Mort subite (médecine)

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La mort subite inopinée (ou MSI) est définie comme un décès imprévisible dans les 24 heures qui la précèdent. Elle peut se définir comme étant une mort naturelle survenant de façon inattendue. Elle est, dans ce cas, le premier et dernier symptôme de la maladie sous-jacente. Parfois, elle reste inexpliquée.

Épidémiologie[modifier | modifier le code]

La mort subite est responsable de près de 400 000 morts annuelles aux États-Unis[1].

En France, on en dénombre 40 000 cas par an uniquement pour la mort subite cardiaque[2].

La mort subite du sujet jeune et sportif aux États-Unis concerne un athlète tous les quatre jours[3].

La fréquence des morts subites cardiaques augmente avec l'âge et est moindre chez la femme[4]. Aux États-Unis, elle est plus fréquente chez les Afro-Américains[5].

Causes[modifier | modifier le code]

La survenue de mort subite est principalement secondaire à une cardiopathie coronarienne responsable de troubles du rythme ventriculaire. La maladie coronarienne est responsable d'environ trois-quarts des morts subites cardiaque[4]. L'embolie pulmonaire et les accidents vasculaires cérébraux en sont également des étiologies fréquemment retrouvées. En l'absence d'atteinte cardiaque évidente, un peu moins de la moitié des arrêts cardiaques récupérés de l'adulte ne reçoivent pas d'explication satisfaisante malgré des investigations poussées[6].

Chez le sujet jeune[modifier | modifier le code]

La survenue d'une mort brutale chez un sujet jeune est relativement rare. À titre d'exemple, entre 1980 et 2003, 2 220 autopsies ont été faites par l'institut médicolégal de Lyon pour des morts par MSI (tel que défini par l'OMS), tous âges confondus. Pour 57 morts d'enfants de 6-18 ans, on a constaté une forte prédominance masculine (47 garçons pour 10 filles) et le plus souvent l'anatomopathologie a conclu à une cause cardiaque (cardiomyopathie hypertrophique et la dysplasie arythmogène du ventricule droit). Un prolapsus valvulaire mitral était fréquent, très souvent alors associé à d'autres anomalies. Une part significative de ces morts (24 sur 57) est survenue lors d'une activité physique[7]. Dans une autre série américaine, une anomalie cardiaque est retrouvée dans la moitié des cas, avec comme première cause, une anomalie de naissance de la coronaire gauche[8].

Surtout si la MSI survient au cours d'un effort, elle doit faire penser aux pathologies cardiovasculaires suivantes :

L'activité physique ne semble pas jouer un rôle systématique ni déterminant dans la MSI.

La commotio cordis, expression latine signifiant « choc sur le cœur », est un cas particulier. Elle consiste en une mort subite dans les suites immédiates d'un choc à la poitrine provoquant une fibrillation ventriculaire, et ce en l'absence d'anomalie structurale du cœur avant le traumatisme.

Prévention[modifier | modifier le code]

La prévention de la mort subite a fait l'objet de la publication de recommandations. Celles de l'European Society of Cardiology ont été mises à jour en 2022[9]. Elle repose sur l'identification des sujets à risque chez qui doit être discutée l'indication de la pose d'un défibrillateur automatique implantable en plus du traitement spécifique de la maladie causale.

Cette stratification du risque est cependant imparfaite puisque la majeure partie des accidents surviennent chez des patients qualifiés d'« à faible risque », car, de loin, les plus nombreux[10].

Le risque dépend essentiellement de l'évaluation de la fraction d'éjection, index de la fonction mécanique du ventricule gauche. Le seuil est situé entre 30 et 35 % suivant les études[11],[12]. Dans les cas limites, la présence de potentiels tardifs sur l'électrocardiogramme à haute amplification[13], ainsi que celles de salves de tachycardie ventriculaire non soutenue sur le holter (électrocardiogramme de 24 h)[14] sont des facteurs de risque de mort subite rythmique.

En cas de cardiomyopathie hypertrophique, maladie comportant un épaississement important du muscle cardiaque avec désorganisation structurelle des fibres musculaires, le risque de mort subite semble augmenté pour des degrés d'hypertrophie importante[15], et surtout, s'il existe des antécédents de syncope chez le sujet ou de morts subites dans la famille de ce dernier[16]. La corrélation entre degré d'obstruction et risque de mort subite reste discutée. La présence d'accès de tachycardie ventriculaire non soutenue sur l'enregistrement électrocardiographique de 24 h (holter) est un critère péjoratif[16].

Chez le sujet jeune[modifier | modifier le code]

Une évaluation médicale du jeune sportif, comprenant un interrogatoire, un examen clinique et un électrocardiogramme pourrait diminuer le risque de mort subite[17], de même que certaines mesures préventives (ex : éducation des intervenants, et accès rapide à un dispositif de réanimation cardiaque)[7].

Il a été publié plusieurs recommandations sur la prévention de ces accidents, tant en Europe[18] qu'aux États-Unis[19]. Les deux publications différent cependant sur plusieurs points, l'un des plus importants étant celui attribué au rôle de l'électrocardiogramme dans le dépistage des sujets à risque : ce dernier examen est fortement recommandé en Europe mais l'est beaucoup moins aux États-Unis. Si l'intérêt de l'électrocardiogramme n'est plus à démontrer, plusieurs freins à sa réalisation systématique subsistent.

