Qabus ibn Saïd

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Qabus ibn Saïd
قابوس بن سعيد
Illustration.
Le sultan Qabus ibn Saïd en 2013.
Titre
Sultan d'Oman

(49 ans, 5 mois et 18 jours)
Premier ministre Tariq ibn Taïmour
Lui-même
Prédécesseur Saïd ibn Taimour
Successeur Haïtham ben Tariq
Premier ministre d'Oman

(48 ans et 8 jours)
Monarque Lui-même
Prédécesseur Tariq ibn Taïmour
Successeur Vacant
Biographie
Dynastie Al Saïd
Nom de naissance Qabous ibn Saïd ibn Taïmur al-Mu’azzam Al Saïd
Date de naissance
Lieu de naissance Salalah, Dhofar
(Mascate et Oman)
Date de décès (à 79 ans)
Lieu de décès Sib, gouvernorat de Mascate
(Oman)
Nature du décès Cancer du côlon
Sépulture Cimetière royal de Ghala
Père Saïd ibn Taïmour
Conjoint Nawal bint Tariq ben Taïmour Al Saïd (divorcés)
Enfants Sans descendance
Héritier Haïtham ben Tariq
Religion Islam ibadite

Qabus ibn Saïd
Monarques d'Oman

Qabus ibn Saïd (arabe : قابوس بن سعيد), né le à Salalah (Dhofar) et mort le à Sib (gouvernorat de Mascate), est un homme d’État omanais. Il devient sultan d'Oman le , succédant à son père, Saïd ibn Taimour, et le reste jusqu’à sa mort.

Biographie[modifier | modifier le code]

Enfance[modifier | modifier le code]

Descendant de la dynastie Al Saïd au pouvoir depuis 1744, fils du sultan Saïd ibn Taïmour et de sa seconde épouse Mazoon al-Mashani (en), Qabus ibn Saïd naît à Salalah, la grande ville du sud du pays, alors dénommé Mascate et Oman. Il vit une enfance solitaire et austère[1], se voyant l’interdiction d’aller à la plage, de participer à des jeux, ou de parler avec ses précepteurs de questions étrangères à ses études[réf. nécessaire].

À l’âge de seize ans, il est envoyé en Angleterre pendant cinq ans, d'abord à l’académie privée de Bury St Edmunds, dans le Suffolk, où il devient un excellent cavalier et un grand amateur de musique classique. Il étudie ensuite à l'Académie royale militaire de Sandhurst jusqu'en 1962, puis sert pendant un an dans l’armée britannique en Allemagne en tant qu’officier du régiment des Scottish Rifles[1].

Après un grand tour du monde, il est rappelé en 1965 par son père, qui le maintient en quasi-détention.

Vie privée[modifier | modifier le code]

S’étant rapidement marié à sa cousine en 1972, Qabus ben Saïd est sans descendance[2]. Le quotidien France-Soir indique en 2011 : « Qabous ben Saïd ne fait rien comme ses homologues des pays du Golfe. Divorcé, sans enfants, presque ouvertement gay, il laisse à son peuple la liberté de culte et ne réprime que très peu l'adultère et l'homosexualité, bien que ceux-ci soient encore considérés officiellement comme des délits[3],[4]. »

Sultan d’Oman[modifier | modifier le code]

Accession au trône[modifier | modifier le code]

Le sultan Qabus en 1980.

Le , Qabus ibn Saïd renverse son père, Saïd ibn Taïmour, lors d'une révolution de palais[n 1]. Oman, alors le pays le plus pauvre de la péninsule arabique, vivant hors du temps, exploitant peu son pétrole, est en pleine guerre civile. Avec l'aide de l'Iran et des forces spéciales du Royaume-Uni[5], Qabus ibn Saïd réussit à écraser la rébellion marxiste du Dhofar.

Pendant les premières années de son règne, la réalité du pouvoir est entre les mains des Britanniques. La guerre est conduite par un conseil de défense dont tous les membres, à l’exception de Qabous, sont britanniques. Les officiers de l’armée omanaise et les fonctionnaires civils sont également pour la plupart britanniques[6].

