivement trotskistes, donc communistes, mais généralement anti-staliniens et opposés à l'URSS. Mais la plupart des skinheads antiracistes de cette époque au Royaume-Uni sont plutôt proches du travaillisme (l'aile gauche du Labour Party anime le red wedge, le "coin rouge", à destinations des jeunes punks et skinheads) et du syndicalisme réformiste. Ils ne constituent que des compagnons de route du SWP. Les véritables redskins, impliqués dans la gauche révolutionnaire, constituent d'ailleurs à l'origine un mouvement distinct des skinheads. Ils gravitent autour du groupe de soul-rock The Redskins, animé par des militants du SWP.
Les skinheads antiracistes considèrent les nationalistes et les néonazis comme de faux skinheads et les appellent boneheads (littéralement « crânes d'os », en fait l'équivalent anglais de « crétin »). Les skinheads d'extrême droite appellent leurs opposants reds (« rouges » ou « gauchos » en français). Ces termes, péjoratifs dans l'esprit de ceux qui les utilisent, ont toujours cours aujourd'hui.
Époque actuelle
Actuellement, le phénomène skinhead est profondément divisé et hétéroclite, le terme mouvance est celui qui correspond le mieux à une culture urbaine devenue plurielle. Le néophyte aura bien du mal à les distinguer, d'autant plus que les codes vestimentaires sont parfois similaires malgré des tendances politiques très différentes. Comme la culture skinhead est fondée sur un support musical, la lecture des chansons, l'imagerie des pochettes de disque, les labels de distribution, de production, les logos ou slogans affichés permettent souvent de localiser politiquement les artistes. Cependant il faut bien comprendre que l’affiliation ou non à un courant politique n'est qu'une des composantes de l'identité skinhead.
Il y a des points communs qui rassemblent (presque) tous les skinheads : ils sont généralement issus des classes sociales modestes ou moyennes et sont fiers de leurs origines sociales, ils font de la rue, des bars et des salles de concerts leur espace de sociabilité. Enfin, les skinheads sont également très actifs dans la rédaction et la diffusion de fanzines dédiés à la musique, au football et à d'autres cultures (comme le tatouage ou le scooterisme par exemple).
Trojans, Sussed et Trad skins
Parmi les branches de la mouvance skin qui n'ont pas forcément de coloration politique générale, on rencontre en particulier les Trojan skinheads ou skinheads traditionnels, perpétuant « l'esprit de 1969 » (en référence à l'ouvrage de Georges Marshall), fans de reggae, de soul, de rocksteady et de ska, ils circulent souvent en scooter et sont parfois assimilables à la scène mod, ils ne mêlent pas forcément musique et politique, même s'ils constituent le gros des bataillons du S.H.A.R.P. Le terme Trojan skin (ou Sussed skin) est à l'origine une précision utilisé dans la scène britannique pour se dissocier des groupes néonazis. Cette catégorie de skinheads met un point d'honneur à suivre de manière très précise (voire strict) le dress code et les valeurs des skins originaux.
Ils affichent un antiracisme sincère à travers leur amour pour les musiques d'origine Jamaïcaines ou afro-américaines et revendiquent leur appartenance à la classe ouvrière. Ils sont, au sens historique, les fidèles continuateurs de la première vague skinhead. Ces skins vont accompagner la renaissance du courant traditionaliste au niveau international. Collectionneurs passionnés d'une musique dont les 45 tours ne coûtent plus rien au début des années 1980 en Angleterre, le pèlerinage à Londres et le shopping qui en découle favorisent l'extension du phénomène au niveau international. Ils seront les « gardiens du temple » en rédigeant un nombre incroyable de publications, en organisant des soirées où en s'impliquant dans le support à la scène dite du second revival (scène ska qui fait suite au mouvement 2 Tone, avec des groupes tels que les 100 Men, Maroon Town, No Sports, Frelons, Braces et de nombreux autres).
Cette scène permettra la survie dans la mémoire collective et la redécouverte de vieilles stars tels Laurel Aitken ou Derrick Morgan.
Il faudra attendre le milieu des années 1990 pour voir un prolongement de cette scène se transformer en nouvelle vague de fond notamment grâce à des groupes tels les Toasters, les labels allemands Porkpie, Grover, Américain tel Moon Ska ou Stubborn ou Espagnols Liquidator et à la reprise en main instigué par le Sharp au niveau international. Cette effervescence finit par dépasser le strict milieu skin/ska et des groupes, dont les membres sont parfois issus de cette tribu, Slackers, Hepcat, Aggrolites ont un succès qui semble concerner le grand public.
En France, les groupes Ska fortement marqués à la fois par le son original et le mode de vie skinhead sont les Rudeboy System, les 8°6 Crew et les Branlarians.
