Julienne de Cornillon

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Sainte Julienne de Cornillon

Sainte Julienne de Cornillon (ou Julienne du Mont-Cornillon), née vers 1192 à Retinne, près de Liège et décédée le , à Fosses-la-Ville (Belgique), était une religieuse augustinienne, et prieure du couvent-léproserie du Mont-Cornillon, dans la principauté de Liège. Elle est surtout connue pour avoir obtenu de l'évêque de Liège l'institution de la Fête-Dieu (en 1246).

C'est une sainte de l'Église catholique célébrée en Belgique le 7 août[1] et ailleurs le 5 avril[2]

Sa vie

Les Prémices

Née à Retinne, village près de Fléron, Liège (Belgique), elle perd ses parents Henri et Frescende, riches agriculteurs, à l'âge de 5 ans. Elle fut confiée, avec sa sœur Agnès, au couvent des soeurs augustiniennes du Mont Cornillon à Liège, pour y être élevée par les sœurs. Le couvent dirigeait une léproserie qui nous est connue par un document de 1176, par lequel les bourgeois de Liège imposent un règlement à l'établissement. Ils constatent qu'il est pauvre en revenus, mais que la situation s'améliora grâce aux dons de certaines personnes. Le couvent-léproserie se composait de quatre communautés : les hommes malades et les hommes sains, les femmes malades et les femmes saines. Les quatre communautés vivaient sous la direction de deux prieurs, un homme (prêtre) et une femme, dans l'observance du célibat, du partage des biens et de la prière, sans posséder de règle religieuse fixe.

À 14 ans, Julienne fut admise au nombre des sœurs. Elle étudia le latin, le français, ce qui lui permit de lire les Pères de l'Église, tels que Saint Augustin et Saint Bernard. Julienne aimait particulièrement ce dernier saint, dont elle connaissait par coeur des sermons entiers.

Dès son adolescence, elle était particulièrement portée vers la dévotion eucharistique. À partir de 1209, (source?) elle eut de fréquentes visions mystiques. Une vision revint à plusieurs reprises, dans laquelle elle vit une lune échancrée, c'est-à-dire rayonnante de lumière, mais incomplète, une bande noire la divisant en deux parties égales. Elle resta longtemps sans comprendre la signification de cette vision, et sans en parler à personne.

En 1222, Julienne fut élue prieure des soeurs augustiniennes du monastère de Cornillon (sous le Mont Cornillon). Elle subit en tant que prieure de nombreux tourments, certains dus à des membres de sa communauté et d'autres dus à des bourgeois de Liège souhaitant augmenter leur pouvoir sur la léproserie et en accaparer les charges.

Cependant, la vision étrange continuait de tourmenter Julienne. Après des années, c'est - selon la Vita - le Christ même qui lui donna les lumières nécessaires à la compréhension de cette vision. Comme le dit alors Benoît XVI lors de l'audience générale du 17 novembre 2010: "Le Seigneur lui fit comprendre la signification de ce qui lui était apparu. La lune symbolisait la vie de l’Eglise sur terre, la ligne opaque représentait en revanche l’absence d’une fête liturgique, pour l’institution de laquelle il était demandé à Julienne de se prodiguer de façon efficace: c’est-à-dire une fête dans laquelle les croyants pouvaient adorer l’Eucharistie pour faire croître leur foi, avancer dans la pratique des vertus et réparer les offenses au Très Saint Sacrement." Julienne, croyant d'abord se dérober, accepta finalement sa mission et se mit à oeuvrer pour l'établissement de cette fête. La première personne à qui elle osa parler de son projet fut la Bienheureuse Ève de Liège, recluse.

Julienne probablement composa elle-même l'office, les paroles comme la musique. Les deux amies entreprirent des démarches pour l'instauration de la Fête-Dieu, demandant conseil à quelques éminentes autorités ecclésiastiques, tels que Jean de Lausanne, chanoine de Saint Martin, Jacques Pantaléon, archidiacre de Liège et futur Pape Urbain IV, Guy, évêque de Cambrai, et aussi de brillants théologiens dominicains, dont Hugues de Saint Cher, et bien d'autres. Le prince-évêque Robert de Thourotte s'intéressa à cette proposition et s'engagea à officialiser le culte eucharistique. Tombé malade à Fosses, craignant de n'avoir pas le temps de confirmer la fête à sa principauté; il recommanda l'institution de la fête au clergé qui l'entourait et en fit célébrer l'office en sa présence, à Fosses même. Il y mourut, le 16 octobre 1246, sans avoir pu tenir un synode général et y publier son mandement.

L'institution de la Fête-Dieu

La Fête-Dieu (ou Corpus Christi) fut introduite en Europe, d'abord 1246 dans le diocèse de Liège.

Les bourgeois de Liège s'opposaient à la fête car cela signifiait un jour de jeûne en plus pour la population et certains religieux considéraient que cette fête ne méritait de telles dépenses. L'opposition à la fête devint plus forte après la mort de son protecteur l'évêque Robert. L'opposition devenant persécution, Julienne et quelques compagnes quittèrent leur couvent. Elles trouvèrent asile en plusieurs abbayes cisterciennes, passant par le Val Benoît et Huy. Elles furent accueillies finalement à l'Abbaye de Salzinnes, près de Namur, qui, se trouvant hors de la Principauté de Liège, devint leur refuge permanent.