Politique intérieure[modifier | modifier le code]

Après sa prise de pouvoir commence l'exploitation intensive du pétrole[5].

Ses efforts se concentrent également sur la modernisation du pays : ports, routes, écoles ou université[5]. Il concède le droit de vote et d'éligibilité aux femmes en 1995, plusieurs d'entre elles accédant notamment au rang de ministre à partir de 2004 puis d'ambassadrices[1]. Il est à la tête d'un pays où, globalement, les femmes sont mieux considérées que dans les pays voisins, pouvant conduire ou travailler par exemple[2].

L'eau, l'électricité ou l'essence sont commercialisés à prix modique, les impôts inexistants ; les fonctionnaires sont pléthore et plusieurs métiers sont réservés aux locaux : toutes ces mesures préservant ainsi la longue accalmie sociale dans le pays, le Printemps arabe du début des années 2010 touchant peu le pays[5].

Préparant la constitution d'un État de droit en Oman, abandonnant progressivement l’absolutisme hérité de son père, il œuvre à une transition démocratique et égalitaire. Cependant, il impose l'image d'un État où il est impossible de ne pas soupçonner un régime despotique : longtemps, il cumule encore les fonctions — qu'il s'est adjugées — de chef de l'État, de Premier ministre, de ministre des Affaires étrangères, de ministre de la Défense, de chef d'état-major des armées et de directeur de la banque centrale. Dans la capitale, Mascate, le port, l'université, l'autoroute, les billets de banque portent son nom ou son image. Des affiches à son effigie sont présentes partout[7].

En 1996, le sultan promulgue un décret clarifiant les règles de succession, instituant un Premier ministre et un Conseil bicaméral doté de certains pouvoirs législatifs, et garantissant des libertés civiles de base pour les citoyens omanais. Il existe désormais un chef de la diplomatie omanaise, Youssef ben Alaoui[8]. La chambre basse du Conseil est librement élue au suffrage universel direct pour la première fois en 2003, mais la chambre ne possède pas de réel pouvoir et ses membres ont interdiction de se réunir en partis politiques. Le Parlement n'a qu'un rôle consultatif[5].

En 2005, un complot orchestré par des islamistes visant à renverser son gouvernement est déjoué. Une trentaine de personnes seront condamnées à des peines allant de sept à vingt ans d’emprisonnement.

Diplomatie[modifier | modifier le code]

Tout en s'associant avec des pays de la région (notamment l'Égypte), il mène une politique d'indépendance du sultanat. Sous son règne, Oman adhère à la Ligue arabe (), à l'ONU () et à l'OMC ().

Acteur influent de la diplomatie mondiale en plein cœur d'une zone particulièrement tendue, maintenant son pays dans la neutralité, le sultan d'Oman sert à de maintes reprises d'intermédiaire entre différents États[9]. L'ibadisme y est pour beaucoup, permettant une bonne cohabitation entre toutes les religions[5], y compris entre les sunnites et les chiites, traditionnellement en opposition. Ainsi, dès la fin des années 1970, Qabous ben Saïd sert de messager entre l'Iran de Khomeini et les États-Unis ainsi que l'Arabie saoudite. Dans les années qui suivent, il tente de rétablir quelques liens entre l'Iran et l'Irak[5]. La décennie suivante jusqu'au début du millénaire, il établit des contacts avec Israël, cherchant à apaiser le conflit avec les Palestiniens[10].

Par la suite, il est partie prenante dans les relations établies entre l'Iran et l'Arabie saoudite[n 2], qu'il invite à Oman pour discuter, dans la libération d'otages au Yémen ou encore dans la réussite du Plan d’action global commun, en 2013 puis 2015[7], auquel il œuvre à partir de 2009, au départ discrètement. La guerre civile syrienne donne lieu également à son entregent[10]. Son éducation en Angleterre facilite également ses relations avec les Occidentaux.

Maladie, mort et succession[modifier | modifier le code]

Le sultan Qabus ibn Saïd en 1998.