Aujourd'hui la scène des skins d'obédience Trojan est essentiellement présente dans les sound-systems avec des villes où ces évènements drainent un public international (Barcelone, San Francisco, Hambourg pour ne citer que les capitale les plus importantes du genre).
Casuals, hooligans
Ces termes renvoient à la nébuleuse footballistique. Les hooligans sont des supporteurs qui utilisent la violence pour peser sur le résultat d'un match[réf. nécessaire]. Les hooligans habillés en skinheads représentent aujourd'hui une infime minorité, tant au Royaume-Uni que dans le reste du monde. Les casuals sont des hooligans bien habillés, très éloignés par leur allure vestimentaire du skinhead ou du « jeune de banlieue ». Leur style est un emprunt sans cesse renouvelé aux tendances les plus avant-gardistes du sportswear, ils s'inscrivent à leur manière dans une certaine filiation moderniste tout en tentant de se rendre inaperçu par les forces de police. L'assimilation parfois exagérée entre skins et « tribus » de casuals repose essentiellement sur le fait que nombre d'entre eux sont souvent d'anciens skins au début du mouvement.
Politique
Les skinheads politisés sont des skinheads affichant des opinions politiques voire s'investissant dans des organisations, politiques, syndicales ou associatifs. Ils évoluent généralement à la périphérie des différents courants de l'extrême gauche ou d'extrême droite. Dans ces groupes, le mode affinitaire est priorisé mais force est de constater que l'engagement réel dans des structures militantes dépend de la vitalité des scènes locales. Leur allégeance à un courant politique est visible au travers de leurs concerts, leurs fanzines et leur manière de s'afficher auprès du grand public. En dehors de similitudes vestimentaires et musicales (musique oi!), les skinheads d'extrême droite et d'extrême gauche s'opposent radicalement, parfois par la violence, aucune de ces tendances ne reconnaissant de légitimité à l'autre.
Extrême droite
Une partie des skinheads affiliés à l’extrême droite est initialement proche des partis électoralistes (particulièrement le British National Party Au Royaume-Uni).
En France, la seule tentative partiellement réussie d'organiser politiquement les skinheads d'extrême droite est l'œuvre de Serge Ayoub, à travers le groupuscule Jeunesses nationalistes révolutionnaires qui a entretenu des relations très complexes avec le Front national de Jean-Marie Le Pen, puis de Marine Le Pen. La tentative de Roger Holeindre d'intégrer directement des skinheads au Front national dans les années 1980 se solde par un échec partiel. Les skinheads et leur comportement violent et indiscipliné semblent inconciliables avec la stratégie de respectabilité d'une force politique en pleine expansion. Après le remplacement de Roger Holleindre par Bernard Courcelle comme responsable du service d'ordre du Front national, le Département protection sécurité (DPS), le Front national restructure son fonctionnement dans les années 1990 et met en place des critères plus stricts de sélection. De plus, la scission du Mouvement national républicain (MNR) de Bruno Mégret réduit d'autant la présence de radicaux dans ses rangs[2],[4]. Par la suite, la stratégie de normalisation du Front national mise en œuvre par Marine Le Pen à partir de 2011 conduit « les éléments les plus radicaux [à se tourner] vers des groupuscules plus en phase avec leurs idées. Et des groupes skinheads ont eux aussi recommencé à se développer, en Picardie, dans le Nord, en Alsace ou dans la région lyonnaise. Ce sont des bandes pas forcément politisées mais que Serge Ayoub, fondateur des JNR (Jeunesses nationalistes révolutionnaires), essaye de récupérer[5]. » Les rapports avec le Front national sont marqués par des visées stratégiques divergentes : « il s'agit une relation à sens unique : Marine Le Pen, comme son père d'ailleurs, cherche systématiquement à se démarquer de ces radicaux, mais eux estiment qu'ils doivent soutenir leur camp, avec en plus l'espoir d'infléchir le FN avec leurs idées, de le rappeler à ses fondamentaux[6]. »
Les skinheads nationalistes sont généralement homophobes et ouvertement nazis. On parle aussi de skinheads NS, les détracteurs les surnomment 'boneheads' (littéralement, crâne d'os), terme péjoratif utilisé par leurs opposants (souvent du bord opposé), ou de naziskins. Ils sont parfois très actifs et constituent généralement les troupes de choc de l’extrême droite la plus radicale. En France, dans la période 1985-89, ils représentaient la partie la plus visible des skinheads et probablement la plus importante numériquement. Les skinheads néonazis ont leur propre réseau pour se regrouper tels Blood and Honour, Hammerskins. D'autres groupes non spécifiquement skinheads comme Combat 18, un groupe terroriste Britannique organisé à partir du kop fasciste des Chelsea Headhunters ou le Ku Klux Klan américain les accueillent. Ces boneheads WP sont très visibles en Scandinavie, en Allemagne de l'Est (ex-RDA), dans certaines régions des États-Unis, ainsi qu’en Europe de l’Est, notamment en Pologne, Serbie ou surtout Russie, pays qui compte le plus grand nombre d'entre-eux (où ils défraient souvent la chronique par leurs nombreuses agressions contre des immigrés ou Russes orientaux, allant couramment jusqu'au meurtre).
