Jean-Félix Bapterosses

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Jean-Félix Bapterosses
Description de l'image M. Bapterosse.JPG.
Naissance
Bièvres
Décès (à 71 ans)
Briare
Nationalité Drapeau de la France France
Pays de résidence Drapeau de la France France
Profession
industriel
Activité principale
céramique
Autres activités
politicien
Distinctions
Ascendants
Jean-François Bapterosses
Conjoint
Anne-Léontine Jahan
Descendants
Blanche (épouse) Loreau, Jeanne (épouse) Yver, Marie-Louise (épouse) Bacot

Jean-Félix Bapterosses est un inventeur, un industriel et un homme politique français né en 1813 à Bièvres et décédé en 1885 à Briare.

Il a fondé à Paris en 1845 une fabrique de boutons de porcelaine. Il rachète la faïencerie de Briare en 1851 devenue les Émaux de Briare par la suite, puis progressivement la Faïencerie de Gien à partir de 1864.

Il incarne l'archétype du paternalisme de l'entrepreneur catholique du XIXe siècle, se souciant du bien-être physique et moral de ses ouvriers, au même titre que ses contemporains Henri Schneider au Creusot ou les Wendel à Joeuf.

Biographie

Jean-Félix Bapterosses (qui se fit appeler par la suite Félix Bapterosses, d'où les initiales FB)[1], né le à Bièvres dans le département de Seine-et-Oise est le dernier d'une fratrie de cinq enfants[2]. Son père, Jean-François, contremaître chez Dollfus-Mieg et Compagnie chargé de la gravure des cylindres pour les toiles d'« indienne » vit dans un des logements de fonction créés dans l'ancien presbytère. Jean-Félix, après un passage chez les frères des écoles chrétiennes[3], le rejoint dès onze ans comme apprenti[A 1]. Il gravit les échelons d'ouvrier à contremaître dans différents ateliers de construction mécanique - notamment Byver spécialiste des outils de polissage de glaces - parisiens[4],[5].

Marié en 1849, il aura quatre enfants[2]. Il s'installe à Briare en 1851 et loge avec sa famille dans la maison de maître de la fabrique[note 1].

Il meurt à Briare le [2]. Dix mille personnes assistent à ses funérailles[6]. Aujourd'hui, on peut voir son buste en bronze sculpté par Henri-Michel-Antoine Chapu et réalisé par Barbedienne sur la place de la République à Briare[7] où un monument lui est consacré ainsi qu'au musée de la mosaïque et des émaux de Briare.

Un inventeur précoce

Jean-Félix Bapterosses est un créatif s'intéressant particulièrement à la mécanique. Il présente un modèle de fusil se chargeant par la culasse vers 1835[A 1]. Il dépose un premier brevet à l'âge de 24 ans en 1837 puis en 1838 pour le perfectionnement de la lampe mécanique inventée par Bertrand Guillaume Carcel[A 1]. Il se tourne ensuite vers un projet de machine à vapeur[A 1] avec en tête une locomotive rapide[note 2], projet qui fera finalement l'objet d'un brevet en 1842.

Il part en voyage en Angleterre en 1843 pour visiter les usines de Minton de Stoke-on-Trent dans le Staffordshire, région spécialisée dans la céramique, et de Chamberlain (Worcester)[8], fabricants de boutons céramiques qu'ils frappent à l'unité selon le procédé inventé par les frères Prosser en 1840[9],[10]. Il rentre de ce périple pour déposer le brevet en 1844 d'une presse pouvant produire 500 pièces à la fois[A 1]. La vente de celui-ci devait lui permettre de financer la fabrication de sa machine à vapeur, dont le brevet avait été déposé deux années plus tôt. Le prix demandé pour la machine étant trouvé trop élevé par les anglais[11], Jean-Félix Bapterosses demeure avec sa machine à frapper les boutons sans savoir fabriquer la pâte à bouton[A 2]. Après une phase de test, il met au point une pâte plus souple que la traditionnelle pour la confection des boutons en y ajoutant du lait, en partant de données issues de la manufacture nationale de Sèvres[12]. Il profite de cette occasion pour inventer un four breveté à « moufles ouverts » chauffé à la houille en 1847 qui permet de surveiller de façon continue la cuisson des boutons[A 2]. En 1849, Jean-Félix Bapterosses est récompensé par la section céramique de l'exposition de 1849, mais très vite il doit se défendre contre des contrefacteurs. Son talent d'innovateur est cependant très vite reconnu, notamment par Jacques-Joseph Ebelmen directeur de la manufacture nationale de Sèvres[13] ainsi qu'en Allemagne par G. Kühn, directeur de la manufacture royale de porcelaine de Saxe[A 3]. Inventeur reconnu, il est nommé correspondant de la Société d'encouragement pour l'industrie nationale[14].