Elle mourut le 5 avril 1258 à Fosses-la-Ville, dans l'Entre-Sambre-et-Meuse (Belgique), et fut inhumée dans l'abbaye cistercienne de Villers-La-Ville. Elle y fut vénérée, aux côtés des cinq bienheureux de cette abbaye, dont Gobert d'Aspremont.

Après la mort de son amie, Eve continua cependant les démarches, et obtint l'institution de la fête pour l'Église universelle grâce à sa bonne relation avec Jacques Pantaléon. C'est ainsi que Jacques Pantaléon de Troyes, archidiacre de Liège devenu pape sous le nom de Urbain IV institua la Fête Dieu pour l'Église universelle par la bulle Transiturus de hoc mundo le 11 août 1264.

La Fête-Dieu ne fut reçue dans l'ensemble de l'Église latine qu'au temps de Clément V, à l'époque du concile œcuménique de Vienne 1311 où il renouvela la constitution d'Urbain IV.

L'office célébré à Liège en 1246, a désormais laissé la place à un office composé par Thomas d'Aquin. La teneur théologique des deux offices est différente car le premier était christocentrique et communautaire, tandis que le second est d'une théologie plus moderne pour l'époque.

Canonisation et vénération

Sainte Julienne est célébrée liturgiquement le 5 avril, en Belgique, et plus solennellement le 7 août dans le diocèse de Liège. Elle est souvent représentée avec une lune échancrée ou un ostensoir.

Sa mémoire est restée en vénération dans l'Ordre Cistercien, tant pour l'appui que les moines lui prêtèrent dans l'accomplissement de sa mission, que pour sa dévotion à Saint Bernard dont elle méditait les sermons sur le Cantique des Cantiques au point d'en connaître une vingtaine par cœur.

Grandes figures du XIIIe siècle en lien avec l'Eucharistie

Le XIII siècle est une période féconde pour l'Église avec les grandes figures de Saint François, de Saint Dominique et de Sainte Claire

Saint François d'Assise

Né à Assise (en Italie) en 1181 et décédé le 3 octobre 1226, la foi de Saint François d'Assise dans le Corps et le Sang du Seigneur apparaît dans sa Lettre aux fidèles. François rappelle, en une sorte de credo, l’essentiel du mystère de Jésus : la place centrale et récapitulative de l’Eucharistie : « Cette Parole du Père, si digne, si sainte et si glorieuse, le Père très haut l’envoya du ciel (…) Lui qui fut riche par-dessus tout, il voulut lui-même dans le monde, avec la très bienheureuse Vierge, sa mère, choisir la pauvreté. Et près de la passion, il célébra la Pâque avec ses disciples et, prenant le pain, il rendit grâces et le bénit et le rompit en disant : Prenez et mangez, ceci est mon corps ».

Ici l’Eucharistie apparaît située à la charnière entre les deux temps forts du mystère du Christ : sa venue à nous dans le dépouillement généreux de l’incarnation et son chemin pascal de remise totale entre les mains du Père. Le double événement de Noël et de Pâques, vient nous rejoindre dans l’Eucharistie. Pour François, Incarnation rédemptrice, conversion de vie et réception de l’Eucharistie sont trois réalités profondément imbriquées.

Saint Dominique

Dominique de Guzman naît vers 1170 dans le bourg de Caleruega, en Espagne. Fondateur de l'ordre des frères prêcheurs, il meurt en 1221. Il est fêté le 8 août.

Il devint chanoine à Osma où il fit ses études de théologie. C'est au cours d'une famine qu'il vendit ses livres de théologie pour soulager la misère des pauvres. Son exemple fit de nombreux émules.

Au cours d'une mission avec son évêque Diègue d'Osma, Dominique traverse le sud de la France gagné à la cause cathare. L'aubergiste qui les accueille était d'ailleurs cathare. Saint Dominique passera la nuit à le convaincre de la religion catholique, et au petit matin, grâce à ses arguments, l'aubergiste reviendra à sa religion maternelle. Leur mission diplomatique ayant échoué, ils rencontrent par hasard une délégation papale de moines cisterciens voués à la prédication de l'évangile dans ces contrées. Leur échec amène Diègue a essayer un nouveau mode de prédication inspirée par la prédication mendiante et itinérante de l'évangile. Après quelque temps, alors que la méthode porte quelques fruits, Diègue doit revenir à Osma mais il laisse Dominique continuer son œuvre. Dominique poursuivra cette œuvre avec assiduité, fondant par là un ordre voué à la prédication : l'ordre des frères prêcheurs, plus connu sous le nom de dominicains.

