Marcelle Capy

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Marcelle Capy
Biographie
Naissance
Décès
Voir et modifier les données sur Wikidata (à 68 ans)
Pradines (Lot, France)Voir et modifier les données sur Wikidata
Nom de naissance
Marcelle MarquèsVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
Activités

Marcelle Capy, pseudonyme de Marcelle Marquès, née le à Cherbourg et morte le à Pradines (Lot), est une journaliste, écrivaine, militante syndicaliste, pacifiste et féministe libertaire française[1],[2].

Elle est directrice de la Ligue des droits de l'homme[3][4] et cofondatrice de l'hebdomadaire La Vague.

Dans ses livres, ses conférences, ses articles, elle soutient un triple combat : pour la paix en dénonçant l'horreur et l'absurdité de la guerre ; féministe en soulignant le rôle fondamental des femmes dans la société moderne qu'a révélé la Première Guerre mondiale et socialiste libertaire de caractère surtout moral et philosophique, en prônant le devoir de solidarité[5]. Elle pratique un journalisme d'immersion avant l'heure, travaillant à la chaîne dans une fabrique de moteurs d'avions, sur les soudures pour les ampoules électriques, ou encore comme poissonnière aux Halles.

Biographie[modifier | modifier le code]

Origines familiales et formation[modifier | modifier le code]

Les parents de Marcelle Eugénie Marie Marquès sont issus de familles paysannes de Pradines, près de Cahors (Lot). Elle est la deuxième d'une famille de quatre filles[6]. Son père, Jean Marques, est officier d'artillerie et de marine[5]. Elle grandit là, dans le Lot, près d'un grand-père attaché à la terre. C'est aussi là qu'elle vit ses dernières années[7].

Elle a adopté comme pseudonyme Capy, le nom patronymique de sa mère, Gabrielle Marceline Capy[8] mais aussi celui de son grand-père maternel, ami de Léon Gambetta[7], également originaire de Cahors.

Elle fait des études secondaires au lycée de jeunes filles de Toulouse, puis entre en classe préparatoire à l'École normale supérieure de Sèvres dans le même lycée. À 18 ans, elle rencontre Jean Jaurès à Toulouse et décide qu'elle sera écrivaine, journaliste et militante[5]. « J'ai compris que les mots nous ont été donnés pour aider ceux qui sont malheureux. Je me sentais enragée de justice. »[9]

Elle épouse Henri Pierre Alexandre Cachet le  ; ils divorcent en 1914[8].

La Première Guerre mondiale[modifier | modifier le code]

La Vague (date illisible).

Elle collabore à La Voix des femmes[réf. souhaitée] et à La Bataille syndicaliste[10] dont elle démissionne avec Fernand Desprès, en , en raison de la ligne d'Union sacrée adoptée par le journal[11],[12].

En 1916, elle publie, sous le nom de Marcelle Capy, son premier ouvrage, préfacé par Romain Rolland, Une voix de femme dans la mêlée. C'est un vibrant plaidoyer contre la guerre et l'ouvrage est victime de la censure[13]. Sa correspondance est alors surveillée par la police[14]. Son pacifisme affiché, en pleine guerre, l'oblige à démissionner en août 1915 de La Bataille syndicaliste, qui ne partage pas ses positions. Séverine, la doyenne des femmes journalistes, lui apporte son soutien. Marcelle Capy écrit alors pour Les Hommes du jour et Le Journal du peuple[6].

Entre et , elle travaille anonymement dans une usine d'armement et publie son témoignage dans le journal La Voix des Femmes : « La journaliste Marcelle Capy, qui a enquêté sur les conditions de travail de la femme dans les usines d'armement, a été impressionnée par l'effort demandé aux femmes, notamment aux contrôleuses d'obus qui, onze heures par jour, manipulent 2 500 obus de 7 kilos, soit 35 tonnes. S'essayant à ce labeur pour tester ses capacités, Marcelle Capy doit déclarer forfait : “Au bout de trois quarts d'heure, je me suis avouée vaincue. J'ai vu ma compagne toute frêle, toute jeune, toute gentille dans son grand tablier noir, poursuivre sa besogne. Elle est à la cloche depuis un an. 900 000 obus sont passés entre ses doigts. Elle a donc soulevé un fardeau de 7 millions de kilos.” En ce qui concerne le salaire des femmes, la formule à travail égal salaire égal est partout bafouée. Dans une fabrique d'obus, un garçon de 15 ans touche de 12 à 15 francs et une mère de famille de 5 à 6. Les patrons osent justifier de telles différences en invoquant l'allocation touchée par les femmes de mobilisés »[15],[16],[17].

