Louis de Luxembourg-Saint-Pol

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Louis de Luxembourg
Connétable de Saint-Pol
Image illustrative de l’article Louis de Luxembourg-Saint-Pol
Louis de Luxembourg, comte de Saint-Pol.
Vue d'artiste peinte par Alexandre Joseph de Steuben, musée de l'Histoire de France (Versailles), 1838.

Titre Comte de Saint-Pol et de Conversano
(1433-1475)
Autres titres Comte de Brienne
Prédécesseur Pierre Ier de Luxembourg
Successeur Pierre II de Luxembourg
Arme Chevalerie
Commandement Connétable de France
Conflits Siège de Dieppe
Ligue du Bien public
Bataille de Montlhéry
Faits d'armes Siège de Dieppe
Reprise d'Harfleur (1443)
Reprise de Caen (1450)
Prise de Saint-Quentin (1470)
Distinctions Chevalier de l'Ordre de Saint-Michel
Biographie
Dynastie Maison de Luxembourg
Naissance
Décès
Paris
Père Pierre Ier de Luxembourg-Saint-Pol
Mère Marguerite des Baux

Blason de Louis de LuxembourgConnétable de Saint-Pol

Louis de Luxembourg, connu dans l'histoire sous le nom de connétable de Saint-Pol[1], né en 1418 et mort à Paris, le , fut l'un des membres les plus influents de la haute noblesse française, à la fois vassal du roi de France et du duc de Bourgogne. Il fut fait connétable par Louis XI mais fut condamné à mort et exécuté pour haute trahison en place de Grève.

Biographie[modifier | modifier le code]

Un grand du royaume de France[modifier | modifier le code]

Louis de Luxembourg était le fils de Pierre Ier de Luxembourg, comte de Saint-Pol[Note 1], de Brienne et de Conversano, et de Marguerite des Baux (Margherita del Balzo, 1394-1469). Son nom vient du fait qu'il était un descendant de 7e génération de Henri V, comte de Luxembourg, appartenant donc à la branche française de la maison de Luxembourg.

Louis de Luxembourg était comte de Saint-Pol de 1433 à 1475, de Ligny et de Conversano, comte de Brienne, de 1441 à 1475, de Guise de 1441 à 1444, de Marle et de Soissons de 1435 à 1475, châtelain de Lille, seigneur d'Enghien, d'Oisy, de Bohain, de Beauvoir, de Condé-en-Brie et de Bourbourg.

Il épousa en premières noces, Jeanne de Bar, comtesse de Soissons et de Marle, seigneur de Ham[Note 2]. Il hérita à son décès de la seigneurie de Ham[2].

Par le comté de Saint-Pol, il était vassal du duc de Bourgogne qui était lui-même vassal du roi de France. Il fut ainsi mêlé aux intrigues de ces deux personnages.

Orphelin de père à quinze ans, il fut élevé par son oncle Jean de Luxembourg qui s'était illustré en 1430 par la capture de Jeanne d'Arc à Compiègne. À la mort de Jean de Luxembourg en 1441, les biens hérités de ce dernier furent mis sous séquestre par Charles VII car Louis refusait de signer le traité d'Arras de 1435. Louis de Luxembourg se rapprocha de la France et put ainsi les récupérer, mais le comte du Maine lui intenta un procès à propos de la possession de la seigneurie de Guise. Un arrangement fut trouvé en mai 1444, Charles du Maine ayant épousé Isabelle de Luxembourg-Saint-Pol, la sœur de Louis de Luxembourg, celle-ci reçut Guise en dot.

Louis de Luxembourg fortifia la ville de La Fère dans l’Aisne, qu’il entoura de murs et, sur l’emplacement d'un ancien château fort au donjon carré, il en fit élever un nouveau, qui fut agrandi et embelli par sa petite fille, Marie de Luxembourg-Saint-Pol, arrière-grand-mère d’Henri IV et de Marie Stuart.

Il fit reconstruire le château de Ham et le dota en 1441 d'un donjon formidable (appelé « tour du Connétable ») de 33 m de haut et de 33 m de diamètre avec des murs de 11 mètres d'épaisseur capables de résister aux assauts de l'artillerie naissante. Il fit graver cette devise au-dessus de la porte d'entrée de la Tour du Connétable: « Mô Myeux » (Mon mieux)[3].