L'apparence vestimentaire a évolué du look traditionnel avec des apports des années 1980 (jean passés à l'eau de Javel, treillis camouflage) parfois jusqu'à un look paramilitaire exacerbé, le tout accessoirisé de symboles du IIIe Reich et de groupes néofascistes (selon ce que permet les législations des différents pays où cette tendance est présente). Les skinheads néonazis se réclament de la classe ouvrière. Dans les années 1980, beaucoup d'entre eux se considéraient comme les fils spirituels des SA (Sections d'assaut, brigades de militants nazis des années 1930 en Allemagne, recrutés généralement dans la pègre). Les S.A. tenaient un discours à la fois nationaliste, raciste mais aussi social peu développé et étaient issus du monde ouvrier et de la petite bourgeoisie. Les membres d'organisations néonazis au début des années 1980 ont cherché à instrumentaliser en valorisant la conduite des skins les plus racistes par le biais d'une assimilation aux S.A.
En France on peut citer le Mouvement Nationaliste Révolutionnaire de Jean Gilles Malliarakis qui à l'instar de Roger Holleindre tentera de recruter dans les milieux skins. Un certain nombre de la bande « Nazi Klan » de Serge Elie Ayoub, deviennent les Jeunesses Nationalistes Révolutionnaires qui avant de prendre leur autonomie politique sont la branche jeunesse du mouvement.
Le lien qui unit les skinheads NS du monde entier est le racisme : ils pensent représenter l'élite de la race blanche européenne et se préparent à la « guerre des races ». En Amérique du Nord, le terme « suprémaciste » désigne ceux qui croient en la supériorité de la race blanche. À ce racisme et ces références historiques vient parfois s'ajouter l'imagerie ésotérique relevant du paganisme, du celtisme.
La musique des skinheads N.S est le R.A.C : Rock Against Communism (ou rock anticommuniste) paradoxalement le terme R.A.C n'est pas un style à proprement parler, il vient du nom des premiers festivals de rock NS de la première moitié des années 80. Ce qui constitue le fondement du R.A.C est le message politique généralement minimaliste. Les thèmes abordés sont les mots d'ordre et slogans de l’extrême droite dans sa version la plus radicale. La plupart des groupes R.A.C sont diffusés de façon discrète, par la vente par correspondance depuis des pays où la législation sur le racisme est la moins contraignante, ou lors des concerts. Les bénéfices générés par les productions sont parfois conséquents, le contrôle des revenus de la vente de disques et de merchandising pouvant être réinvestis dans les organisations politiques, donne parfois lieu à de véritables guerres internes (c'est particulièrement le cas depuis le décès accidentel de Ian Stuart Donaldson, vocaliste de Skrewdriver).
Beaucoup de « distros » (petites organisations indépendantes de distribution musicale) en France ou en Allemagne refusent de vendre des disques R.A.C (soit par antifascisme, soit pour éviter les ennuis). Ceux qui acceptent de distribuer cette musique, comme Bords de Seine, à Paris, sont alors identifiés par les skinheads antifascistes comme des agents sournois de l'extrême droite. Chez les skinheads le simple commerce n'est jamais neutre.
Parmi la multitude de groupes musicaux néonazis, souvent d'une durée de vie éphémère, on peut citer existant ou séparés à l'heure actuelle: Les Allemands Landser, les Français Légion 88, Bunker 84, Division Skinhead, les Australiens Fortress, les Polonais Konkwista 88, les Américains Bound For Glory ou encore les Suédois Pluton Svea. Le groupe de référence reste les Anglais de Skrewdriver (cf la première partie de l'article).
Si les premiers groupes s'affichant comme tels sont assimilables musicalement à la Oi! music britannique, le style a progressivement évolué vers le métal, le hardcore, etc.
Il existe, depuis quelques années, un rapprochement entre les skinheads white power et les milieux black metal païens aussi appelé NSBM, qui se réclament parfois eux aussi du national-socialisme, créant un style hybride qui commence à prendre une certaine ampleur, notamment en Europe de l’Est et aux États-Unis. Si l'on constate aussi une adhésion aux idées d'extrême droite dans une partie minoritaire des scènes industrielle et dark folk, la mouvance gothique est loin d'adhérer massivement à l'extrême droite. Il y a là encore une récupération partielle. Seul le R.A.C peut être considéré, par les idées qu'il véhicule, comme authentiquement d'extrême droite. Cependant nationalistes et néonazis fréquentent aussi d'autres univers musicaux qui ne leur sont pas réservés.
