Initiative populaire « Acquisition de la nationalité suisse Expulsion d'étrangers »

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Initiative populaire fédérale
Acquisition de la nationalité suisse Expulsion d'étrangers

Déposée le

Contre-projet non
Votée le
Participation 45,59 %
Résultat : rejetée[NB 1]
Par le peuple non (par 84,1 % et 61,9 %)
Par les cantons non (par 19 6/2)[NB 2]

L'initiative populaire « Acquisition de la nationalité suisse Expulsion d'étrangers » (sic), est une initiative populaire suisse, séparée en deux éléments sur décision du Parlement et rejetée par le peuple et les cantons le .

Contenu[modifier | modifier le code]

L'initiative, originellement présentée d'un seul bloc, est divisé en deux parties soumises indépendamment à la votation[1]. La première propose une modification de l'alinéa 2 de l'article 44 de la Constitution fédérale qui indique les modalités pour une demande de naturalisation et fait passer de 6 à 12 le nombre d'années pendant lesquelles le postulant doit avoir séjourné en Suisse avant de pouvoir faire sa demande. La même modification déclare inéligibles les étrangers naturalisés arrivés en Suisse après leur 8e année.

La seconde partie propose la modification de l'article 70 de la Constitution qui traite du renvoi des étrangers en y apportant les modifications suivantes : le droit qu'a la Confédération de renvoyer des étrangers compromettant la sûreté du pays devient une obligation et cette obligation est étendue à tout étranger compromettant « la prospérité du peuple suisse » ou participant à des groupes anticonstitutionnels ou « à des entreprises politiques » qui pourraient compromettre la politique extérieure ou l'économie du pays.

Le texte complet de l'initiative peut être consulté sur le site de la Chancellerie fédérale[2].

Déroulement[modifier | modifier le code]

Contexte historique[modifier | modifier le code]

C'est en juin 1876 que la première loi sur les naturalisations est votée, avec un délai d'assimilation fixé à deux ans. Cette loi est modifiée en 1920 pour faire passer le délai à six ans devant l'afflux de réfugiés à la suite de la Première Guerre mondiale et pour octroyer la nationalité suisse aux enfants nés en Suisse de parents étrangers dont l'un serait né en Suisse.

Récolte des signatures et dépôt de l'initiative[modifier | modifier le code]

La récolte des 50 000 signatures nécessaires a débuté le . Le , l'initiative a été déposée à la chancellerie fédérale qui l'a déclarée valide le [3].

Discussions et recommandations des autorités[modifier | modifier le code]

Le parlement[4] et le Conseil fédéral[5] recommandent le rejet de cette initiative.

Dans son message adressé à l'assemblée, le Conseil fédéral indique rejeter la première partie comme allant trop loin dans le délai d'assimilation (aucun pays d'Europe n'allant au-delà de 10 ans). Il indique de même rejeter la seconde partie, tout en « approuvant pleinement les innovations proposées par l'initiative » ; il estime cependant que l'inscription dans la Constitution des différents éléments justifiant le renvoi d'un étranger est inutile, voire contre-productif.

Votation[modifier | modifier le code]

Soumise à la votation le , les deux parties de l'initiative sont refusées par la totalité de 19 6/2 cantons[NB 2] et par 84,1 % des suffrages exprimés dans le premier cas[6] et 61,9 % dans le second[7]. Le tableau ci-dessous détaille les résultats par cantons pour les deux parties[8],[9] :

Effets[modifier | modifier le code]

Près de 30 ans après le très net refus du durcissement des conditions de naturalisation, une loi fédérale du sur l’acquisition et la perte de la nationalité suisse (LN) entre en vigueur le [10]. Cette loi réduit, entre autres, la durée d'assimilation pour les jeunes étrangers. Une révision de la loi en 1976 donne la nationalité suisse aux enfants d'une mère suisse et d'un père étranger vivant en Suisse lors de la naissance de l'enfant. Par la suite, plusieurs motions présentées par le Conseil fédéral dans le but de faciliter la naturalisation des étrangers seront refusées par le peuple en 1983, 1994 et 2004[11].

En ce qui concerne l'article 70, même non modifié selon l'initiative, il a été largement employé au cours du XXe siècle, dont parfois dans des affaires médiatiques telles que l'expulsion de Maurice Papon du territoire suisse[12].

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Selon l'article 139 de la Constitution, une initiative proposée sous la forme d'un projet rédigé doit être acceptée à la fois par la majorité du peuple et par la majorité des cantons. Dans le cas d'une initiative rédigée en termes généraux, seul le vote du peuple est nécessaire.
  2. a et b Le premier chiffre indique le nombre de cantons, le second le nombre de cantons comptant pour moitié. Par exemple, 20 6/2 se lit « 20 cantons et 6 cantons comptant pour moitié ».

Références[modifier | modifier le code]

  1. « Arrêté fédéral »  (28 janvier 1921) de la Feuille fédérale référence FF 1921 I 175
  2. « Texte de l'initiative populaire fédérale », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  3. « Initiative populaire 'Acquisition de la nationalité suisse Expulsion d'étrangers' » (consulté le )
  4. « Arrêté fédéral »  (3 mai 1922) de la Feuille fédérale référence FF 1922 II 1
  5. « Message du Conseil fédéral »  (22 juin 1921) de la Feuille fédérale référence FF 1921 III 572
  6. « Votation no 89 Tableau récapitulatif », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  7. « Votation no 90 Tableau récapitulatif », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  8. « Votation no 89 - Résultats dans les cantons », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  9. « Votation no 90 - Résultats dans les cantons », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  10. Loi fédérale du 29 septembre 1952 sur l’acquisition et la perte de la nationalité suisse (Loi sur la nationalité), RS 141.0.
  11. [PDF] « Initiative parlementaire : La Suisse doit reconnaître ses enfants », sur parlement.ch (consulté le )
  12. « Maurice Papon: du chalet à la prison », Le Matin,‎ (lire en ligne)