Un connétable jouant double jeu[modifier | modifier le code]

Louis de Luxembourg devint proche du dauphin (le futur Louis XI) et participa à ses côtés au siège de Dieppe. La ville fut délivrée le . Le dauphin l'arma chevalier, juste avant l'assaut final. Le comte de Saint-Pol ensuite combattit les Anglais et les chassa de Flandre et de Normandie, reprise d'Harfleur, le , de Gournay-en-Bray en 1449 et de Caen en 1450[4].

Le comte de Saint-Pol, malgré son soutien au roi de France, apportait également son aide au duc de Bourgogne, Philippe le Bon. En 1452, il combattit contre l’archevêque de Cologne et les Gantois révoltés.

Il prit part en 1465 à la Ligue du Bien public et à la guerre qui s'ensuivit aux côtés des grands féodaux révoltés contre Louis XI, roi de France. C’est sa désobéissance qui provoqua la bataille de Montlhéry, et sa fuite manqua d’entraîner une déroute bourguignonne.

À la bataille de Montlhéry, il commandait l’avant-garde du comte de Charolais (le futur Charles le Téméraire). Néanmoins, Louis XI cherchait à l'attirer à son service.

Par le traité de Conflans de 1465, il reçut de Louis XI le titre de connétable[Note 3]. Il épousa, en 1466, Marie de Savoie, sœur de la reine de France Charlotte, et reçut les seigneuries de Guise et du Nouvion-en-Thiérache. Le connétable de Saint-Pol passa ainsi au service du roi de France. Il fut nommé, par ailleurs, à la première promotion de l'Ordre de Saint-Michel, créé par Louis XI le [5].

Puissant parmi les puissants, il se comportait en prince indépendant et cherchait à jouer le rôle principal dans les intrigues et les troubles de la période.

Malgré des marques apparentes d'hostilité envers le duc de Bourgogne (prise de Saint-Quentin, 1470), il avait des intelligences secrètes avec lui et en 1475, lors de l'invasion de la France par le roi Édouard IV d'Angleterre, sa conduite ne fut pas moins équivoque.

La chute[modifier | modifier le code]

En 1471, lassé des intrigues du connétable, Charles le Téméraire prévint Louis XI de son double-jeu. Les deux princes firent de Louis de Luxembourg leur ennemi commun à partir de 1474. Le comte de Saint-Pol incita alors le roi d'Angleterre Édouard IV à marcher sur la Picardie promettant de lui livrer Saint-Quentin[6].

À la suite des conférences de Picquigny entre Louis XI et le roi d'Angleterre, le , Édouard IV, trompé par le comte de Saint-Pol, donna à Louis XI la correspondance que le connétable lui avait adressée[7]. Louis XI marcha ensuite sur Saint-Quentin où le connétable s'était retranché. Préférant esquiver l'affrontement, Louis de Luxembourg chercha refuge à Mons auprès du duc de Bourgogne. Mais Charles le Téméraire décida de le faire arrêter et de le livrer à Louis XI[7].

Dès son arrivée à Paris le , son procès commença et dura trois semaines.

L'étude des interrogatoires du connétable de Saint-Pol permet de retracer le déroulement d'un complot dans lequel de nombreux princes français et européens étaient impliqués. Cet événement judiciaire apparaît comme une confrontation entre le roi de France et la très haute noblesse. Le connétable de Saint-Pol y défendit constamment son « honneur » face au souverain qui utilisa le Parlement de Paris et s'appuya sur le « principe monarchique » élaboré au cours des siècles passés.

Louis XI fit de ce procès pour lèse-majesté, un procès exemplaire par sa durée et par la procédure suivie. La condamnation et l'exécution de Saint-Pol ont fortement marqué les chroniqueurs du temps, comme Philippe de Commynes, Thomas Basin ou Jean de Roye, du fait de l'importance du connétable. Celui-ci apparaît comme une victime de l'utilisation par Louis XI de la justice royale à des fins de vengeance personnelle[8].

Emprisonné à la Bastille le 27 novembre, Louis de Luxembourg fut condamné à mort par le Parlement le , et décapité sur la place de Grève de Paris le même jour. Sa dépouille fut ensevelie par les moines cordeliers dans l'église Saint-Claire[4],[9].