À l'époque où les rois catholiques combattent l'hérésie cathare l'épée à la main, Saint Dominique et ses frères recentrent leur vie chrétienne sur l'essentiel: la présence du Christ, dans l'Eucharistie. D'ailleurs, dans la bulle transiturus qui institua la Fête-Dieu, le pape Urbain IV écrit qu'"il est juste néanmoins, pour confondre la folie de certains hérétiques, qu'on rappelle la présence du Christ dans le très Saint-Sacrement".

Saint Thomas d'Aquin

Né en 1224 en face de l'abbaye bénédictine du Mont-Cassin, devenu disciple de Saint Dominique, Saint Thomas d'Aquin commence à enseigner en 1252 – il a 30 ans. Il se distingue par sa dévotion et son amour de l’Eucharistie. Toute sa vie sera consacrée à exhorter, stimuler, éclairer, combattre les hérésies. Il mène de front ses cours, ses prédications, ses traités, ses sommes, des lettres. Il écrit la Messe du Saint-Sacrement qui sera promulguée par Urbain IV avec la bulle transiturus qui instituera la Fête-Dieu. Il y chante le merveilleux Pange Lingua, le mystère sublime de l’Eucharistie. Il dicte à 2 ou 3 secrétaires en même temps.

Il passe une grande partie de la nuit dans l’église, puis rentre dans sa cellule avant les mâtines, afin que nul ne s’en aperçoive. Jamais il ne manque les offices, bien qu’il en ait la dispense à cause de son travail considérable et des nombreuses visites qu’il doit recevoir. Son esprit ne se laisse jamais distraire de Dieu: sans doute aurait-il pu dire comme la petit Thérèse: Je ne suis jamais restée plus de trois minutes sans penser au Bon Dieu. Quand il célèbre l’Eucharistie, des larmes coulent sur ses joues. Le 7 mars 1274, entouré de Dominicains et de Cisterciens, il reçoit l’extrême onction, prêche une ultime fois sur le Cantiques des Cantiques, puis son souffle se perd. Il murmura le Credo et sur ces mots: "Je remets tout au jugement de l’Église".

Sainte Claire

Née en 1192 et morte le 11 août 1253, Claire d'Assise, également en raison d'un genre d'iconographie qui a eu un vaste succès à partir du XVII° siècle, est souvent représentée l'ostensoir à la main. Le geste rappelle, bien qu'avec une attitude plus solennelle, l'humble réalité de cette femme qui, déjà très malade, se prosternait, soutenue par deux sœurs, devant le ciboire d'argent contenant l'Eucharistie, placé devant la porte du réfectoire, où devait s'abattre en vain la furie des troupes Musulmanes. Claire vivait de ce pain, que pourtant, suivant l'usage de l'époque, elle ne pouvait recevoir que sept fois par an. Sur son lit de malade, elle brodait du linge d'autel et l'envoyait aux églises pauvres de la vallée de Spolète.

En réalité, toute la vie de Claire était une eucharistie, car - à l'instar de François - elle élevait de sa clôture un continuel " remerciement " à Dieu par la prière, la louange, la supplication, l'intercession, les pleurs, l'offrande et le sacrifice. Tout était accueilli par elle et offert au Père en union avec le " merci " infini du Fils unique, enfant, crucifié, ressuscité, vivant à la droite du Père.

De l'élévation à la Fête-Dieu

Les origines de la solennité du Corps et du sang du Christ, célébrée naguère le jeudi après le dimanche de la Sainte-Trinité, et maintenant souvent reportée au dimanche suivant pour permettre la participation des fidèles, remontent selon certains historiens au XIIe siècle. L'élévation manifestait le désir de contempler l'hostie, mais l'impulsion décisive fut donnée par sainte Julienne de Cornillon et la bienheureuse Ève de Liège.

Le prélude

La solennité aurait été dans un certain sens préparée par le débat théologique et par le réveil de la dévotion eucharistique survenu après l'hérésie de Bérenger de Tours qui niait la présence réelle du Christ dans l'Eucharistie. Ce réveil s'accompagnait d'un désir de pouvoir contempler l'hostie pendant la messe: c'est à Paris, en 1200, que l'existence de ce rite de "l'élévation", au moment de la consécration, est attestée pour la première fois.

Biographie

  • Audience Générale de Benoit XVI du 17 Nov 2010 sur Sainte Julienne de Cornillon(Rome)
  • "Sainte Julienne de Cornillon", Chanoine Jean Cottiaux, Liége, 1991, 260 pp.
  • "Compte rendu de Fête-Dieu (1246-1996), 1.Actes du colloque de Liège", septembre 1996, éd. A. Haquin;
  • "Compte rendu de Fête-Dieu (1246-1996), 2.Vie de sainte Julienne de Cornillon", éd. Jean-Pierre Delville, Louvain-la-Neuve, 1999
  • "Fêter Dieu avec Julienne de Cornillon", éd. Fidélité, Namur, 1996.

Lieux

Paroisses dédiés à Sainte-Julienne de Cornillon

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Notes et références

  1. nominis.cef.fr Nominis : Sainte Julienne du Mont-Cornillon.
  2. nominis.cef.fr Nominis : Sainte Julienne de Cornillon.