Extrême gauche
Redskins
À l'origine, il s'agit d'un groupe de soul-rock britannique The Redskins (fin 70's/première moitié 80's), dont plusieurs membres appartenaient au Socialist Workers Party et en étaient des permanents. Le nom vient d'une bande de skins de Sheffield proche du minuscule British Communist Party. Le groupe, qui tient un discours révolutionnaire sur fond de musique soul mâtinée de punk rock, passera la majorité de sa courte carrière à soutenir les luttes de résistance contre les dégâts sociaux et politiques du libéralisme de Margaret Thatcher. Notable signe d'indépendance et de radicalisme, ils refuseront de devenir animateurs du Red Wedge (le « coin rouge ») avec d'autres groupes et artistes (Style Council, Billy Bragg, Bronski Beat/The Communards…) jugeant celui-ci trop proche du Parti Travailliste. Leurs incessantes tournées leur permettent d'être le point de rencontre où se regroupent d'authentiques skinheads « rouges » qui commencent plus ou moins à s'organiser pour reprendre la rue aux fascistes ou défendre les concerts. Ces skinheads sont regroupés dans la Red Action Skinhead, fraction skinhead de la Red Action, un petit groupe politique trotskiste issu d'une scission du SWP sur la question de l'antifascisme dans la rue, ou issus de bandes à caractère particulier, comme celle des skinheads de Coventry. Enfin ils permettront de fédérer nombre de skins traditionnels déçus par le tournant raciste de la scène, d'ex-punks rejetant le folklore punk's not dead et des étudiants en rupture de fac en amenant au grand public leurs thèmes de prédilection : anti-apartheid, soutien aux mineurs en grève et antiracisme dans les quartiers populaires.
En France, les premiers redskins sont portés par l'émergence de la scène dite du rock alternatif, représentée par Bérurier Noir, Nuclear Device, Ludwig von 88, Babylon Fighters, LKDS, Laid Thénardier… et sont popularisés par les luttes étudiantes de l'hiver 86 contre les skinheads d'extrême droite. Ils affichent un look empruntant autant aux skinheads qu'aux tribus « rock » en général (punks, mods, psychobillys…).
Nombre de ces redskins ont aussi gravité autour du réseau SCALP (sections carrément anti-Le Pen ou section de contre-attaque à la peur) et en particulier du SCALP-REFLEX parisien. C'est le cas de l'une des premières bandes de « chasseurs de skins », les Red Warriors.
Au reflux de la vague alternative, à partir de 1989, certains se sont ensuite rapprochés du style skinhead originel en conservant parfois quelques particularismes hérités de cette première vague redskin : bomber retourné côté doublure orange, lacets rouges, insignes et patches communistes divers…
C'est dans le Sud de la France, à Toulouse, Marseille et Bordeaux que la jonction avec un mouvement skin plus traditionnel va s'opérer encore plus avant.
Mais tous les redskins ne se considèrent par pour autant comme skinheads. Si la majeure partie d'aujourd'hui peut être rattachée aux skinheads (musiques, style vestimentaire ou de vie…), il subsiste un courant qui n'en reste qu'à la marge ou, même, s'en éloigne parfois au niveau culturel (investis dans le rap…) et ne cultivant souvent avec les autres redskins qu'un lien social et politique.
RASH, une structuration des Red Skinheads au niveau global
Fondé à New York au tout-début des années 1990, le RASH (Red and Anarchist Skinheads), surtout européen et – depuis quelques années – latino-américain ou encore indonésien, regroupe d'anciens redskins de la première vague et de nouveaux skinheads engagés à l'extrême gauche, parfois issus de la mouvance SHARP, le premier groupe Rash étant issu du SHARP new-yorkais et de l'Anti Fascist Action. Ses membres considèrent leur appartenance au mouvement skinhead comme un complément de leur engagement militant, le skinhead devenant une forme d'idéal ouvriériste, mais l'inverse est parfois vrai : certains skinheads « sentimentalement » ou culturellement de gauche, mais sans engagement, deviennent militants par les fréquentations, la formation ou l'acquisition expérimentale au sein de bandes et groupes où sont présents des militants du RASH.
