Royaume du Mustang

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Le Mustang au coeur de l'Himalaya
District de Mustang dans la zone de Dhawalagiri
Drapeau national du Mustang
Charang

Du tibétain, Mun Tang signifiant plaine fertile, le Mustang ou Royaume de Lo est une région située dans le Nord-Est du Népal. Le territoire historique correspond aux deux-tiers nord du district de Mustang (मुस्ताङ जिल्ला, mustāṅa jillā, un des 75 districts népalais), et fut longtemps interdit d'accès aux étrangers. Aujourd'hui, les autorités népalaises autorisent l'entrée de quelques centaines de visiteurs par an.

Autrefois indépendant, bien que très proche du Tibet par la langue et la culture, il fait partie intégrante du territoire népalais depuis 1951. La capitale du royaume est le village de Lo Mantang. Le chef-lieu du district administratif de Mustang étant situé à Jomoson.

Le râja qui portait le titre tibétain de Lo Rgyal-p" n'occupait plus qu'une position honorifique à l'époque de la monarchie népalaise. En octobre 2008, la monarchie a été abolie au Mustang par décision du gouvernement de la nouvelle république du Népal.

Histoire

Du point de vue historique, il semble que la plus ancienne référence occidentale à ce royaume soit une lettre écrite par un moine capucin provenant de Bétia en Inde et datant de 1759. Le religieux dit avoir entendu parler du Mustang, région indépendante de Lhassa mais faisant partie du Tibet.

Archéologie

Les habitations troglodytes des nombreuses falaises du pays conservent une grande partie de leur mystère. Vingt-neuf cités troglodytes ont été découvertes et recensées par Michel Peissel[1] en 1964. Un éboulement récent (1994) survenu dans l'une d'elles a mis au jour des ossements et des poteries que les services archéologiques népalais datent d'il y a plus de 3 000 ans. Le Mustang est un des plus grands sites préhistoriques d'Asie.

En 2007 et 2008, des chercheurs de l'American Himalayan Foundation ont découvert des manuscrits prébouddhistes, des chambres funéraires et des peintures datant du XIIIe siècle, bien antérieures donc à la fondation du royaume de Lo[2],[3].

Le bouddhisme

Omniprésents autour des habitations, les triangles multicolores des drapeaux à prière rappellent qu'il s'agit d'une des terres d'origine du bouddhisme tibétain implanté au VIIIe siècle. Le Mustang regorge de légendes liées à Padma Sambava, le sage qui amena les enseignements de Bouddha jusqu'au Tibet et aurait fondé le plus ancien monastère mustangi. La plupart des moines vivaient dans des grottes, héritées de populations plus anciennes. Personne, d'ailleurs, n'en connaît l'origine, la plupart étant situées au milieu de la paroi de falaises particulièrement difficiles d'accès.

À Chhusang, tout près du village, un temple creusé dans la roche contient des statues de terre datant, peut-être, du XIIIe siècle et, une petite stèle de pierre que les spécialistes datent de la fin du Xe ou au début du XIe siècle mais par sa nature, elle ne semble pas appartenir au temple. Cette stèle indiquerait que le bouddhisme a pénétré la région bien avant la fondation du royaume de Lo, au début du XVe siècle.

Le royaume

Raja Jigme Dorje Palbar Bista, dernier roi de Mustang, 2011

La lignée des râjas remonterait à 1350 et à Ame Pal, le guerrier qui créa le royaume bouddhiste. Le Mustang a toujours été protégé par les autorités népalaises qui ont laissé au roi (gyalpo) la plupart de ses prérogatives et préservent le pays de l'invasion touristique. Cependant, le 7 octobre 2008, le gouvernement népalais a pris la décision d'abolir la monarchie du Mustang. L'ultime souverain de ce petit royaume s'est plié à cette décision en acceptant de devenir un citoyen ordinaire tout en continuant de travailler à la préservation de l'héritage culturel de son ancien royaume. L'ex-souverain reste cher au cœur des habitants. La fertilité des terres est considérée comme directement liée à la piété envers le souverain.

Le Mustang constitue une particularité ethnique et culturelle. « Nous sommes politiquement népalais mais naturellement tibétains », sourit le prince héritier, Jigme Singi Palbar Bista, dans sa résidence de Katmandou où il vit la plupart du temps.

Jusqu'à l'occupation chinoise du Tibet, la frontière n'existait d'ailleurs que sur papier : les bergers et leurs troupeaux la traversaient sans même le savoir, et les moines avaient l'habitude d'aller compléter leur formation dans les monastères tibétains. Symbole des liens étroits entre les deux peuples, le roi et le prince héritier sont d'ailleurs tous deux mariés avec des Tibétaines de souche. Selon le dalaï-lama, le Mustang est « l'un des rares endroits dans l'Himalaya ayant gardé inchangée sa culture tibétaine »[4].

Géographie

Vallée de la Kâlî Gandhakî
Khobang, Kâlî Gandhakî
Lopa au festival de Yartung
Yak

Le Mustang s'étend approximativement sur 80 kilomètres du nord au sud et 45 kilomètres dans sa plus grande largeur pour une superficie d'environ 1 200 km². L'altitude dépasse 2 500 m. En position derrière une barrière montagneuse himalayenne, il est quasiment à l'abri de la mousson indienne et largement aride, les précipitations annuelles sont entre 250 à 400 millimètres.

