Royaume de Lombardie-Vénétie

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Royaume lombardo-vénitien
(it) Regno Lombardo-Veneto
(de) (officielle) Königreich Lombardo–Venetien

18151866

Drapeau Blason
Description de cette image, également commentée ci-après
Carte du royaume de Lombardie-Vénitie en 1852, avec les frontières actuelles des pays.
Informations générales
Statut Monarchie constitutionnelle, possession de l'Drapeau de l'Autriche Empire d'Autriche
Capitale Milan (1815–1859)
Venise (1859–1866)
Langue(s) Italien, Lombard, Vénitien et Frioulan.
Monnaie Lire lombardo-vénétienne
Florin lombardo-vénitien (1862-1866)
Histoire et événements
Création du royaume de Lombardie-Vénétie par le congrès de Vienne à la suite de la victoire sur Napoléon Ier.
9 juin 1815 L'Autriche octroie Gênes et la Ligurie au royaume de Sardaigne pour constituer un État tampon contre la France.
1821 Mouvement révolutionnaires libéraux : prémices de l'unification italienne : le « Risorgimento ».
1848 Printemps des peuples : mouvements révolutionnaires en Europe.
18-22 mars 1848 Cinq journées de Milan : échec contre la révolution milanaise. Le roi de Sardaigne Charles-Albert déclare la guerre à l'Autriche et annexe la Lombardie.
mars 1848 - mars 1849 Première guerre d'indépendance italienne : victoire autrichienne contre le royaume de Sardaigne et récupération de la Lombardie.
avril-juillet 1859 Deuxième guerre d'indépendance italienne : échec face à la coalition franco-sarde. Traité de Zurich : annexion de la Lombardie par le royaume de Sardaigne.
juin-août 1866 Troisième guerre d'indépendance italienne et Guerre austro-prussienne : échec contre la Prusse et l'Italie : dissolution de la Confédération germanique des Habsbourg-Lorraine et création de la Confédération de l'Allemagne du Nord des Hohenzollern.
Traité de Prague : la Prusse annexe le Royaume de Hanovre, les duchés de Schleswig , de Holstein, et de Nassau, l'Hesse-Cassel et Francfort.
Traité de Vienne : l'Autriche cède la Vénétie à la France, qui la rétrocède à l'Italie.

Entités précédentes :

Entités suivantes :

Le royaume de Lombardie-Vénétie (en italien : Regno Lombardo-Veneto) est un État dépendant de l'empire d'Autriche, créé en 1815 lors du congrès de Vienne, après la chute de l'empereur Napoléon Ier et l'effondrement du royaume d'Italie qu'il avait établi en 1805.

En 1859, dans le cadre des guerres pour l'unification de l'Italie, le royaume de Lombardie-Vénétie est amputé par Victor-Emmanuel II, roi de Sardaigne, de la Lombardie sauf la province de Mantoue ; en 1866, le reste du territoire est annexé par le nouveau royaume d'Italie.

Histoire du royaume[modifier | modifier le code]

La défaite napoléonienne en Italie[modifier | modifier le code]

Le , l’Autriche déclare la guerre à la France, affaiblie par la désastreuse campagne de Russie et abandonnée par la confédération du Rhin. Elle constitue une armée pour envahir l'Italie, confiée au feld-maréchal Heinrich Johann de Bellegarde ; cette armée est battue par celle du vice-roi Eugène de Beauharnais lors de la bataille du Mincio le .

Dans les deux mois qui suivent, la position de Beauharnais se dégrade sensiblement en raison :

Cette situation de plus en plus précaire oblige le vice-roi à signer le 23 avril à Mantoue la capitulation du royaume : il laisse son armée, 45 000 hommes en armes, victorieuse à Mincio, aux ordres de Heinrich Johann de Bellegarde et part le 27 pour Munich. Le 26 avril le commissaire autrichien Annibal Sommariva prend possession de la Lombardie au nom du feld-maréchal Bellegarde, et le Milan est occupée par 17 000 soldats autrichiens.

Le 25 mai, Bellegarde dissout la régence du royaume d'Italie qui cesse d'exister et assume les pouvoirs comme Commissaire plénipotentiaire des provinces autrichiennes en Italie au nom du nouveau souverain, l’empereur François Ier. Le 12 juin, il prend la charge de gouverneur général après l'annexion de la Lombardie à l'empire, le même jour.