En France, le sigle Rash (deux haches croisées, visuel popularisé par le groupe indépendantiste basque Negu Gorriak) apparaîtra tout d'abord au Havre puis à Bordeaux autour des rédacteurs du bulletin Red'n'Skinhead (1995), puis du fanzine The Shaven Republic (ou RASH est décliné en Red Action Skin Head), pour ensuite s'implanter à Paris. La plupart des skinheads RASH en France gravitent principalement autour de la Confédération Nationale du Travail (anarcho-syndicaliste), la Ligue communiste révolutionnaire (ou de nos jours le NPA), le réseau No Pasaran (issu du SCALP) mais aussi la Fédération anarchiste, l'Union anarchiste / the Anarchist Black Cross, l'Organisation communiste libertaire et différents groupes trotskistes ou guévaristes, voire marginalement autonomes post-maoïstes…
Ce mouvement revendique un antiracisme viscéral et un antifascisme radical et joue parfois la surenchère vis-à-vis du SHARP, tantôt considéré comme un allié, tantôt comme un concurrent (mais pas comme un ennemi). Les thèmes de la lutte des classes, de l'urgence révolutionnaire ou de l'internationalisme sont récurrents. Un slogan des skinheads Rash est : « Pas de guerre entre les races, pas de paix entre les classes. »
Récemment, en Allemagne, au Royaume-Uni et en France, des skinheads Rash ou proches d'autres mouvements libertaires (tels l'anarchist black cross) ont été impliqués dans les black blocks. Ces derniers sont des môles de contestation musclés présents dans les manifestations anticapitalistes et altermondialistes. Ces black blocks s'en prennent aux forces de l'ordre mais aussi aux symboles du capitalisme comme les banques ou certaines chaînes de restauration rapide.
Parmi la scène skinhead d'extrême gauche, on peut citer les italiens de Banda Bassotti, Erode, Los Fastidios ou les groupes indépendantistes catalans marxisants Opcio K-95 et Pilseners, les madrilènes de kaos Urbano, Guerilla Oi! ou Non Servium, les basques de Suburban Rebels ou Mossin Nagant, les groupes libertaires parisiens Brigada Flores Magon et Ya Basta ! ou les groupes bordelais Los Foiros et Redweiler.
Nombre de groupes, sans être d'ailleurs idéologiquement marqués, soutiennent certaines initiatives du réseau Rash. On peut citer : les Allemands de Stage Bottles, les légendes britanniques Angelic Upstarts, le premier groupe Oi! Italien Nabat ou encore les très Sharp The Oppressed…
À noter que certains skinheads Sharp, Rash et de nombreux redskins s'affichent aussi comme indépendantistes, voire nationalistes. Ils se réclament des nationalismes de libération nationale en particulier au sein de minorités qui luttent pour leur reconnaissance ou leur indépendance : Bretons, Basques, Catalans, Québécois, Occitans… Ce nationalisme est généralement inspiré des groupes marxisants et internationalistes des années 60 et 70, il n'y à donc pas d'équivoque possible.
Skinheads et apolitisme
Partout dans le monde où il y a une scène skinhead, nombreux sont ceux et celles qui refusent et rejettent à des degrés divers toute affiliation politique à un parti ou une tendance à travers leur identité skinhead. Ils constituent une part numériquement très importante du monde skinhead. Toutefois, cela ne signifie pas que ces skinheads sont dépourvus de conscience politique. En réalité, cette tendance se distingue par un refus de mélanger musique et culture skinhead avec quelconque engagement. Il est probable que la plupart d'entre-eux votent, participent à des débats de société, s'engagent par ailleurs. Mais ils ne l'affichent pas sur leurs vêtements. Pour certains, le militantisme politique au sein de la scène skinhead est un poison et le mouvement skinhead doit redevenir aussi apolitique que les scènes mod, psycho, scooteriste ou rocker. Cette mouvance apolitique n'est ni structurée ni organisée, mais cette tendance qui met paradoxalement son apolitisme comme identité politique fédératrice au centre de ses préoccupations est présente internationalement et se trouve parfois prise dans les affrontements de factions politisées antagonistes.
Dans les scènes marqués à gauche de l'échiquier politique, les apolitiques sont parfois considérés comme des crypto-fascistes ou des spécialistes du retournement de veste. Il est vrai que certains skinheads français des années 1980 ont commencé par être apolitiques avant de devenir néonazis et que des passerelles existent entre « apos » et skins plus marqués à droite, mais aussi à gauche. On peut évoquer ici le très controversé chanteur du groupe L'Infanterie Sauvage, eurasien qui finira chanteur dans un groupe néonazi, mais il y eut aussi des parcours inverses. Surtout, les skinheads apolitiques se sentent parfois aujourd'hui pris entre « le marteau et l'enclume » de camps à l'antagonisme irréductible. Il est vrai que les tensions entre différentes tendances de skins rendent la situation pour ces skinheads plus que délicate, conduisant parfois ces derniers à prendre position d'une manière qui est justement politique. Lorsque le groupe français Œil Pour Œil, autoproclamé apolitique, choisit d'intituler son album RAC - Rock Anti Caillera, il provoqua un mini scandale. De fait, un certain nombre de thèmes abordés dans ses chansons le sont d'un manière idéologiquement proche de l’extrême droite identitaire. Le sigle RAC désigne en fait la musique des skinheads néonazis et signifie rock against communism (rock anticommuniste). D'autant plus que de nombreux skinheads d'extrême droite avaient fait de la chasse aux délinquants et dealers (« la caillera », c'est-à-dire « la racaille ») un de leurs fantasme de prédilection.