Les cavaliers se protègent des tourbillons de sable. En effet, les bourrasques qui s'engouffrent entre l'Annapurna et le Dhaulagiri soufflent quotidiennement sur le Mustang. La rareté de la végétation les transforme vite en tempêtes désertiques. En conséquence de cette sécheresse, malgré l'altitude (4 000 mètres), il neige peu.

Le Mustang est entouré par les provinces népalaises de Dolpo et de Manang et borde le Tibet auquel il est relié par quatre cols tous à plus de 4 000 m : Kore (4 480 m), Phuphu (4 270 m), Sharba (4 420 m) et Chak (4 100 m).

La rivière Kali Gandaki prend sa source sur le territoire du Mustang à une altitude de 5 000 m et y développe sa vallée, partageant son territoire dans le sens du nord-est vers le sud-ouest et s'écoulant vers le Terai népalais. Cette vallée était autrefois une route commerciale entre l'Inde et le Tibet, en particulier pour le sel. Une partie de la vallée de la Kâlî Gandhakî, le Thak Khola, est la gorge la plus profonde au monde.[réf. nécessaire]

Pour un royaume de moins de dix mille habitants, traverser cinq siècles d'histoire en sauvegardant son autonomie est un véritable exploit. Il doit beaucoup à la géographie. Au sud, côté Népal, deux voies d'accès dont la gorge vertigineuse qui sépare le Dhaulagiri (8 172 m) et l'Annapurna (8 078 m). Au nord, vers le Tibet, le col le plus bas est à 4 270 mètres, à deux mois de marche de Lhassa. À l'est et à l'ouest, les chaînes montagneuses interdisent tout passage...

Population

La population tibétaine (ou thakali) s'élève à quelque 9 000 habitants appelés Lo-ba et répartis entre les trois « villes » et trente villages plus petits. La majeure partie de la population vit sur les rives de la Kâlî Gandhakî, entre 2 000 et 3 000 m d'altitude, mais, du fait des conditions climatiques rigoureuses, elle opère une importante migration saisonnière vers les régions plus basses du Népal.

Le Mustang serait peuplé d'environ 10 000 habitants, principalement des paysans pauvres. Le manque de perspective pousse beaucoup de jeunes à descendre dans les vallées, à Katmandou ou, plus au sud, en Inde pour chercher du travail[5].

Transports

Jomoson est doté d'un aéroport depuis 1962, ce qui en fait l'accès touristique principal du Mustang, depuis que la région a été ouverte aux étrangers en 1992.

La campagne n'est encore accessible qu'à pied ou à cheval. La construction d'une route précipitera bientôt ce territoire hors du temps en plein XXIe siècle[6].

Économie

La capitale est Lo Mantang, elle abrite quelque 1 000 habitants. Le centre administratif du district de Mustang où vivent 5 363 habitants[7], se trouve à Jomoson[8].

Les alpages

Le tourisme

Une taxe imposée par les autorités népalaises exige de s'acquitter d'un montant de 50 dollars US par jour et par personne pour visiter la région. Cette taxe instaurée dans les années 1990 devrait, pour 60 % au moins, servir au développement de la région. Dans les meilleures années, les lowas ont reçu tout juste 10 % des montants prélevés[réf. nécessaire].

Deux périodes sont à privilégier, à l'occasion des deux grands festivals locaux : Tenji (avril-mai) et Yartung (la nuit de la pleine lune d'août). Septembre-octobre est également une bonne période, à la veille des récoltes, les champs ajoutant une touche de couleurs aux paysages[9].

Annexes

Notes et références

  1. À partir de 1959, l'ethnologue français, parmi les premiers à parcourir les royaumes fermés de l’Himalaya passant de nombreuses années à sillonner à pied ou à dos de mulet le Mustang, le Bhoutan, le Ladakh, le Zanskar et le Tibet et rapportant divers témoignages (livres, articles, films documentaires, dessins et aquarelles).
  2. http://www.archeolog-home.com/pages/content/shangri-la-decouverte-de-vieux-manuscrits-tibetains.html
  3. GEO 404, Octobre 2012, p. 40
  4. GEO N°404 d'octobre 2012 p.41
  5. GEO N°404 d'octobre 2012 p.37
  6. GEO N°404 d'octobre 2012 p.31
  7. recensement de 1998
  8. déformation du tibétain Dzong Sampa signifiant les trois forteresses
  9. GEO N°404 d'octobre 2012 p.44

Bibliographie

  • Michel Peissel, Mustang, Royaume Tibétain Interdit, Ed. Arthaud, Paris, 1969
  • Michel Peissel, Tibet, the Secret Continent, Cassel's Illustrated, London, 2002
  • Michel Peissel, Le Troisième pôle - Voyage aux fins fonds du Tibet dans l'inconnu et dans le froid sur le plus haut plateau de la planète, DVD documentaire, 2005

Articles connexes

Liens externes

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