En principe, c'est le fils aîné du sultan qui lui succède à sa mort. Faute d'héritier mâle, le sultan régnant peut nommer un frère ou tout autre parent mâle parmi les descendants du sultan Saïd. Le sultan Qabus n'a pas d'enfant et a indiqué qu'à son décès, il incombera à la famille royale de se réunir et de convenir du nom d'un candidat. Cependant, si la famille royale ne parvient pas à s'accorder sur un candidat sous trois jours, c'est le Conseil de défense qui décidera, à partir des deux noms que le sultan Qabus a placés dans des enveloppes scellées avant sa mort[11].

En 2014, Qabous ibn Saïd est traité pour un cancer. Dans les mois qui suivent, il se fait absent[10]. La question de la succession se pose.

Le , il se rend à Louvain, en Belgique, pour des soins prévus pour une durée de deux mois[12]. Il interrompt ses soins au bout de cinq jours, le , et retourne dans son pays[13].

Le , après plus de 49 ans de règne, Qabus ibn Saïd meurt, des suites d’un cancer du côlon, à l'âge de 79 ans[14]. Le lendemain, le , Haïtham ben Tariq, ministre du Patrimoine et de la Culture et cousin du défunt, prête serment comme nouveau sultan[15]. Celui-ci a été désigné — parmi plus de 80 autres membres de la famille royale[16] — comme héritier par le défunt roi dans une lettre ouverte après sa mort[17].

Qabus ibn Saïd est inhumé ce même au cimetière royal de Ghala, à Mascate, aux côtés de ses prédécesseurs. Fait rare pour un chef d’État du Moyen-Orient, les messages de condoléances et de sympathie sont unanimes, des monarchies arabes[18] à Israël[19] et de l'Iran[20] aux États-Unis[21],[22].

Titulature[modifier | modifier le code]

  •  : Son Altesse le prince Qabus ibn Saïd
  •  : Son Altesse le sultan
  •  : Sa Majesté le sultan (depuis l'indépendance et la fin du protectorat britannique)

Fortune et passions[modifier | modifier le code]

Sa fortune était estimée à 700 millions de dollars en 2011, ce qui le classait alors 7e monarque le plus fortuné de la planète[23]. Quelques années plus tard et peu avant sa mort, elle s'élevait à près d'un milliard de dollars[24].

Il est notamment propriétaire du yacht le Al-Saïd[25], qui est le plus lourd du monde avec 15 850 tonnes et aussi l'un des plus longs du monde. Il est propriétaire de deux châteaux dans le parc de Massoury, à Fontaine-le-Port, dans le département de Seine-et-Marne, en France[26]. Il a racheté les bâtiments d'une ancienne ferme avoisinante pour y aménager une écurie, créant ainsi un haras pour ses purs-sangs[24]. Il se rendait dans ce château en moyenne une fois tous les trois ans, accompagné de quelque 500 personnes. Il fait aménager un tunnel pour accéder plus rapidement à sa propriété. Il investit un total de 12 millions d'euros dans la rénovation de ses deux châteaux dans un style Belle Époque par l'architecte Gabor Mester de Parajd[27],[3].

Pourtant, l'origine précise de sa fortune reste un mystère, même si logiquement le gaz et le pétrole lui apportent ses plus gros revenus ; malgré tout, le journaliste Vincent Jauvert indique que « Qabous n'a pas dilapidé les richesses du pays »[2].

Grand amateur de musique classique, il est à l'origine de l'orchestre symphonique royal d'Oman, et fait ériger en 2011 l'opéra royal de Mascate, à Qurum. Également passionné d'architecture, particulièrement engagé dans la défense et la modernisation raisonnée du style traditionnel omanais, il fait construire la grande mosquée de Mascate, le musée de la porte de Mascate et entièrement refaire le palais royal de Mascate, dans un style à la fois omanais, moderne et d'une humilité rare au Moyen-Orient[28].


Hommages et distinctions[modifier | modifier le code]

L’armoire royale de la Maison d'Al Saïd.