La genèse du royaume[modifier | modifier le code]

Selon les plans des puissances victorieuses, la chute de Napoléon aurait dû ramener à la situation géopolitique de l'Europe d'avant 1789, mais l'ampleur des changements de la conquête française nécessite l'ouverture à Vienne d'un grand congrès pour le réaménagement de l'Europe.

L’Autriche peut annexer de nouveau sous son autorité directe les territoires italiens qui lui appartenaient depuis longue date : Trente, Trieste et Gorizia, mais aussi par décret impérial du 7 juin[1] le duché de Milan (Milan, Côme, Pavie, Lodi, Crémone) et le duché de Mantoue où elle avait été influente, et en plus, conformément au traité de Campo-Formio (1797), les territoires de l'ancienne république de Venise. L'annexion à l'Empire autrichien est acceptée par les puissances victorieuses lors du congrès de Vienne en échange de la renonciation des droits dynastiques des Habsbourgs sur les Pays-Bas catholiques (actuels Belgique et Luxembourg).

Pour comprendre l'utilité pour Vienne de cet échange, il faut rappeler l'argument classique de Carlo Cattaneo, lequel a toujours soutenu que de la Lombardie-Vénétie, Vienne tire « un tiers de l'impôt de l'empire, bien qu'elle ne constitue qu'un huitième de la population »[2]. Giuseppe Martini[3] synthétise la situation : « Les négociations s'ouvrent autour du problème de l'Italie, et comme en fit publiquement la promesse le congrès viennois commençant par un grand acte de justice, il statua que l'Autriche reprendrait en sa possession Milan et Mantoue, acquerrait les États vénitiens avec l'ajout de quelques territoires qui, par des antiques accords entre puissances italiennes, appartenaient un temps aux États de Parme et Ferrare, acquerrait en plus, non seulement les terres de la Valtellina avec le comté de Bormio et de Chiavenna, sites très opportuns pour les choses de la Suisse ».

Les territoires vénitiens sur la côte orientale de la mer Adriatique sont absorbés directement par l'Autriche alors que pour des raisons historiques d'autonomie, Milan et Venise bénéficient d'un gouvernement autonome. L'Autriche réorganise ces territoires en une entité administrative apparemment autonome, la solution choisie est de créer un unique royaume et deux gouvernements auquel est donné le nom de royaume lombard-vénitien.

Le nom est choisi après un long débat et non sans hésitation. Les Autrichiens et leurs alliés ne veulent pas conserver le nom choisi par Napoléon, le royaume d'Italie. Il est évident qu'est pris en considération la localisation Ost und West Italien (Italie orientale et occidentale) ainsi que l'österreichische Italien (Italie autrichienne). Les noms excessivement liés à une des deux capitales sont écartés notamment parce que Milan et Venise n'ont jamais été unis sous une couronne commune depuis la chute du royaume Lombard et qu'il n'existe aucun terme pour définir les deux territoires unifiés. On choisit donc un nom destiné à stimuler le rapprochement entre les populations lombardes et vénitiennes mais qui fait aussi la démonstration de tout l'artifice de la nouvelle création administrative.

La création du royaume[modifier | modifier le code]

François Ier d'Autriche, premier souverain de Lombardie-Vénétie jusqu'à sa mort en 1835.

Le , la constitution des États autrichiens en Italie en un nouveau royaume de Lombardie-Vénétie est annoncée. Celui-ci est constitué sur les bases du traité de Vienne qui comprend les territoires du duché de Mantoue, Dogado, les Domini di Terraferma (« domaines de terre ferme ») de la république de Venise avec la Valteline appartenant déjà à la république des trois ligues, et une partie de la région de Ferrare, alors que le Stato da Màr (« État de la Mer »), appartenant à la Sérenissime en est exclu car directement annexé dans les territoires de l'Empire ainsi que le duché de Parme[4].

Le royaume est confié à François Ier, empereur d'Autriche et roi de la Lombardie-Vénétie. Le roi-empereur gouverne au travers d'un vice-roi en la personne du frère de l'empereur, l’archiduc Rainier d'Autriche (1783-1853), dont la résidence est à Milan et à Venise.

La Lombardie et la Vénétie, qui sont séparées par le Mincio, ont chacune leur propre gouvernement appelé conseil du gouvernement (Consiglio di Governo) confié à un gouverneur et à des administrations distinctes dites congrégations (Congregazioni Centrali), dont dépendent les administrations locales parmi lesquelles les congrégations provinciales (Congregazioni Provinciali) et les congrégations municipales (Congregazioni Municipali).

