Orogenèse

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L’orogenèse est le terme scientifique désignant l'ensemble des mécanismes de formation des montagnes, divers systèmes théoriques (modèles géodynamiques) englobant ces processus de formation des reliefs, et des ensembles d'orogènes (systèmes montagneux sur une portion de croûte terrestre ayant subi d'importantes contraintes compressives engendrant plis et nappes de charriage) se succédant à travers les temps géologiques encore appelés phases orogéniques. En ce qui concerne ces regroupements temporels et géographiques effectivement constatés, les cycles de Wilson donnent un cadre explicatif cohérent basé sur la tectonique des plaques et la finitude de la surface sub-sphérique de la Terre.

Étymologie

Le terme orogenèse dérive du mot « orogénie » (qui en est toujours un synonyme). En grec, ὄρος / oros désigne la montagne : l'orogenèse étudie donc la naissance des montagnes. En réalité, elle inclut aussi l'étude de l'érosion et de la disparition des reliefs, mais il est vrai que la question centrale est longtemps restée celle de la formation des montagnes, plus que celle de leurs origines ou de leur devenir. La terminologie contemporaine parlant d'orogenèse apparaît en 1907 avec Émile Haug[réf. nécessaire].

Origines et formation

Modèle de cycle orogénique

Collision continentale

Une orogène résulte de la collision entre deux lithosphères continentales, collision au sens d'une convergence plus rapide d'un facteur 2 à 5 par rapport à une vitesse de déplacement horizontal typique (de l'ordre de quelques cm/an dans le référentiel des points chauds pour la tectonique des plaques). Quand deux plaques continentales de même nature et de même densité se rencontrent, le moteur du mécanisme se bloque. Il n'est pas assez puissant pour faire plonger l'une des plaques dans l'asthénosphère à cause de leur faible densité. Les deux plaques se soudent pour n'en former qu'une seule.

Il faut noter que pendant la collision, le matériel sédimentaire est transporté en hauteur pour former des chaînes de montagnes où les roches sont plissées et faillées. La collision conduit au raccourcissement de l'écorce terrestre. Au contact des deux lithosphères continentales, la compression provoque des raccourcissements horizontaux, et donc des épaississements verticaux, première cause de création de reliefs, notamment avec des plissements. Souvent, après quelques millions d'années d'un tel régime de déformation, l'une des lithosphères monte en chevauchement au-dessus de l'autre, provoquant un redoublement crustal, seconde cause de création de relief, mais aussi des déplacements horizontaux relatifs beaucoup plus importants. Des volumes de matériaux importants peuvent être translatés sous la forme de nappes de charriage, le plus souvent impliquant essentiellement les couvertures sédimentaires décollées de leurs socles.

Pendant la durée de cette convergence, la limite des plaques qui modélisent ces lithosphères devient diffuse, lesquelles perdent aussi plus ou moins leur rigidité horizontale (déformations horizontales diffuses à l'échelle continentale). Dans cette situation, à l'échelle géographique de ces déformations continentales et pendant la durée de la collision, en général de l'ordre de quelques dizaines de millions d'années, le modèle de la tectonique des plaques ne peut plus s'appliquer localement.

Les chaînes de montagne issues d'un tel processus collisionnel s'appellent chaînes alpines, en référence à l'arc alpin. C'est le cas notamment de la chaîne de l'Himalaya, à la frontière entre la plaque indienne et la plaque eurasienne ; cette rencontre s'est produite il y a 65 millions d'années à la faveur de la fameuse migration du continent indien. Les Alpes et les chaînes de l'Atlas sont des exemples de chaîne de collision.

Subduction et obduction

Dans le cas de la convergence entre une lithosphère océanique et une lithosphère continentale, une zone de subduction s'installe, avec formation d'un arc volcanique en avant de la lithosphère continentale. Le fonctionnement d'un tel système pendant quelques dizaines de millions d'années aboutit à la création d'une cordillère comme les chaînes péri-pacifiques. C'est le second type d'orogenèse, avec formation d'une zone lithosphérique de type crustale sur-épaissie amenant la formation de reliefs et donc d'une chaîne montagneuse, appelée chaîne andine.

Dans le cas de la convergence entre deux lithosphères océaniques, une zone de subduction s'installe, avec formation d'un arc volcanique sur la lithosphère océanique supérieure. Après quelques millions d'années de fonctionnement, de croissance magmatique des édifices, de maturation métamorphique des matériaux dans la racine de l'alignement volcanique, cet arc volcanique plus ou moins continentalisé au sens de la géodynamique, peut ultérieurement être accrété à une marge continentale, ce qui constitue la seconde modalité d'orogène. Éventuellement, l'arc volcanique peut se développer sur cette marge, ou plus ou moins en "profondeur" sur la croûte continentale (éloignement de l'alignement volcanique vers l'intérieur du continent). Un exemple actuel d'une telle situation est la Fosse des Mariannes.