Monument[modifier | modifier le code]

La mosquée Qabus ibn Saïd, du nom du sultan, compte parmi les plus vastes du monde. Achevée en 2001, elle accueille 20 000 fidèles d'obédience ibadiste. Doté de 35 lustres et d'une salle de prière ornée d'un tapis de 4 600 m2, ce sanctuaire est ouvert à la visite des non-musulmans.

Anniversaire[modifier | modifier le code]

L'anniversaire du sultan, le 18 novembre, est le jour de la fête nationale d'Oman[29],[30].

Décorations[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Cette date deviendra par la suite la fête nationale du pays, tout comme son anniversaire.
  2. Géographiquement, Oman est situé entre les deux.

Références[modifier | modifier le code]

  1. a b et c Olivier Michel, « À Oman, avec les cavaliers du sultan », Le Figaro Magazine, semaine du , pages 40-48.
  2. a b et c Jauvert, p. 61.
  3. a et b Marie Marvier, « Le sultan veut son souterrain », sur francesoir.fr, .
  4. Gilles Fumey, « Le sexe contre la mondialisation », sur Geographica.net, .
  5. a b c d e f et g Jauvert, p. 62.
  6. Marc Pellas, « Oman. Comment le chah d’Iran a sauvé le régime », orientxxi.info,‎ (lire en ligne)
  7. a et b Jauvert, p. 60.
  8. « Mascate ne ferme pas son ambassade à Damas », Press TV,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  9. Jauvert, p. 60 à 63.
  10. a b et c Jauvert, p. 63.
  11. « Le sultan Qabus, monarque absolu sans prince-héritier », sur Courrierinternational.com, .
  12. « Oman: le sultan Qabous se rend en Belgique pour des examens médicaux », sur Le Figaro.fr, lefigaro, (ISSN 0182-5852, consulté le ).
  13. « Le sultan d’Oman a quitté Louvain », sur Le Soir, (consulté le ).
  14. « À Oman, les adieux à l’atypique sultan Qabous », sur Le Figaro.fr, lefigaro, (ISSN 0182-5852, consulté le ).
  15. Georges Malbrunot, « Oman: le nouveau sultan a la lourde tâche de poursuivre l’œuvre de Qabous », sur Le Figaro.fr, (consulté le ).
  16. « Le sultan d'Oman Qabous ben Saïd, au pouvoir depuis 50 ans, est mort », sur Le Huffington Post, (consulté le ).
  17. « Mort du sultan Qabous d'Oman, son cousin Haïtham ben Tarek lui succède », sur parismatch.com (consulté le ).
  18. Benjamin Barthe, « Après la mort du sultan d’Oman, une transition en douceur », sur Le Monde, .
  19. « Mort du sultan Qabous d’Oman : Netanyahu salue “un grand dirigeant” », sur timesofisrael.
  20. « La mort du sultan d'Oman est "une perte pour la région", dit l'Iran », sur lorientlejour.com, .
  21. « Trump se dit "très attristé" par la mort du sultan d'Oman, un "ami de tous" », sur lorientlejour.com, .
  22. Dominique Bonnet, « Quand le sultan Qaboos d’Oman recevait têtes couronnées, présidents et Premiers ministres », sur Paris Match, .
  23. « Qabus ibn Saïd, Sultan d’Oman », sur Capital.fr, .
  24. a et b Jauvert, p. 60 à 61.
  25. « Le Top 10 des plus beaux bateaux d'hommes d'affaires », sur Yahoo.com, .
  26. Éric de Legge, « Le château du sultan d'Oman, en Seine et Marne », sur Journaldunet.com, .
  27. « Fontaine-le-Port : le sultan échange un rond-point contre un souterrain », sur Leparisien.fr, .
  28. Peter J. Ochs, Maverick Guide to Oman, Pelican Publishing, , 384 p. (ISBN 978-1-56554-687-5, lire en ligne), p. 212.
  29. Guide des Fêtes.
  30. Site de l'ambassade d'Oman à Paris.

Annexes[modifier | modifier le code]

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Source[modifier | modifier le code]

Article connexe[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]