Le , elle est parmi les fondateurs de l'hebdomadaire antimilitariste La Vague, dont elle assure le secrétariat de rédaction[18],[19] et la direction politique avec le député socialiste Pierre Brizon (1878-1923) qu'elle épouse en 1922. L'hebdomadaire, fondamentalement socialiste et pacifiste, conquiert rapidement une large audience. Les articles de Marcelle Capy devenant incompatibles avec le ligne du journal, elle quitte La Vague et Pierre Brizon en 1923[20].

La journaliste Séverine est intéressée par ses articles et demande à la rencontrer. Elles deviennent amies[7].

L'entre-deux-guerres[modifier | modifier le code]

En 1925, elle écrit L'amour Roi et son ouvrage majeur Des hommes passèrent…, couronné du prix Séverine de l'Association des femmes journalistes. Ce roman raconte le passage, dans les familles de Pradines, de prisonniers allemands venus remplacer, aux travaux de la ferme, les hommes partis au front.

Elle rencontre Henri Barbusse, Romain Rolland, Joseph Caillaux et Anatole de Monzie. Elle donne des conférences en Europe, aux États-Unis, au Canada[5].

Au début des années 1930, elle participe à la Ligue internationale des combattants de la paix[21] (LICP) , dont elle est « responsable de la propagande » et pour laquelle elle donne des conférences avec Robert Jospin[22]. Son discours À bas les armes, prononcé en congrès de mars 1932, devant, entre autres, Albert Einstein, Georges Duhamel et Heinrich Mann, est applaudi à tout rompre. Elle voyage beaucoup pour ces conférences, à travers l'Europe, aux États-Unis et au Canada[6]. Il semble qu'elle se soit rendue également en URSS et donne des conférences sur La vie en URSS[7].

En 1934, elle publie Femmes seules, un roman découpé en trois saisons.

En 1936, « voyant que tout cela recommence », elle republie, à compte d'auteur, Une voix de femme dans la mêlée avec le texte complet qui avait été censuré en 1916.

La Seconde Guerre mondiale et après[modifier | modifier le code]

Bien qu'elle ait été membre du bureau de la Ligue internationale contre l'antisémitisme au début des années 1930, elle écrit pendant l'Occupation dans L'Effort, quotidien socialiste fondé en août 1940 et rallié au régime de Vichy, et Germinal, revue hebdomadaire fondée en 1944 et proche de la Collaboration[23], où écrit aussi Robert Jospin.

Après la guerre, elle écrit deux romans : La vie tient à un fil et L'Égypte au cœur du monde, qu'elle rapporte d'un voyage chez sa sœur aînée, Jeanne Marques, journaliste et conférencière liée aux milieux intellectuels et artistiques progressistes égyptiens.

Elle participe aussi à la fondation du Comité national de résistance à la guerre et à l'oppression (CNRGO) de Félicien Challaye et Émile Bauchet en 1951[24].

Antiraciste, elle était membre de la Ligue des droits de l'homme (dont elle a été un temps directrice) et avait rejoint la LICRA. Cependant, en 1944, en raison de ses silences complices durant l'Occupation, la LICRA, la classera parmi les traîtres. En 1951, elle est parmi les membres fondateurs du Comité national de résistance à la guerre et à l'oppression.

Elle meurt en 1962 à l'âge de 70 ans.

Hommages[modifier | modifier le code]

Séverine dit d'elle dans La Vie féminine du  : « Jeune, robuste, frémissant d'amour pour la détresse humaine et de révolte contre qui l'exploite, elle se jette à tout instant dans la mêlée »[25].

Son roman Des hommes passèrent reçoit le prix Séverine en 1932[6].

Une rue du quartier de Lalande, à Toulouse, et une place de Pradines portent son nom.

Publications[modifier | modifier le code]

Ouvrage[modifier | modifier le code]

  • Une voix de femme dans la mêlée, Paris, Éd. Paul Ollendorf, 1916[26].
  • La défense de la vie, Paris, Éd. Ollendorf, 1918[27].
  • L’Amour roi, Paris, Société mutuelle d’édition, 1925[28].
  • Des hommes passèrent..., Éd. du Tambourin, 1930[29].
  • À bas les armes ! : discours prononcé au cours de la Croisade de la Paix organisée par la Ligue internationale des combattants de la paix, Paris, Patrie humaine, 1932[30].
  • De l'amour du clocher à l'amour du monde, conférence au groupe républicain lotois à Paris, Paris, Éd. Brutus, 1932.
  • À bas les armes !, Paris, LICP, 1933[31].
  • Femmes seules, Paris, Éd. Marqués, 1934.
  • Du côté du soleil, Alger', Éd. Braconnier Frères, 1935.
  • Avec les travailleurs de France, Paris, édité par l'auteur, 1937.
  • Femmes seules, Tarbes, Éd. Hunault, 1939.
  • L'Égypte au cœur du monde, Paris, Éd. Denoël, 1950.
  • L'homme et son destin, conférence donnée à la salle de la Société de Géographie, Paris, Éd. de l'école addéiste, 1951.