D'une manière générale, on trouve des skins « apolitiques » gravitant dans tous les courants de la scène skin.
Skinheads Against Racial Prejudice
À l'origine, il s'agit d'un regroupement de skins refusant l'embrigadement par l'extrême droite au début des années 1980 aux États-Unis. Le mouvement SHARP américain peut être considéré comme initialement apolitique, bien que marqué par un patriotisme certain. Les fondateurs du SHARP en 1987, Marcus Pochelo et Bruce Kreitman, sont basés à New-York et sont principalement liés à la base du NYC hardcore et non à la scène traditionnelle. Ils refusent l'affiliation à une tendance politique précise et affichent un patriotisme US farouchement antiraciste. La réalité est différente en Europe où ils sont globalement liés aux groupes antifascistes radicaux issus des milieux autonomes et alternatifs.
Le mouvement SHARP (Skin Heads Against Racial Prejudice[3], en français : « Skinheads contre les préjugés raciaux ») désigne donc de façon générale un mouvement de skinheads issus des différentes tendances musicales (reggae, Oi !, hardcore Punk, ska) qui se positionnent contre le racisme et le fascisme. Le SHARP est une tendance active dans les groupes luttant contre l’extrême droite. Si le SHARP a très fortement contribué au développement de la scène skinhead en étant un de ses courants dominants au début des années 1990, il s'agit davantage de nos jours d'un positionnement individuel que d'un réel réseau actif organisé tel qu'il avait commencé à l'être dans la seconde moitié de la décennie.
Tendances et courants parallèles à la mouvance skinhead
Skinheads chrétiens
Le positionnement des skinheads chrétiens est ouvertement antiraciste et antinazi (mais pour autant, il existe aussi des boneheads chrétiens). Présents essentiellement en Amérique du Nord (Canada et États-Unis) où la scène rock chrétienne est importante, les skinheads chrétiens font rarement parler d'eux en Europe[réf. nécessaire].
Aux États-Unis, ils sont souvent issus de la mouvance évangélique progressiste plutôt que du catholicisme ou de l'évangélisme conservateur. Ils sont cependant beaucoup plus présents dans les milieux ska/rocksteady que dans le milieu Oi!. Parmi les groupes skins chrétiens, on peut citer le groupe de ska/rocksteady américain The Israelites, le groupe de punk hardcore américain The Deal, le groupe street-punk américain aux sonorités écossaises Flatfoot 56 par contre il s'est avéré que le groupe Oi! allemand Jesus Skins qui fut un temps le fer de lance de cet épiphénomène ultra marginal était en fait un canular orchestré par des anarchopunks et des skins hambourgeois.
Skins homosexuels et gayskins
Il convient de distinguer l'existence d'individus gays et lesbiens au sein de la mouvance skinhead et la sous-culture gayskin. Les premiers sont investis dans la scène skin au-delà des questions d'identité sexuelle. Ils sont cependant parfois regroupés au sein de collectifs antihomophobes et antiracistes dans la mouvance SHARP américaine (collectif Brotherhood), espagnol (collectif Joligan) ou Rash (notamment en Allemagne). Il s'agit de personnes partageant une culture identique à leurs homologues hétérosexuels mais homosexuels affirmés et revendiqués comme tels, ils ne constituent pas un mouvement ou une tendance en tant que telle.
Les seconds sont plus déroutants à cerner. La mode skinhead est ostensiblement réinvestie par certains homosexuels (dans sa version la plus "militariste"), appelés gayskins, cette tendance n'a à peu près aucun lien avec les skins au sens strict, elle n'en partage que quelques éléments vestimentaires fétichisés à l’extrême[réf. nécessaire]. Dans la pornographie homosexuelle masculine, le skinhead est un avatar du working class boy (jeune ouvrier), généralement teinté de sadomasochisme. L'avatar fantasmé de cette tendance est Nicky Crane. Ancien membre de la sécurité du groupe néonazi Skrewdriver il tenta d'organiser les Gay Aryan Skinheads (skinheads aryens gays), qui se référaient aux S.A et aux mœurs « grecs antiques » de ces derniers. Ce dernier mourra du S.I.D.A après avoir renié ses engagements politiques. Très connu dans le milieu homosexuel Londonien pour son image de dur, mort prématurément, Nicky Crane est devenu une figure symbolique de la mouvance Gayskin indépendamment de ses convictions.