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. (en) Zipes DP, Wellens HJJ, « Sudden cardiac death », Circulation, no 98,‎ , p. 2334-2351 (lire en ligne)
  2. Mort subite cardiaque : que faire ?
  3. (en) Maron BJ, Doerer JJ, Haas TS, Tierney DM, Mueller FO., « Profile and frequency of sudden death in 1 463 young competitive athletes: from a 25 year US national registry: 1980-2005 », Circulation, no 114,‎ , p. 830 (résumé)
  4. a et b (en) Deo R, Albert CM., « Epidemiology and genetics of sudden cardiac death », Circulation, no 125,‎ , p. 620-637 (lire en ligne)
  5. (en) Becker LB, Han BH, Meyer PM. et al., « Racial differences in the incidence of cardiac arrest and subsequent survival. The CPR Chicago Project », N Engl J Med., no 329,‎ , p. 600–606 (lire en ligne)
  6. Krahn AD, Healey JS, Chauhan V et Als. Systematic assessment of patients with unexplained cardiac arrest: Cardiac Arrest Survivors With Preserved Ejection Fraction Registry (CASPER), Circulation, 2009;120:278-285
  7. a et b J.-M. Dupuis et A. Tabib, « Mort subite inopinée d'origine cardiaque entre 6 et 18 ans. Données anatomopathologiques. Rôle du sport ? Prévention ? », sur Archives de Pédiatrie, (DOI 10.1016/j.arcped.2005.02.006, consulté le ), p. 1204–1208
  8. Eckart RE, Scoville SL, Campbell CL et al. Sudden death in young adults: a 25-year review of autopsies in military recruits, Ann Intern Med, 2004;141:829-834
  9. Zeppenfeld K, Tfelt-Hansen J, de Riva M et al. 2022 ESC Guidelines for the management of patients with ventricular arrhythmias and the prevention of sudden cardiac death: Developed by the task force for the management of patients with ventricular arrhythmias and the prevention of sudden cardiac death of the European Society of Cardiology (ESC) Endorsed by the Association for European Paediatric and Congenital Cardiology (AEPC), European Heart Journal, 2022;43,3997–4126
  10. Goldberger JJ, Cain ME, Hohnloser SH, American Heart Association/American College of Cardiology Foundation/Heart Rhythm Society : Scientific statement on noninvasive risk stratification techniques for identifying patients at risk for sudden cardiac death, JACC, 2008; 52:1179-1199.
  11. Buxton AE, Lee KL, Hafley GE, et als. MUSTT Investigators, Relation of ejection fraction and inducible ventricular tachycardia to mode of death in patients with coronary artery disease: an analysis of patients enrolled in the Multicenter Unsustained Tachycardia Trial, Circulation, 2002;106:2466-2472.
  12. Moss AJ, Zareba W, Hall WJ et als. Multicenter Automatic Defibrillator Implantation Trial II Investigators Prophylactic implantation of a defibrillator in patients with myocardial infarction and reduced ejection fraction, N Engl J Med, 2002;346:877-883.
  13. Gomes JA, Cain ME, Buxton AE, Josephson ME, Lee KL, Hafley GE, Prediction of long-term outcomes by signal-averaged electrocardiography in patients with unsustained ventricular tachycardia, coronary artery disease, and left ventricular dysfunction, Circulation, 2001;104:436-441.
  14. Buxton AE, Lee KL, Fisher JD, Josephson ME, Prystowsky EN, Hafley G, Multicenter Unsustained Tachycardia Trial Investigators A randomized study of the prevention of sudden death in patients with coronary artery disease, N Engl J Med, 1999;341:1882-1890.
  15. Spirito P, Bellone P, Harris KM, et als. Magnitude of left ventricular hypertrophy and risk of sudden death in hypertrophic cardiomyopathy, N Engl J Med, 2000;342:1778–85.
  16. a et b Elliott P, Spirito P, Prevention of hypertrophic cardiomyopathy-related deaths: theory and practice, Heart, 2008;94:1269-1275.
  17. Corrado D, Basso C, Pavei A, Michieli P, Schiavon M, Thiene G, Trends in sudden cardiovascular death in young competitive athletes after implementation of a preparticipation screening program, JAMA, 2006;296:1593-601
  18. Corrado D, Pelliccia A, Bjornstad HH, Vanhees L, et als. Cardiovascular pre-participation screening of young competitive athletes for prevention of sudden death: proposal for a common European protocol. Consensus statement of the study group of sport cardiology of the Working Group of Cardiac Rehabilitation and Exercise Physiology and the working group of myocardial and pericardial diseases of the European Society of Cardiology, Eur Heart J, 2005;26:516-24
  19. Maron BJ, Thompson PD, Ackerman MJ et als. Recommendations and considerations related to preparticipation screening for cardiovascular abnormalities in competitive athletes: 2007 update: a scientific statement from the American Heart Association Council on Nutrition, Physical Activity, and Metabolism: endorsed by the American College of Cardiology Foundation, Circulation, 2007;115:1643-55