Simone Weber

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Simone Weber
Meurtrière
Image illustrative de l’article Simone Weber
Simone Weber en 2006.
Information
Naissance
Ancerville (Meuse)
Décès (à 94 ans)
Cannes (Alpes-Maritimes)
Surnom La diabolique de Nancy
Condamnation
Sentence 20 ans de réclusion criminelle
Actions criminelles Meurtre
Victimes 1 reconnue, 2 supposées
Période -
Pays Drapeau de la France France
Régions Lorraine
Ville Maxéville
Arrestation le

Simone Weber, née le à Ancerville (Meuse) et morte le à Cannes, est une femme française condamnée le à une peine de vingt ans de réclusion pour le meurtre de son ancien amant Bernard Hettier, disparu près de six ans auparavant. Libérée le , elle a toujours nié être l'auteur de ce meurtre malgré un faisceau d'indices convergents.

L'affaire Simone Weber a fait l'objet d'une grande couverture médiatique en France : elle a suscité de très nombreux articles dans les journaux, plusieurs livres et des émissions de télévision.

Biographie[modifier | modifier le code]

Famille[modifier | modifier le code]

Simone Weber naît le , d'un père mécanicien et d'une mère ouvrière. Ses parents se séparent alors qu'elle a quatre ans. Deux enfants sont gardés par la mère malade. Elle et sa sœur Madeleine (1933-2016) restent avec leur père.

Mariages[modifier | modifier le code]

Sans diplôme, les deux sœurs quittent le domicile familial pour épouser les frères Thuot. Simone a cinq enfants, trois filles et deux garçons. Elle met à la porte son époux alcoolique et fait des petits travaux pour nourrir ses enfants. Deux de ses enfants meurent assez jeunes, ce qui la fait sombrer dans la mythomanie et la paranoïa.

En 1977, elle rencontre Marcel Fixard, qui l'engage comme dame de compagnie, à la suite d'une petite annonce parue au printemps dans la presse, indiquant qu'il recherche une femme de service. Criblée de dettes, Simone Weber répond à l'annonce alors qu'elle ne correspond pas au profil recherché (elle se fait passer pour une divorcée sans enfant, professeur de philosophie à la retraite), et obtient le poste.

Elle « épouse » Marcel Fixard en organisant un faux mariage[1].

L'affaire[modifier | modifier le code]

Disparition de Bernard Hettier[modifier | modifier le code]

Le , Patricia Hettier fait publier dans L'Est républicain, à la une de son édition, un avis de recherche dans l'intérêt des familles au sujet de son père Bernard Hettier. Ce contremaître dans une usine chimique, âgé de 54 ans et divorcé d’un second mariage, a disparu alors depuis deux semaines[2]. La police est rapidement sur la piste d'une ex-maîtresse, Simone Weber, des voisins témoignant avoir vu le (c'est-à-dire le dernier jour où il a été vu en vie) Weber en train de guetter au volant de sa voiture Hettier à son domicile à Maxéville, et le menacer de mort, un fusil à la main. Leur liaison avait débuté en , lorsqu'Hettier était venu tondre le gazon dans le jardin de cette veuve. Il avait rompu au bout d'un an, lassé de son amante jalouse et possessive, et se disait persécuté par elle depuis[3].

Plusieurs autres indices orientent l'enquête vers Simone Weber : un arrêt maladie prétendument envoyé par Bernard Hettier à son employeur, quelques jours après la publication de L'Est républicain, se révèle avoir été prescrit en réalité à Pascal Lamoureux, marié à Brigitte, la fille de Simone Weber[4]. Les enquêteurs retrouvent chez elle une quarantaine de timbres en caoutchouc permettant d'établir de faux documents médicaux[5].

Des témoins, les Haag, déclarent l'avoir vue le descendre de chez elle dix-sept sacs poubelle, après qu'elle a fait dans la nuit un vacarme considérable, « comme si elle passait l'aspirateur sur place[5]. » Or, la veille de la disparition de Bernard Hettier, Simone Weber avait loué une meuleuse à béton à six mille tours par minute (destinée selon elle à couper les murets des jardinets de fleurs), qu'on lui aurait volée. La meuleuse est retrouvée dans le coffre de sa voiture, avec des traces de sang et un morceau de chair encore accroché à un disque[6].

Le véhicule de Bernard Hettier a également disparu. Des conversations téléphoniques entre Simone Weber et sa sœur Madeleine, qui demeure sur la côte d'Azur, permettent aux enquêteurs de comprendre que les deux femmes emploient un code pour en parler, l'appelant « Bernadette »[7]. Les policiers commencent à avoir des doutes quand, dans les conversations, elles échangent de prétendus résultats du loto avec des numéros supérieurs à quarante-neuf. Rapidement les enquêteurs comprennent qu'il s'agit de numéros de cabines téléphoniques destinées à passer des communications dont elles souhaitent qu'elles ne soient pas écoutées, avec l'heure de l'appel. Le juge d'instruction Gilbert Thiel, qui ordonne une soixantaine d'expertises au cours de l'enquête, est désigné par les sœurs comme « le shérif ».