Jean-Félix Bapterosses est également un homme d'affaires. Il comprend notamment l'importance d'une Marque commerciale et de sa publicité, témoin et garante de la qualité des produits. Il affiche donc systématiquement ses initiales (FB) sur toutes ses cartes échantillons et les accompagna très vite des reproductions de médailles et autres récompenses recueillies dans différentes expositions universelles[15].

L'ère industrielle

Jean-Félix Bapterosses ouvre sa première fabrique de boutons en porcelaine en 1845 dans le quartier parisien de Belleville. Deux ans à peine après l'ouverture de cette usine, et grâce à plusieurs inventions pour lesquelles il obtient une médaille d'or[16], les usines à Longton de Minton et Chamberlain doivent abandonner la fabrication de boutons[17],[18]. Le succès aidant, il doit s'agrandir et déménage sa manufacture rue de la Muette[19]. Le succès de son entreprise et les troubles sociaux découlant des évènements de 1848 l'incitent à chercher en province un autre emplacement pour sa manufacture.

En 1850, à la recherche d'un emplacement pour agrandir son usine, la légende rapporte que c'est à l'occasion d'une panne de diligence qu'il découvre la faïencerie de Briare alors en difficultés financières. Il la rachète en 1851. Aidé par son frère aîné, Jean-Frédéric Bapterosses, plus porté sur la chimie, il se met à développer les formes et les couleurs de ses produits[20]. Il construit quelques années après une briqueterie aux Combles, près de Châtillon-sur-Loire[21] qui lui permet d'agrandir considérablement la faïencerie d'origine, occupant alors 17 hectares[22].

En 1860, il lance la fabrication des boutons à queues métalliques[A 2] et en 1864 celle des perles[A 3],[20].

Il devient, à l'occasion de sa transformation en société anonyme, le premier président du conseil d'administration de la faïencerie de Gien[23] pour laquelle il invente un système d'encastage spécial qui est en partie à l'origine du succès de la marque[A 3]. Il fait construire dans son enceinte, outre une annexe à sa fabrique de perles et de boutons de Briare, une usine à gaz qui assure notamment l'éclairage public de Gien pendant 20 ans (jusqu'en 1886)[24].

Un philanthrope impliqué

Jean-Félix Bapterosses est croyant et relativement proche des catholiques libéraux[25] dans la lignée de Félix Dupanloup, évêque d'Orléans. L'abbé de Briare se plaint néanmoins en 1869 à l'évêché du manque de ferveur religieuse de Bapterosses[26].

Il devient cependant administrateur et donateur du Bureau de bienfaisance briarois - institution au service des indigents - dès 1854[27]. Il finance la construction d'une gendarmerie[28] et l'achat du château des seigneurs du canal de Briare vendu par la Société du canal en liquidation, après l'avoir acquis en 1657[29] pour le transformer en mairie en 1861[30]. En 1867 il créé la Société de secours mutuels - sorte de Sécurité sociale avant l'heure[31] pour s'occuper de ses ouvriers souffrant mais aussi pour les autres habitants de la commune souhaitant en profiter[32]. En 1869, il fait construire des écoles qui reçoivent 240 enfants au sein de l'usine[33], et invente un procédé mécanique (breveté en 1868) afin de régler l'éloignement du siège et la hauteur du repose pied en fonction de la taille des enfants[A 3] qui est notamment utilisé dans l'école municipale supérieure d'Auteuil[34]. En décembre 1870, il paie la rançon exigée par les occupants prussiens[26]. En 1875, il ouvre à ses frais une école à Langesse, où pourtant il n'a pas d'intérêt direct connu[35]. Il fait construire en 1876 les cités ouvrières capables de loger plus de 180 familles, soient environ 800 personnes[36]. Peu avant sa mort en 1882, il dessine les plans pour construire un hôpital et une maison de retraite[A 3].