De plus, dans le cas de la convergence entre deux lithosphères océaniques, la lithosphère océanique disparaissant dans la subduction peut être suivie de lithosphère continentale. Lorsque cette croûte continentale passe dans la zone de subduction, la croûte océanique portant l'arc insulaire passe transitoirement au-dessus de la croûte continentale, ce qui correspond à un épisode d'obduction. Très rapidement (à échelle de temps géologique) la densité de la croûte continentale l'empêche de plonger et bloque le mécanisme. Si la convergence se poursuit, elle peut conduire à l'inversion du sens de la subduction, et/ou à une collision continentale.

Les différentes phases orogéniques

Les processus géologiques se produisent sans liaison avec une phase orogénique (anorogénie ou processus anorogénique), dans la phase initiale (pré-orogénie ou processus préorogénique), durant une orogenèse (syn-orogénie ou processus synorogénique), dans la phase finale (processus tardiorogénique) ou après l'orogenèse (post-orogénie ou processus postorogénique).

Éléments historiques

Le XIXe siècle voit naître en Europe de nombreux scientifiques montrant un intérêt particulier pour la genèse des massifs montagneux. À cette époque, l'étude de la planète s'organise autour de systèmes aussi divers qu'incompatibles ; mais pour ce qui est de sa structure, la plupart des érudits intègrent leurs travaux dans la perspective des « révolutions terrestres » avancées par Georges Cuvier : compte tenu de l'évolution du vivant, il s'agit de découvrir quelles nécessaires transformations ont provoqué des bouleversements susceptibles de changer la donne écologique à l'échelle globale. On tente ainsi de relier les connaissances en zoologie et botanique avec les premières observations purement géologiques, comme les strates et lignes de démarcation rocheuses. Léonce Élie de Beaumont décrit ainsi — sans toutefois les désigner par leur nom moderne — les discordances angulaires, c'est-à-dire les zones de contact entre deux strates de nature et d'âge différents et selon deux plans géométriques également différents.

Si quelques personnes avancent des théories quant à une Terre creuse, la majorité des géologues du XIXe siècle sont adeptes de la théorie générale de la Terre en refroidissement : les masses internes de la planète perdant leur chaleur, elles se contractent, ce qui doit provoquer l'affaissement des couches superficielles de ce qui est déjà décrit comme le manteau terrestre. Cependant, tout le monde ne s'accorde pas avec cette vue. Ainsi, Léopold de Buch s'intéresse à un autre type d'orogenèse, comme soulèvements successifs et multiples. Certains imaginent, en observant les volcans, que les montagnes se forment par des cratères de soulèvement. Globalement, les études se concentrent sur la question du mouvement, et délaissent celle de l'âge (faute de moyen pour dater les couches visibles). C'est pourquoi il est communément admis, et ce depuis René Descartes, que les montagnes d'un même âge s'orientent toutes dans la même direction, c'est-à-dire qu'il y a unicité du mouvement d'affaissement ou de soulèvement à une époque donnée. Ainsi, les montagnes sont vues soit comme la charpente de la Terre (De Beaumont propose un système géométrique des orogenèses en systèmes redondants selon la localisation géographique), soit comme le résultat d'une contraction chaotique.

Les discordances décrites par De Beaumont sont mieux expliquées par James Hutton, qui propose un système moderne en quatre phases (transformation en roche des sédiments ; formation de masses fondues en profondeur ; intrusion de ces coulées en surface, donc soulèvement et basculements ; érosion, donc mise à jour de plis d'âges différents). On peut noter la synthèse entreprise par Eduard Suess au début du XXe siècle, dans son ouvrage Face de la terre. En remarquant la prédominance des arcs alpins, il abandonne l'idée d'uni-direction et recentre son étude sur les tensions animant le manteau. Les mouvements horizontaux des roches ont déjà été étudiés par ses prédécesseurs, mais jamais réellement mis en relation avec le mouvement radial (donc vertical en un point donné du manteau) du magma. Par ailleurs, la théorie de la tectonique des plaques progresse rapidement, apportant son lot de remises en causes et de questions nouvelles, mais aussi de réponses. En s'appuyant sur ces différents travaux, Marcel Bertrand introduit notamment la décisive idée de nappe de charriage. L'orogenèse moderne se met ainsi en place et profite des progrès techniques du début XXe, dans les domaines de la datation, du forage, de l'étude des ondes sismiques...

Annexes

Articles connexes

Lien externe

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Bibliographie