Pendant cette instruction, Simone demande à sa sœur de faire disparaître des pièces à conviction (chéquiers au nom d'Hettier, blocs d'ordonnance volés chez les médecins, passeport, autres documents) et cette dernière s'exécute. Au cours d'une perquisition menée chez Madeleine Weber à Cannes, les policiers saisissent la carte grise et les papiers d'assurance de la Renault 9 de Bernard Hettier. Ils découvrent également le contrat de location d'un box en face du domicile de Madeleine. Ce garage abrite la Renault 9 blanche d'Hettier. Le , à Poincy, dans un bras mort de la Marne, un pêcheur retrouve un tronc humain (sans membres ni tête), enveloppé dans un plastique à l'intérieur d'une valise lestée d'un parpaing. Le corps ne peut être formellement identifié mais des indices (âge, groupe sanguin, valise identifiée par Patricia Hettier comme appartenant à son père, parpaing contenant de la terre identique à celle du jardin de la maison de Rosières-aux-Salines et des gouttes de peinture bleu ciel de composition identique à celle utilisée chez elle par Simone Weber) suggèrent qu'il s'agit de Bernard Hettier[8]. Le , Thiel fait arrêter les deux sœurs. Il inculpe Madeleine Weber pour recel de preuves, obstruction à l'action de la justice, et destruction d'éléments de preuve dans le cadre d'une affaire criminelle.

L'instruction de l'affaire est très longue, le juge Thiel cherchant à explorer au maximum toutes les pistes avant de conclure qu'une seule d'entre elles est crédible : Simone Weber est l'auteur d'un homicide, même si les preuves matérielles, apparemment accablantes, sont juridiquement minces[3]. Avec la découverte dans l'appartement de Simone d'une carabine .22 Long Rifle équipée d'un silencieux, d'une cartouche percutée et d'une douille sous l'armoire, l'hypothèse privilégiée par Thiel est que Simone Weber a tué Hettier d’une balle dans la tête alors qu’il se baissait, puis l'a découpé à la meuleuse, refusant de restituer cet outil loué de peur qu'y soient trouvées des traces de chair et de sang[9].

Mort mystérieuse de Marcel Fixard[modifier | modifier le code]

L'enquête sur la disparition de Bernard Hettier permet de s'intéresser au passé de Simone Weber. Elle est la veuve de Marcel Fixard, 81 ans, un militaire à la retraite, veuf et sans enfant, qui l'a engagée comme dame de compagnie. Afin de récupérer l'héritage de Fixard, elle a demandé à un figurant de se faire passer pour lui et l'a épousé dans la plus stricte intimité à la mairie de Strasbourg le [10].

Bien que le retraité soit décrit comme en pleine santé pour son âge, il meurt brusquement trois semaines après ce faux mariage. L'enquête prouve qu'il n'est pas l'homme qui s'est présenté le jour du mariage, et qu'il ignorait donc qu'il était marié.

À l'ouverture du testament, Weber apprend qu'elle n'est pas l'héritière. Elle fabrique un faux testament, postérieur, qu'elle présente au notaire, pouvant ainsi bénéficier de l'héritage. Elle s'installe dans sa maison de Rosières-aux-Salines, un pavillon dont elle a hérité par subterfuge, à quinze kilomètres de Nancy[10].

Le juge Thiel reste persuadé, sans le prouver, que Simone Weber a empoisonné Marcel Fixard, pour récupérer son héritage, avec de la digitaline qu'elle s'est procurée au moyen d'une fausse ordonnance[11].

Procès et condamnation[modifier | modifier le code]

Après une instruction de cinq années, aboutissant à la constitution d'un dossier de 18 000 pages, le procès de Simone Weber devant la cour d'assises de Meurthe-et-Moselle a lieu du au [12]. Il est l'occasion de multiples coups d'éclat de l'accusée. Elle récuse des jurés, après avoir renvoyé vingt-cinq de ses avocats, notamment Gilbert Collard [13] et Jacques Vergès, qu'elle a trouvé trop vulgaire pour avoir dit au juge Thiel : « Vous avez créé une effrayante chimère avec les couilles de Landru et les ovaires de Marie Besnard »[14]. Elle insulte copieusement certains témoins. En entendant l'avocat général requérir contre elle une peine de vingt ans de réclusion criminelle, assortie d'une période de sûreté de dix-huit ans, elle éclate de rire[15].