Carrière politique

Jean-Félix Bapterosses devient conseiller municipal de Briare en 1852, soit une année à peine après son arrivée à Briare, et reste en poste jusqu'en 1874. Il reçoit le plus de voix mais ne brigue jamais la charge de maire[37]. Il devient ensuite délégué cantonal puis conseiller général du canton de Briare[38] dès 1857, soutenu en cela par le gouvernement par le biais du sous-préfet de Gien. Il conserve son siège jusqu'à son décès en 1885[39]. Il est nommé en 1855 chevalier de la Légion d'honneur, et il reçoit en 1878 le grand prix de céramique et la rosette d'officier de la Légion d'honneur[A 4].

Sa descendance

Ayant eu trois filles et un seul garçon (Léon, mort en 1886)[40], Jean-Félix Bapterosses souhaite assurer sa succession en filtrant soigneusement ses gendres en fonction de leurs études : Raymond Bacot, époux de Marie-Louise, est polytechnicien et futur père de Jacques Bacot[41], Alfred Loreau, époux de Blanche, sort de l'École centrale tandis que Paul Yver, époux de Jeanne, est aussi polytechnicien. Les trois gendres se succéderont à la tête des émaux de Briare.

Le premier marie sa fille Henriette Bacot à Robert Chodron de Courcel. Jean-Félix Bapterosses est ainsi l'arrière-arrière-grand-père de Bernadette Chirac[42].

Les deux derniers suivront les traces de leur beau-père à la faïencerie de Gien et prendront différents mandats politiques (maire de Briare pour Paul Yver ; maire de Briare, conseiller général du canton de Briare et député du Loiret (département)|Loiret pour Alfred Loreau.

Le nom Bapterosses s’éteint malgré deux tentatives de le faire revivre par ses petits-enfants qui avaient adjoint son nom au leur : René Loreau-Bapterosses et André Yver-Bapterosses. À l'occasion du centième anniversaire de sa naissance (trente ans après sa mort), et sous l'impulsion de son gendre Alfred Loreau, maire de Briare à l'époque, de grandes festivités ont été organisées à Briare avec une messe conduite par monseigneur Stanislas-Arthur-Xavier Touchet[43], futur Cardinal.

Notes et références

Notes

  1. Actuel musée de la mosaïque et des émaux
  2. Nous sommes dans les années du lancement du chemin de fer, les Anglais étant les précurseurs.

Références

  1. UPL magazine
  2. a b et c « La généalogie de la famille Le Priol (lettre B) », sur www.gatinaisgeneal.org, Association Gâtinais généalogique (consulté le ) Erreur de référence : Balise <ref> incorrecte : le nom « généalogie » est défini plusieurs fois avec des contenus différents.
  3. UPL magazine p. 10
  4. La manufacture Bapterosses p.7
  5. Le Journal de Gien
  6. Une aventure industrielle p.34
  7. un canal des émaux p. 124
  8. Jouffroy p. 693-694.
  9. Ornament 1995 p. 68
  10. Ebelmen p.588-593
  11. Briare-le-Canal et ses seigneurs, p.164-165.
  12. Raconte moi Briare-le-Canal, p. 41.
  13. Jean-Félix Bapterosses 1813-1885
  14. Bulletin de 1922 p. 386.
  15. Buttons p. 74-76.
  16. Daclin
  17. Robin P.249-250
  18. Promenades pittoresques dans le Loiret p. 64-65.
  19. Pinsseau p.165.
  20. a et b promenades pittoresques dans le Loiret p.66.
  21. Centenaire de la manufacture p.9.
  22. La Nature p. 371.
  23. La faïence de Gien p.67.
  24. Le Giennois industriel p.49
  25. Un canal des émaux p. 124
  26. a et b Le Journal de Gien du 25 octobre 2001.
  27. La manufacture Bapterosses p.73.
  28. Raconte-moi Briare-le-Canal p.41.
  29. Promenades pittoresques dans le Loiret p.70.
  30. La manufacture Bapterosses p. 152-154
  31. Un canal des émaux p.126
  32. La manufacture Bapterosses p. 69.
  33. La manufacture Bapterosses dans Briare p.79.
  34. Riant p. 392.
  35. La manufacture Bapterosses dans Briare, P.166.
  36. La manufacture Bapterosses dans Briare, P.65.
  37. La manufacture Bapterosses dans Briare p. 139.
  38. Pinsseau p.166.
  39. La manufacture Bapterosses dans Briare, p. 140.
  40. Une aventure industrielle p. 40.
  41. Bacot p.20
  42. Bacot p.22
  43. Le Travailleur
  1. a b c d et e p. 184
  2. a b et c p. 185
  3. a b c d et e p. 186
  4. p. 187
  • Le Travailleur de l'arrondissement de Gien, dimanche 7 septembre 1913
  • Ornament 1995 p. 68-71 (en anglais)
  • Le Journal de Gien 18 avril 1974
  • UPL magazine février 1996
  • Le Journal de Gien 25 octobre 2001

