Quasi-guerre
Date | 1798 - 1800 |
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Lieu | Côtes atlantiques d'Amérique du Nord, Antilles, Mer des Caraïbes. |
Issue | Traité de Mortefontaine |
République française | États-Unis |
Corsaires effectifs inconnus |
18 frégates 4 sloops 2 brigs 3 schooners 365 corsaires 5 700 marins |
inconnues 22 prises |
20 tués 42 blessés 300 cargaisons capturées Plus de 2000 navires capturés au total[1] |
Guerres de la Révolution française
Batailles
- Combat de l'USS Delaware et du Croyable
- Capture de l'USS Retaliation par le Volontaire et l’Insurgente
- Combat de l'USS Constellation et de l’Insurgente
- Combat naval du 1er janvier 1800
- Combat de l'USS Constellation et de la Vengeance
- Puerto Plata Harbor (en)
- Combat de l'USS Boston et du Berceau
- Combat de l'USS Enterprise et du Flambeau
- Invasion de Curaçao (en)
Entre 1798 et 1800, la quasi-guerre (Quasi-War en anglais) fut une période de conflit larvé entre la France et les États-Unis, véritable guerre maritime non déclarée. Aux États-Unis, le conflit est nommé quelquefois la Guerre non déclarée avec la France (Undeclared War with France).
Le contexte
Au début de la Révolution française, les relations sont excellentes entre les républicains américains et les révolutionnaires français, mais elles se détériorent après l'exécution de Louis XVI en 1793 et surtout l'abolition de l'esclavage décrétée par le Gouvernement français, à laquelle s'opposent les lobbies américains soucieux de ne pas donner des idées de liberté à leurs propres esclaves[réf. nécessaire]. Les Français reprochent au gouvernement de Washington le rapprochement avec le Royaume-Uni, les retards de remboursement de la dette (les Américains affirmant que leur dette concerne la France royale et non la France républicaine) et sa neutralité dans les guerres révolutionnaires en Europe.
Début 1794, pour contrer l'augmentation des captures des navires marchands américains par les corsaires barbaresques sur les côtes du Maghreb, le Congrès des États-Unis a ordonné la construction d'une marine militaire pour la protection de leur commerce.
Edmond Genêt, ambassadeur de France à Philadelphie, est révoqué par les Américains après de nombreuses maladresses[2]. Les États-Unis lui fournissent cependant l'asile, et s'opposent à son retour en France, alors confrontée à la Terreur.
Montée des tensions
Le , le traité de Londres, signé par John Jay, permettant aux Anglais de confisquer les marchandises françaises découvertes dans les navires américains, est vécu par les Français comme une « trahison et violation » des traités bilatéraux de 1778. Le gouvernement de la Convention nationale réplique en immobilisant des navires américains au mouillage dans les ports français et en autorisant des corsaires à arraisonner ceux qui sont en mer.
Peu de temps après, les déprédations commises par les corsaires de la France révolutionnaire et orchestrées par Victor Hugues, commissaire de la République en Guadeloupe, forcent la toute nouvelle US Navy à protéger les expéditions marchandes des États-Unis, qui sont en plein développement.
Le 17 octobre 1797, les Américains dénoncent le fait que le navire La Fortitude, du capitaine Jourdain, corsaire français basé au Cap-Français de Saint-Domingue, a pillé puis brûlé, en plein port de Charleston, L'Oracabissa, un bateau anglais chargé d'une riche cargaison[3].
En 1797, éclate l'affaire XYZ. Des agents du ministre français des affaires étrangères Charles Maurice de Talleyrand exigent des pots-de-vin de la part des émissaires américains venus négocier un traité. Ces révélations provoquent un scandale aux États-Unis, et les parlementaires fédéralistes et anglophiles réclament l'ouverture des hostilités avec la France. Les relations entre les deux pays continueront de se dégrader, pour aboutir à la révocation de l'émissaire Charles Pinckney. C'est le début de l'état de « quasi-guerre », avec des combats navals entre les deux nations, principalement en zone caraïbe.
La quasi-guerre commença le , durant le Directoire, quand le Congrès américain abrogea tous les traités bilatéraux signés au préalable avec la France. Le président John Adams refusa d'engager son pays dans une guerre formelle. Cependant, par mesure de rétorsion, et avec l'autorisation du Congrès, il instaura un embargo sur les produits français, chargea le docteur Edward Stevens de soutenir la révolution haïtienne contre la présence coloniale française et ordonna à la marine américaine de capturer les navires français.
L'US Navy, qui avait pour l'essentiel disparu depuis presque une décennie, fut ressuscitée pour l'occasion, grâce aux Naval Acts de 1794 et 1798. Lors de ce conflit, elle aligna environ 30 vaisseaux, aidés d'un nombre important de bateaux privés. Les escadres américaines parcouraient principalement la côte sud des États-Unis et les Caraïbes, à la recherche de corsaires français, puisque leur effectif limité ne leur permettait pas d'escorter en nombre des convois de navires marchands.