Le , la cour la déclare innocente du meurtre de son faux mari Marcel Fixard. Elle la reconnaît coupable d'avoir découpé le corps de son ancien amant à la meuleuse à béton, sans reconnaître de préméditation, et la condamne à une peine de vingt années de réclusion criminelle[16].

Le , le pourvoi en cassation formé par Simone Weber et par sa sœur Madeleine – condamnée à deux ans de réclusion pour recel de vol et destruction de preuves – est rejeté par la chambre criminelle de la Cour de cassation[17],[18].

Purgeant sa peine à la prison centrale des femmes de Rennes, Simone Weber continue de soutenir qu'elle n'a pas découpé son ex-amant à la meuleuse[19].

Libération et dernières années[modifier | modifier le code]

Une fois libérée le , après huit années de prison, grâce aux remises de peine et à une bonne conduite, elle le redit à la télévision.

Elle vit ensuite auprès de sa sœur Madeleine à Cannes, avant d'habiter une maison de retraite.

En , elle demande à son nouvel avocat, Valéry Le Douguet, de lancer une demande de procédure en révision de sa condamnation criminelle de [20].

Sa dernière prise de parole remonte au à la radio RTL. Elle a 91 ans.

Elle meurt le à l'âge de 94 ans à Cannes[21].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Serge Cosseron et Jean-Marc Loubier, Les Femmes Criminelles de France, Éditions De Borée, , p. 336-337.
  2. Sylvain Larue, Les Nouvelles Affaires Criminelles de France, Éditions De Borée, , p. 408.
  3. a et b Pascale Robert-Diard, Didier Riouxs, Le Monde : les grands procès, 1944-2010, Les Arènes, , p. 320.
  4. Michel Pascal, 40 ans d'affaires criminelles, Michel Pascal, , p. 59.
  5. a et b « Les grands crimes du XXe siècle : Simone Weber », article d'Isabelle Horlans publié le dans France-Soir.
  6. Michèle Agrapart-Delmas, Femmes fatales : les criminelles approchées par un expert, Max Milo, , p. 67.
  7. Michel Pascal, op. cit., p. 60.
  8. Frédéric Brunnquell, Moi, juge d'instruction, Hermé, , p. 83.
  9. Roger-Louis Bianchini, Crimes sans cadavres, Fayard, , p. 127.
  10. a et b Michel Pascal, op. cit., p. 62.
  11. Michel Pascal, op. cit., p. 63.
  12. Serge Cosseron et Jean-Marc Loubier, op. cit., p. 336.
  13. Nathalie Lamoureux, « Les mystères de l'histoire : Simone Weber, la diabolique de Nancy », sur lepoint.fr, .
  14. Bernard Violet, Vergès : le maître de l'ombre, Le Seuil, , p. 245.
  15. Yves-Marie Labé, « Simone Weber : la "diabolique de Nancy" condamnée à vingt ans », Le Monde, (ISSN 1950-6244, consulté le ).
  16. Pascale Robert-Diard, Didier Riouxs, op. cit., p. 322.
  17. Décision du 8 janvier 1992 sur courdecassation.fr.
  18. « La Cour de cassation a rejeté le pourvoi de Simone Weber », Le Monde, (consulté le 11 avril 2024).
  19. « La saga Simone Weber : Simone, as-tu caché le corps ? », Brigitte Vital-Durand, , Libération.
  20. « Simone Weber veut une révision de sa condamnation », L'Express,
  21. « Disparition. Simone Weber, surnommée "la diabolique de Nancy", est morte », sur dna.fr (consulté le ).

Annexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Olivier Richou, Simone Weber : la bonne dame de Nancy, 1990 (ISBN 2855656311).
  • Georges Moréas (conseiller technique) et Bill Waddell (conseiller technique), Dossier meurtre. Enquête sur les grands crimes de notre temps, vol. 22 : La Diablesse. Simone Weber : la paisible sexagénaire de Nancy a-t-elle empoisonné son mari et dépecé son amant ?, Paris, ALP, , 30 p.
  • Christian Gonzalez
  • Monique Raux, Georges Simonin, Simone Weber, le procès, 1993 (ISBN 2876920859).
  • Jacques Zimmer, L'Homme sans tête. L'affaire Simone Weber, J'ai lu, 1994 (ISBN 2277070661).
  • Michel Pascal, 40 ans d'affaires criminelles (1969-2009) (chapitre : « L'affaire Simone Weber » pages 58 à 64), , 208 p. (ISBN 978-1-4092-7263-2).

Fiction[modifier | modifier le code]

  • Denis Robert relate l'affaire Simone Weber dans le romanChair Mathilde, 1991, éditions Bernard Barrault.

Filmographie[modifier | modifier le code]

Documentaires télévisés[modifier | modifier le code]

Adaptations[modifier | modifier le code]

Radio[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]