Plus marginalement encore des groupuscules de skinheads néonazis homosexuels existeraient. Ces skinheads homosexuels nazis tentent surtout, à travers leurs contradictions, de faire exister une identité marginale en soi autant que dans leur propre espace socio-politique.[réf. souhaitée]
Gabbers
La culture gabber, sous-culture imprégnée de musique techno hardcore de genre gabber, s'est développée aux Pays-Bas dans les années 1990. Le style vestimentaire de ses membres, les gabbers, a souvent été assimilée à tort par les médias à celui de la scène skinhead.
Politiquement, la majorité des gabbers affiche des convictions antiracistes et antifascistes — en témoigne le slogan de Mokum Records, United Gabbers Against Racism and Fascism —, un part relativement restreinte de ses auditeurs évolue dans la sphère d'influence de l'extrême droite, part estimée à 5 %[7]. Néanmoins, un certain nombre de groupes politisés tentent de s'attirer les bonnes grâces de ces jeunes, souvent issus des milieux populaires, particulièrement les groupes nationalistes et identitaires à la recherche de jeunes militants dans ces milieux[8]. Une minorité de membres de ce courant culturel, politisés, ont été désignés sous le nom de « gabba-skins »[8], appellation pas toujours revendiquée par ces personnes. Le look des gabbers — crâne rasé et musique violente — a fait le jeu d'amalgames, apparentant faussement le mouvement gabber au mouvement skinhead, simplement dans sa version la plus « streetwear », et pour certains des éléments vestimentaires identifiant les groupes hooligans (marques de sports Lonsdale, Fred Perry…) les faisant nommer, pour la frange la plus violente, les « Lonsdalers »[7]. Cependant, la consommation fréquente de stupéfiants par les gabbers, les bagarres et la violence des thèmes abordés par la musique qu'ils écoutent ont fait des gabbers une cible toute choisie des politiques, stigmatisant l'ensemble de la scène gabber du fait de ces débordements, que toutefois nul organisateur d'événement gabber ne nie[9].
Autre élément identitaire, la minorité gabba-skin pratique le hakken tout comme les autres gabbers ; ce style de danse, proche du style jumpstyle quoique plus rapide et syncopé, est parfois considéré comme une sorte de marche crypto-fasciste voire nazie[10]. Toutefois, les danseurs clament haut et fort qu'il ne s'agit que d'une danse inoffensive à l'image du style musical, visant à « uit je dak gaan », « devenir dingue »[11].
Géographiquement, cette mouvance gabba-skin est peu présente en France (dans le Nord essentiellement), au Royaume-Uni, au Canada, en Suisse et aux États-Unis. En revanche elle, est plus importante aux Pays-Bas, en Belgique et en Allemagne. Globalement, les liens de cette scène avec les différentes composantes de la scène skin sont très faibles, pour ne pas dire inexistants.
Enfin, les gabbers revendiquent souvent la consommation de drogues comme un marqueur identitaire. S'il y a un rapprochement à faire sur le caractère antiraciste des causes de ces deux sous cultures — les mots d'ordre « Skinheads Against Racial Prejudice » et « United Gabbers Against Racism and Fascism » sont très proches — il y a disjonction nette entre gabbers et skinheads[12].
Notes et références
- (en) Trojan Records, Trojan Mod Reggae Box Set liner notes, Londres
- Guy Hermier, Bernard Grasset, Rapport fait au nom de la Commission d'enquête sur les agissements, l'organisation, le fonctionnement, les objectifs du groupement de fait dit "Département Protection Sécurité" et les soutiens dont il bénéficierait., Assemblée nationale, 1999, 783 p. Lire en ligne.
- « Les skinheads pourquoi faut-il se méfier? », sur Jeunes Journalistes, (consulté le )
- Lire la mise au point : Valéry Rasplus, « De quoi le mot “skinhead” est-il le nom ? », Les Inrockuptibles, 18 septembre 2013.
- Stéphane François, « Meurtre de Clément Méric : “On assiste à une radicalisation croissante” », sur metronews.fr, .
Ce constat est partagé par Nicolas Lebourg, voir à ce propos « Vive émotion et forte mobilisation après la mort d’un étudiant », la-croix.com, 6 juin 2013, ainsi que Nicolas Lebourg, « Mariage pour tous : pourquoi la discrétion de Marine Le Pen favorise les radicaux », leplus.nouvelobs.com, 21 avril 2013 - Stéphane François, propos cité dans « Agression de Clément Méric : qui sont les JNR ? », lexpress.fr, 6 juin 2013.