Les compétences du gouverneur, à travers le conseil du gouvernement, sont assez importantes et recouvrent la censure, l'administration générale du patrimoine et des impôts directs, la direction des écoles, des travaux publics, la nomination et le contrôle des congrégations provinciales. L'armée impériale assure, au cours de ces années, l'ordre public.

L’administration financière et de la police est soustraite au conseil du gouvernement pour dépendre directement du gouvernement impérial de Vienne qui agit au travers d'un magistrat de chambre (Magistrato camerale) (mont de Lombardie, monnaie, loto, intendance des finances, caisse centrale, fabrication des tabacs et des explosifs, offices des taxes et des timbres, imprimerie royale, inspections des forêts et agence du sel), un office de la comptabilité et une direction générale de la police.

En notant l'importante centralisation du pouvoir entre les mains du gouverneur nommé par Vienne et du gouvernement impérial, on comprend le rôle marginal du vice-roi réduit à de la représentation, celui-ci maintenant de splendides palais où se tient sa cour.

La marginalisation de la noblesse locale[modifier | modifier le code]

Toutes les autres charges du royaume sont le résultat d'une nomination royale et jamais élective. Elles sont en grandes parties confiées à des Austro-allemands ce qui est le cas des gouverneurs, le plus souvent issus des officiers basés en Italie bien que l'armée autrichienne respecte la composition hétérogène de la population de l'empire et du vice-roi : des non-Italiens bénéficient du contrôle presque absolu sur la vie du royaume. Les propos lors d'une réunion de 1832 entre Paolo de Capitani, un noble lombard, et Metternich sont devenus célèbres : « Quelle nécessité y a-t-il à faire occuper tous les postes importants par des Tyroliens ou des sujets d'autres provinces ? »[5].

Aux « patriciens » locaux, italiens, il ne reste que l'administration des congrégations provinciales et municipales, donc des postes secondaires. Les congrégations municipales, par exemple, prennent en charge les édifices communaux, les églises paroissiales, les routes internes, les salaires des employés communaux et la police municipale.

Pour compléter le tout, les codes civils et pénaux entrent en vigueur le interdisant toute intervention italienne même au travers du conseil du gouvernement.

La faiblesse intrinsèque du royaume[modifier | modifier le code]

Tabard aux armes du royaume lombard-vénitien, conservé au Trésor impérial de Vienne.

La réunion des deux provinces ne satisfait pas les Milanais dont les relations économiques sont tournées vers le port de Gênes qui relève alors du royaume de Piémont-Sardaigne alors que l'empire autrichien voulait développer le port de Trieste (à la place de Venise décadente), débouché naturel sur la mer Adriatique. Les Milanais accuseront Vienne, mais à tort, de retarder la liaison ferroviaire Venise-Milan et d'isoler ainsi la Lombardie[6].

Pour les sujets lombards et vénitiens, ce nouveau royaume apparait comme une "comédie", ceux-ci se rendant compte que le pouvoir est confié à un gouvernement viennois sous l'autorité austro-allemande. Les "Allemands" sont omniprésents et soustraient aux "patriciens" et aux intellectuels italiens les postes qui dans un royaume réellement autonome leur seraient revenus de droit.

Cette mainmise de l'Autriche est, pour les italiens, une aggravation de la situation par rapport à l'ancien royaume d'Italie. Celui-ci était en effet dirigé par un roi (Napoléon) et un vice-roi (Eugène de Beauharnais) français qui en avait fait un protectorat de Paris mais qui bénéficiait d'une autonomie administrative presque totalement nationale, avec une armée nationale composée de nombreux officiers italiens.

En définitive, le gouvernement autrichien n'apparaît pas respecter les droits traditionnels de la Lombardie et de la Vénétie et ne bénéficie donc d'aucune légitimité. Ces considérations sont à la base de l'instabilité permanente au moins jusqu'en 1820 et de la grande adhésion de l'élite et de la population lors de la guerre de libération.

Déclin et fin du royaume[modifier | modifier le code]

Le 18 mars- au terme des cinq jours de Milan, les Autrichiens sont chassés de la capitale lombarde et de Venise. Les deux conseils du gouvernement sont respectivement remplacés par un gouvernement provisoire de Lombardie auto-proclamé et par l'instauration de la république de Saint-Marc.