Le duc de Bourgogne reçut, après son exécution, les territoires de Saint-Quentin, Ham et Bohain[10], qu'il troqua avec Louis XI contre l'autorisation tacite[11] de conquérir le duché de Lorraine (octobre-).

Mariages et descendance[modifier | modifier le code]

Le , il épousa Jeanne de Bar (1415 - † 1462), comtesse de Marle et de Soissons, fille de Robert de Bar, comte de Marle et de Soissons, et de Jeanne de Béthune[Note 4],[12]. Il hérite au décès de son épouse de la seigneurie de Ham (Somme). Ils eurent sept enfants :

Veuf, il se remaria en 1466 avec Marie (1448 - † 1475), fille de Louis Ier, duc de Savoie, et prince de Piémont, et d'Anne de Lusignan. Avec ces noces, il devient beau-frère de Louis XI. Ils eurent trois enfants :

  • Louis (1467 † 24.12.1503), comte de Ligny (1475), puis prince d’Altamura, duc d'Andria et de Venosa, capitaine de Charles VIII, lieutenant général de l'armée française, grand chambellan de Louis XII, gouverneur de Picardie.
  • Jeanne, nonne à Gand.
  • Charles (1475 ? † 1475/76?), meurt à Cambrai peu après l'exécution de son père.

Louis de Luxembourg eut par ailleurs huit bâtards, dont Robert de Luxembourg évêque d'Angoulême et Gilles de Luxembourg, 80e évêque de Châlons-en-Champagne de 1503 à 1535.

Ascendance[modifier | modifier le code]

Sources[modifier | modifier le code]

Pour approfondir[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Archives du Syndicat d'Initiative de La Fère, extrait du livre La Fère, son histoire.
  • Anselme de Sainte-Marie, Histoire généalogique et chronologique de la Maison royale de France..., Paris, La Compagnie des libraires associez, 3e édition, tome 3, p. 726-727 : généalogie des comtes de Saint-Paul (disponible sur Gallica).
  • Joël Blanchard, Commynes et les procès politiques de Louis XI. Du nouveau sur la lèse-majesté, Paris, Picard, 2008, 184 p. (ISBN 978-2-7084-0834-0).
  • Pierre-Jacques Brillon, Dictionnaire des arrêts ou jurisprudence universelle des parlements et autres tribunaux, Paris, G. Cavelier père, 1727, tome 2.
  • Louis Charles Dezobry et Théodore Bachelet, Dictionnaire de Biographie et d’Histoire, Paris, [détail de l’édition].
  • Jacques Dollar, Les intrigues de Louis de Luxembourg, comte de Saint-Pol, connétable de France, Bascharage (Luxembourg), chez l'auteur, 1985.
  • Edmond Edmont, Galerie ternésienne ou Dictionnaire biographique des personnages les plus remarquables de l'ancien comté de Saint-Pol ou de l'arrondissement actuel de ce nom, Saint-Pol-sur-Ternoise, Imprimerie Dubois, 1910, p. 139 à 145.
  • Jean Favier, Louis XI, Paris, Fayard, , 1019 p. (ISBN 978-2-213-61003-0).
  • Charles Gomart, Ham, son château et ses prisonniers, Ham, Lucas, 1864 [lire en ligne].
  • Yves Lallemand, « Le procès pour trahison du connétable de Saint-Pol », in Les procès politiques XIVe – XVIIe siècles, Yves-Marie Bercé éd, Rome, École française de Rome, 2007, 709 p.
  • Werner Paravicini, « Peur, pratiques, intelligences. Formes de l'opposition aristocratique à Louis XI d'après les interrogatoires du connétable de Saint-Pol », in La France de la fin du XVe siècle. Renouveau et apogée, Bernard Chevalier et Philippe Contamine (dir.), Paris, Éditions du CNRS, 1985, p. 183-196.
  • G. Périnelle, « Un texte officiel sur l'exécution du connétable de Saint-Pol () » in Mélanges d'archéologie et d'histoire t. 23, 1903, p. 427-432. Lire en ligne
  • G. E. Sauvage, « Chapitre V: Le connétable Louis de Luxembourg » in Histoire de Saint-Pol, Arras, Jean Degeorges imprimeur, 1834.
  • Daniel Soumillion, Le procès de Louis de Luxembourg : comte de Saint-Pol, connétable de France (1418-1475). s.l. : s.n., 2007. 287 p.
  • Célestine de Varreux, Le connétable de Saint-Pol ou la Bataille de Montlhéry, histoire du XVe siècle, Paris, L. Cerf, 1892, 440 p.
  • Leopold De Villers, II. Documents relatifs à l'arrestation de Louis de Luxembourg, comte de Saint-Pol, connétable de France, à Mons, en n dans Bulletin de la Commission royale d'Histoire, 1890, no 17, p. 302-318 (lire en ligne)
  • Hanno Wijsman, « Le connétable et le chanoine. Les ambitions bibliophiliques de Louis de Luxembourg au regard des manuscrits autographes de Jean Miélot », in Le livre au fil de ses pages. Actes de la 14e journée d'étude du Réseau des Médiévistes belges de Langue française. Université de Liège, , édités par Renaud Adam et Alain Marchandisse, Bruxelles, Archives et bibliothèque de Belgique numéro spécial 87, 2009, p. 119-150.
  • Hanno Wijsman, Luxury bound: illustrated manuscript production and noble and princely book ownership in the Burgundian Netherlands. 1400-1550, Belgique, Brepols, 2010, 717 p.