Les engagements navals tournèrent dans l'ensemble à l'avantage des Américains. En particulier, la frégate américaine USS Constellation captura la frégate française l'Insurgente (), et endommagea sévèrement la frégate La Vengeance (frégate) (nuit du 1er au ). Les Revenue cutters, ancêtres des US Coast Guards, ont également participé au conflit. Notamment le cotre Pickering, qui a fait deux voyages aux Antilles et a capturé plusieurs navires, dont un qui portait 44 canons et manœuvré par environ 200 marins, soit trois fois plus que sa propre puissance.
Le succès de la révolte des esclaves de Saint-Domingue, qui représente alors la moitié de la production mondiale de coton et de café et un tiers de celle de sucre, changea alors la donne économique mondiale.
L'arrivée à Cuba de réfugiés de Saint-Domingue après l'armistice du 30 mars 1798 en voit beaucoup devenir corsaires lors de la quasi-guerre, sur fond de convention commerciale tripartite de 1799 entre Toussaint Louverture, les États-Unis et l'Angleterre, contestée par la France, ce qui va nourrir la piraterie des années 1800 dans la Caraïbe et donne un premier coup de fouet au trafic commercial à Cuba, comme le montrent les valeurs produites par le port de Cuba entre 1797 et 1801, une partie venant des prises des corsaires français attaquant les navires américains commerçant avec Saint-Domingue[4] :
Année | 1797 | 1798 | 1799 | 1800 | 1801 |
Tonnage | 32,5 | 46,1 | 76,5 | 84 | 116,6 |
Les escadres de la marine américaine ont recherché et attaqué non seulement les corsaires français, mais aussi tous types de navires français, jusqu'à ce que la France du Consulat s'accorde à un règlement honorable. De leur côté, plusieurs corsaires s'enrichirent notablement et en peu de temps.
À partir de 1800, les deux parties souhaitaient mettre fin aux hostilités, et la quasi-guerre se termina le avec la signature du traité de Mortefontaine.
Conséquences
À la fin du conflit en 1800, on estime que les Américains ont capturé 85 navires français, dont un nombre important de captures effectuées par des cotres privés. De leur côté, les Français ont saisi plus de 2000 bateaux marchands américains, entraînant une augmentation très importante des primes d'assurances commerciales[5].
Diplomatiquement, le conflit a permis aux deux pays de rompre leur alliance et de retrouver une neutralité que chacun désirait dans le contexte des guerres napoléoniennes.
Notes et références
- Arthur E. Fehlings, « America's First Limited War », p. 108
- Chargé d'entraîner les Américains dans la guerre que la France venait de déclarer à l'Angleterre, il est cependant allé trop loin dans cette voie, selon son biographe Claude Moisy, et se heurta à la « relation spéciale » entre les « Anglo-Saxons ». Genêt « croyait pouvoir entraîner l'Amérique dans la guerre au secours de sa patrie » et « s'était mis aussitôt en devoir de distribuer à grand bruit des lettres de marque, d'armer des corsaires, d'ordonner des recrutements, de condamner des prises, de préparer des conquêtes », a raconté en 1862 l'historien et député centriste Cornélis Henri de Witt, avant d'ajouter, que « dans ses efforts pour réchauffer la haine des masses contre l'Angleterre », il « fit tout ce qu'il fallait pour les détacher complètement de la France et du parti français ».
- La guerre de course en Guadeloupe, XVIIIe-XIXe siècles
- Le monde caraïbe : Défis et dynamique. Tome II. Géopolitique, intégration, par Christian Lerat, p. 112 (contribution de Maria-Elena Orozco, professeur à l'université de Bordeaux).
- America’s First Limited War, Lieutenant Colonel Gregory E. Fehlings, U.S. Army Reserve
Bibliographie
- (en) Alexander De Conde, The quasi-war : the politics and diplomacy of the undeclared war with France 1797–1801, New York : Scribner's, 1966
- (en) Arthur E. Fehlings, « America's First Limited War », Naval war college Review, (lire en ligne)
- Myriam Alamkan, Histoire maritime des Petites-Antilles XVIIe et XVIIIe siècles, Ibis Rouge, 2002, ISBN 2-84450-160-5
- Ulane Bonnel, La France, les États-Unis et la guerre de course (1797-1815), Paris, 1961, Nouvelles Éditions latines.
Voir aussi
Articles connexes
- L'affaire XYZ.
- Diplomatie
- Histoire des États-Unis
- Interventions militaires des États-Unis dans le monde
- Histoire des relations franco-américaines
- Liste des traités de paix
- Histoire militaire des États-Unis