- [PDF] (nl) Van Donselaar Jaap et Rodrigues Peter R. (Dir.), Monitor Racisme & Extremisme : Zevende rapportage, La Haye, Fondation Anne-Frank / Universiteit Leiden, , 256 p. (ISBN 978-90-8667-960-7, lire en ligne)
- Stéphane François, « Les skins de Chauny et la scène musicale gabber : entretien avec Stéphane François », sur Blog Droites extrêmes, sur le site du Monde ([1]), Le Monde, (consulté le )
- (en) « 01.04.2000: Thunderdome 2000 (cancelled) », sur www.thunderdome.com, ID&T (consulté le Date invalide (12 juin2013))
- « Débat sur la danse hakken », sur Forum M6 (consulté le )
- (nl) Elger van der Wel, « End of an era: nog één keer Thunderdome », sur nos.nl, (consulté le )
- (ru) no justice, « Древнее интервью с MISTER X », sur belsharp.blogspot.fr, (consulté le ) : « Я считаю электронную музыку средством пропаганды искусственных наркотиков типа LSD или extasy, без которых человеку просто невозможно выдержать всеночную техно-пати ». Interview du groupe street punk biélorusse Mister X.
Bibliographie
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
- Série photographique sur les mods, punks, skinheads : Tribes Of England - Our culture
- Valéry Rasplus, "Skinheads", Dictionnaire historique et critique du racisme, Presses universitaires de France, 2013
- (eng) Georges Marshall: Spirit of 69: a skinhead bible, ST publishing
- (eng) Georges Marshall: Skinhead Nation, ST publishing
- (eng) Georges Marshall: 2 Tone story, ST publishing
- (eng) Nick Knight: "skinhead" Omnibus press, 1982, version française aux éditions Camion Blanc, 2013
- Mods, une Anthologie - Speed, Vespas & Rythm'n'Blues par Paolo Hewitt - 2010 - Rivages Rouges
- John King (roman), Skinheads, éditions Au Diable Vauvert, version française sortie le 31 mai 2012, 388 p.( ISBN 2846264023)
- John King (roman), Football Factory, Éditions de l'Olivier (ISBN 978-2-87929-464-3)
- Daniel Hubert et Yves Claudé, Les skinheads et l'extrême droite, VLB éditeur, Montréal, 1991, 134 p. (ISBN 978-2-89005-439-4)
- Benoît Marin-Curtoud, Planète skin : les groupuscules néo-nazis face à leurs crimes, L'Harmattan, 2000, 204 p. (ISBN 978-2-7475-0058-6)
- Collectif, Dance Ska la book, Association Banana Juice, 2011, 192 p.
- Le Mouvement skinhead et l'extrême droite, Ligue des droit[s] et libertés, Montréal (Québec), 1989, 111 p. (ISBN 978-2-920549-92-0)
- (de) Klaus Farin et Eberhard Seidel, Skinheads, C.H. Beck, Munich, 2002 (5e éd.), 245 p. (ISBN 978-3-406-47583-2)
- (de) White noise : Rechts-Rock, Skinhead-Musik, Blood & Honour - Einblicke in die internationale Neonazi-Musik-Szene, Searchlight Magazine Ltd. (Londres), Unrast, Hambourg, Münster, 2001, 167 p. (ISBN 978-3-89771-807-4)
- (en) Mark S. Hamm, American skinheads : the criminology and control of hate crime, Praeger, Westport, Conn., Londres, 1993, 243 p. (ISBN 978-0-275-94355-4)
- KROUBO DAGNINI, Jérémie, 2008, Les origines du reggae: retour aux sources. Mento, ska, rocksteady, early reggae, L'Harmattan, coll. Univers musical, 264 p (ISBN 978-2-296-06252-8).
- (en) Terry Rawlings, Mod: A Very British Phenomenon - Paperback ed., 2001.
- (en) Marc Griffiths et Dave "Oldwah" Sandford, Boss Sounds 2, réédition augmentée, à compte d'auteur de l'ouvrage Boss Sounds sorti en 1991 chez S.T.Publishing 2013, 286 p.
- (en) Garry Bushell, Hoolies: True Stories of Britain's Biggest Street Battles, John Blake Publishing Ltd, 289 p, 2010 (ISBN 1844549070 et 978-1844549078)
- (en) Garry Bushell, Dance Craze: Rude Boys on the Road, Countdown Books, 136 p, 2011 (ISBN 0957098618 et 978-0957098619)
- (en) Garry Bushell et Jeff Turner, Cockney Reject, John Blake Publishing Ltd, 288p, 2010
- (en) Murray Healy, Gay Skins: Class, Masculinity and Queer Appropriation (Sexual Politics), Continuum International Publishing,286 p, 25 juillet 1996
- (it) Riccardo Pedrini, Skinhead: Lo stile della strada, Castelvecchi, 1996 (ISBN 8886232926, 9788886232920)
Vidéographie
- Yves Claude, Skinheads : à la droite de l'extrême droite, 10 septembre 2012, Canal+, Spécial investigation, 52 min, lire en ligne et voir en ligne.
Liens externes
- « Contre-culture skinhead », sur wind.prohosting.com