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Aujourd'hui, Saint-Pol-sur-Ternoise, dans le Pas-de-Calais.
  2. Ville de Picardie.
  3. C'est-à-dire, chef des armées royales.
  4. Par lettres du 27 juin 1437, Jean de Luxembourg-Ligny et sa femme Jeanne de Béthune, reconnurent que Louis de Luxembourg, mari de Jeanne de Bar, avait assigné le douaire de sa belle-mère, veuve de Robert de Marle, sur la seigneurie d'Oisy.

Références[modifier | modifier le code]

  1. Sa généalogie sur le site Medieval Lands
  2. G. E. Sauvage, Histoire de Saint-Pol, chapitre V: Le connétable Louis de Luxembourg; Arras, Jean Degeorges imprimeur, 1834
  3. Charles Gomart, Ham, son château et ses prisonniers, IIe partie, chapitre XXIII, p. 269-281 et chapitre XXIV, p. 282-296, 1864
  4. a et b Edmond Edmont, Galerie ternésienne ou Dictionnaire biogtaphique des personnages les plus remarquables de l'ancien comté de Saint-Pol ou de l'arrondissement actuel de ce nom, Saint-Pol-sur-Ternoise, Imprimerie Dubois, 1910, p. 139 à 145
  5. Lettres patentes de Louis XI, Amboise, le 1er août 1469 : Marquis de Pastoret, Ordonnances des Rois de France de la 3e Race, recueillies par ordre chronologique, vol. XVII, Paris, Imprimerie royale, (présentation en ligne, lire en ligne), p. 237.
  6. Edmond Edmont, Galerie ternésienne ou Dictionnaire biographique des personnages les plus remarquables de l'ancien comté de Saint-Pol ou de l'arrondissement actuel de ce nom, Saint-Pol-sur-Ternoise, Imprimerie Dubois, 1910, p. 139 à 145
  7. a et b Favier 2001, p. 692
  8. Yves Lallemand, « Le procès pour trahison du connétable de Saint-Pol », Congrès les procès politiques XIVe – XVe siècles, 20 janvier 2003, in Revue /Journal Tittle collection de l'École française de Rome, 2007, iss 0223-5099
  9. Pour connaitre les derniers jours du connétable, voir J.-J. Carlier, « Henri d'Oisy, fragment d'études historiques », dans Mémoire de la Société dunkerquoise pour l'encouragement des sciences, des lettres et des arts, 1857 publié en 1858, Dunkerque, p. 202-208, lire en ligne.
  10. Charles Gomart, Ham, son château et ses prisonniers, IIe partie, chapitre XXVI p. 313-314, 1864
  11. Favier 2001, p. 703.
  12. J.-J. Carlier, « Henri d'Oisy, fragment d'études historiques », dans Mémoire de la Société dunkerquoise pour l'encouragement des sciences, des lettres et des arts, 1857 publié en 1858, Dunkerque, p. 233, lire en ligne
  13. Les Genealogies Historiques Des Rois, Empereurs, &c. Et De Toutes Les Maisons Souveraines qui ont subsisté jusqu'à présent, , 698 p. (lire en ligne), p. 76.