Préface[modifier | modifier le code]

Article[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Les femmes et la 1re guerre mondiale, CRDP de Champagne-Ardenne, 2000, en ligne.
  2. Éliane Gubin, Le siècle des féminismes, Éditions de l'Atelier, 2004, p. 31.
  3. notice de l'Idref.
  4. Cette information n'est pas confirmée par d'autres sources et le nom de Capy ne figure pas sur le site de la Ligue
  5. a b c et d Pierre Gayet, Marcelle Capy, une voix de femme au-dessus de la mêlée, Homme et Femmes en Quercy, septembre 1998, texte intégral.
  6. a b c et d Bernard Matot, Petite anthologie des premières femmes journalistes, Bordeaux, L'Eveilleur, , 223 p. (ISBN 9791096011407), p. 69-75
  7. a b c et d « CAPY Marcelle [née MARQUÈS Marcelle] - Maitron », sur maitron.fr (consulté le )
  8. a et b « Généalogie de Marcelle Eugénie Marie MARQUÈS », sur Geneanet (consulté le )
  9. Marcelle Capy, « La Leçon de la solitude », La République, 18 octobre 1934.
  10. « Filature du coton », La Bataille syndicaliste, 9 avril 1914, texte intégral.
  11. « Fernand Desprès », in Dictionnaire international des militants anarchistes (notice biographique en ligne).
  12. Pierre Jean Jouve, Fernand Desprès, notice.
  13. Anne Cova, Féminismes et néo-malthusianismes sous la Troisième République, L'Harmattan, 2001, p. 115.
  14. Emmanuel Naquet, « La société d'études documentaires et critiques sur la guerre. Ou la naissance d'une minorité pacifiste au sein de la Ligue des Droits de l'Homme », in Matériaux pour l'histoire de notre temps, 1993, no 30, « S'engager pour la paix dans la France de l'entre-deux-guerres », p. 7.
  15. Pierre Darnon, Vivre à Paris pendant la Grande Guerre, Hachette Littérature, 2004, extrait en ligne.
  16. « L'évolution de la condition féminine pendant la 1re guerre mondiale », in L'Histoire des femmes et les femmes dans l'histoire de la Troisième République, Académie de Rennes, en ligne.
  17. Roger Colombier, Le travail des femmes autrefois : Chroniques jusque dans les années 1960, L'Harmattan, 2012, p. 146.
  18. René Bianco, 100 ans de presse anarchiste, notice.
  19. Yannick Ripa, Les femmes, actrices de l'Histoire : France, de 1789 à nos jours, A. Colin , 2010, extrait en ligne.
  20. « Brizon Pierre », sur ex-pcf.com (consulté le )
  21. Jean-Pierre Biondi, La mêlée des pacifistes : 1914-1945, extrait en ligne.
  22. « Émile Bauchet », in Dictionnaire international des militants anarchistes, notice biographique.
  23. Simon Epstein, Un paradoxe français, Albin Michel, 2008, extraits en ligne.
  24. « Marcelle Capy », sur Si/si, les femmes existent, (consulté le )
  25. Collectif, 1914-1918 L'Autre Front, Éditions de l'Atelier, 1989, page 194.
  26. Annamaria Laserra, Nicole Leclercq, Mémoires et Antimémoires littéraires au XXe siècle - La Première Guerre mondiale, Pter Lang, 2008, page 274.
  27. BNF : notice.
  28. Cgecaf : notice.
  29. IdRef : notice.
  30. Cgecaf : notice.
  31. Cgecaf : notice.
  32. IdRef : notice.
  33. Anne-Marie Sohn, Chrysalides femmes dans la vie privee XIXe – XXe siècles, Publications De La Sorbonne, 1996, p. 144.
  34. « La Vague 25 septembre 1919 », sur RetroNews - Le site de presse de la BnF (consulté le )

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Évelyne Diebolt, Marcelle Capy - Aline Valette : femmes et travail au XIXe siècle, Syros, 1984.
  • Pierre Gayet, Marcelle Capy, une voix de femme au-dessus de la mêlée, Homme et Femmes en Quercy, , texte intégral.
  • Michel Gaudart de Soulages, Hubert Lamant, Capy (Eugénie Marie Marcelle Marques, dite) in Dictionnaire des francs-maçons français, 1980, p. 135.
  • Aline Canal, Pacifisme, féminisme, socialisme. Marcelle Capy (1891-1962) : une femme engagée dans la Cité de la Belle-époque à le seconde guerre mondiale, s/d de Sylvie Chaperon, Thèse, Université Toulouse II-Le Mirail, 2009.

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]