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

Sources historiques

  • Charles Daclin, Bulletin de la Société d'encouragement pour l'industrie nationale, volumes 1 à 36, Paris, Madame Huzard imprimeur-libraire, , p. 80, 712, 727
  • M. le Marquis de Jouffroy, Dictionnaire des inventions et découvertes anciennes et modernes, Paris, M. l'Abbé J.P. Migne /bibliothèque universelle du Clergé, (lire en ligne), p. 693-694
  • Charles Joseph Nicolas Robin, Histoire illustrée de l'Exposition universelle, par catégories d'industries, Paris, Furne, (lire en ligne), p. 249-250
  • Jacques-Joseph Ebelmen,Louis Alphonse Salvetat, Recueil des travaux scientifiques, Paris, Mallet-Bachelier, imprimeur libraire, (réimpr. vol. 1), 598 p. (lire en ligne), p. 588-593
  • Gaston Tissandier, La Nature, Revue des sciences et de leurs applications aux arts et à l'industrie., Paris, Masson, (réimpr. vol 25), p. 518
  • Aimé Riant, Hygiène scolaire : influence de l'école sur la santé des enfants, Paris, Hachette, , 399 p., p. 158, 392-396
  • Gaston Tissandier, La Nature, Revue des sciences et de leurs applications aux arts et à l'industrie., Paris, Masson, , 428 p. (lire en ligne), p. 371
  • Jean-Félix Bapterosses 1813-1885, 1886?, Gien, imprimerie Paul Pigelet
  • Bérard, Bulletin de la société d'encouragement pour l'industrie nationale, Paris, Conservatoire numérique des arts et métiers, (lire en ligne), p. 182 à 187
  • Emile Huet & Paul Pigelet, Promenades pittoresques dans le Loiret, Orléans, Paul Pigelet imprimeur, Herluison libraire, , 64-71, 642-644
  • Bulletin de la Société d'encouragement pour l'industrie nationale, Madame Huzard, imprimeur-libraire à Paris, Volume 121 p. 385 et suivantes (1922)
  • Pierre Pinsseau, Briare-le-Canal et ses seigneurs, Orléans, René Houzé, "la boule blanche", , 167 p.
  • Centenaire de la manufacture Bapterosses 1845-1945, 1945, Gien, imprimerie Jeanne d’Arc.

Ouvrages didactiques

  • Pascale Nourisson, Une aventure industrielle. La manufacture de Briare (1837-1962), éditions Alan Sutton, coll. « Parcours et labeurs », , 22 à 39 (ISBN 2-84253-558-8)
  • Jean-Claude Renard, Faïences de Gien, une technique, un art de vivre, une légende, éditions Alan Sutton, coll. « Parcours et labeurs », , 9 à 11 (ISBN 2-84253-581-2)
  • Roger Bernard, Jean-Claude Renard, La Faïence de Gien, (réimpr. 2ème édition), 105 p.
  • (en) Diana Epstein & Millicent Safro, Buttons, New York, USA, Harry N. Abrams Inc., , 176 p. (ISBN 0-8109-3113-3)
  • Jean-Pierre Roth, Le Giennois industriel 1821 à 2001, , 35 à 110 (ISBN 2-9517946-0-6)
  • Michel Marchesnay, L'entrepreneur: une histoire française, ERFI université de Montpellier 1, Lavoisier, coll. « Revue Française de Gestion n° 188-189 », (ISBN 978-2-74622-319-6).

Autres sources

  • Jean-Yves Montagu, Erwan Quéméré, Briare: un canal, des émaux, La Renaissance du Livre, coll. « Les beaux livres du patrimoine » (réimpr. 2000), 143 p. (ISBN 978-2-80460-353-3)
  • Arnaud Petit, La manufacture Bapterosses dans Briare, Orléans, Université d'Orléans (mémoire de maîtrise d'histoire, non publiée),
  • Michel Bacot & alii, Les Bacot : regards sur une famille du XVIe au XXe siècle, Paris, lelivredart, , 111 p. (ISBN 978-2-35532-031-6)
  • Lionel Guillaume, Raconte-moi Briare-le-Canal, Journal de Gien,