Le avec l'armistice signé par Salasco à la suite de la victoire autrichienne des 24-25 juillet à Custoza sur les troupes sardes, se termine la première phase de la première guerre d'indépendance : Milan est réoccupée et le gouvernement provisoire de Lombardie est dissous. Les 22-, Charles-Albert de Sardaigne est de nouveau battu lors de la bataille de Novare et il abdique en faveur de Victor-Emmanuel II. Le 24 août suivant, après un long siège, Venise se rend également aux Autrichiens.

Le royaume lombard-vénitien survit à la perte de la Lombardie (sauf Mantoue) après la seconde guerre d'indépendance de 1859 puis disparaît définitivement en 1866 à l'issue de la troisième guerre d'indépendance.

Rois, vice-rois et gouverneurs[modifier | modifier le code]

Souverains
Vice-rois
Les vice-rois ont dirigé le royaume par l'intermédiaire des gouverneurs ou des lieutenants suivants

Administration locale[modifier | modifier le code]

Les deux gouvernements de la Lombardie et de la Vénétie sont divisés en dix-sept provinces. Chaque province est administrée par une délégation provinciale créée pour la première fois le .

Provinces lombardes

Provinces vénitiennes

Le découpage du royaume en provinces.

Chaque province est divisée en districts, 127 en Lombardie et 91 en Vénétie. Chaque district est divisé en communes, cellule de base de l'administration publique. Selon la population, les communes appartiennent à trois classes;

  • les communes de première classe, dont le chef-lieu est contrôlé directement par la délégation provinciale, ont un conseil communal d'un maximum de 60 membres,
  • les communes de seconde classe, dotées d'un conseil communal d'au moins 30 membres et administrées par un chancelier du patrimoine,
  • les communes de troisième classe, les plus petites qui sont dirigées par une assemblée de propriétaires qui se réunit une fois l'an en présence du chancelier du patrimoine pour nommer les fonctionnaires et approuver le bilan. Pendant le reste de l'année, trois propriétaires sont délégués aux affaires courantes.

Organisation judiciaire[modifier | modifier le code]

Chaque chef-lieu provincial est le siège d'un tribunal de premier grade alors que dans les deux centres régionaux Milan et Venise sont présentes deux cours d'appel. Au sommet du système se trouve le Sénat, la cour de cassation du royaume qui est située à Vérone.

Langue du royaume[modifier | modifier le code]

La langue officielle du royaume est l'Italien, langue qui est enseignée dès l'école élémentaire qui est obligatoire et gratuite pour tous les enfants du royaume. La population parlait habituellement des langues locales : lombard, vénitien, frioulan et ladin. Il y avait une population composée de 2 % de minorité[pas clair] de langue allemande dans les provinces de Vicence, de Belluno et de langue slovène dans la province d'Udine.

Sources[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Annexion proclamée juridiquement le 12 juin 1814 par Heinrich Johann de Bellegarde.
  2. Carlo Cattaneo : Dell'insurrezione di Milano nel 1848 e della successiva guerra, Lugano, Tipografia della Svizzera Italiana, février 1849.
  3. Storia d'Italia continuata da quella del Botta dall'anno 1814 al 1834 : première partie 1814-22.
  4. Le duché de Parme est confié à Marie-Louise d'Autriche, seconde épouse de Napoléon Ier et fille de l'empereur François Ier d'Autriche.
  5. Francesco Arese, La Lombardia e la politica dell'Austria, Archive historique lombarde, LXXVIII.
  6. François Fejtő, Requiem pour un empire défunt, Perrin, collection tempus 2014 p. 138.
  7. Comprend les circonscriptions de Saronno, Busto Arsizio et Gallarate entrées dans la province de Varèse en 1927.
  8. Comprend la Valcamonica entrée dans la province de Brescia en 1861.
  9. Comprend la circonscription de Varèse qui a donné la province de Varèse en 1927 et une grande partie de l'actuelle province de Lecco créée en 1992.
  10. Comprend la circonscription de Crema devenue la province de Crémone en 1861.
  11. Comprend la circonscription de Abbiategrasso entrée dans la province de Milan en 1861 à l'exclusion de Lomelline et l'Oltrepò à l'époque appartenant au Royaume de Sardaigne.
  12. Comprend le delta gauche du , province de Rovigo depuis 1866.
  13. à l'exclusion des vallées ladines à l'époque tyrolienne.
  14. Comprend l'actuelle province de Pordenone créée en 1968 mais en excluant les vallées de Tarvisio à l'époque à la Carniole.

Annexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]